Chapitre 41
*Harry*
Les jours passent et les concerts s'enchaînent. Je suis heureux de retrouver la scène, surtout dans ces conditions. Les salles sont petites, il y a une vraie proximité avec le public et un réel échange. On plaisante, on s'amuse. Chaque concert est différent, intense. Lorsque les lumières s'éteignent et que la foule m'acclame, je suis revigoré et prêt à tout donner.
Tout a été très rapidement organisé, entre l'annonce officielle de la tournée, la mobilisation de mes musiciens, le choix des chansons et les répétitions.
Finalement, on travaille beaucoup au feeling. On change constamment la setlist. C'est une petite tournée, sans réel enjeu alors on en profite et on passe chaque soir des moments uniques.
C'est excitant. J'aime cette ambiance et chaque jour qui passe me rappelle à quel point j'aime mon métier.
Mais quand les lumières se rallument, que la salle se vide et que je retrouve ma couchette dans le bus, mon cœur s'effrite. Louis me manque. Hayden me manque.
Nous sommes partis depuis plus de deux semaines et venons d'atteindre la ville de Denver dans le Colorado. Louis et moi avons peu d'échange. Il m'envoie des photos d'Hayden quotidiennement mais reste assez distant quand nous discutons. Quand j'ai quitté l'appartement, je l'ai senti si triste que j'ai failli appeler Sarah et tout annuler. Mais j'avais pris un engagement, la tournée faisait salle comble. Je ne pouvais pas revenir sur ma promesse faite aux fans.
Je suis pris d'un haut le cœur quand je réalise que j'ai rompu l'une des promesses les plus importantes que j'ai faites à Louis, sous prétexte que je lui ai laissé le choix.
JE NE LUI AI PAS LAISSÉ LE CHOIX. J'avais pris ma décision avant même de lui en parler et j'ai tourné notre conversation dans le sens où je voulais la mener. Louis m'a laissé faire parce qu'il sait pertinemment à quel point la scène est importante pour moi. Louis s'est montré généreux envers moi, privilégiant mon bonheur mais ravalant sa peine et sa déception, juste pour que je puisse exercer ma passion. Je suis égoïste !
Je sors de la salle où nous jouons ce soir. J'ai besoin de prendre l'air. Je souffle fortement en sortant et commence à faire les cent pas dans la cour attenante. Je ne m'éloigne pas trop et surtout j'évite de me faire repérer. Il est à peine 14h mais de nombreux fans sont déjà devant l'enceinte. Je finis par m'accroupir, le dos contre le mur, la tête entre les mains. La boule dans le fond de ma gorge m'empêche de respirer. Je suis père de famille, éperdument amoureux de mon mari et je me rends compte que je suis en train de tout foutre en l'air parce que je ne suis pas fichu de rester inactif dans ma vie professionnelle. Je ne suis pas fichu de vivre tout simplement, de regarder mon fils grandir et de passer mes soirées aux côtés de mon mari. Les larmes me montent aux yeux. Je récupère mon téléphone dans la poche de mon jean, définitivement trop serré. Je déverrouille l'appareil et contemple quelques minutes la photo d'Hayden en fond d'écran, couché sur le ventre dans son lit, dormant comme un ange si paisible. J'essuie la larme qui s'échappe et me décide à envoyer un message à Louis.
Message de Harry à Louis : Hello mon ange. Si Hayden est couché, est-ce que je peux te téléphoner ?
La réponse ne se fait pas attendre. Ça me réjouit et m'attriste en imaginant Louis, seul à la maison, en train de m'attendre.
Message de Louis à Harry : Depuis quand tu demandes pour m'appeler Harry ?
Message de Harry à Louis : Je ne veux pas te déranger.
Message de Louis à Harry : C'est en général moi qui ai peur de te déranger. Hayden s'est endormi sur moi. Il pleure beaucoup en ce moment. J'essaye de le mettre dans son lit et je t'appelle après.
Message de Harry à Louis : Oh... qu'est-ce qu'il a ? D'accord. J'attends ton appel.
Je fais tourner mon téléphone entre mes mains. Hayden pleure beaucoup. J'espère qu'il n'est pas malade, que c'est juste passager. Mais Louis doit être épuisé, à gérer la maison, son travail et notre fils tout seul, même si je suis sûr que tout le monde essaie de l'aider.
Les minutes s'égrainent et son appel se fait attendre. Je reprends mes allers-retours dans la petite cour à l'arrière de la salle. J'entends la porte s'ouvrir et me tourne pour voir Sarah me faire signe de la rejoindre.
« Tu viens, les gars t'attendent pour la balance.
- Deux minutes. Louis doit m'appeler.
- Ça fait une heure que tu es là tout seul Harry. Ça va ?
- Euh... oui. J'attends juste que Louis m'appelle depuis.... 25 minutes.
- Bon, on t'attend. Ne tarde pas trop. »
Sarah retourne à l'intérieur et je réalise que Louis ne va pas m'appeler. J'entends à nouveau la porte s'ouvrir et même si je suis perdu dans mes pensées et ma peine, je sais que ça ne fait que deux minutes que Sarah m'a quitté. C'est Niall qui sort cette fois et lorsqu'il s'avance vers moi, je baisse mon regard sur mon portable qui m'annonce l'arrivée d'un mail. Un mail de Louis.
« Harry, mon cœur,
Désolé, je n'ai pas pu te rappeler. Hayden a fait une crise de larmes à peine après que j'ai fermé la porte de sa chambre. Il était inconsolable. Il dort maintenant dans notre lit à côté de moi et je n'ose pas bouger, ni parler. J'espère que tu comprendras. Je crois que son papa lui manque terriblement.
Tu nous manques terriblement Harry. Tu me manques terriblement.
Je ne devrais pas te dire ça parce qu'en vérité je suis... je suis en colère, voilà. Les jours passent et tu me manques. Tu sais comment je suis. Je préfère rester en colère, ton absence est plus facile à supporter et le temps passe un peu plus vite. Mais la vérité c'est que je me languis de toi. Ce putain de décalage horaire me pèse et avec Hayden c'est plus difficile de veiller tard le soir.
Enfin, bref. J'espère que cette tournée vaut ce sacrifice.
Je t'aime.
Lou »
« Ça va Harry ? me demande Niall.
- J'attendais un appel de Louis et finalement il m'envoie un mail. Il est distant depuis que nous sommes partis et là il me dit que je lui manque mais qu'il est en colère.
- Tu ne t'en doutais pas ?
- De quoi ?
- Harry, tu ne te doutais pas que Louis était soit blessé soit en colère que tu décides de partir en tournée pendant un mois alors que vous aviez prévu de passer votre temps ensemble ?
- Il est pas là de la journée. Je suis seul à la maison avec Hayden... Je...
- Harry, il faut vraiment que vous vous parliez tous les deux. Parce que tous vos non-dits vont finir par vous séparer.
- Non... mais non ! Pourquoi tu dis ça ?
- Écoute, je te vois. Tu es heureux et souriant uniquement sur scène. Dès que tu as fait ton show, ton sourire s'efface et tu es triste. Parce que Louis te manque, ton fils te manque. Je me trompe ?
- Non. Bien sûr qu'ils me manquent. J'espérais que Louis viendrait avec nous. Même si avec Hayden, ça aurait été folklorique, nous aurions été tous les trois.
- Tu lui as dit ?
- Non. Parce que dès que je lui ai parlé de la tournée, il m'a clairement dit qu'il ne pourrait pas rester aux États-Unis. Et je sais à quel point il attache de l'importance à son travail même si...
- Même si ?
- J'ai dû mal à comprendre parfois...
- Mais pourtant Louis, il comprend tout ce que ton métier représente pour toi. Et même si aujourd'hui, il est triste, mal et seul à Londres, il t'a laissé partir. Loin de lui, loin de votre fils. Tu lui avais fait une promesse Harry...
- Et je l'ai rompue. Je le réalise aujourd'hui.
- Seulement aujourd'hui ?
- Je ne le voyais pas comme ça, quand j'ai accepté la proposition que Sarah et toi m'avez faite.
- Je ne regrette pas que nous soyons partis faire ce tour. Mais nous aurions dû en parler plus avant et surtout avec Louis. Prendre vraiment en considération son avis. Je lui dois des excuses moi-aussi.
- Tu crois que je dois m'excuser ?
- Je crois que tu as intérêt à le faire.
- Louis et toi avez discuté, hein ?!?
- Oui. Mais ce n'est pas à moi de te dire ce qu'il ressent.
- OK. Après le show de ce soir, on est off combien de jours ?
- Je demande à Sarah de réserver un jet privé. Tu partiras après le concert. Tu dois être revenu dans 3 jours à Salt Lake City. Pour une fois, le décalage horaire aura du bon.
- Merci. »
Niall me quitte et me rappelle que tout le monde m'attend à l'intérieur pour les répétitions. Je ne réponds pas à Louis. Ce n'est pas bien mais je veux pouvoir lui répondre quand je serai en face de lui. Si je décolle après le show, je serai à Londres en milieu d'après-midi. Je décide d'appeler ma mère, même s'il est déjà tard pour elle, pour lui demander de me rendre un service.
***********
J'ai peu dormi pendant le vol, répétant mille fois le discours que je réserve à Louis. J'ai l'estomac noué, je suis épuisé mais quand je quitte l'aéroport d'Heathrow, je suis heureux de retrouver mon pays, de rentrer chez moi. Je donne l'adresse de la librairie au chauffeur de taxi puis envoie un rapide message à Sarah pour lui dire que je suis bien arrivé. Je fais de même avec ma mère qui me confirme qu'elle gardera Hayden toute la soirée et toute la nuit, et qu'elle a hâte de me voir le lendemain. Je suis impatient de retrouver mon bébé mais je suis encore plus impatient de retrouver Louis.
La circulation est dense dans les rues de Londres et le taxi peine à m'amener jusqu'à Wellington Street rapidement. Je bascule ma tête contre le siège et tire mes cheveux en arrière sur mon crâne. Je tente de calmer les battements de mon cœur qui s'accélèrent à mesure que nous nous rapprochons de notre destination, à mesure que je me rapproche de ma confrontation avec Louis. Car si Louis parvient à se livrer totalement, comme il semble l'avoir fait avec Niall, je vais passer quelques instants difficiles à devoir assumer mon égoïsme.
La voix du chauffeur me sort de mes pensées et j'ouvre les yeux pour découvrir la devanture de la librairie. Je règle la course et remercie l'homme pour sa discrétion concernant mon arrivée à Londres. Je descends du véhicule et souffle un grand coup en poussant la porte. La clochette retentit et l'odeur familière de la librairie s'infiltre dans mes narines : le café, les viennoiseries et cette odeur d'encre et de papier. C'est quand je pénètre ici, dans ce cocon agréable, que je comprends à quel point Louis aime être dans cet endroit. C'est chaleureux.
Je croise immédiatement le regard d'Émy qui lève son visage vers moi. Son sourire est timide et j'imagine aisément qu'elle en entend sur mon compte à longueur de journée. Je lui adresse un petit signe de la main avant de m'avancer vers elle. Un regard circulaire dans la boutique m'indique que Louis n'est pas là.
« Harry ! Comment vas-tu ? Tu es rentré quand ? C'était prévu ? Louis ne m'en as pas parlé !
- Ohlala, toutes ces questions ! Bonjour Émy !
- Désolée !
- Je t'en prie, je réponds en lui souriant et la serrant entre mes bras. Non ce n'était pas prévu du tout. Je viens d'atterrir mais je suis là que pour 48h.
- Louis le sait ?
- Non... c'est comme qui dirait une surprise même si je ne suis pas certain qu'il soit très heureux de me voir.
- Il le sera. Il ne te le dira peut-être pas, mais il le sera.
- Il est où ?
- Dans la réserve. Il essaye de négocier la venue d'un auteur pour organiser une journée porte ouverte. C'est sa nouvelle lubie depuis quoi... deux semaines. »
Elle me lance un regard quelque peu accusateur avant de me sourire. Je sens le rouge me monter aux joues. Louis s'occupe l'esprit par tous les moyens possibles.
Je me dirige vers l'arrière-boutique. Je me souviens de cette fois où j'étais venu annoncer à Louis mon départ pour L.A. alors que nous venions de nous rencontrer, de nous retrouver après son retour à Londres. Aujourd'hui, j'ai le même sentiment qui étreint ma poitrine, cette douleur à voir Louis malheureux par ma faute.
Je m'avance dans l'encadrement de la porte et l'observe quelques minutes alors qu'il termine une communication téléphonique. Son visage est fatigué et il n'est pas rasé depuis plusieurs jours. Il raccroche le téléphone et soupire en se penchant sur l'ordinateur. Il ne semble pas avoir remarqué ma présence. J'entre doucement et me racle la gorge. Il lève son visage vers moi et le sourire qui l'illumine à cet instant est magnifique.... mais de courte durée. Louis se cache, se blinde derrière sa déception. Il se lève pour venir me rejoindre et je suis surpris qu'il m'enlace, surpris de sentir ses lèvres caresser les miennes, son corps se coller au mien et ses mains s'accrocher avec force à ma nuque. Je passe mes bras autour de sa taille et le presse contre moi aussi fort que je le peux. Je quitte ses lèvres et dépose des baisers sur sa joue, sa mâchoire, son cou où je finis par y échouer mon visage, lui murmurant une litanie de « Je suis désolé » dans le creux de l'oreille.
*Louis*
Je m'accroche au corps d'Harry comme à une bouée de sauvetage. Il est là devant moi, les traits tirés par la fatigue des concerts et du voyage. Je ne peux pas contrôler la joie et le plaisir de le voir et de le sentir contre moi. Je profite de ces quelques minutes de douceur, de ses lèvres sur les miennes, de la force de ses bras qui m'étreignent, de son odeur. Nos visages lovés dans le creux de l'épaule de l'autre, nous nous rappelons tout l'amour que l'on se porte malgré les tensions de ces derniers mois, malgré son absence de ces dernières semaines. Je l'entends s'excuser dans une complainte qui me serre le cœur.
Je me détache doucement de lui. Mes mains glissent sur ses bras et je plonge mon regard dans le sien. Je ne sais pas quoi dire. Je ne sais pas si je craque ou si je reste à l'abri de ma colère et ma rancœur.
Sa main vient caresser ma joue et ses lèvres déposent un baiser sur ma bouche.
« Bonjour, me dit-il avant de s'écarter totalement de moi.
- Qu'est-ce que tu fais là ? je demande la voix un peu brisée.
- Le sacrifice n'en vaut pas la peine, il me répond en me regardant.
- Quoi ?
- Par rapport à ton mail d'hier, à mon absence. Tu me manques beaucoup trop Louis. Et c'est insupportable.
- C'est toi qui as souhaité cette situation.
- Oui. Et même si je ne regrette pas réellement ma décision, j'en regrette les conséquences. Je crois qu'il faut qu'on parle. Qu'on parle vraiment tous les deux.
- Sûrement...
- Non Louis. C'est plus que nécessaire. Je sais que tu as des choses à me dire, toi aussi.
- Tu as parlé à Niall ?
- Oui. Mais il ne m'a rien dit de ce que tu as pu lui dire. Il m'a simplement dit que nos non-dits allaient finir par nous séparer et c'est inconcevable, d'accord ?
- Ok..., je soupire. Pas ici...
- Tu peux rentrer avec moi ? Je suis là à peine 48h Lou...
- Euh... oui. Hayden est avec Anne.
- Je sais. Je lui ai demandé de le garder toute la nuit aussi. On ira le récupérer demain.
- Tu n'es pas impatient de voir ton fils ? je demande sur le ton du reproche, c'est plus fort que moi.
- Si... et tu n'imagines pas à quel point il m'est difficile d'être loin de lui. Mais on a besoin de se retrouver tous les deux. S'il te plaît Louis... »
La lueur dans son regard me dévoile toute sa peine. Je me tourne pour récupérer mon manteau et les clefs de la voiture. Nous sortons du bureau et je rejoins Émy pour lui faire part de mon départ. Je lui glisse doucement que je serai sûrement absent le lendemain.
« Prends le temps qu'il te faut Louis. Parlez, vous en avez besoin... tous les deux.
- Je sais. Je déteste ça.
- Oui. Mais tu ne peux pas rester avec ton amertume. Harry a fait le voyage jusqu'à toi. Ne le laisse pas partir sans explication.
- Merci, je réponds en reculant pour rejoindre Harry qui m'attend dans l'entrée.
- A bientôt les garçons », nous salue Émy.
Nous sortons pour regagner la voiture stationnée quelques mètres plus hauts. Le trajet jusqu'à l'appartement se fait dans le silence. Je déteste le conflit. Je déteste devoir mettre des mots sur ce qui me touche, me vexe et me fait du mal. Mais, Harry a raison, Émy a raison. Nous devons discuter.
Avant d'ouvrir la porte de l'appartement, je préviens Harry que c'est un peu le bazar (le mot étant clairement un euphémisme) et que je n'ai pas eu le temps de ranger ces derniers jours. Je suis mal à l'aise parce que l'image de l'homme fort que je veux lui montrer depuis son départ va littéralement s'évanouir quand il va passer la porte de notre appartement. La vaisselle n'est pas faite depuis quelques jours. Je ne prépare pas de quoi manger et me nourris essentiellement de plats cuisinés surgelés ou venant du traiteur. Sur le canapé, il y a mon ordinateur et plusieurs de mes carnets, certains dont Harry n'a même jamais vu la couleur. Mais surtout, il y a son pull lavande qui ne me quitte pas dès que je passe la porte. Je me trouve tellement pathétique quand j'entre à l'intérieur, sentant sa présence derrière moi.
Il dépose son sac de voyage dans l'entrée et enlève son manteau et son écharpe qu'il range dans le placard.
« Ah oui ! Quand même...
- J'aurais rangé, si j'avais su que tu revenais.
- Je ne pense pas que ce soit le plus important pour l'instant.
- Tu veux un thé ou tu veux aller te reposer, je lui demande alors que je commence à réunir la vaisselle dans l'évier et nettoyer le plan de travail.
- Lou... s'il te plait, viens t'asseoir. Je vais préparer le thé.
- Harry...
- Non... je sais ce que tu es train de faire. Tu essayes de gagner du temps parce que tu détestes que l'on soit en désaccord. Et je crois que nos disputes peuvent se compter sur les doigts d'une main à cause de ton aversion du conflit. Mais aujourd'hui, c'est important. Moi j'ai des choses à te dire.
- Tu as des reproches à me faire ?
- Pas nécessairement. »
J'en veux à Harry. Je l'ai rabâché à qui voulait l'entendre depuis qu'il est parti. Je lui ai dit dans mon mail hier que j'étais en colère. Mais lui dire en face, lui révéler ma peine, ma déception, c'est pour moi quelque chose de difficile. Je prends une profonde inspiration et alors qu'il me rejoint dans la cuisine, je sors deux tasses du placard et le thé pendant qu'il met de l'eau à bouillir. Il embrasse ma tempe et j'ai envie de me jeter dans ses bras.
« C'est pas parce qu'on est en colère qu'on ne s'aime plus Lou »
Ces quelques mots murmurés et son souffle sur ma peau me font frissonner. Je m'empare des tasses et les amène sur la table basse. Je débarrasse le canapé et m'assieds, rejoint deux minutes plus tard par mon mari.
« Alors... tu commences ou je commence, il demande.
- Je ne sais pas.
- Je t'écoute Lou. Tu es distant et tu était terriblement malheureux quand je suis parti.
- Qui ne l'aurait pas été alors que tu t'absentais pour un mois.
- C'est vrai. Mais ce n'était pas la première fois que ça arrivait. »
Il se racle la gorge et s'installe mieux dans le canapé, me faisant face mais sans me toucher. Je le regarde, réfléchir, chercher les bons mots à me dire.
« Lou... Je te présente mes excuses. Pour être parti sans vraiment te laisser le choix mais surtout parce que j'ai rompu la promesse que je t'ai faite. Je sais que tu crois que je suis parti parce que je m'ennuyais à la maison à m'occuper d'Hayden mais ce n'est pas exactement ça. J'ai sauté sur l'opportunité que Niall et Sarah m'ont offerte et j'ai fait en sorte que tu acceptes mais sans te demander ton avis. Alors je m'excuse.
- Je venais de t'annoncer que j'étais prêt à partir à Los Angeles pour qu'on s'y installe définitivement avec Hayden. Pour que tu puisses reprendre doucement le travail alors que je mettais le mien entre parenthèses. J'acceptais que tu rompes ta promesse. Je ne pensais pas que tu le ferais si brutalement. Je remets ma vie en question pour toi, tout le temps Harry, et j'ai l'impression que ce n'est jamais assez.
- Non... Non pas du tout Lou. Je sais la chance que j'ai de t'avoir et je sais aussi que souvent, je ne te mérite pas. Parce que tu es trop gentil. Comme tu le dis, tu acceptes tout de moi et j'arrive à en abuser. Je me rends compte que je suis égoïste.
- Je ne t'ai pas demandé de t'arrêter de travailler.... pendant trois années. Tu me les as offertes et à la première occasion tu es parti.
- Lou... Quand j'ai mis ma carrière entre parenthèses pour toi, pour le bébé qu'on allait avoir, pour nous, j'avais dans l'espoir que... »
Harry s'interrompt. C'est difficile d'être en colère lorsque je l'ai face à moi, quand il semble épuisé et presque démuni. Je sais que cette conversation, nous aurions dû l'avoir depuis longtemps, peut-être même avant qu'il ne décide de partir pendant un mois. Est-ce qu'il y a des signes que je n'ai pas su voir, pas su interpréter ? Il m'est insupportable d'être loin de lui, de l'avoir en face de moi et pourtant de le sentir si éloigné. Il me reproche d'être distant, alors je me redresse et m'avance jusqu'à ce que nos genoux se touchent et que mes mains puissent s'emparer des siennes.
Sa main caresse ma joue, ce geste tendre. Je penche mon visage pour en accentuer la pression et pose ma main sur la sienne. Imperceptiblement, nous nous rapprochons et nos lèvres se rejoignent, s'épousent parfaitement dans un baiser timide, maladroit. J'intensifie notre échange parce qu'Harry me manque et que l'avoir avec moi ce soir c'était inespéré pour moi. Son front se colle au mien et il reprend ce qu'il était en train de me dire.
« Je pensais que tu ne travaillerais pas non plus. Qu'on serait tous les trois tous les jours, toute la journée. Qu'on profiterait d'Hayden et qu'on le regarderait grandir ensemble. »
Je me recule pour pouvoir le regarder dans les yeux. Pour qu'il puisse lire mon incompréhension.
« Mais pourquoi tu ne m'en as pas parlé ?
- Pour la même raison que toi je pense. Pourquoi tu m'as laissé partir sans rien ME dire, puisque apparemment tu as parlé à Niall ?
- Parce que je sais à quel point tu aimes ton métier, que sur scène tu te sens vivant, que tu aimes partager ces instants avec tes fans, leur offrir des moments inoubliables. Harry, je pourrais te donner mille raisons même si chacune d'elles me brise le cœur parce que ça signifie devoir te partager, devoir te regarder partir.
- Lou... Je ne t'ai rien dit parce que dans un tout autre contexte, tu es autant passionné par ton métier que moi. Mais être seul à la maison, malgré tout l'amour que je ressens pour Hayden, c'est terriblement chiant. Te voir rentrer le soir, avoir les sourires de notre fils alors que moi j'ai eu droit aux colères, aux couches sales. J'étais jaloux. De l'attention que vous vous portiez mutuellement. Et j'ai terriblement honte de t'avouer ça. »
J'arrête d'hésiter. La colère que je ressentais s'envole au fur et à mesure du discours d'Harry. Au-delà de la promesse qu'il a rompu, il y a surtout de l'incompréhension et des non-dits qui nous ont éloignés. Harry et moi vivons dans notre bulle, à se protéger l'un l'autre des nuisances de l'extérieur pour être constamment entourés de bien-être. Je pars du principe que c'est à moi d'accepter son métier, ses décisions et les contraintes qui peuvent en découler. Je ne me suis jamais mis à sa place, à vouloir garder une vie « normale » alors que partager la vie d'Harry est loin d'être « normal », banal.
« Je suis désolé d'être parti, ajoute-t-il.
- Non, ne le sois pas. Moi aussi, je te dois des excuses parce que je n'ai pas su voir que ça n'allait pas. Que ce n'était pas ce que tu voulais.
- J'avais juste à t'en parler.
- Comme moi. »
Harry me sourit, sincèrement, avec sa fossette au creux de sa joue. Le vrai sourire. Et je réalise que depuis qu'il est venu me retrouver, il n'avait pas souri du tout.
Je me cale contre son torse, son bras encerclant mes épaules et nous continuons de discuter. Nos jambes tendues sur la table basse s'entrelacent. Bien sûr, nous en arrivons très vite à parler d'Hayden. Je fais défiler sur mon téléphone les centaines de vidéos que j'ai de notre fils.
« Il se met debout tout seul ? Mais quand je suis parti, il était encore si peu confiant sur ses jambes !
- Il change de jour en jour. C'est incroyable.
- J'ai hâte de le retrouver. Tu me disais qu'il pleurait beaucoup...
- Oui. Dès que je quitte la pièce, il pleure. Pareil quand je le laisse pour aller travailler. Et comme on n'a pas un rythme régulier, je pense que ça le perturbe. Les seuls jours où il est vraiment mignon, ce sont ceux qu'il passe avec moi, à la librairie. »
Je sens Harry se crisper un peu. Je passe ma main sur sa poitrine pour le rassurer.
« C'est normal à son âge. Alice a fait pareil avec Liam et Sophia. Quand tu seras rentré, certaines choses vont rentrer dans l'ordre, je suis certain que ça ira mieux.
- J'espère. Il va quand même me reconnaître ?
- Mais oui ! On écoute tes albums souvent... Et Sarah m'envoie toujours des vidéos de tes concerts. On les regarde tous les deux.
- Vous êtes adorables. Je ne savais pas que tu étais en contact avec Sarah.
- Toujours. Je sais aussi que la séparation est difficile pour toi, mais je suis bien trop fier pour t'appeler et te dire que tout va bien.
- Parce que de toute façon, ce n'est pas vraiment le cas.
- Oui c'est vrai. »
Je sens ses lèvres déposer un baiser sur le sommet de ma tête et ses doigts caresser doucement mon bras. Je suis si bien. Ma colère est définitivement envolée. C'était nécessaire qu'on discute. Que je me rende compte que mes propres agissements peuvent blesser l'homme que j'aime.
« Merci d'être venu. »
Harry se penche vers moi et je relève mon visage vers lui. Nos regards s'accrochent et nos sourires s'étirent. Ses lèvres se déposent sur les miennes. Je m'appuie sur ses épaules et m'assieds sur ses cuisses. Ses mains se plaquent dans mon dos, alors que les miennes se glissent dans ses cheveux, intensifiant notre baiser. Je me délecte de la douceur de ses caresses et la tendresse de son baiser. Je retrouve mon mari, celui qui me semblait si loin depuis des mois, entre notre nouvelle vie de pères et la fatigue, nos craintes inavouées.
*Harry*
Louis et moi avons passé une soirée agréable. Nous nous sommes fait livrer de quoi manger pour ne pas avoir à sortir puisque le frigo est vide. Nous sommes montés dans notre chambre de bonne heure, épuisé par mon voyage et notre conversation à cœur ouvert. Nous nous sommes câlinés mais je suis rapidement tombé de sommeil. Je me réveille vers 3h du matin. Louis dort à poings fermés. Je fais bien attention à ne pas le réveiller en me levant pour aller prendre un verre d'eau dans la cuisine.
Je regarde autour de moi l'appartement en désordre, les papiers qui traînent sur la table basse. Je m'assieds sur le canapé. Je souris en repoussant mon pull lavande. Plus que mon odeur, il porte désormais celle de Louis. Je ne sais pas comment ce pull résiste au temps, vu le nombre de fois où Louis le porte quand je m'absente.
Je jette un coup d'œil sur les documents laissés près de l'ordinateur. Louis est vraiment en train de monter un projet pour que nous partions vivre à Los Angeles. Il est prêt à laisser la librairie de Londres pour ouvrir une boutique aux États-Unis, pour que je puisse reprendre mon travail et mes collaborations avec Niall. Louis s'offre à 100 % pour moi et je trouve le moyen de lui reprocher de passer ses journées à la librairie. Je m'adosse au dossier du canapé et bascule ma tête en arrière. Je me pince l'arête du nez avant de me frotter les yeux. Je suis si fatigué qu'ils me brûlent. Je dépose mon verre dans la cuisine et remonte dans la chambre. Louis dort toujours. Je me glisse contre son corps et passe son bras autour de ma poitrine, tenant sa main dans la mienne. Je murmure un « Je t'aime » en embrassant ses doigts et ferme les yeux pour essayer de me rendormir.
************
Les doigts de Louis caressent doucement ma nuque pendant que je conduis jusque chez ma mère. Nous allons chercher Hayden pour le ramener à l'appartement et passer la journée tous les trois. Je suis heureux de retrouver mon bébé qui me manque énormément chaque jour. Je suis content de pouvoir aller le chercher en sachant que Louis et moi avons pu discuter et mettre des mots sur nos sentiments, nos craintes et nos souhaits.
Nous avons discutés ce matin en prenant le petit déjeuner de l'éventualité de nous installer à Los Angeles. Louis m'a confié que c'était une décision mûrement réfléchie tant pour moi que pour lui, que vivre loin de sa famille lui pesait beaucoup, surtout depuis que nous avions Hayden. Nous avons donc décidé, ensemble, de nous pencher sérieusement sur la recherche d'une nouvelle maison, car Louis a ses conditions.
Je souris en tournant mon visage vers lui, lorsque je m'engage dans l'allée de la maison de ma mère. Il est à peine 9h du matin. J'ai eu du mal à dormir et j'étais impatient de voir Hayden. J'ai réveillé Louis en le couvrant de baisers et nous avons pu prendre la route rapidement. Nous descendons de la voiture et naturellement j'attends que Louis en face le tour pour me rejoindre avant de me diriger vers la porte d'entrée. Sa main se glisse dans la mienne et je serre mes doigts autour des siens avant de lui donner un rapide baiser.
La porte s'ouvre avant même que nous sonnions. Ma mère nous accueille et me serre dans ses bras. Elle offre un grand sourire à Louis.
« Comment tu vas Harry ? Tu n'es pas trop fatigué ?
- Ça va aller. Je dormirai dans l'avion demain. Hayden est réveillé ?
- Bien sûr. Il joue sur sa couverture dans le salon. »
Je rentre dans la maison et appelle le prénom de mon fils. J'ai l'angoisse qu'il ne me reconnaisse pas ou qu'il m'ait oublié. Je le vois assis au milieu d'une multitude de coussins, entouré de ses jouets. Quand il m'aperçoit, il a quelques secondes de surprise et puis il me sourit. Je me penche vers lui pour le prendre dans mes bras. Je le serre contre mon cœur et le dévore de bisous. Mon bébé m'a manqué. Je suis si heureux de le retrouver. Il bat des mains pour me montrer sa joie mais ce sont ses « Pa pa pa pa pa pa » qui font définitivement chavirer mon cœur.
Depuis des mois, je me sens enfin heureux et entier.
Ma mère nous propose une tasse de thé avant que nous ne reprenions la route. Louis installe Hayden dans la chaise haute, ma mère lui donne un biscuit qu'il attrape dans sa petite main. Je suis impressionné par les progrès qu'il a fait en l'espace de trois semaines.
De retour à l'appartement, je dépose Hayden dans son lit, endormi pendant le trajet en voiture.
« Va te reposer un peu et quand Hayden sera réveillé, on ira se balader un peu dans le parc.
- Non, j'ai envie de profiter de toi, je réponds à Louis.
- Je vais ranger un peu l'appart. De toute façon, ça m'étonnerait qu'Hayden dorme longtemps.
- OK. »
J'embrasse Louis et commence à monter l'escalier. Je le vois récupérer mon pull - son pull - et le plier soigneusement sur le canapé. Alors avant de monter, je l'interpelle.
« Lou ?
- Ouais ?
- Je suis content que nous ayons réussi à nous parler tu sais.
- Moi aussi, il me répond, son regard rivé au mien. Je n'aurais pas supporté qu'on reste comme ça tous les deux.
- Moi non plus. »
Je lui souris avant de gravir les marches et de m'étaler sur le lit. Je reprends l'avion demain après-midi et honnêtement, je n'en ai pas la moindre envie.
*Louis*
J'ai insisté pour qu'on accompagne Harry jusqu'à l'aéroport. Nous traversons le long couloir, Harry poussant fièrement la poussette d'Hayden. Nous avons la chance de passer inaperçu de ce côté de l'aéroport puisque Harry repart avec le jet réservé par Sarah.
« On viendra te chercher dans une semaine, je lui promets alors qu'il m'entoure de ses bras.
- J'ai déjà hâte de rentrer.
- Moi aussi. »
Je lui donne un baiser et l'étreins de toutes mes forces. Il me relâche et m'embrasse avant de se baisser vers Hayden.
« Et toi, ne grandis pas trop en une semaine, d'accord ».
Il embrasse le front d'Hayden et caresse sa tête.
Ma famille, mon univers est là sous mes yeux. Et pour rien au monde, je ne voudrais échanger ma vie. Harry et moi avons des concessions à faire et j'ai hâte que nous mettions en route nos nouveaux projets.
*
* *
#Justthewayfic
💚 💙
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