Chapitre 9.

Le jour suivant, Katsuki s'était levé avant que son réveil sonne. Il avait largement le temps pour se préparer alors il ne se pressa pas. Il s'extirpa de ses draps, fit son lit et quitta sa chambre. Il entama sa routine matinale, la tête dans le thé. Si l'on venait l'emmerder dès le matin, il n'hésiterait pas à sortir les crocs. Dieu savait à quel point il était renfrogné quand il venait de se réveiller!

Il posa ses fesses sur la chaise après s'être servi pour le petit-déjeuner et entama sa tartine de pain à la confiture de mûre. Il mangerait une pomme sur le chemin. Sa mère le rejoignit au moment où il partait se réfugier dans la salle de bains.

-Bonjour Katsuki..., salua-t-elle en baillant.

-'lut.

Il claqua la porte derrière lui, ce qui fit hérisser les poils de sa mère.

-Ne fais pas autant de bruit dès le matin! s'énerva-t-elle en se préparant un café.

Dix minutes plus tard, il était prêt. Il avait eu le temps de prendre une petite douche. Cela l'avait bien réveillé! Les cheveux encore mouillés, il se regardait dans le miroir en tentant de les coiffer comme il pouvait. Constatant que ses efforts étaient vains, il grommela des noms d'oiseaux, une petite crevasse entre ses sourcils, témoignant de son agacement matinal.

Finalement, il abandonna son combat contre ses cheveux, se rappelant que de toute façon, ils finiraient par sécher et reprendraient leur aspect d'hérisson. Il se dirigea par la suite dans l'entrée pour enfiler ses chaussures. Chose faite, il plaça son sac de cours sur le dos et quitta la demeure familiale sans saluer sa mère, qui ressentit de l'exaspération envers son fils.

-Il ne changera jamais, ce morveux, souffla-t-elle avant de prendre une gorgée de son café chaud.

Le nouvel élève admis à Yuei accéléra le pas sur le trottoir, les mains dans les poches, le regard plissé, la bouche pincée. Cette réaction n'était pas celle attendue quand on réussit à franchir une étape permettant de se rapprocher de son rêve. Étudier à Yuei était un prestige, une chance inestimable. Devenir un grand héros était une carrière toute tracée, désormais. Mais il n'y pouvait rien: le matin, il demeurait un ours qui ne se retiendrait pas de rugir si des parasites venaient empiéter son territoire. Être de bonne humeur? Cela ne semblait pas faire partie de son vocabulaire. Il traînait des pieds, le dos légèrement courbé. On pourrait presque apercevoir de la vapeur s'extirper de ses narines, comme le ferait un taureau avant de s'élancer vers le toréador. Au final, Katsuki Bakugo ressemblait plus à un animal qu'à un futur homologue d'All Might.

Arrivé à l'autre bout de la ville, Katsuki s'arrêta devant un grand portail bleu du haut duquel se trouvait une inscription dorée, UA. Il était finalement arrivé. Cela avait toujours été une chance qu'il vécût dans la ville de l'établissement de ses rêves. Quand il était enfant, il faisait souvent des caprices à sa mère pour qu'elle fût un détour pour passer devant cette magnifique école. Le bâtiment en forme de H, dont les murs étaient faits de miroirs semi-réfléchissants, lui avait toujours inspiré gloire et puissance. Il passait de longues minutes à imaginer son futur au sein de ce lycée réputé. Il souriait de toutes ses dents et bombait le torse, l'air victorieux, en déclarant haut et fort à sa mère qu'il serait considéré comme le nouveau pilier de la paix et de l'espoir par les enseignants car il surpasserait All Might dans tous les domaines.

Et désormais, son rêve de gosse était devenu réalité. Il n'en avait jamais douté. Il comptait faire de son mieux pour ne pas le laisser filer entre ses doigts.

Il se rendit alors soudainement compte qu'il était resté planté là, comme un touriste visitant une œuvre de renom dans un musée. Il s'imagina à la place d'un passant et se dit qu'il devait avoir l'air bien bête à attendre que le temps passât. Il reprit ses esprits qui avaient été happés bien trop longtemps dans ses souvenirs et avança d'un pas. Il avait franchi le portail.

Il était vraiment devenu un élève de Yuei.

Marchant pas à pas jusqu'au hall de l'établissement, il observait plus particulièrement la façade de sa nouvelle école. Il ne le montrait pas, mais il était heureux et fier de faire partie de l'élite. Sa mauvaise humeur s'était totalement volatilisée.

Arrivé dans les couloirs, il constata qu'il n'y avait pratiquement personne. Il n'avait croisé que cinq élèves et il crut un instant être arrivé le mauvais jour. En cherchant un peu, il retrouva sa salle de classe: la classe 1-A. Difficile de la manquer avec l'imposante porte qui faisait trois fois sa taille. À quoi cela servait-il? Personne ne mesurait plus de deux mètres dans cette école, à sa connaissance! Mais il ne s'attarda pas sur ce détail d'architecture et fit coulisser la porte afin d'accéder à la pièce dans laquelle il assisterait au cours pour le restant de ses années au lycée. Aussitôt, une tête se tourna dans sa direction, intéressé de connaître l'identité du nouvel arrivant. C'était un garçon aux cheveux aussi rouges que la combustion de ses explosions quand il activait son Alter. Il compatit silencieusement quand il constata l'état de sa chevelure encore plus catastrophique que la sienne. Instantanément, ils lui firent penser à des cornes. Entre l'hérisson et le rhinocéros, Katsuki avait du mal à lui décerner une identité. Ils échangèrent un long regard. Le blondinet n'avait pas envie de lui parler. Mais cela ne sembla pas être le cas du rouquin qui lui adressa un sourire de bienvenue. Il fut davantage surpris quand il constata que ses dents étaient pointues comme les crocodiles.

-Salut, toi! Je m'appelle Kirishima Eijiro. Toi aussi, tu fais partie de la classe 1-A?

Était-il débile? S'il ne l'était pas, pourquoi serait-il entré dans cette salle? Pensait-il qu'on pouvait se tromper avec la peinture sur la porte désignant "1-A"? Mais il se calma. Après tout, il allait passer ses journées de cours avec cette personne. Alors autant essayer de l'apprécier plutôt que de le rejeter.

-Bakugo Katsuki. Nan, je passais juste dans le coin, tu penses!

Sur le coup, Eijiro se sentit gêné d'avoir posé une question aussi idiote. Et pour détendre l'atmosphère, il se mit à rire. Le nouvel arrivant remarqua alors qu'il y avait un plan de classe dessiné au tableau. Il parcourut les quelques noms, à la recherche du sien. Il était au deuxième rang, côté fenêtre. Il ne chercha pas à regarder les autres noms, se disant que de toute manière, il ne les retiendrait pas de sitôt. Il posa son sac sur la table et s'écroula sur sa chaise, accoudé sur son bureau, faisant face au rouquin qui avait cessé de rire.

-J'avoue que j'aurais pu trouver mieux comme approche!

-J'te pardonne.

Eijiro plaça alors son pouce et son index sous son menton, ayant l'air en pleine réflexion. Puis, tout à coup, il tiqua.

-Ah! Mais c'est toi qui est arrivé à la deuxième place au classement! Désolé, je ne t'avais pas reconnu. En tout cas, toutes mes félicitations!

Il ne comprenait pas pourquoi il le félicitait. Après tout, ce n'était pas la place dans le classement qui était important mais le fait d'y être.

La porte coulissa, coupant court à leur discussion. Un petit groupe de cinq personnes apparut: deux filles et trois garçons. Encore des nouvelles têtes qu'il ne connaissait pas. Cela lui fit un drôle d'effet de se dire qu'il ne connaîtrait personne dans sa classe. Après tout, il était le seul de son collège a avoir été reçu à Yuei.

Le petit groupe salua les deux garçons par politesse puis se dirigea vers le tableau pour repérer leur place. Presque aussitôt, une nouvelle tête passa le seuil de la porte. Il attira de suite l'attention avec ses cheveux bicolores et sa large cicatrice balafrant une partie de son visage. Se serait-il brûlé? Pour un futur héros, s'il était aussi maladroit, il ne ferait pas long feu. Néanmoins, il dégageait une aura particulière qui imposait une certaine forme de respect. Son air froid lui rappela quelqu'un. Il le suivit discrètement du regard afin de ne pas éveiller les soupçons. Il était curieux de connaître son identité. Le garçon aux cheveux blancs et rouges se dirigea directement vers le fond de la classe. Il dévia son regard pour le poser sur le tableau et repéra son nom. Todoroki Shoto. De la famille Todoroki? Serait-il possible qu'il soit le fils d'Endeavor, le Numéro Deux du classement des super-héros? Son air supérieur appuya son hypothèse. Katsuki sourit. Peut-être avait-il hérité de son Alter et qu'il était fort?

"Enfin un adversaire à ma hauteur!" pensa-t-il, orgueilleux.

Les minutes s'écoulèrent et la salle se remplissait à vue d'œil. Vint alors l'arrivée d'une petite tête verte qu'il aurait préféré ne pas recroiser. Elle était en compagnie de Miss Anti-Gravité et d'un grand garçon à lunettes, aux allures d'androïde. Il avait le visage carré, la mine fermé et une importante masse musculaire. Pratiquait-il la musculation à son jeune âge? Au moins, il avait l'air impliqué dans son futur rôle de héros. Mais celui qui attirait le plus son attention était Izuku. Dès l'instant où son regard avait percuté sa silhouette, son cœur s'était resserré dans sa poitrine, comme si sa cage thoracique s'était refermée autour de son palpitant, le compressant davantage. Au lieu du visage de son sauveur lors de l'épreuve, s'était superposé celui de son défunt camarade. Une profonde douleur se diffusa dans tout son corps. Il détourna rapidement le regard, une main à la poitrine, serrant de toutes ses forces sa veste grise d'uniforme. Son coude droit était toujours posé sur son bureau, retenant son front d'une main moite et tremblante. Ce garçon lui rappelait les pires cauchemars qu'il avait pu faire. Revivre éternellement ce moment où il l'avait conduit vers l'autre face du monde. Il regrettait. Il regrettait tellement ce qu'il avait pu lui faire ou lui dire. Il pensait pourtant être passé au-dessus, mais visiblement, son cœur ne désirait pas le laisser en paix. Tout à coup, une main se posa sur son épaule, le faisant sursauter. Il se tourna vers son interlocuteur et fut confronté à deux merveilleuses prunelles de jade. Des yeux d'une telle rareté lui rappelant la verdure des arbres en présence du printemps. Il se sentit apaisé durant un court instant.

-Ça va, Bakugo? Tu n'as pas l'air en forme. Tu voudrais prendre l'air, quelques minutes?

Les tremblements de son corps cessèrent. Il reprit une respiration convenable, sans jamais quitter son regard hypnotique. Il essaya d'avaler un peu de sa salive, malgré le désert du Sahara qui composait sa bouche. Mais au lieu de lui répondre que tout allait bien pour le rassurer, il se renfrogna et rejeta sa main qui n'avait pas délaissé son épaule d'un balayage de la sienne.

-T'occupes. Je vais très bien.

Ochaco et l'athlète qui les accompagnaient se lancèrent un regard, ne comprenant pas son rejet et son caractère désagréable alors que leur ami voulait simplement le réconforter. Pour autant, Izuku ne paraissait pas susceptible. Katsuki n'était pas le genre de personne à laisser libre court à ses sentiments en présence des autres. Mais son état l'inquiétait. Pourquoi quand Katsuki le regardait, il semblait si...triste? Il ne lui avait pourtant jamais fait de mal et il ne le souhaiterait pour rien au monde! Il ne voulait pas le brusquer mais il n'appréciait pas vraiment se sentir comme un bourreau. Quand il l'avait fixé dans le blanc des yeux, il semblait ravagé par un fantôme du passé, et Izuku ne voulait pas être celui qui le lui rappelle. Néanmoins, il ne pouvait s'empêcher de vouloir l'aider à aller mieux. Il leur faudrait peut-être du temps, mais du temps, ils en avaient. Durant leurs années au lycée Yuei, il aurait le temps de le libérer de ses vieux démons. Alors, simplement, il lui sourit doucement et s'éloigna en compagnie de ses deux acolytes pour chercher leur place.

Et quand Katsuki se rendit compte que ce garçon qui accaparait ses pensées les plus obscurs était placé juste derrière lui, il se dit que le destin s'acharnait sur lui...

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