Chapitre X: La distance entre nous

(Démarrez la vidéo, baisser votre volume, détendez votre et bonne lecture)
Acte2 🟤:  Lutte intérieure et les non-dites





"Le plus grand risque est de ne prendre aucun risque. Dans un monde qui change vraiment rapidement, la seule stratégie vouée à l'échec est de ne pas prendre de risques."
Mark Zuckerberg












Adéola.


Ryan me tend une tasse de café que je bois lentement. Son café est doux, ni amer ni trop sucré, parfaitement équilibré. J'aurais aimé lui demander comment il a réussi cet équilibre, mais je n'ose pas. J'ai déjà pris du retard, je ne veux pas risquer de l'énerver encore plus en posant des questions sur quelque chose d'aussi trivial que du café.

Je termine ma tasse, la lave soigneusement et la remet à sa place. Je prends mon sac et le suis jusqu'à la voiture, où il m'attend déjà. Il démarre, et le trajet se déroule en silence, ce silence pesant qui s'installe entre nous à chaque fois. Il s'arrête finalement devant ce qui semble être une bijouterie, ou plutôt une joaillerie. Il stationne, et nous descendons. Il saisit ma main, ce qui me fait sursauter.

— Désolé, murmure-t-il, sa voix grave sans la moindre trace d'agressivité. Donne-moi ta main.

Je suis le mouvement, un peu hésitante, et je pose ma main dans la sienne.

Nous entrons dans la boutique, et à peine avons-nous franchi le seuil qu'un homme en costume-cravate noire s'approche de nous. Ils discutent un moment dans une langue que je ne comprends pas, puis l'homme se tourne vers moi.

— Tu vas choisir les parures qui te plaisent, je reviens dans un instant, m'informe Ryan d'un ton détaché.

— Mais... j'ai déjà beaucoup d'accessoires, lui rappelé-je doucement. Je n'ai même pas encore porté ceux de ma dot.

— Ceux-ci aussi font partie de ta dot, alors tu vas suivre ce monsieur. J'arrive.

     Il lâche ma main et s'éloigne en direction d'une pièce à l'arrière.
     Je prends sur moi et suis l'homme qui m'ouvre la voie. Il m'amène dans un salon privé, luxueux, où il me demande ce que je voudrais boire. Je demande juste de l'eau , mais il insiste en me ramenant du champagne. Je m'installe, seule dans ce salon imprégné de luxe, tandis que l'homme part chercher les bijoux en question.

Quelques minutes plus tard, un couple entre et s'installe dans l'un des canapés. Ils sont servis par une femme en costume, qui leur apporte également du champagne.

    L'homme qui m'a installée revient ensuite avec plusieurs ensembles de colliers qu'il dispose sur la table en face de moi, me demandant de choisir ceux qui me plaisent.

— Elles sont... commence-je, hésitante.

— Elles sont toutes en diamant, madame, rassurez-vous, me répond-il d'un ton qui me met mal à l'aise.

Je ressens une pointe de panique. J'ai déjà reçu un alliance ornée de plusieurs petits diamants formant une fleur, que je peux passer des heures à admirer.
    Et maintenant, on me demande de choisir des colliers. Est-ce une manière de me punir pour avoir trop dépensé hier ?

Je reste figée, fixant les pièces devant moi. L'homme, semblant ne pas comprendre mon malaise, ouvre une vitrine et m'invite à y jeter un coup d'œil, me proposant même de toucher les bijoux.

Bien que j'aie déjà porté de l'or dans ma vie, les diamants m'intimident. Et si je me faisais cambrioler ? Mes pensées s'embrouillent, jusqu'à ce que la femme du couple s'approche de moi.

— Très belle pièce ! Vous l'avez choisie ? me demande-t-elle avec intérêt.

— Non, non, vous pouvez la prendre si vous voulez, réponds-je rapidement, comme si je cherchais à me débarrasser d'un fardeau. L'homme referme la vitrine et me suggère de regarder d'autres pièces.

Je finis par en choisir deux, que le personnel met de côté avec précaution.

— Mademoiselle, vous semblez être une collectionneuse ? me demande soudainement un homme derrière moi, que je ne connais pas.

— Non, non, c'est juste ma première fois ici, balbutié-je, mal à l'aise.

— Vous en êtes sûre ? Alors pourquoi...

— Parce qu'elle est l'épouse du propriétaire, intervient la voix de Ryan derrière moi. Darling, tu as fini ?

Je fais un effort surhumain pour ne pas trahir mon étonnement. "Darling".
    C'est moi, "darling".
   Je suis censée répondre "chéri", "mon amour", ou quelque chose comme ça ? Je me contente de répondre simplement :

— Oui, oui.

L'homme s'excuse pour son indiscrétion et s'éloigne. Je sens le stress revenir, encore plus intense.
  Je vais peut-être mourir d'anxiété avant de terminer mes cinq ans de vie conjugale avec lui ?

Ryan se remet à discuter avec le personnel, et je me concentre sur mon verre de champagne. Une femme vient ensuite prendre des mesures de mon poignet et de mon cou avant de disparaître.

Le trajet du retour se fait dans le même silence tendu, et je prie pour que nous arrivions rapidement à la maison.

Une fois arrivés, Ryan me tend le sac contenant les bijoux et me demande d'aller les ranger dans le coffre-fort de ma chambre. Il ajoute que je devrais les porter lors des événements officiels, et m'informe que nous sommes invités à un dîner vendredi soir.
     Après ces quelques mots, il disparaît en haut des escaliers.

Je monte également et ouvre le sac dans mon dressing. À ma grande surprise, il y a quatre pièces au lieu des deux que j'avais choisies. L'une des pièces contient des perles, toutes magnifiques. Je me retrouve avec un coffre-fort déjà plein, une collection de bijoux qui pourrait durer toute une vie.


   

  Lala a réussi à me décrocher un rendez-vous dans l'un des meilleurs salons de coiffure de la ville, du moins selon elle. Je décide d'opter pour de longues braids, un choix pratique. Mais avec ma crinière, la séance dure quatre heures. Mon dos me fait mal à la fin, une douleur sourde qui irradie jusqu'à mes épaules.

Plus tard, elle me dépose à la maison où je retrouve Ryan, occupé à arroser le jardin. Il le fait parfois, comme une routine discrète.

     Ce soir, c'est le dîner, et bien sûr, je ne peux m'empêcher de stresser. 
     Dans ma chambre, je m'applique à ma routine skincare avant de fouiller dans ma garde-robe pour trouver la robe parfaite. Ryan m'a assuré , si rassurer c'est juste parler oui , que ce n'était qu'un dîner informel avec un vieux couple qui n'avait pas pu se déplacer pour le mariage . Pourtant, l'idée de devoir convaincre que nous sommes réellement mariés, et pas juste deux colocataires, me stresse plus que je ne veux l'admettre.

Après une douche rapide, je choisis une robe longue, col roulé, sans manches, d'un vert argile apaisant. Des escarpins noirs complètent la tenue. Ma tresse, relevée en chignon, descend gracieusement dans mon dos. Quelques boucles d'oreilles, deux bracelets, et un sac à main viennent parfaire le tout. Le miroir me renvoie une image impeccable, mais mon esprit rêve de se coucher et d'oublier la soirée.

On frappe à la porte. « J'arrive, » dis-je, tout en me parfumant.
Une inspiration, une expiration, et je sors de la chambre.

Je descends les escaliers, avalant mon stress à chaque marche. Ryan se tient dos à moi dans le salon. Ce n'est qu'une fois que j'atteins le bas des escaliers qu'il se tourne vers moi, ce qui ne fait qu'accentuer mon appréhension.

Il s'approche, se tenant face à moi. Son parfum envahit l'air, prenant le pas sur tout le reste. Mes pensées s'arrêtent nettes.

— Redresse les épaules, me dit-il d'un ton calme. Tu es stressée ?

J'hoche la tête, incapable de cacher mon état. Il me dépasse et revient rapidement avec un verre contenant un peu d'alcool, qu'il me tend. Je bois, mais ce n'est pas suffisant pour calmer mes nerfs.

— C'est un dîner tout à fait normal, m'assure-t-il comme si c'était la chose la plus simple au monde . Il se peut que je te touche la main ou le bras, m'autorises-tu ?

Sa question me surprend. C'est la première fois qu'il me demande mon avis sur ce genre de choses. J'essaie de baisser les yeux, mais son regard insistant me contraint à répondre.

— Oui, dis-je finalement.

Il m'ouvre la voie, et je passe devant lui pour entrer dans le garage. Il me rejoint après avoir verrouillé toutes les portes. Je m'installe dans la voiture, et il démarre.

Après une vingtaine de minutes, il s'arrête devant un restaurant élégant. Il descend et vient m'ouvrir la portière, confiant les clés au portier qui nous accueille. L'endroit a des airs de vieux films hollywoodiens.

Accrochée à son bras, nous entrons dans le restaurant, qui baigne dans un décor des années 80, rappelant une sorte de cabaret.
      D'un geste de sa main libre, Ryan appelle un serveur et lui souffle quelques mots dans la même langue que celle utilisée à la joaillerie. Le serveur nous guide alors vers une table où un vieux couple mixte d'une soixantaine d'années nous attend.

Ils se lèvent à notre arrivée. Je relâche mon bras de celui de Ryan lorsque la dame, une femme blanche, s'approche de nous en premier. Elle lui fait la bise, puis se tourne vers moi et m'offre le même geste.

— Ravie de vous rencontrer enfin, dit-elle avec un sourire angélique.  Je comprends pourquoi ce jeune homme vous cache tant, vous êtes magnifique.

—Merci, dis-je, souriant avec gratitude tout en luttant pour ne pas rougir.

Les compliments me vont droit au cœur. L'homme s'adresse ensuite à Ryan dans la même langue que celui de la joaillerie, avant de revenir à l'anglais. Il plaisante avec lui, puis se tourne vers moi pour me serrer la main.

—J'espère que notre pays vous plaît. Je suis sûr que ce gaillard vous a simplement convaincue de le suivre.

— C'est une ville magnifique, réponds-je, sourire aux lèvres.

—Enchanté de l'entendre...

— Vous n'allez pas rester debout, tout de même ! intervient la dame avec un sourire amusé.

—Rossi, tu t'es présentée, j'espère ? ajoute l'homme.

Elle fait une moue exagérée qui me fait sourire.

— Madame Rossi et Monsieur Alexandre Perera, dis-je avec assurance.

Ryan me l'avait soufflé dans la voiture. Madame Rossi porte une main à son cœur en signe de soulagement, tandis que son mari me sourit avant de céder la place.
    
  Ryan tire ma chaise, et je m'assois, le suivant des yeux tandis qu'il prend place à son tour. Le serveur récupère nos commandes, et Ryan choisit pour moi.

      La dame le complimente sur son galanterie, ce qui arrache une grimace à son mari, qui lui rappelle que son filleul est maintenant marié et qu'elle devrait arrêter de le flatter.
   Ryan se contente de sourire, et c'est la première fois que je le vois sourire vraiment. Ce simple fait me détend quelque peu, me rappelant que tout cela n'est qu'un jeu pour duper le monde extérieur.

Je me surprends à prier pour que le vin m' aide à calmer mes nerfs.

— Alors, le restaurant vous plaît ? me demande la femme.

— Oui, réponds-je en essayant de ne pas laisser ma nervosité transparaître.

— Comme vous êtes encore en lune de miel, nous avons voulu que vous restiez dans l'ambiance, confie-t-elle en baissant légèrement la voix.

Grâce à l'éclairage tamisé du restaurant, elle ne voit pas mon embarras. Comment peut-on aborder un sujet aussi gênant avec autant de facilité ?

— Marraine, la lune de miel est terminée, précise Ryan d'un ton serein.

— Oh non, non... cela ne finit jamais aussi facilement, insiste-t-elle en riant.

Cela fait sourire son mari.

— La lune de miel se termine seulement lors de la première dispute où elle voudra divorcer à tout prix. Et laisse-moi te dire que les demandes de divorce, tu en auras au moins une vingtaine avant la fin de la première année de mariage.

Je sens la main de Ryan se poser sur la mienne, ce qui me fait tressaillir légèrement. Je tourne la tête vers lui

— Tu ne ferais pas ça, toi ? me demande-t-il, une sincérité presque effrayante dans la voix.

Je secoue immédiatement la tête. Il esquisse un léger sourire avant de se tourner vers Alexandre.

— On ne me demandera pas le divorce, rétorque-t-il d'un ton vainqueur.

Je bois une gorgée de vin pour me rappeler que tout cela n'est qu'un jeu, un jeu pour duper tout le monde tandis qu'Alexandre essaie de le contredire.

    Le serveur nous apporte nos plats. Le mien se compose d'un agneau et de pommes de terre au four .

Le dîner se poursuit dans une ambiance agréable, le vieux couple qui ne cesse de  partager avec nous les secrets d'un mariage durable
   Ils se calment un peu lorsque le spectacle commence, une interprétation théâtrale charmante qui capte mon attention. C'est la première fois que je regarde du théâtre, et je trouve cela amusant.

    Le dîner se conclut sur une note agréable ,avec  une promesse de refaire cela une prochaine fois, et Madame Rossi me confie, avec un clin d'œil, qu'elle sera toujours à l'écoute d'une « bonne nouvelle ». Je comprends soudain qu'elle fait allusion à une éventuelle grossesse, et je lui offre un sourire aimable , dissimulant mon étonnement.

Sur le chemin du retour, nous roulons en silence, laissant le rythme de la route nous bercer. Une fois à la maison, Ryan monte déposer ses affaires pendant que je rejoins ma chambre.
   Épuisée, je me change rapidement avant de me laisser tomber sur le lit, où je m'endors presque immédiatement, le stress de la soirée s'évanouissant doucement.








  
       Trois mois plus tard ici à Johannesburg ,  le temps est différent de celui de Lagos.
     En août, Lagos est souvent assiégée par le froid, mais ici, la chaleur est omniprésente. Le temps est agréable, un peu humide. Le ciel est complètement dégagé, et des papillons voltigent paisiblement dans le jardin. La lumière du soleil envahit la maison entière, créant une atmosphère lumineuse et vivante.

Assise dans la cuisine, face à mon ordinateur, je rédige pour la première fois un CV. Ifé, au bout du fil, m'accompagne dans cet exercice nouveau pour moi. J'ai décidé de me lancer, de chercher un travail. Ces derniers mois, je les ai passés à explorer la ville avec Lala, un restaurant après l'autre, chaque jour une nouvelle découverte. Je me suis amusée plus que je ne l'avais jamais fait auparavant. Même une boîte de nuit a été ajoutée à ma liste d'expériences, bien que cela m'ait coûté un mensonge à Ryan—le premier, et l'inconfort que j'en ai ressenti m'a poursuivie.
       Il ne se mêle jamais de mes affaires, se contentant d'aller et venir, d'échanger des politesses lorsqu'on se retrouve dans la même pièce et me donner des instructions si c'est nécessaire . Depuis que je suis ici, j'ai appris à respirer, à trouver une certaine paix. Je ne veux pas gâcher cela pour un mensonge insignifiant.

Parfois, Solaya se joignait à nos sorties. Avec elle, j'ai découvert les joies d'une journée au spa et j'ai même tenté le yoga, bien que je manque cruellement de souplesse . On n'en étais au Pilate et à barre le samedi dernier, j'ai encore des courbatures.

Maintenant que Lala est retournée à Londres et que Solaya est moins disponible, j'ai décidé de me trouver un travail. Une annonce, lue sur les réseaux sociaux, reste ancrée dans mon esprit. Un grand magazine du pays cherche à lancer une campagne de recrutement pour son service de rédaction. L'idée me trotte dans la tête, et Ifé m'encourage à suivre cette voie, à enfin prendre mes propres décisions. Mon père avait toujours tout décidé pour moi.

Je termine les dernières modifications de mon CV et les envoie à Ifé pour validation. Une fois approuvé, je clique sur "envoyer". Une petite prière pour recevoir une réponse rapide, puis je me dirige vers la bibliothèque, aujourd'hui c'est jour de club de lecture.

Plus tard dans la soirée, je repose le livre à sa place pour vérifier si j'ai reçu une réponse concernant mon CV. J'avais envie de lire la réponse avec Ifé lorsqu'elle sera de retour du travail, mais ma curiosité l'emporte. J'ouvre le mail, passe rapidement les formules de politesse et tombe sur la dernière partie : je suis invitée à un entretien d'embauche, et la date est pour demain.

J'ai failli hurler de joie, mais je me suis retenue. Rien n'est encore gagné ; j'ai simplement passé la première étape. Je prends une photo de la partie importante et l'envoie à Ifé, qui me renvoie une note vocale pleine de félicitations.

Finalement, je me laisse emporter par une danse de Macarena devant le gigantesque miroir de ma chambre. Je ne suis pas au niveau de Dracula dans "Hôtel Transylvania", mais je me débrouille. Ifé m'envoie une vidéo d'elle en train de manger de la viande fumée en mon honneur, en me promettant de m'enseigner l'art de survivre à un entretien d'embauche dès que je serais chez elle.

Je descends les escaliers pour me préparer à manger lorsque j'entends la grille s'ouvrir. Je ne me suis toujours pas habituée à ses entrées et sorties imprévisibles.

Dans la cuisine, je sors une poêle, récupère les restes de viande et de légumes du frigo, prends une baguette de pain et ma sauce spéciale, et j'insère le tout avant de laisser griller légèrement. Pendant que ça chauffe, je fais la vaisselle. Le sandwich est prêt, je le coupe en deux, les pose dans un plat et m'assois pour déguster. Après avoir fini, je nettoie la cuisine et sors.

Ryan est assis dans le canapé devant son ordinateur, encore habillé comme pour le travail, ses manches simplement retroussées, laissant entrevoir de l'encre tatoué sur le bras gauche et sa montre. Son parfum flotte légèrement dans l'air.

— Bonsoir, dis-je en le saluant un peu hésitant

Il lève la tête, comme s' il ne m'avait pas entendu m'approcher

— Bonsoir, comment s'est passée ta journée ? me demande-t-il, comme à son habitude.

— Bien... , réponds-je en hésitant, mon cœur battant plus fort à l'idée de lui parler de mon projet.

Je ne sais toujours pas comment me positionner face à lui, ni sur quel pied danser.

— Je veux travailler, finis-je par dire d'un coup.

Seigneur ! , pourquoi n'ai-je pas trouvé une meilleure façon de formuler cette demande ? Le stress me trahit à chaque fois. Il se tourne vers moi, son expression restant neutre.

—  D'accord , me répond -t-il, sans sourciller. Je te ferais préparé ton bureau au cours de la semaine

Je secoue immédiatement la tête, évitant son regard.

— En fait... j'ai postulé pour un entretien d'embauche, murmure je

— Où ? demande-t-il en fronçant légèrement les sourcils.

— Elle South Africa.

— Tu as de l'expérience en rédaction ?

Je secoue encore la tête, maudit ma tête qui bouge sans arrêt.

— J'ai envie d'essayer. Je rédigeais les annonces et les publicités quand je travaillais dans l'équipe marketing.

— D'accord, et c'est quand ton entretien ?

— Demain.

Il hoche brièvement la tête.

— D'accord, conclut-il simplement.

Je lâche un merci à peine audible et file rapidement dans ma chambre. Je soupire profondément, comme si je venais de passer une partie de mon entretien. Pourquoi me stresse-t-il autant ? me dis-je en enfouissant mon visage dans l'oreiller pour étouffer un cri.

Pour la première fois depuis des mois, le jour se lève à une vitesse hallucinante. J'ai passé la nuit à écouter les conseils d'Ifé pour les entretiens, à regarder des dizaines de vidéos sur TikTok et YouTube.
    Résultat : un mal de tête carabiné. J'ai fait des simulations devant le miroir, choisi ma tenue, et multiplié les exercices contre le stress. Mon combat quotidien.

J'ai lu des dizaines de magazines publiés par Ankara Magazine depuis l'année dernière, appris leurs projets en cours, et je connais même les détails de la vie privée de la directrice du magazine, jusqu'au nom de son chien. Je l'ai vue dans une vidéo à la Fashion Week de Paris , une autre sur la plage bref ses activités . Son compte Instagram est devenu une obsession.

Résultat : JE STRESSE À MORT.

Déjà que j'ai du mal à tenir une conversation normale avec Ryan, face à cette femme charismatique, je crains de ne plus avoir d'espoir.

Fatiguée, je descends pour me chercher un café. Je mets la machine en marche en me maudissant intérieurement. Ma tasse à la main, je m'arrête devant la porte-fenêtre du salon, admirant le jour se lever sur le jardin. Au moins, la nature semble plus sereine, quelles que soient les circonstances.

Je m'apprête à détourner le regard lorsque je vois le portail s'ouvrir et une femme pénétrer dans la propriété. C'est la première fois que quelqu'un entre ici sans sonner. Curieuse, je m'approche alors qu'elle s'avance dans le salon, comme si elle connaissait parfaitement les lieux.

— Bonjour, dis-je en la saluant.

— Bonjour, répond-elle, confiante, avec un joli sourire. Vous devez être Madame Longuti ?

Je me contrôle pour ne pas grimacer. Reste calme.

— Oui, répondis-je en serrant brièvement sa main.

— Je suis Alice... Alice Fall. J'ai beaucoup entendu parler de vous.

— Je ne peux pas vous assurer l'inverse, répliqué-je avec un sourire pincé.

— C'est justifié, répond-elle avec un large sourire. Je suis CCM au sein du groupe Longuti, community manager.

— Oh, d'accord. Enchantée de vous rencontrer.

— De même, je viens emprunter votre mari très tôt... Ah, le voilà.

Je me retourne et vois Ryan descendre les escaliers, ajustant ses vêtements. Il s'approche de nous.

— Bonjour, Ryan, le salue-t-elle, toujours avec ce sourire éclatant.

— Qu'est-ce que tu fais ici ? réplique-t-il d'un ton sévère.

Elle soupire, sans perdre son sourire.

Apparemment, je ne suis pas la seule à trouver son attitude irritante. Ils semblent proches.

— Tu as écouté mon message ? J'ai besoin de toi d'urgence...

— Tu ne pouvais pas attendre 8 h ou 9 h ? l'interrompt-il en ajustant sa montre.

— Non, j'ai ton expresso et on...

Elle le presse, lui tendant un gobelet qu'il prend avant de lui faire signe de sortir. Elle s'exécute sans broncher.

— Au revoir et bonne journée, Madame, me souhaite-t-elle.

Je lui rends son sourire avant qu'elle ne se tourne pour partir. Ryan me caresse doucement la tête en passant.

—Bonne chance pour ton entretien et ne stresse pas trop , me souffle-t-il.

Je sens la chaleur monter à mes joues, tout mon corps se tend.

— Bon... bonne journée à toi aussi, dis-je en retour.

Il me sourit.

— Change le code d'entrée  en sortant et envoie-le-moi par message, ajoute-t-il avant de quitter l'intérieur.

Je lui rends son sourire et il part rapidement ,j'ai a peine le temps de lui demander comment on change le code .
   Le stress s'estompe peu à peu, remplacé par une confusion et une bouffée d'énergie qui s'estompe lorsqu'une promesse  silencieuse se formant dans mon esprit. Je vais réussir cet entretien, peu importe les obstacles. Cette femme, avec sa confiance et son allure impeccable, m'a inspirée. Elle semble inébranlable dans son tailleur . Je les observe monter dans la voiture, le bruit de la grille se refermant derrière eux.

Je finis mon café et monte à l'étage pour commencer à me préparer. Aujourd'hui, c'est le début de quelque chose de nouveau, et je suis prête à relever le défi.



Bonne journée 🤎

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