Chapitre 49: Anna

Je mis beaucoup de temps à me réveiller. Mais je fus plutôt motivée lorsque je reçus en pleine figure mes vêtements préparés la veille.

-Aïe, dis-je simplement à moitié assoupie.

-Ne fait pas comme-ci c'était douloureux, je n'y croirai pas un seul instant.

J'ai ouvert les yeux et retiré les habits qui recouvraient mon visage. Éthan se tenait devant moi, et son regard n'était pas celui d'une personne qui avait passé la plus merveilleuse nuit au monde.

-Tu me fais sérieusement la tête ? demandais-je tout de même.

J'essayais de faire changer la réponse qu'il s'apprêtait à m'envoyer en pleine figure, en lui faisant ma petite tête d'enfant battu. Mais ça ne sembla que l'énerver davantage.

-Comment pourrais-je faire la tête à ma copine qui a passé la nuit à m'engueuler et me dénigrer alors que je voulais seulement lui sauver la vie ? Je suis vraiment de très bonne humeur, et particulièrement envers toi, Anna.

Son ton était plein de reproches et presque de haine à mon égard. Chacun de ses mots sonnaient faux lorsqu'ils dépassaient ses lèvres. Il avait détourné le regard pour ne plus foudroyer de celui-ci. On voyait qu'il était tendu et qu'il était sur le point d'exploser si je disais un seul mot de travers. Je le connaissais depuis suffisamment longtemps pour savoir qu'il ne valait mieux pas lui parler dans ce genre de situation.

Alors je me suis juste levée en saisissant mes affaires, et je suis partie me changer dans la salle de bain. Une fois fait, je suis allée prendre un petit déjeuné seule dans la cuisine. Dans le silence le plus total. C'était tellement improbable comme situation.

Le silence qui était roi en ce lieu aujourd'hui, n'avait jamais de place les autres jours. Il était toujours dominé par les rires, les conversations joyeusement animées, la musique et les chants. C'était toujours le cas, et ce, même le matin. La bonne humeur régnait ici. Sauf aujourd'hui.

Je n'ai pas trainé pour finir de me préparer en moins de deux, et pour sortir en évitant soigneusement Éthan qui était toujours énervé dans la chambre. Je sortis de l'appartement et j'ai claqué la porte derrière moi.

Il voulait être seul ? Très bien. Mais moi je n'arriverai pas en retard en cour à cause de ses caprices. J'avais beau devoir quitter définitivement ce monde d'ici quelques jours, je ne voulais pas abandonner l'établissement, mes amis là-bas, ni toutes les années de travail acharné que j'ai dû fournir pour être là où j'en suis aujourd'hui. En plus, j'avais promis à Prophétie, ou plutôt Sacha, que l'on se verrait pour organiser une rencontre avec tout le groupe demain après-midi dans la vraie vie. Je n'allais pas laisser la mauvaise humeur de mon copain gâcher toutes ces petites joies.

Je sais bien qu'il a des raisons de m'en vouloir, mais ce n'est pas lui qui va décéder sous peu. Il essaye d'agir comme si je pouvais y réchapper, et pour cela, il est prêt à en payer n'importe quel prix. Mais il risque de nous faire tous tuer, et se comporter comme un gamin avec une collégienne n'est pas une très grande preuve de maturité, ni une raison valable pour être désagréable dès le matin. Je sais bien qu'il a de la rancœur, mais il faut qu'il apprenne à se contrôler. Qui sera là pour le supporter lorsque je ne serai plus là et qu'il se sera mis tout le monde à dos avec ses caprices impossibles ?

Je ne veux pas qu'il ne lui reste personne.

La pluie commença à tomber dehors, alors que je n'avais pas encore accompli ne serait-ce que la moitié du chemin jusqu'au lycée.

-Encore une belle journée en perspective, soufflais-je pour moi même d'un ton las.

Les goûtes commençaient à tomber sur mon visage et sur mes vêtements. J'allais encore me faire enguirlander par les profs pour être arrivée trempée, et je n'avais pas le temps de rentrer chez moi me changer, ni de chercher un parapluie. Une douce odeur de goudron fraichement trempé commençait à flotter dans l'air. Pourtant, alors que les goûtes continuaient de tomber les unes après les autres sur le sol, plus aucune ne tombait sur moi à présent.

J'ai levé la tête pour découvrir un parapluie au-dessus de celle-ci, et Éthan à mes côtés. Il n'osait pas me regarder, et fixait le sol devant lui comme je le faisais depuis plus de quinze minutes.

-Désolé, souffla-t-il. J'aimerai juste que tu restes en vie comme tout le monde. En plus, tu as oublié de prendre un parapluie en partant.

Je ne pus m'empêcher d'émettre un petit rire.

-Ce n'est en aucun cas drôle Anna, rétorqua-t-il vexé.

Sa voix était beaucoup plus douce et calme. Presque posée. C'était comme si je venais de dire seulement une mauvaise blague et qu'il était gêné. Il ne savait pas comment réagir, et je ne pouvais pas lui jeter la pierre à ce sujet. Je ne savais pas quoi faire non plus.

-Merci, répondis-je avec le sourire.

-Merci pourquoi ? demanda-t-il étonné.

-Merci pour le parapluie et pour toujours être à mes côtés.

Je me suis mise sur la pointe des pieds et je lui ai déposé un petit baisé sur la joue. Simple, mais rempli d'affection.

Il se stoppa nette dans sa marche et me regardais maintenant avec de grands yeux pleins d'étonnement. Ses joues avaient soudainement pris une teinte rouge, et le parapluie trainait presque au sol à ses côtés car le tenir au-dessus de nous semblait à présent trop compliqué.

Je me mis à rire de bon cœur face à sa sorte de bug.

-Qu'est-ce qui t'arrive Éthan ? le questionnais-je en riant. Tu as vu un fantôme.

Il secoua la tête négativement pour toute réponse, me relançant une fois de plus dans mes rires. Ses yeux étaient complètement perdus et il ne savait ni où se mettre ni quoi faire.

Je le pris par sa main de libre et j'ai commençait à le trainer.

-Dépêche-toi Éthan ! On va arriver en retard sinon.

C'est comme ça que l'on s'est mis à courir sous la pluie. Je l'entraînais main dans la main dans ma course en riant, et lui, comme à son habitude, il suivait en finissant par me rejoindre dans mon rire.

S'il ne pleuvait pas ce jour-là, on aurait vu des larmes s'écouler sur mon visage.

Des larmes de joies.

Les plus belles larmes du monde.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top