Chapitre 15 - J'commence à douter de la présence d'hétéros dans mon entourage

B'jour, c'est mon anniversaire, et pour l'occasion, voilà le chapitre de la semaine, hue hue~ (Oui, je vous dis ça seulement pour vous prévenir que c'est mon anniversaire, voilà voilà.)

Bonne lecture!


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« 'J'crois que j'suis gay'. Non... Non, non, j'peux pas lui annoncer ça de but en blanc... Mmh... 'Hé, Eijirou, j'en pince pour le nerd, mais j'crois bien que j'ai tout fait foirer !'... Ca va pas non plus. Putain, quelle brillante idée j'ai eu, moi, hein ! »


Comme un lion en cage, je fais les cent pas dans ma chambre, nerveux, serrant et desserrant les poings tandis que je cherche les bons mots. La tâche est d'autant plus difficile sachant que je n'ai pas fermé l'œil de la nuit, davantage occupé à me retourner dans mon lit en ruminant mes actions, guettant mon téléphone en l'attente d'une réponse de mon meilleur ami. Lorsque celle-ci m'est parvenue, il était dix heures du matin, et je m'étais déjà levé afin de manger un morceau et de passer à la salle de bain faire ma toilette et m'habiller. Je n'ai jamais vraiment été du genre à traîner au lit, le matin, que je sois supposé me rendre en cours ou non. En descendant à la cuisine, j'ai d'ailleurs vu mes parents qui se sont retrouvés surpris de me voir ici, alors que j'étais censé passer la nuit chez Izuku. Je me suis contenté de leur dire que cela ne s'était finalement pas fait, sans entrer dans les détails. Ils ont alors échangé un regard, visiblement interloqués, mais n'ont pas cherché à en savoir davantage : ils savent reconnaître lorsque je n'ai pas envie de parler de quelque chose, et n'insistent généralement pas quand tel est le cas. Sauf s'ils jugent la chose en question comme étant grave. Ce qui n'est pas le cas ici. Pas pour eux, en tout cas. Alors que, de mon côté, j'ai l'impression que mon cœur est susceptible d'exploser à tout moment.

... Et puis, est-ce que cela va réellement changer quelque chose, que j'en parle à Eijirou ? Cela n'annulera pas mes paroles ni mes actes passés. Cela n'effacera pas le probable chagrin engendré chez Izuku. Je me mords la lèvre, au point que ça en devient douloureux, et me saisis rapidement de mon téléphone. Je m'apprête à ouvrir la conversation avec tête d'orties pour lui dire de ne finalement pas venir, mais c'est sans compter la voix de ma mère qui m'appelle depuis le rez-de-chaussée, me faisant m'arrêter sur le moment et serrer la mâchoire.


« Katsuki ! Quelqu'un pour toi !

- Euh... Ouais, dis-lui de monter ! » réponds-je en rangeant mon téléphone dans ma poche.


Je m'assois sur le rebord de mon lit en poussant un long soupir. Je ne me sens pas bien. Qu'est-ce qui m'a pris de vouloir en parler à Eijirou ? Je ne me sens pas prêt. Pas prêt à dévoiler mon homosexualité. Je sais que mon meilleur ami est quelqu'un d'ouvert. Pour autant, si je lui en fais part, j'aurai l'impression d'avoir exposé une faiblesse, de lui laisser une ouverture pour m'attaquer, me faire du mal, si jamais l'envie l'en prenait. Ce n'est pas son genre, je le sais bien. Mais je ne peux pas m'empêcher d'être inquiet.

J'entends quelqu'un monter les escaliers, se rapprocher peu à peu de ma chambre. Très probablement lui. Alors je fais de mon mieux pour paraître détendu. Comme si cette tempête en mon intérieur n'existait pas, comme si elle n'était pas en train de ravager mon esprit, d'y semer un indescriptible chaos. On frappe à ma porte. J'inspire profondément, expire.


« Ouais, entre. »


Je vois la poignée s'abaisser, la porte s'ouvrir, dévoilant un garçon à la chevelure rouge qui esquisse un sourire à ma vue. Ses mèches d'ordinaire coiffées en piques sont aujourd'hui relâchées, les laissant retomber jusqu'à ses pommettes. Je trouve que cela lui va bien et lui donne un air plus doux, collant mieux avec sa personnalité. Mais bon, d'un autre côté, il peut bien faire ce qu'il veut de ses cheveux.


« Salut, mec !

- Salut.

- Ca va ? T'as l'air claqué. »


Il s'avance dans l'enceinte de ma chambre, prenant soin de refermer la porte derrière lui. Il se place devant moi, bras croisés, et me jauge silencieusement du regard tandis que je me décale légèrement pour lui indiquer de s'asseoir à mes côtés. Il comprend sans que je n'aie à ouvrir la bouche et se pose à son tour, attendant que je daigne lui répondre.


« J'ai pas dormi d'la nuit, finis-je par avouer dans un haussement d'épaule.

- Ah, merde ! Comment ça se fait ? T'as passé ta nuit à te faire un marathon de films ?

- Nan, ça c'est plutôt un truc que toi, tu ferais.

- Rho, ça va, c'est pas comme si j'étais la seule personne au monde à passer ce genre de nuits ! » se défend-il.


Je lève les yeux au ciel sans dissimuler mon amusement. Combien de fois, pendant les vacances, n'ai-je pas eu de nouvelles d'Eijirou avant le milieu d'après-midi parce que celui-ci avait passé la nuit à regarder telle et telle série de films en compagnie de Denki ou Mina - ou les deux. Moi en revanche... Je suis du genre à rapidement piquer du nez, lorsqu'il commence à se faire tard. Alors je ne suis pas un grand fan de ce genre de soirées. La dernière fois, j'ai réussi à m'endormir devant Sinister et mon ami l'a assez mal vécu : lorsque je me suis réveillé durant le générique de fin, je l'ai retrouvé recroquevillé sur le canapé, visiblement terrifié par ce qu'il venait de regarder - après tout, il m'avait invité pour ne pas avoir à le regarder tout seul, vu que ce film a apparemment la réputation de foutre les jetons. Il m'avait alors incendié en sanglotant à moitié, me reprochant de l'avoir laissé tomber, abandonné, me racontant comment son cœur avait failli le lâcher. Mais j'avoue que, sur le moment, voir Eijirou dans un tel état avait provoqué chez moi un élan hilare.

... J'imagine bien Izuku se mettre à pleurer comme une madeleine face à un tel film. Les yeux rouges, le corps tremblant, agrippé à moi en poussant des petits chouinements lorsque l'horreur arrive à son comble... Et puis, mes pensées me rappellent à l'ordre, me ramène à hier soir, et je me mets à l'imaginer pleurer de tristesse, abattu après mon départ, après ce rejet de ma part. Et cette vision me ramène à la réalité.

Je me penche vers l'avant, les coudes posées sur mes cuisses, la tête entre mes mains et je sens alors celle de mon ami se poser de manière compatissante dans mon dos. Et même sans le regarder, je sais que ses iris sont posées sur moi, attendant patiemment que je me livre, que je lui révèle la raison pour laquelle j'ai demandé à lui parler. Je suppose également qu'il doit être surpris de me voir sans mon air assuré habituel. Je n'ai pas souvenir avoir déjà montré le moindre signe de faiblesse, même face à Eijirou.


« Putain, tête d'orties, j'ai déconné. J'ai grave déconné... » soufflé-je.


Il demeure silencieux tandis que je me redresse, essayant tant bien que mal de rassembler mon courage pour lui parler de ce que j'ai sur le cœur, de mes sentiments à l'égard d'une personne du même genre. Nous n'avons jamais abordé ce genre de sujet. Eijirou a beau être l'une des personnes les plus gentilles que je connaisse, rien ne me dit qu'il est ouvert à cela, qu'il ne risque pas de se moquer de moi ou de me cracher au visage avant de quitter l'enceinte de ma demeure et de ne plus jamais m'adresser la parole. Qu'il ne va pas ensuite aller le raconter à tout le monde dans notre classe, me mettant ainsi son intégralité à dos.

... C'est peut-être un peu exagéré : j'aurais forcément des alliés si cela venait à arriver. Et puis... Est-ce que tête d'orties serait vraiment capable de réagir aussi violemment ? Je pose mon regard sur lui, qui m'adresse un sourire encourageant.


« Je sens que tu as un peu de mal, mais prends ton temps, Katsuki. T'en fais pas, je bouge pas. »


Je passe une main dans mes cheveux blonds. Mon cœur bat douloureusement fort, envahi par l'appréhension. Je dois me jeter à l'eau. Je ne peux pas continuer seul, vis-à-vis d'Izuku. J'ai besoin de conseils, d'une oreille attentive, de quelqu'un pour m'indiquer la marche à suivre.


« Je suis... Putain, merde, j'suis amoureux.

- Ah ouais ? Bah c'est trop cool, non ? T'es amoureux de qui ? C'est quelqu'un que je connais ?

- Me brusque pas, c'est déjà assez compliqué comme ça, grogné-je.

- Oui, pardon, je t'écoute. »


Je soupire, laisse un petit temps s'écouler entre nous, avant de reprendre.


« C'est... C'est Izuku. J'suis... Amoureux d'Izuku. »


J'attends les rires. Le rejet. Qu'il annonce la fin de notre amitié.

Mais rien de tout cela ne vient. A la place de cela, je vois son sourire s'agrandir, son visage s'illuminer, comme si je venais de lui annoncer la meilleure nouvelle de la journée.


« Il le sait ? demande-t-il.

- ... Quoi ?

- Bah... Est-ce qu'il le sait ? Est-ce que tu lui as dit ?

- Non, je veux dire... C'est ça, ta réaction ? Me demander s'il le sait ?

- Pourquoi ? J'aurais dû réagir autrement ? »


Un vent de soulagement me parcourt, un poids semble me tomber de la poitrine, libérant cette crainte d'être jugé, pointé du doigt. Et, instantanément, je m'en veux d'avoir douté d'Eijirou. J'aurais dû me douter qu'il répondrait quelque chose de cet acabit à mon aveu. Mais je ne pouvais pas m'empêcher de m'en faire, d'imaginer le pire.

Je m'autorise un petit sourire, secoue lentement la tête.


« Nan. Nan, c'est juste que... J'm'attendais pas à c'que tu l'acceptes aussi facilement.

- Katsuki, je suis attiré par les filles et les garçons. Alors bon, c'est pas moi qui vais faire la moindre remarque là-dessus. »


Il hausse les épaules, m'annonçant cela sans la moindre difficulté alors que, de mon côté, j'ai dû me battre et me préparer mentalement, et que même avec cela, j'ai eu beaucoup de mal à finalement me livrer, me confier à lui. C'est un aspect de la personnalité d'Eijirou que j'apprécie beaucoup : il est sûr de lui. Il ne se soucie pas de ce que peuvent penser les autres. Et d'ordinaire, c'est également mon cas. Mais sur ce coup-là, il a fait preuve de bien plus d'assurance que moi.


« J'savais pas, me contenté-je de répondre.

- Y'a que Mina qui est au courant. Je lui en ai parlé quand j'ai appris que c'était pareil pour elle. Mais c'est vrai qu'avant ça, je menais pas large. J'avais un peu peur d'être le seul à pas être...hétéro, dans notre classe. Mais bienvenue au club, du coup ! rit-il.

- Ouais, 'fin, moi, les filles, ça m'attire pas.

- Bah c'est pas grave ! Ca se contrôle pas, tu sais ! »


Oh que oui, je le sais. Je l'ai bien constaté, lorsque j'essayais en vain de trouver une fille susceptible de me faire ressentir la moindre petite chose, sans aucun succès.


« Et donc, par rapport à Izuku ?

- Ah, euh, ouais... Comment dire... Bah en fait, il... Ressent la même chose. »


Eijirou fronce les sourcils, comme si quelque chose lui échappait.


« Et... Et donc, quel est le problème dans ce cas ? Qu'est-ce qui fait que tu as 'déconné' ? »


... Ah oui. C'est vrai que j'avais tellement peur de sa réaction en apprenant que je suis gay que j'en ai oublié l'essentiel. Pourquoi je lui ai demandé de venir. Pourquoi je n'ai pas dormi de la nuit. Pourquoi j'ai besoin d'aide.


« Je... Mmh... Je lui ai plus ou moins... Fais comprendre que ses sentiments... Me répugnaient ? Sans... Sans le penser... Parce que je... Je sais même pas pourquoi... Si c'était par peur ou par fierté... »


Mes iris sont focalisées sur le sol tandis que je me frotte la nuque. La culpabilité de la veille est remplacée par un puissant sentiment de honte. Je sais que j'ai été idiot. Que de toutes les réactions, j'ai opté pour la pire. Et cette sensation est renforcée lorsque j'entends mon meilleur ami longuement souffler par le nez, et que je le vois porter sa paume contre son visage lorsque mon attention se reporte sur lui.


« ... Putain, Katsuki, t'es pas sérieux. »

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