Chapitre 7 : mousse, tiges et rochers
-Oui, je vous reçois cinq sur cinq.
-Écoutez, nos amis, Shaya et Julien, nous ont envoyé un message dans lequel ils disent avoir perdu le contact avec vous, avoir perdu la balise et être blessés.
-Et sont-ils en état de continuer la mission ?
-Euh... Je ne sais pas, nous avons perdu le contact, après. J'espère qu'ils s'en sont sortis mais je n'ai aucun moyen de le savoir. Pouvez-vous faire quelque chose ?
-Je ne sais pas. Je... Je vais appeler le directeur.
Un long silence s'en suivit pendant lequel Xiaoyu espéra de tout son cœur recevoir une réponse positive du directeur.
-Oui, bonjour, Chris Johnson.
-Bonjour, Shaya et Julien sont blessés, ils ont perdu le contact avec vous et ont perdu la balise !
-Comment ça ? Ils ont perdu la balise ?!
-Oui, et ils sont certainement en danger de mort, il faut que vous fassiez quelque chose !
-Hélas nous ne pouvons rien faire... Pas plus que vous malheureusement.
-Mais vous avez beaucoup de matériel ! C'est quand même vous qui avez planifié cette mission, non ?
-Oui, en effet, mais aucun outil ne permet ici de retrouver la balise, étant donné que nous n'avions qu'un module et que le vaisseau ne peut se poser sans balise. Nous n'avons pas de GPS, étant donné qu'aucun satellite-GPS ne tourne autour de cette planète ! Elle n'est pas encore colonisée par l'Homme, et il n'y a aucun moyen de retrouver une personne perdue. Vous ne vous tenteriez pas à vous perdre sur cette planète ? Vous ne savez pas où ont dérivé vos amis ? Et bien nous non plus. Nous ne pouvons rien faire pour eux. Nous ne pouvons qu'attendre et prier pour qu'ils réussissent, car toute la population du vaisseau dépend d'eux. Allez, faites donc ça. Priez pour que...
-Taisez-vous !
-Ne me parlez pas sur ce ton ! Je suis directeur, je vous rappelle !
-Je m'en fous ! Vous nous avez envoyés dans une mission périlleuse sans moyen pour nous sauver si tout cela tournait mal !
-Oui, mais je...
-Je me fous de vos justificatifs, je vous hais ! À l'heure qu'il est, Shaya et Julien sont peut-être en train de mourir, et vous, vous ne feriez rien pour les aider ?!
-Vous ne comprenez pas, je...
-Arrêtez ! Si nous sortons vivants de cette mission, ça ne sera pas grâce à vous !
-Mais c'est quand même moi qui l'ai planifiée cette mission, je ne pouvais pas prévoir que vos amis allaient perdre la balise...
-De toute façon, puisque c'est tout ce qui vous importe, la balise, que vous vous fichez bien de la survie de mes amis, alors pourquoi je vous parle encore ?
Sa voix tremblait sous l'impulsion de la colère et de la tristesse, désormais exténuée après s'être défoulée.
-Je ne me fiche pas d'eux, je prie tous les jours pour eux...
-Je me fiche bien de vos prière, je ne suis pas croyante et je peux vous dire que vous auriez plutôt dû prévoir des mesures de sécurité. Mais je suis lassée de vous écoutez, puisque vous ne ferez rien pour nous, je ne vais pas perdre mon temps à parler avec un irresponsable comme vous. Si vous voulez parler, ne vous adressez plus à moi.
-Non, attendez, je...
Xiaoyu interrompit la séquence de communication, les larmes aux yeux.
« Que vais-je faire, maintenant ? Pensa-t-elle. Je suis dans l'incapacité de les aider, donc il faut que je fasse passer le temps... »
Elle se retourna pour tâter la tige contre laquelle elle était adossée.
-Tiens ! S'écria-t-elle. Je pourrais étudier ces... « plantes ».
-Shaya ! S'écria Julien.
Il courut vers son amie, contorsionnée sur le sol.
-Shaya, tu vas bien ? Je suis désolé, vraiment...
-Hmm...
-Quoi ?
-Espèce... d'abruti... articula-t-elle.
Julien sourit, elle était toujours vivante, et consciente de la situation.
-Je suis désolé, vraiment, je vais te sortir de là.
Le jeune homme se redirigea vers le levier et recommença la même manœuvre, c'est à dire de placer soigneusement les pierres sur le levier. Une à une, il prit plus de soin à les placer de façon équilibrée, et quand il eut fini, il appuya sur le levier, comme la première fois.
La jeune fille trouva à peine la force d'enlever son pied ensanglanté à l'aide de ses mains.
Une fois qu'elle l'eut posé à une distance de sécurité, Julien lâcha le levier et s'approcha d'elle.
Elle tenait son pied dans ses mains, son visage déformé par la douleur.
Elle se redressa péniblement, arrivant à la hauteur du jeune homme. Celui-ci semblait tiraillé par le regret et l'inquiétude.
-T'en fais pas, articula-t-elle. Ça va aller. Il faut... Il faut qu'on retrouve la balise.
Elle se leva avec difficulté, suivie de Julien.
-Mais tu es sûre que tu peux continuer, dans cet état, je veux dire, tu es sûre que tu peux encore marcher ?
-On n'est jamais sûrs de rien... Mais si je ne le fais pas, comment vas-tu faire, sans moi ?
-Arrêtes, s'il te plaît, je suis sérieux, là !
-Je sais. Bon, allons-y.
Elle fit un pas, et s'écroula par terre. Julien s'avança précipitamment et la retint avant qu'elle ne touche le sol. Elle était désormais retenue par la seule force des bras de son ami, en dessous des siens.
La jeune femme se releva tant bien que mal, jetant un léger regard gêné à son partenaire, avant de lui dire, un fin sourire aux lèvres :
-Merci, sans toi je serais tombée.
-C'est normal, entre « collègues ».
Son sourire ne lui ressemblait pas, le mauvais élève habituel plein d'entrain et de malice avait disparu, laissant sa place à un gentil garçon qui souriait presque timidement.
-Hey, ça va ? Demanda Shaya d'un ton de moquerie.
-Mais tu râles quand je râle, et quand je souris, tu râles aussi ! S'écria le jeune homme. Que veux-tu que je fasse, ô Shaya toute puissante ?!
Il fit mine de la vénérer tel un dieu et la jeune fille explosa de rire devant ce spectacle incommensurablement drôle.
-Tu es trop drôle ! Maintenant qu'on est sur la planète, on pourra faire plus de loisirs, tu devrais être humoriste !
-Mais non. La blague est mon quotidien ! Et puis je trouverais bien autre chose à faire...
-C'était une blague Julien ! Je ne te pensais pas vraiment humoriste ! C'est pas un vrai métier, ça !
-Bien sûr que si !
-De toute façon tes blagues sont nulles.
-Tu viens de dire qu'elles étaient bien !
-Celle-là. Pas les autres.
-Mais tu sais que tu m'énerves ?
-Oui, je sais. C'est presque fait exprès. Bon, assez tergiversé. On a pas tout notre temps, si tu vois ce que je veux dire.
-D'accord. Donc on va chercher la balise ? Tu as vu par où elle est partie ?
-Non, pas trop... J'essayais de ne pas me prendre le sol, si tu vois ce que je veux dire.
-Tu t'es pris plus que le sol. Tu peux marcher ?
-Je sais pas...
-Tu veux que je te porte ?
-Pff ! T'y arriveras pas.
-On va voir ça.
Il passa son bras droit derrière les jambes de la jeune fille et son bras gauche sous ses épaules. Il la tourna horizontalement et la souleva. La rousse cria de stupeur et s'accrocha à ses épaules par peur de tomber.
-Que fais-tu ?!
-Tu vois que je peux te porter !
À la seconde où il avait prononcé cette phrase, son buste ploya vers l'avant et les cheveux de Shaya frôlèrent le sol.
-Mais tu es lourde ! Plus que ce que je pensais...
-Qu'insinues-tu ?
-Rien, rien...
-Et oui mon cher ami, nous sommes sur une planète bien plus grosse que la Terre, et nos ancêtres n'ont pas prévu de pesanteur artificielle augmentant progressivement ! Notre poids est bien supérieur ici que sur Terre. Mais je te l'ai déjà dit, je me trompe, monsieur Julien-qui-n'écoute-jamais-ce-qu'on-lui-dit ?
-Si, si, je t'avais écouté...
-Bon, je vais marcher moi-même, ça sera plus sûr.
-Tu n'as pas confiance en moi ?
-Hmmm... Sur ta force corporelle, pas du tout. Et sur ton intelligence, non plus. Heureusement que tu n'es pas méchant sinon tu serais vraiment bon à rien.
-C'est sûr que c'est ce que l'on s'attend à entendre de la part d'une amie !
-Parce que nous sommes amis ? Non, je blague. Bien sûr, pauvre petit Juju !
-Hé, ne m'appelles pas comme ça, sinon je t'appelle Shasha !
-Ça me va, Juju.
-Non, arrêtes !
-Eh bien, Juju, tu capitules ? Je suis délibérément celle-qui-a-toujours-le-dernier-mot ?
-D'accord ! Ô Shaya-qui-a-délibérément-toujours-le-dernier-mot...
-Et bah super ! On va pouvoir reprendre notre mission, maintenant.
-Oui, mais je...
-Hé, c'est moi qui ai délibérément toujours le dernier mot et j'ai dit qu'on y allait.
-Tu veux que je me mette à te pieds aussi ?
-Si ça peut te faire plaisir...
Elle leva la main comme pour dire « fais ce que tu veux », un sourire malicieux au lèvres, tout en pivotant pour partir dans la « forêt » qui ne contenait en réalité qu'une mousse verte et spongieuse et des pierres disposées les unes sur les autres.
Julien secoua la tête, exaspéré.
-Tu m'énerves ! Lui rappela-t-il.
La jeune femme tourna la tête, toujours le même sourire écrasant sur le visage.
Arrivée en haut d'un petit promontoire, elle s'était arrêtée. Julien ne tarda pas à la rejoindre pour observer à son tour ce qui l'avait fait se stopper.
Devant eux, jouissait une immense étendue de mousse, coupée d'empilement de pierres, et de bâtons qui semblaient morts mais avaient tout de même d'immenses racines. Elle était assombrie par la nuit qui commençait à tomber, privant les deux amis d'une bonne visibilité. Mais leurs yeux humains ne pouvaient que voir l'immense créature qui reposait au centre de l'étendue.
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