Chapitre 7 - Maeve
Froid. Il... faisait... froid. Trop.
Ses dents claquaient de plus en plus fort et chaque mot qu'elle prononçait la forçait à inspirer de nouveau l'air glacé d'Okuno.
— S'il t-te plaît... ne m-me laisse p-pas...
— Tu as froid au point de me laisser t'approcher ? ironisa Hailey en l'étreignant de nouveau
— Je... d-désol-lée, je ne...
— Tout va bien, l'interrompit l'adolescente en serrant plus fort
Maeve ferma les yeux et se sentit perdre connaissance peu à peu. Peut-être que Hailey profiterait de son inconscience pour la poignarder. Ou peut-être qu'elle la laisserait seule dans le froid. C'était une des raisons pour lesquelles elle ne faisait jamais confiance à personne. La confiance rendait naïf, et la naïveté conduisait toujours à des blessures impossibles à soigner. Profondes. Indélébiles.
Elle en avait fait l'expérience, à deux reprises. Et elle s'était promit de ne plus jamais se fier à personne. Même si sa vie en dépendait.
Du moins, c'est ce qu'elle avait décidé alors qu'elle était parfaitement en sécurité, dans sa chambre. Si elle avait su qu'un jour viendrait où elle serait forcée d'accepter l'aide d'une fille qu'elle connaissait à peine et qui semblait changer de personnalité plus rapidement que son frère s'enfuyait lorsque leurs parents lui demandaient de ranger sa chambre... elle n'aurait rien fait, non, parce qu'à l'époque elle entrevoyait encore la possibilité d'avoir des amis. Idiote.
Elle sentit une salve d'électricité traverser son corps, s'entendit crier et vit le monde basculer sur le côté sans savoir ce qui lui arrivait exactement. Elle percevait la respiration lente et profonde de Hailey contre elle mais ne la voyait pas. Elle ne voyait rien, ne sentait même plus le froid. Elle ne pouvait qu'entendre le vent glacé et la respiration de Hailey, rassurante.
— Elle est... morte, déclara une voix à côté d'elle
Quoi ? Qui ça ?
...
Elle ?
Elle était morte ?
Les sons se brouillèrent et elle serra les dents tandis qu'un sifflement suraiguë emplissait son crâne.
— ... à ce rythme.
Comment ça ?
Elle entrouvrit les yeux et aperçut l'homme qui leur avait parlé à Hansaï. Était-il seul ? Non. Non, il y avait Hailey. Elle ne devait pas être très loin...
— Maeve... tu es là ? souffla une voix proche. Serre ma main si tu m'entends. Allez...
Elle sentit la main de Hailey se glisser dans la sienne et voulu serrer. Vraiment. Mais comment alors que ses doigts étaient couverts de givre ?
— Bon, c'est pas grave alors, on va faire comme si tu m'entendais, tu veux bien ?
Oui.
— Il faut juste que tu tiennes le coup encore quelques minutes... juste un peu, d'accord ?
Essaye un peu, pour voir.
— Je sais que c'est difficile, même si je ne comprend pas comment une fille d'Okuno peut être à ce point affectée par le froid, mais... il faut vraiment que tu essaie, d'accord ?
...
— D'accord ? S'il-te-plaît, dis quelque chose... tiens le coup juste un peu.
D'accord.
— Pourquoi tu ne me réponds pas ?
À ton avis ?
— Je veux juste m'assurer que tu es vivante.
Mmh... je dirais que oui.
— Parles, bon sang !
Maeve tenta encore de serrer la main de Hailey pour lui montrer qu'elle avait compris mais elle ne parvenait pas à bouger d'un millimètre. Parler ? L'air gelait sa gorge et ses poumons, et elle tremblait trop pour dire quoi que ce soit.
Alors elle sourit. Au bout d'un moment, Hailey le remarqua et sourit à son tour, éclairant son visage.
— Tu... tu es vraiment là, hein ?
Hocher la tête. Juste un centimètre, ce serait suffisant... bon. Ça devrait aller.
— Ce n'est pas pour vous interrompre, mais j'ai d'autres choses à faire, alors... intervint l'homme
— Dépêchez-vous, le coupa Hailey. Vous vouliez nous dire un truc, non ? Eh bien dites le, qu'on en finisse.
Elle redressa Maeve malgré ses protestations – qui se traduisaient par une grimace de douleur, étant donné qu'elle ne pouvait rien faire d'autre.
Aïe. Pourquoi tu t'obstines ? Je vais mourir de froid et ensuite tu mourras à la seconde où tu traversera le Passage. Conclusion : ça ne sert à rien. Alors lâche moi.
— Comme tu voudras... même si je trouve étrange que tu veuilles autant savoir ce que j'ai à vous dire, au vu de ton insolence habituelle. À moins que tu aies compris que Mlle Erin était déjà perdue ?
— Elle n'est pas perdue tant que je ne l'ai pas décidé !!!
Parce que c'est toi qui décide quand je meurt, maintenant ?
— C'est trop tard pour elle, personne ne viendra vous sauver !
Ça je n'en doute pas, il faut juste que Hailey se le rentre dans le crâne.
— J'AI DIT QU'ELLE N'ÉTAIT PAS PERDUE !!!
Hurler ne rendra pas tes paroles plus vraies, Hailey...
— Quoi qu'il en soit, reprit l'adolescente d'une voix plus calme. Je veux juste savoir ce que vous nous voulez, alors... allez-y.
Elle couvrit le nez et les lèvres de Maeve avec la manche de sa chemise en priant pour que ça lui permette de tenir quelques minutes de plus. L'adolescente se recroquevilla, la tête sur les genoux de Hailey.
Pourquoi ne parvenait-elle pas à réguler la température de son corps ? C'est elle qui devrait être en train de réchauffer Hailey, pas l'inverse ! Enfin... son pouvoir aurait du le lui permettre, non ? Sinon, il ne servait qu'à détruire.
— Comme tu voudras. Je voulais simplement vous apporter des précisions au sujet de votre... transfert.
La jeune fille se raidit, serrant la main de Maeve à lui faire mal.
— Tu sais pourquoi, tu te doutes de quand et de comment. Il reste une seule question – question importante, j'entends. Où.
— Même vous, vous ne pouvez pas le savoir. Les rares recherches qui ont été réalisées sur le Passage ont été difficiles, parce qu'on ne sait jamais où on va être emmené. Ça peut être sur une planète, en plein milieu d'une étoile ou quelque part dans le néant... c'est aussi pourquoi les expériences ont été arrêtées : parce que trop de gens avaient été portés disparus ou avaient perdu la vie durant celles-ci. J'ai tort ?
L'homme resta quelques instants sans parler puis répondit, masquant mal sa surprise :
— Non... c'est juste. Mais tu ne devrais pas savoir tout ça, ce sont des dossiers secrets.
— Mes parents travaillent pour le gouvernement, dans le secteur expérimental. Ils ont accès à ces documents, et il leur arrive de les laisser traîner dans leur bureau.
— Oh... eh bien je leur en toucherais un mot. Quoi que tu ne risque plus d'apercevoir la moindre information concernant Laena, là où tu sera... justement, c'est ce que je voulais te préciser : toi et ton amie, si elle est encore vivante, allez être envoyé sur une planète que ceux qui l'habitent appellent... la « Terre ». J'imagine qu'elle est... terreuse. C'est la première planète sur laquelle nous avions fait des recherches : dénuée de toute trace de magie, peuplée par des êtres qui nous ressemblent mais qui semblent parler toutes sortes de dialectes incompréhensibles...
— Comment avez-vous fait pour savoir ça ? Vous avez réussi à calibrer le Passage ?
— Absolument, jeune fille. Nous savons à présent comment faire pour décider de notre destination. Le seul problème qui réside, maintenant, c'est que...
Il marqua une pause, durant laquelle Hailey se crispa encore davantage. Maeve ne réussit qu'à saisir la dernière phrase de l'homme avant de sombrer :
— ... chaque traversée est un aller simple.
Voilà voilà ! Maeve est-elle déjà morte ou juste inconsciente ? Hailey parviendra-t-elle à la garder en vie suffisamment longtemps ? Où est Claire ?
Et à mercredi !
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