Chapitre 12 ~ Discussions

La musique martèle mes tympans tandis que les larmes coulent. Je suis allongée sur le lit king-size de ma chambre d'hôtel à sangloter en silence. Je regarde le plafond, le visage figé en un air neutre, presque ennuyé, en me concentrant successivement sur la sensation de la basse qui pulse dans mes oreilles et de la fraîcheur du sillon de mes larmes sur mes tempes. Quelque chose me perturbe et j'enlève un de mes écouteurs pour me rendre compte que quelqu'un frappe à ma porte ou plutôt, que quelqu'un tente de la défoncer. Je me lève pour aller ouvrir et essuie mes larmes du revers de la main, merci le maquillage waterproof. Je ne suis plus qu'à quelques pas de ma porte lorsque la voix de Ben me parvient :

- Hart, ouvre moi, je sais que tu es là.

Je soupire et tourne la poignée pour ouvrir.

- En même temps, ce n'est pas difficile à deviner, je réplique alors que mon visage toujours blasé apparaît dans l'embrasure.

Ben paraît surpris et déclare :

- En fait, pour être tout à fait honnête, je n'étais même pas sûr que tu sois là et je commençais même à envisager sérieusement que tu sois partie courir...

Je hausse les épaules, c'est vrai que l'idée m'a traversée l'esprit, courir est mon meilleur moyen de me vider la tête et de combattre ma tristesse, mais quelque chose m'a poussé à rester ici, la honte peut-être, ou la peur ? Je suis sortie mes pensées par Ben qui se racle la gorge et demande :

- Je... Je peux entrer ?

Je m'efface et laisse le blond entrer. Je referme derrière lui et me retourne afin de lui faire face. Je pense qu'il s'attend à me voir triste ou énervée, car il hésite un moment avant de prononcer, ne serait-ce qu'un mot, comme si mon visage neutre, en attente de ce qu'il a à me dire, le prenait de court. Il finit par se décider et entame :

- Je suis vraiment désolé, May.

Le fait qu'il m'appelle par mon prénom m'intrigue et je penche légèrement la tête sur la droite pour écouter la suite.

- Je me suis laissé emporter par l'euphorie du moment, je n'aurais jamais dû te contraindre à montrer ton tatouage et je m'en veux terriblem...

- Tais-toi, je murmure, comme une prière.

Il est manifestement interloqué et obéit. Entre temps, je me suis déplacée jusqu'au bureau sur lequel je m'appuie en fixant obstinément le sol.

- Je te pardonne, si c'est ce que tu veux savoir. En fait, je ne vois même pas ce que j'ai à te pardonner, j'ajoute en relevant la tête pour croiser ses yeux verts.

Nous nous approchons l'un de l'autre et nous prenons dans les bras. À la fin de notre étreinte, je recule avant de commencer les yeux embués :

- Si tu savais le nombre de fois où j'ai rêvé de rencontrer mes idoles... Je ne pensais pas que ça arriverait un jour, pour être honnête, je continue avec un petit rire. Et encore moins qu'ils verraient mon tatouage, avec tout ce que cela implique. Je m'en veux à moi-même d'avoir été si bête... Et maintenant, j'ai gâché ma première -et peut-être unique- rencontre avec les personnes que j'admire peut-être le plus sur cette Terre. Celles qui m'ont sauvé et toujours aidé sans le savoir...

Un silence passe avant que Ben ne reprenne lentement :

- Bon, je sais que tu ne veux pas que j'en parle, mais je veux vraiment te présenter mes excuses.

D'un revers de la main, j'essuie mes larmes qui se sont remises à couler pendant mon monologue sans que je ne m'en rende compte.

- Je te pardonne... Jones.

Il sourit à l'entente de ce surnom.

- J'ai quelque chose à te montrer, Hart, dit-il en s'approchant de moi.

Il attrape ma main et m'entraîne en dehors de ma chambre. La porte se claque derrière nous et je serre les dents, Ben le remarque et me montre une petite carte, celle de ma chambre. Je soupire de soulagement et sans prononcer un mot de plus mon meilleur ami m'emmène dans la cage d'escalier. Je me demande où nous allons, je sais que le cast loge au quatrième étage, mais je ne vois pas pourquoi on monterait voir leurs chambres. Alors que nous dépassons le fameux quatrième étage, je suis encore plus perdue. Ben le remarque et déclare :

- On pourrait y aller en ascenseur, mais...

Mes yeux s'arrondissent et il lâche un petit rire. Je le suis de plus en plus perdue jusqu'à ce que nous arrivions au huitième et dernier étage. Je regarde mon ami toujours aussi désorientée et ce dernier se contente de me sourire de son habituel rictus moqueur. Il pousse une porte et nous arrivons finalement sur le toit de l'hôtel où sont installés des lumières et du mobilier d'extérieur qui semble aussi luxueux que le reste de l'hôtel et je suis éblouie par la beauté du lieu. Pourtant, en dépit du fait que ce lieu soit magnifique, il est désert. Je tourne sur moi-même pour couvrir du regard toute la surface du toit pendant que Ben commence :

- Quand j'ai fait cette découverte, j'ai tout de suite pensé à toi.

- Merci Jones, c'est super, comment tu es arrivé ici ?

- En fait, je l'ai trouvé la première semaine de mon arrivée en me baladant. C'est quasiment tout le temps désert, ajoute-t-il, je ne sais pas pourquoi. Il faut croire que les riches qui viennent à l'hôtel préfèrent la vue depuis leur chambre.

Je saute littéralement dans ses bras et le couvre de remerciements. À ma réaction, on dirait que Ben vient de m'offrir la terrasse entière, mais ce qu'il m'a offert est bien mieux : un endroit calme où je peux respirer, réfléchir et observer ma ville préférée, ce que ne me permet pas totalement ma chambre. Je regarde un instant la ville agitée, accoudée à la rambarde de sécurité, tandis que la nuit tombe lentement, il doit être vingt heures trente et je suis surprise qu'il ne fasse pas déjà noir. 

- Tu viens manger avec nous, Hart ?

- Vous ?

Il hoche la tête sans donner plus de détails et je hausse les épaules avant de demander.

- Vous allez où ?

Il répond uniquement :

- Sushis ?

- Sushis ! Je confirme avec entrain.

*Ellipse*

Je suis de retour sur le fameux endroit que m'a montré Ben. À la base, j'étais venue pour lire, mais je dois avouer que j'ai délaissé Little Women pour la vue de Londres de nuit. J'observe les lumières de la ville pourtant plongée dans l'obscurité, accoudée à la rambarde de sécurité, le vent de fin septembre agitant mes mèches rousses lentement, comme les pas d'un slow. J'ai passé la soirée avec le cast et quelques autres acteurs : Tom Hollander, Aidan Gillen, Priya Blackburn et Katherine Newman, qui jouent Jim Beach, John Ried, Kashmira Bulsara et Veronica Tetzlaff. L'actrice qui joue la femme de John est la seule à être déjà présente sur le tournage étant donné que Leila Crerar et Rosy Benjamin qui jouent respectivement Chrissie et Dominique n'apparaissent pas encore dans les scènes et ne sont donc pas encore là. (NDA: Juste un petite pause pour dire que je ne rigole pas, le nom de famille de la fille qui joue Dominique est vraiment Benjamin, et qui joue Roger Taylor ? Bon, j'arrête, mais déjà avec May et Brian May...) D'autres personnes étaient avec nous, dont Emma Louise, la grande sœur de Lucy et Liam, un ami de Gwilym. Nous avons passé une bonne soirée au restaurant japonais au coin de la rue et c'est ce à quoi je pense lorsqu'un bruit m'intrigue. Je me retourne pour découvrir que c'est l'ascenseur qui est le responsable, s'ouvrant sur Brian May. Par réflexe, je me pince discrètement, mais je ne rêve pas. Je referme la bouche pour mordiller mon piercing et me demande ce que le musicien fait là. Il sourit en me voyant et j'ai encore une fois l'impression que mon âme quitte mon corps.

J'ai eu l'impression de rêver le moment qui a suivi et en fait, je n'y crois toujours pas. Mais je vous rassure, tout était bien réel.

- Ben m'a dit que tu serais là, commence-t-il.

J'ouvre la bouche, sûrement dans le but de répondre, mais aucun son n'en sort. Brian rit légèrement avant de demander :

- Nous pouvons discuter ?

J'accepte. Évidemment que j'accepte, Brian May veut que l'on discute, mon idole veut parler avec moi. Nous nous asseyons dans les canapés avant que Brian n'entame :

- Ben s'en veux.

Je me demande si c'est Ben qui lui a demandé de venir me parler pour me faire plaisir et je me sens gênée, mais le guitariste me prend de court.

- Il n'est pas la raison de ma venue si c'est ce que tu te demandes, dit-il avec le même sourire que lors de notre première rencontre.

J'ouvre de nouveau la bouche, mais la referme.

- Alors c'est vrai, tu es la plus grande fan de Queen ? Demande Brian en regardant la ville.

- C'est un peu exagéré, j'arrive enfin à articuler, merci aux centaines d'exercices m'aidant à gérer mon stress que j'ai pratiqué.

Il me regarde enfin, comme heureux que je sois sortie de mon mutisme involontaire.

- Je suis désolée, je commence, c'est vrai que votre musique est très importantes pour moi, j'ai imaginé vous rencontrer des millions de fois, mais je n'avais jamais envisagé la possibilité que ce soit sur le tournage du biopic du groupe.

- C'est vrai que c'est improbable, rit-il doucement. Notre première rencontre n'a pas été à la hauteur de tes espérances ?

- Pas vraiment, j'admets.

- Alors enchanté Mademoiselle May Hart, je suis Brian May, guitariste de Queen, j'ai entendu dire que tu aimais les musiques du groupe ? Demande-t-il en me tendant sa main.

Je souris, touchée qu'il fasse ça pour moi et joue le jeu.

- Enchantée Monsieur Brian May, je m'appelle May Hart, effectivement, j'adore les musiques de Queen, elles sont très importante pour moi.

- Et Keep Yourself Alive est ta préférée, n'est-ce pas ?

Je hoche la tête doucement, comme toujours prudente, mais je ne sais pas pourquoi.

- Ben m'a parlé de toi, dit Brian en me regardant, bien avant que tu arrives ici.

Mes yeux s'écarquillent.

- Il m'a parlé de ta passion pour la musique et de ce que ça représente pour toi. Il m'a parlé de ton histoire, sans entrer dans les détails, il m'a dit que c'était à toi de décider si tu voulais ou non, les partager.

Je mets quelques secondes avant de me remettre de cette déclaration. Nous parlons un peu et ma gorge se dénoue, Brian finit par me dire :

- May, je pense que l'on devrait tous se demander ça : pourquoi est-ce que tu te lèves le matin ?

Je veux répondre ma famille, mais quelque chose m'en empêche. Car ce n'est ni ma famille, ni mes amis qui me font me lever le matin. Ni même Ben, et Dieu sait combien je tiens à lui. Non, ce qui me fait me lever le matin, c'est mon désir de vivre, mais encore une fois, pas au sens propre, au sens que moi je lui donne : créer. Ce qui franchit mes lèvres sort sans que je ne m'en rende compte :

- L'art.

Brian sourit de nouveau, comme satisfait, et je demande :

- Je peux vous demander quelle est votre raison de vous lever le matin ?

- La musique, répond-il. Elle m'a fait me lever pendant des années, et c'est elle qui m'a accompagné tout au long de ma vie, lorsque je vais mal, que je suis heureux ou en colère, je l'exprime dans mes chansons. J'ai choisi de raconter mon histoire grâce à ma guitare. Tu devrais faire pareil, si c'est créer ta raison de te lever, alors crée, peint, chante, écrit, danse, raconte ton histoire au travers de l'art.

Son conseil résonne dans mon esprit et mes lèvres s'étirent dans un sourire. Créer. Des chansons, des articles, des histoire, ma vie tourne autour de ça. J'en ai fait mon métier, car c'est la chose qui me tient le plus à cœur. Le musicien se lève et me salue :

- Il se fait tard, je devrais aller me coucher. Tu sais, ce n'est plus une heure pour un vieil homme comme moi, ajoute-t-il en riant.

- Vous logez à l'hôtel ? Je demande intriguée.

Il hoche la tête et ajoute :

- Au revoir, May, je suis heureux de vous avoir rencontré, j'espère que l'on se recroisera sur le plateau, bonne nuit.

Je le salue et réfléchis un moment à l'instant qui vient de passer. Je ne peux d'ailleurs toujours pas y croire lorsque je regagne ma chambre.

~~~

Salut vous, such a sad day, hein ? Désolée, je ne savais pas comment le dire autrement. Premièrement, j'espère quand même vous avoir fait passer un bon moment, bien que court durant ces vingt-quatre heures difficiles. Bon, entrons directement dans le vif du sujet, vous aurez sûrement remarqué que je n'ai pas publié ce chapitre dimanche, je voulais attendre aujourd'hui, ce jour si particulier : le 24 novembre. Aujourd'hui, cela fait 29 ans que nous à quitté un homme, une idole, un chanteur, un ami, merveilleux et sûrement extraordinaire pour les personnes qui ont eu la chance de le connaître. Tout comme l'année passée, je vous interdis de pleurer ! Comme il l'aurait sûrement voulu, pensez plutôt à la joie que vous procure sa musique. Comme je ne saurais trouver des mots aussi justes que ceux que j'ai écrit un an auparavant, les voici : "En ce jour si triste et pourtant si spécial, car il n'aurait pas aimé que les gens pleurent sa mort, levez votre poing au ciel, et criez : Ay Oh ! N'oubliez pas, chers amis, qu'une légende ne meurt jamais." D'habitude, je n'aime pas mettre des images dans mes chapitre, mais celle-ci est magnifique alors je vous l'offre :

Maintenant, même si cette note de fin de chapitre commence à être longue, j'aimerais vous expliquer rapidement pourquoi j'ai choisi d'associer ce chapitre à ce jour : Car j'aimerais que vous suiviez le conseil de Brian. En ce moment, tout le monde va mal, moi la première, je vous rassure, mais trouvez la raison qui vous fait vous lever le matin et exprimez vous grâce à elle. Bien sûr, ce conseil ne vient pas vraiment de Brian May (je n'ai pas encore eu la chance de lui parler haha, mais j'ai espoir), mais de moi au travers de mon personnage et je l'ai écrit avant de tomber dans un gouffre très profond dont j'ai du mal à ressortir, je l'avoue, mais aujourd'hui, j'ai découvert quelque chose qui m'aide à m'en sortir, très très lentement, mais sûrement. La vie est courte et peut s'arrêter à tout moment, pour X ou Y raison, Freddie nous l'a démontré, mais il ne s'est pas laissé abattre. Faites moi plaisir : on n'a pas le temps pour les larmes et les regrets, alors découvrez, créez, aimez, trouvez votre raison de vous lever le matin et profitez. Je sais que ça paraît difficile, et même moi, j'ai dû mal à garder ça à l'esprit quand je vais mal, mais essayez. Je vous aime prenez soin de vous, désolée d'avoir été si longue, j'espère ne pas vous avoir trop ennuyé. Je souhaite aussi un joyeux anniversaire à Gwilym Lee ;) Aller, des bisous, bye 💞

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