Chapitre 7.
Katsuki était allongé sur un lit simple, dans l'infirmerie de Yuei avec quelques élèves sur les matelas avoisinants. Il les ignorait obstinément. Il ne voulait pas faire la causette avec ces gens qu'il ne connaissait pas.
Il regardait par la fenêtre, absent. Il était torse nu, enroulé de bandages. Recovery Girl s'était très bien occupée de lui. Il ne ressentait désormais plus aucune douleur.
Il observait les immeubles de Musutafu d'un œil terne. Le ciel était bleu, sans la moindre trace de nuage. Son champ de vision lui permettait de voir les oiseaux voler en petits groupes, mais il ne les voyait pas. En réalité, son regard se baladait à travers la fenêtre, mais il était absorbé par ses pensées, comme s'il avait été envoyé dans une autre dimension. Tellement absorbé que son œil ne lui permettait pas de voir le paysage à l'extérieur de la pièce.
Mikumo. Izuku. Qu'est-ce qui les liait, exactement? Ils avaient tous les deux trop de similitudes pour les distinguer et pourtant, il n'y avait aucun lien entre eux. Comment cela pouvait-il être possible?
Izuku avait trop de manières qui lui rappelaient son ami. Notamment ce carnet où ils notaient des informations sur les héros. Ce n'était pas une activité très répandue. La coïncidence était trop énorme!
Ce garçon aux cheveux verts occupait toutes ses pensées et il eut cette subite envie de s'arracher les cheveux. Il se mit en boule, la tête dans les bras.
Il avait enfin réussi à passer au-dessus de la mort de Mikumo. Il ne s'était jamais réellement pardonné, mais finalement il avait daigné penser à autre chose. Le suicide de son ami l'avait profondément atteint. Il s'était absenté des cours deux semaines entières. Durant ce temps, il restait enfermé dans sa chambre, les remords revenant par vagues, qui cherchaient à le noyer dans sa culpabilité. Il n'arrivait pas à remonter à la surface. Quand il se débattait, il se faisait attirer par les profondeurs des abysses de sa douleur. Il avait passé les deux semaines les plus terribles de sa vie... Mais le calvaire était loin d'être terminé: quand il était retourné en cours, tout lui rappelait le défunt. Des flashs de souvenirs lui revenaient quand il passait dans certains couloirs, quand il s'asseyait en classe. Il se souvenait de l'horreur qu'il lui avait fait subir. Toutes les fois où il l'avait rabaissé, frappé, humilié... Inconsciemment, il le considérait comme un jouet qu'il pouvait manipuler à sa guise. Mais il avait fini par le casser... Il ne pouvait même plus recoller les morceaux.
Il l'avait détruit. Et cela l'affecta énormément. Les premiers jours, il n'arrivait même pas à suivre ce que lui disait le professeur. Il était dans sa bulle.
Quand il était revenu en cours, les élèves avaient cru voir un revenant. Mais quelque part, ils étaient rassurés qu'il n'avait pas suivi Mikumo dans sa descente aux Enfers. Ils savaient tous que c'était lui le coupable, qu'il était à l'origine du départ précipité de leur camarade. Ils lui en voulaient tous pour cette raison, même s'ils n'en avaient pas parlé aux professeurs. Cependant, quand ils avaient remarqué le changement opéré chez le blondinet, ils avaient bien compris qu'il s'en voulait bien plus qu'ils ne le croyaient. Il flottait presque dans son uniforme. Ses joues étaient creusées tout comme les poches qu'il avait sous les yeux, et il était bien pâle.
En somme, il ressemblait à Mikumo, quand il était encore sous l'emprise de ses bourreaux. Et les élèves de sa classe en eurent le cœur brisé de le voir ainsi. Certes, il ne méritait que le pire des châtiments pour avoir conduit un élève au suicide. Mais deux victimes n'en valaient pas la peine. Alors quand la sonnerie annonçant la première pause retentit, quelques élèves s'avancèrent vers le bureau du garçon à l'Alter d'explosion.
-Ça fait longtemps qu'on ne t'a pas vu, Bakugo!
-Bon retour!
-Tu as l'air malade. Tu es sûr que tu as bien fait de revenir?
Une ribambelle de questions l'agressa, lui faisant bourdonner les oreilles. Il entendait bien ce qu'ils disaient, mais il n'avait aucune envie de leur répondre. Il voulait être seul...
Alors sans un mot, il se leva de sa chaise et quitta la salle de classe pour se ressourcer dans les couloirs. Il ne s'était jamais senti aussi oppressé de toute sa vie. Il ne doutait vraiment pas qu'en prenant Mikumo comme souffre-douleur, il en payerait les conséquences de cette façon.
-Bakugo...
Une petite voix timide venait de l'interpeller. Il tourna la tête vers la porte coulissante de sa salle de classe pour observer Yuu, qui le sondait d'un œil inquiet. Elle s'avança vers lui, hésitante.
-Tu permets qu'on...discute un peu tous les deux?
Il ne répondit pas. Elle prit ce silence pour une affirmation et le rejoignit en calant son dos contre le mur, juste à côté de lui.
-Je voulais savoir comment tu allais. Mikumo m'a dit un jour, que vous traîniez tout le temps ensemble quand vous étiez petits.
Il ne la regarda pas, continuant de fixer un point invisible face à lui. Ce silence gêna la jeune fille qui prenait sur elle pour ne pas partir.
-Je m'étais dit que son absence devait autant te toucher que moi, même si je ne vous voyais quasiment jamais ensemble.
Il souffla du nez, prenant sur lui pour ne pas perdre les pédales. Il n'avait pas envie de se lancer dans cette conversation.
-Mais... Il faut que tu saches que durant ton absence, j'ai appris des choses que j'aurais peut-être préféré ne pas savoir.
Il jeta un œil dans sa direction. Elle le fixait avec insistance. Où voulait-elle en venir?
-La classe en parlait pendant une pause. J'ai entendu qu'Akatani se faisait harceler. Et j'ai aussi appris que tu n'étais pas innocent sur cette affaire.
Il se redressa et se tourna pour faire complètement face à la jeune fille, les mains dans les poches, le regard distant.
-Ouais, et donc? Je pense bien que tu étais la seule à ne pas être au courant.
Elle fronça le nez, le regard sombre. Elle haussa le ton, tentant désespérément de contenir sa rage.
-Et c'est tout ce que ça te fait? Tu te fiches que toute la classe sache que tu es un harceleur?
Il ne répondit pas, en se contentant de la regarder de haut. Malgré qu'il faisait une tête de plus qu'elle, elle ne se laissa pas impressionner.
-Tu es au courant qu'on pourrait te dénoncer? Tu aurais de sérieux problèmes si ça venait à arriver. Par exemple, ça pourrait t'empêcher d'aller à Yuei.
Il n'avait jamais connu cette personnalité de sa camarade. Elle avait ce sourire suffisant qui commençait à sérieusement l'agacer.
-C'est justement ce que je me demande. Pourquoi vous ne le faites pas? Après tout, ce serait une bonne vengeance, tu ne crois pas?
Si ses yeux étaient des revolvers, elle aurait pu l'abattre sur le champ.
-Au vu de ton absence, on pensait que tu t'étais pendu ou quelque chose du genre. J'avoue que j'aurais préféré que ce soit le cas que de te voir de nouveau.
Alors la gentille fille de la classe pouvait aussi se montrer agressive? Il ne s'attendait pas vraiment à ce qu'elle le menace. Elle sembla se calmer car elle reprit d'un ton moins acerbe. Elle parut mélancolique.
-Et dire que je n'avais rien vu... Il ne m'a jamais dit qu'il se faisait malmener...
Elle regrettait de ne pas avoir été là pour le soutenir. Au final, la mort de Mikumo avait touché tout le monde. Elle le fixa droit dans les yeux, comme pour le supplier.
-Juste, dis-moi une chose: est-ce que tu regrettes ce que tu as fait?
Bien sûr qu'il s'en voulait. Mais croyait-elle réellement qu'il allait le lui avouer? Il détourna le regard, pour lui faire entendre qu'il ne voulait pas lui répondre. Elle se sentit frustrée qu'il l'ignore, mais resta calme car elle connaissait bien la réponse. Katsuki était loin d'être un psychopathe, incapable de ressentir la moindre once de remords.
-Sache que j'aimais beaucoup Akatani. C'était un ami précieux pour moi. Alors imagine le choc que j'ai ressenti quand j'ai appris sa mort...
Il la regarda de nouveau quand il sentit que sa voix se cassait. Ses yeux brillaient, mais elle continuait de sourire doucement.
-Je ne me suis jamais doutée un seul instant qu'il était dans une mauvaise passe. Il avait tout fait pour me cacher son mal.
Katsuki pinça ses lèvres quand il aperçut son regard trembler pour retenir les larmes qui affluaient.
-Je me suis remise en question. Est-ce que j'ai été une bonne amie pour lui? Est-ce que je lui ai apporté du bonheur dans sa vie? Est-ce que j'y étais pour quelque chose dans sa mort?
Elles finirent par rouler le long de ses joues. Le garçon la regardait sans rien dire. Il voyait bien qu'elle avait besoin d'extérioriser sa peine.
-Depuis qu'il n'est plus là, c'est comme si un vide s'était formé en moi. Un vide que je n'arrive pas à combler. Et je me demande même si un jour, j'arriverais à le faire disparaître...
Elle essuya désespérément ses joues humides à l'aide de ses manches. Elle s'était pourtant jurée de ne plus pleurer la mort de son ami...
-Je me dis que si je me vengeais en racontant au professeur que tu étais le principal responsable de la mort d'Akatani, cela ne le ramènerait pas. Et d'ailleurs, je ne pense pas qu'il aurait aimé que je me venge. Il n'arrêtait pas de me dire que s'il devenait un héros, il ne chercherait pas à punir un vilain mais plutôt de le ramener dans le droit chemin. J'avoue que c'était une vision un peu trop simpliste mais c'est comme ça qu'il a toujours été.
Cela lui ressemblait bien de dire ce genre de chose. Katsuki continuait d'écouter attentivement ce qu'elle lui racontait.
-C'est pourquoi j'ai demandé à toute la classe de ne rien dire. Même s'ils étaient tout d'abord en désaccord, ils ont fini par accepter ma proposition. Inutile de gâcher une seconde vie en l'empêchant de réaliser son rêve.
La sonnerie retentit quand elle acheva sa phrase. Les cours allaient reprendre. Elle lui sourit et passa à côté de lui pour retourner en classe.
Katsuki aurait aimé lui dire "Merci". Car sans elle, il n'aurait jamais pu avoir une chance de se présenter à l'examen d'entrée de Yuei. Et pourtant, encore une fois, son ego l'avait refréné.
Néanmoins, malgré tous les efforts qu'il avait dû faire pour passer outre, Izuku était entré dans sa vie et avait tout chamboulé. Tous ses repaires avaient été balayés d'un simple revers de la main. Cette main qu'il lui avait tendue après avoir vaincu le robot.
-Midoriya... Qui es-tu donc, exactement? s'interrogea Katsuki, pensif.
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