Chapitre 10
Tu ne devrais même pas avoir le droit de vivre avec nous, tu es dangereux.
Ta place n'est pas dans cette famille.
Ne me regarde jamais sans ton cache-œil.
Tu n'est plus mon fils.
...Maman ?
Les personnes comme toi sont rares, caches qui tu es et tout ira bien pour toi.
Fils, ne pleure pas, reste fort.
Tu trouveras ta place dans ce monde.
...Papa ?
°°°
Des images défilent, des odeurs, des bruits, des souvenirs, agréables comme dévastateurs.
Je ne sens pas mon corps, c'est comme si j'étais ailleurs, flottant au milieu de nulle part.
Je me sens bien, je me sens bien mais je n'arrive pas à ouvrir les yeux.
Une odeur métallique recouvre l'atmosphère actuelle.
J'ai froid, une brise légère passe près de moi.
Suis-je toujours sur le bateau ?
Suis-je en plein rêve ?
Je finis par ouvrir les yeux, découvrant avec stupéfaction l'endroit où je me trouve. Et à mon grand désarroi, je ne suis plus sur le voilier. Une panique m'envahit, que s'est-il passé ??
J'essaie de bouger mais mes membres sont attachés en X.
Rappellant celle du Christ sur la croix.
Oh non.
Je jette un rapide coup d'œil autour de moi, je suis dans une sorte de cellule bétonnée. La lumière artificielle est très faible et tout paraît rouillé.
Une porte massive trône juste en face de mon corps piégé, un petit rectangle s'entrouvre quelques millisecondes et de referme aussitôt.
- Hé !!! Je m'égosille en remuant comme un asticot.
Où sont Eléonore et Frédéric ??
Je me stoppe trentes secondes à en retenir ma respiration, je suis sur terre. Je ne ressens pas de secousses, même minimes.
Je baisse la tête pour observer mon corps, je suis juste couvert de mon caleçon et de mes chaussettes, je ne suis pas blessé.
Putain je ne me rappelle de rien, la dernière fois que mon cerveau était allumé j'étais dans le voilier et je venais d'envoyer Eléonore dans sa cabine... Je me sentais partir.
Mais ensuite ?
Je recommence à gesticuler mais sans succès...
Un crissement me fait sursauter et je relève la tête.
La porte s'ouvre.
Ma mâchoire se contracte instantanément, c'est pas possible.
Lui ?
Ici ? J'hallucine.
- Salut Nâo. Ça fait un bail n'est-ce pas ?
- Que-que que fais-tu ici ?!
Le concerné ne répond pas et s'approche de moi avec un sourire diabolique. Il soulève délicatement mes cheveux pour observer mon œil droit avec admiration.
Je secoue la tête en hurlant, déchaînant ma frustration.
Une deuxième personne entre alors dans la pièce étroite et je crois perdre le nord.
- Toi ! Je gueule sans prendre le temps d'avaler ma salive, je me bave dessus sans le réaliser vraiment.
- Salut mon petit capitain, je te présente mon mari. Elle rit, enfin vous vous connaissez déjà je crois. Fanny.
Je reste bouche bée, elle s'approche à son tour et embrasse cet homme qui, dans le passé était tout pour moi.
Cet homme en qui j'avais confiance, celui qui connaissait tout mes secrets.
Claudio.
Le seul, l'unique. Mon... Ami.
Je ne le reconnait presque pas. Avant, il était petit et frêle, maintenant, c'est une armoire d'un mètre quatre-vingts dix. Son regard aussi n'est plus pareil. Auparavant ses yeux envoyaient de bonnes attentions, maintenant, j'ai l'impression de voir un soldat bouffé par la haine.
- Où est Eléonore ? Je demande en essayant de garder mon calme.
- La blonde ? M'interroge la rousse d'une voix taquine.
J'hoche la tête mais bien évidemment elle ne me répond pas. Claudio s'avance encore plus, tellement que je sens son souffle contre ma joue.
- C'est fou comme ton visage est resté le même, il chuchote, toujours aussi beau.
Je grogne et écarte mon visage le plus possible du sien. Il me fait peur.
Je ne comprends strictement rien à ce qu'il se passe.
J'essaie tant bien que mal de rassembler les morceaux du puzzle, La rousse pulpeuse, le sous-marin, la corde qui a retenu mon bateau prisonnier... L'alcool qu'elle m'a fait ingurgiter hier soir...
Est-ce que tout ceci était préparé ?
Me serais-je fait avoir comme un idiot ?
Je lance mon regard sur Claudio, il me dévore des yeux et ne cesse de sourire comme le pire psychopathie de la planète. Ses cheveux blonds autrefois très court lui tombe maintenant jusqu'aux hanches, j'ai l'impression d'avoir à faire à quelqu'un d'autre, mais je ne peux pas me tromper, c'est bien lui.
La dernière fois que je l'ai vu c'est quand je quittais la France, il m'avait même aider à trouver un bateau, à mettre de l'argent de côté pour pouvoir partir... Que fait-il si loin de l'Europe ?
Mon crâne surchauffe, je réfléchis trop.
- Où sommes-nous ?? Je parle sans calculer mes paroles, elles sortent toutes seules.
- Bienvenue en Amérique mon ami. Il souffle en tournant sur lui-même, heureux de me montrer cet endroit répugnant.
- Quoi ?? Je m'étrangle, et mon voilier il est où ?? Je tremble, Frédéric, Éléonore ???
- Frédéric ? Ah tu parles de l'oiseau... Il se frotte le menton, ne t'en fais pas pour eux ils vont bien. C'est toi qui nous intéresse tu vois... Il me caresse l'épaule, j'ai les larmes aux yeux...
- Moi ?
- Oui. Il attrape violemment la rousse par la gorge, ce qui me fait à nouveau grogner. Cette merveilleuse créature travaille pour moi tu comprends ? Il l'a balance au sol.
- Claudio... Qu'est-ce que t'es devenu ? Je lâche la voix nouée.
- Je suis toujours le même, je suis ici pour ton œil, pour ta rareté. Il éclate de rire, grâce à toi je vais être riche.
Son rire me glace le sang, je me suis fait avoir. Alors que j'enregistre toutes ces informations ils s'en vont, refermant la porte à double tour derrière eux.
Je recommence tout de suite à m'acharner contre les liens qui me maintienne prisonnier, secouant mes poignets tellement fort que j'ai l'impression qu'ils vont se briser.
C'est trop bête je ne veux pas finir comme ça. Et si ils apprennent que Éléonore est elle aussi "aussi rare" comme ils le disent... J'ai peur qu'ils lui fasse du mal.
En acceptant qu'elle reste avec moi sur le bateau, c'est comme si je m'étais promis qu'il ne lui arriverait rien.
Pour le moment c'est loupé.
Je ne réalise toujours pas que l'homme qui est responsable de mon enfermement, est censé être mon seul ami.
C'est juste horrible.
À l'époque j'ai fini par lui révéler mon identité, j'avais besoin de me confier, et il se doutait de quelque chose.
Si j'avais su qu'il deviendrait comme ça... Jamais je n'aurais parler de ma différence.
Je me demande ce qu'il compte faire de moi. Il peut me vendre comme me tuer, je ne suis à ses yeux qu'un morceau de viande.
Un haut le cœur me projette un peu en avant, je m'étouffe à moitié en vomissant.
Mon cœur se serre je me sens mal.
Tellement mal.
°°°
Le temps passe au ralenti, je crois entendre des sons par moment, mais c'est tellement lointain que j'ai l'impression que mon esprit me joue des tours.
J'ignore depuis combien de temps je suis ici, mais c'est invivable. L'odeur de mes propres excréments me rende malade...
Claudio est repassé une fois, sans dire un mot. Il m'a juste fait boire un verre d'eau et il est reparti sans prêter attention à mes hurlements. C'était il y a déjà quelques jours je pense.
En relevant ma lèvre inférieure je sens que ma moustache devient importante...
Trois jours peut-être.
Cette position est horrible, mes épaules se font lourdes, je souffle encore plus quand je bouge donc je me force à rester immobile.
Alors que je dépose l'arrière de mon crâne contre le mur pour soulager mes cervicales, l'ampoule explose.
Il n'en manquait plus que ça... Me voilà dans le noir complet.
Je m'inquiète pour Éléonore, j'espère qu'elle n'est pas dans les mêmes conditions que moi.
Si j'ai bien compris ce qu'ils m'ont dit, ils ne s'intéressent pas à elle. Si ça se trouve, elle n'est même pas par ici, elle est peut-être déjà loin, partie, comme elle me l'avait dit.
Un sanglot atteint le haut de ma gorge, je ne veux plus...
Je ne veux plus être seul.
Des larmes incontrôlables envahissent mon visage, qu'on soit humain ou pas, être captif n'est pas compatible avec la conscience.
Si je reste comme ça encore quelques temps, je vais devenir fou.
Déjà aujourd'hui je n'arrive plus à distinguer depuis combien de temps je suis là.
je n'arrive plus à savoir si j'avale ma salive ou pas, si j'ai fais mes besoins aujourd'hui... Je ne sais plus rien, sauf que j'ai mal et que je suis mort de trouille.
Un petit cliquetis attire mon attention, je redresse ma tête pour tomber nez à nez avec la rousse, elle tient quelque chose dans sa main droite.
Je plisse les yeux pour essayer de voir ce que c'est, mais le manque de lumière m'empêche de voir comme il faut.
Elle s'avance de quelques mètres et lève le bras, s'en suit des grincements insupportables. Elle change l'ampoule.
Je la regarde sans emmètre un seul son.
Je suis trop fatigué pour hurler ou poser des questions.
Une fois sa tâche terminée elle retourne vers la sortie de la cellule mais ne la ferme pas.
Mon taux d'intérêt s'élève et je me racle la gorge pour essayer de parler.
- Arrête tu vas te faire mal, elle lance d'une voix très douce, bois. Elle me tend une bouteille d'eau.
Je lance ma mâchoire en avant et savoure chaques gorgées, mon gosier est tellement sec que c'est douloureux.
Mais sans ça, je vais crevé.
Ensuite elle retourne vers ce que je pense être un couloir, et reviens aussitôt armée d'un seau et d'une éponge.
Elle soupire et dépose le seau à mes pieds pour y plonger l'éponge.
Elle frôle ma cheville avec le coton gorgé d'eau et je pousse une plainte.
Le contact est douloureux, ma cheville doit être a vif à cause des frottements répétés contre le bout de métal qui me soutient au dessus du sol.
- Tu emprisonne souvent les mecs qui te font l'amour ? Lançais-je dégouté.
Ma propre voix me fait peur, elle est deraillée et rauque.
J'ai dû esquinter mes cordes vocales en hurlant.
- Désolée...
- Tu es desolée ? Alors laisse-moi partir !! Je m'énerve.
- Tu comprends pas, Claudio te cherche depuis trois ans. Elle passe l'éponge sur mon torse, T'es son obsession. Elle chuchote.
- Son obsession ? Je répète en fronçant les sourcils.
Elle hoche la tête et fait volte face pour quitter cet endroit qui pue la mort.
Je laisse tomber ma tête en avant, j'en ai marre.
J'ai l'impression que plus je parle, moins je comprends ce qu'il se passe.
Son obsession mais c'est du grand n'importe quoi, ça n'a vraiment pas de sens !!
Je frissonne en commençant à fixer la lumière qui s'infiltre en dessous de la porte blindée.
Des tremblements incontrolables commencent à jaillir de mon corps, elle n'a pas pris la peine de me sécher, je gèle.
C'est pire qu'une prison ici.
Le temps recommence à tourner au ralenti, j'ai le temps de me sentir sécher, de voir la lumière sous la porte s'allumer et s'éteindre au moins trente fois.
Je serre les dents, j'ai envie de pisser...
Les larmes me montent aux yeux, c'est insupportable, insoutenable.
°°°
Peut-être une semaine maintenant.
Une semaine que je ne mange que du pain, avec un à deux verres d'eau par jour.
En bougeant un peu trop fort hier suite à une provocation de Claudio je crois m'être disloqué l'épaule...
La douleur est atroce.
J'ai dû perdre connaissance trois fois.
Par chance je mourrais peut-être d'une infection avant de succomber de fatigue.
Je commence à avoir des hallucinations, j'entends des rires dans mon dos, des caresses sur ma nuque...
Je suis pris de spasmes par moment, comme si mon esprit essayait de se détacher de mon corps.
Fanny est venue il y a quelques jours pour me faire la toilette, elle m'a proposé un plan dans le creux de l'oreille, une chance de pouvoir m'évader.
"Si tu te transformes en un animal de petite taille tu seras libéré de tes liens"
Facile à dire ma belle, mais je n'ai jamais réussi à contrôler ça.
J'ai pourtant essayé.
Mais je me suis juste épuiser davantage.
Le sort s'acharne contre moi, la température est glacial aujourd'hui, ou c'est peut-être mes dernières forces qui m'abandonne.
Eléonore...
Je n'arrête pas de penser à elle. Sûrement parce que c'est la dernière personne sur cette terre qui compte un minimum à mes yeux.
Je pensais avoir Claudio aussi, mais tout ceci n'était qu'un leurre.
Je repense à tout ce qu'ont a vécues l'adolescents, nos soirées en bord de mer, nos bagarres sympathiques pour savoir lequel était le plus fort, les musiques qu'ont chantait ensemble...
Ça me répugne.
Comment a-t-il pu me manquer un jour ?
NE M'APPROCHE PAS NÂO !!!
Je sursaute, et secoue la tête...
Encore mon cerveau qui s'amuse avec moi.
Cette voix qui passe près de moi comme un courant d'air, c'est celle de ma mère.
Ce n'est pas la première fois que sa voix me surprends ces derniers jours, des phrases crus, souvent très fortes arrivent à mes oreilles et me vole des sursauts de frayeur.
Hahaha....
Un rire cette fois-ci me pétrifie, je sens mes poils se redressés sur ma peau, ma gorge me brûle.
C'est...
C'est mon rire.
Je suis en train de rire.
Je commence à devenir fou...
Sortez-moi de là.
Je tire le plus fort possible sur mon bras Indemne en exerçant des rotations avec mon poignet, si j'arrive à me briser le pouce j'arriverai peut-être à dégager ma main.
Un éclat de voix sort de ma bouche, j'ai tellement mal...
Alors que je m'arrache pratiquement le bras, la porte s'ouvre et je suis rapidement frappé en plein visage.
Mon regard se floute et un goût de sang coule doucement dans ma gorge.
- Il faut que tu restes vivant !!! Braille une voix inconnue.
Je grommêle une phrase incompréhensible avant de perdre connaissance une fois de plus...
××××
Fin du chapitre.
Pauvre Nâo...
Qu'en pensez-vous ?
Prochaine chapitre très bientôt.
××××
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