Chapitre 12.
Il faisait sombre et l'air était humide. Les rats se baladaient sous leurs pieds et l'odeur de la pisse et des déchets pourris en auraient donné la nausée à plus d'un. Un vrai décor de film d'horreur amateur. Les vitres étaient brisées, faisant entrer la brise fraîche de ce début de soirée de printemps. Des graffitis apportaient un peu de couleur dans ce milieu hostile.
-Franchement, il abuse. Pourquoi ne pourrait-on pas aller nous réfugier dans notre bar habituel? s'exaspéra un homme caché entièrement sous une combinaison moulante, assis sur une caisse en boîte moisie avec un idéogramme à moitié effacé qui représentait un verre à pied.
-De ce que j'ai compris, la police est dangereusement à nos trousses. On n'a d'autres choix que de rester ici le temps que cela se tasse, répondit calmement une silhouette enflammée en costume de barman.
-On aurait pu trouver plus luxueux, vous ne croyez pas? renchérit le premier en croisant les bras. Je ne supporte pas cette odeur...
-Tu n'as qu'à sortir si ça ne te convient pas, suggéra un homme aux cheveux noirs et aux cernes et à la mâchoire recousue, le dos reposé contre l'un des murs fondateurs du bâtiment abandonné.
-Mais ça caille dehors!
Un grincement de porte les stoppa dans leur discussion et tous dirigèrent leur attention sur le bel homme d'affaire, valise à la main, chapeau gris sur la tête qui venait de faire son apparition. Il ferma la porte et regarda la petite bande composée de cinq garçons. Il se mit à sourire et à glousser tandis que son visage fondit. Un liquide granuleux s'écoula de sa peau pour rejoindre le sol et disparaître comme neige au soleil. À la place de ce grand homme, une jeune adolescente de quinze ans se métamorphosa, souriant de toutes ses dents, le regard luisant de folie. Elle attrapa son chapeau et le fit tourner autour de son index, joyeuse.
-Du nouveau? demanda négligemment un homme qui n'avait pas encore parlé, le corps recouvert de main, camouflant son visage.
-Oui, et croustillant! affirma-t-elle tout en riant, exprimant ainsi sa bonne humeur éternelle. Plusieurs professeurs seront absents le premier jour de la semaine prochaine à cause d'une réunion entre héros professionnel. Et certains gardiens ont pris congé pour une raison que j'ignore. Ce sera facile pour nous de nous infiltrer.
-Parfait.
-Ça vous dit de venir chez moi pour faire la fête? Il y a assez de place pour tout le monde et mes parents sont d'accord.
Yaoyorozu Momo, une charmante fille à la longue chevelure noire toujours attachée en queue-de-cheval et à la poitrine généreuse venait d'inviter ses camarades. Elle était issue d'une riche famille, et le plus étonnant était qu'elle ne s'en vantait pas. Du peu qu'Izuku connaissait, c'était une fille gentille, intelligente et qui était toujours présente pour aider ses amies. Mais ce qui avait le plus percuté chez la petite tête verte était son Alter très intéressant: l'Alter de création. Il lui suffisait de connaître la composition d'un objet pour le faire apparaître. Elle pouvait vraiment faire tout ce qu'elle voulait. Pas comme lui, malheureusement. Mais cela ne l'avait pas empêché de prendre un bon nombre de notes sur son carnet au sujet de Momo!
-T'es sérieuse? Toute la classe?
-Oui, vous pourriez rester dormir, si cela vous convient. Il y a assez de chambres dans ma maison.
Le seul bémol était qu'elle parlait innocemment de sa condition aisée comme si cela était normal. Elle ne se sentait pas privilégiée mais cela étonnait à chaque fois ses camarades quand elle s'exprimait sur ce sujet.
-Je pensais que puisque demain, on sera vendredi, après les cours, on irait tous chez moi et vous rentreriez samedi dans l'après-midi.
Plusieurs élèves semblèrent ravis par cette invitation et cela semblait envisageable pour tous. Izuku ne s'inquiéta pas pour l'accord de sa mère: elle serait ravie qu'il se rapprochât de ses camarades pour se faire des amis.
-T'es sérieux? Non, tu viens avec nous! Ça sera encore mieux si tu venais!
Il reconnut la voix d'Eijiro. Il se retourna et constata sans surprise qu'il se chamaillait avec Katsuki.
-J'ai pas envie d'y aller.
-Mais s'il te plaît! Ça pourrait être marrant!
-Tu m'les brises, tu l'sais, ça? grogna le blondinet, excédé.
-S't'plaît!!! minauda son ami, les mains jointes comme pour prier.
Il savait que s'il n'acceptait pas, il allait se faire harceler par ce hérisson sur pattes. Il n'avait pas vraiment le choix...
-Tu fais chier..., soupira-t-il, résolu.
Un "oui!" résonna dans toute la classe, tandis qu'il avait levé les bras en signe de victoire. Izuku ne put s'empêcher de rire face à cette réaction d'enfant capricieux.
La fin des cours était arrivée et tout le monde quitta l'enceinte de l'établissement, soulagé que cela fût enfin terminé.
-Salut, on se voit demain! Et n'oublie pas de demander à tes parents s'ils sont d'accord pour la fête de Yaoyorozu!
-Ne t'en fais pas, je ne risque pas d'oublier!
-On s'appelle?
-Je vais par là, j'ai des choses à faire. À demain!
-Bonne soirée!
Tout le monde se salua à la sortie du lycée et se sépara. Il y avait une sacrée foule, en plus des passants qui passaient par là. Izuku fit un signe à ses amis avant de reprendre la marche pour rentrer chez lui. Du coin de l'œil, il observa un homme à lunettes de soleil, une cigarette à la bouche, sous un Duffle-Coat bleu foncé et un chapeau sombre. Izuku l'avait remarqué la veille, au même emplacement, en train d'observer les élèves. Et même s'il portait des lunettes opaques, il avait l'impression qu'il traînait son regard sur lui, ce qui lui provoquait des frissons d'angoisse. Il prenait sur lui pour paraître naturel, en faisant comme s'il ne l'avait pas remarqué. Mais il ne semblait pas le suivre, alors cela le réconforta. Mais tout de même, il se demandait bien ce qu'il pouvait attendre. Peut-être était-il un parent attendant son enfant? Mais Izuku ne pouvait s'empêcher de le suspecter, pensant qu'il était attiré par les adolescents de leur âge et qu'il essayerait tôt ou tard de les agresser. Un frisson lui parcourut la colonne vertébrale rien que de s'imaginer être la proie de ce pervers! Il secoua vivement la tête, se disant qu'il devait divaguer.
"C'est sûrement un parent. Oui, c'est sûrement ça."
Sa grande paranoïa lui hurlait de faire attention et qu'il était peut-être à sa suite. Mais sa raison tentait de le rassurer en lui disant qu'il avait une trop grande imagination. Néanmoins, dans le doute, il jeta un coup d'œil par-dessus de son épaule, afin d'en avoir le cœur net. Mais il crut sursauter quand il constata que cet homme était bel et bien derrière lui, en train de le suivre discrètement. Ses sens se mirent en alerte, son cerveau tourna à plein régime tandis que son cœur pulsait plus rapidement. Il s'imagina le pire: il se ferait kidnapper et se retrouverait emprisonné dans un lieu insalubre, attaché, tout nu, couvert de honte. Le feu lui monta aux joues. Il était hors de question que cela se terminât de la sorte! Il réfléchit, réfléchit. Il tenta de se rassurer en se rappelant qu'il n'avait pas encore utilisé son Alter aujourd'hui alors il pouvait toujours se défendre sans prendre le risque de mettre sa vie en danger.
Il serra le poing, accélérant le pas, guettant si les pas de l'inconnu derrière lui le rattrapaient ou non. Mais il n'entendit rien de tel et après plusieurs mètres, il se retourna à nouveau pour constater...qu'il n'était plus là.
-Hein?
Il tourna les talons, cherchant du regard cet inconnu qui le suivait depuis sa sortie de Yuei. Mais personne. Il n'avait pourtant pas rêvé! Après quelques instants à rester planté au beau milieu du chemin le menant chez lui, il reprit la marche, les questions trottinant dans sa boîte crânienne. Son cœur se calma et il se sentit un peu mieux quand il passa le seuil de sa maison. Mais tout de même inquiet, il préféra verrouiller la porte.
"On ne sait jamais..."
Il se débarrassa de ses chaussures rouges et de son sac et rejoignit sa mère dans la cuisine.
-Coucou Maman!
-Oh! Izuku! Je ne t'avais pas entendu arriver. Comment s'est passée ta journée?
-Bien. Et toi?
Il ne voulait pas l'inquiéter avec la péripétie qu'il venait de vivre. Elle se faisait déjà bien assez de soucis pour lui comme ça.
Il s'installa sur l'une des chaises de la salle à manger, tout en discutant joyeusement avec sa mère, insouciant. Il lui demanda s'il pouvait aller chez Momo et elle accepta volontiers. Puis, quand ils n'avaient plus rien à dire, il s'apprêta à rejoindre sa chambre.
-Bon, je vais travailler un peu.
-Izuku?
Son ton plus sérieux le sortit de sa bonne humeur. Il savait bien ce qu'elle allait lui demander.
-Toujours rien?
Il se pinça les lèvres, un peu gêné de lui offrir une réponse négative.
-Tu ne te souviens vraiment de rien?
-Il m'arrive de faire des rêves, par moment. Mais...c'est comme si quelque chose m'en empêchait...
-Je vois...
Un silence pesant s'interposa entre eux. Il avait baissé la tête mais il porta une nouvelle fois son regard sur le visage de sa mère. Sa poitrine se fendit quand il constata qu'elle avait les yeux embués de larmes.
-Maman...
-Désolée..., sanglota-t-elle en essuyant les perles salées aux coins de ses yeux.
Il se leva, contourna la table et vint la prendre dans ses bras.
-C'est moi qui suis désolé de te faire souffrir... Mais je te promets que je fais des efforts.
Il enfouit son nez dans les cheveux de sa mère, les yeux fermés, bercé par son odeur.
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