Flashback - Sam
Avant la rencontre de Jeanne
Jeudi 28 décembre
SAM
Installé au bar, les écouteurs dans les oreilles, l'album de Linkin park tourne en boucle.
—Un double ?
Sonya attend ma réponse d'un air blasé.
J'allume une clope en guise de réponse.
Elle prend un verre vide sur le présentoir et le remplit de glace. Puis sans un mot, elle fait glisser mon verre sur le bois du bar, pendant que je regarde les touristes qui font leurs achats pour le weekend du nouvel-an.
J'ai pas encore décidé si je veux me bourrer la gueule. J'ai déjà descendu trois shots et je sais que si j'en prends un autre, je serai bourré. D'un côté, m'exploser la tête et tout oublier est une idée séduisante. De l'autre, j'ai besoin d'être un peu près clair pour la nouvelle mission.
Je joue avec le briquet à faire jaillir la flamme en attendant de prendre une décision.
Des mois que j'harcèle le boss pour qu'il me fasse passer dans l'équipe des Players, et qu'il refuse à chaque fois.
Je veux me battre, piéger ces enfoirés qui s'en prennent aux plus faibles. Mais le boss n'est pas dupe. Il sait très bien que j'espère une balle perdue pour en finir. Alors il me garde avec les Angels. Comme un con à juste observer les sujets. Aucune action. Aucune interaction.
Si y a un pépin, on doit appeler les Players. Ils font face au sang, à la mort, pendant que nous on fait face à des sujets qui ignorent notre existence. On est des anges fantômes.
Dix-huit mois et vingt-sept jours que je suis devenu un putain de fantôme. Il est temps d'en finir.
J'écrase ma clope au même moment où deux motos viennent se garer devant le bar. Celles de Jean, et de Blaise le fils du boss.
Je fixe le verre de whisky toujours plein, en passant mon pouce sur la roulette du briquet, faisant naître la flamme.
Je n'ai plus aucune famille sur terre. Depuis que ce fils de pute m'a enlevé la dernière partie de moi qui me restait : ma sœur.
Comble du mauvais sort, il s'est fait sauter avec elle. J'aurais tellement voulu le buter de mes propres mains, mais ce connard est mort comme un lache.
Quelqu'un enlève brusquement les écouteurs de mes oreilles. Je tourne la tête pour intercepter le regard de Blaise qui fixe le briquet que j'ai entre les doigts.
—Amène-toi, crache-t-il entre ses dents en m'arrachant le briquet de la main.
Jean triture nerveusement les percings de ses lèvres, en baissant les yeux comme s'il me fuyait, avant de suivre Blaise qui avance avec son casque de moto sous le bras.
Je lance un dernier regard à mon verre quand je vois deux larmes s'abattrent sur le bar.
Je ne me rappelle pas à quel moment je me suis mis à pleurer.
Je crains.
Je prends une profonde inspiration en ignorant le regard triste de Sonya sur moi, puis me lève du tabouret d'un pas déterminé.
Je suis prêt. Je suis prêt pour ma mission.
Deux minutes plus tard, j'arrive dans le bureau du boss.
Mon regard repère tout de suite un gars, posté à la droite de Warwick. Qu'est-ce qu'il fout là ?
Je l'ai déjà vu traîner à la gare. Et il m'inspire pas confiance. Du tout. Il me fait penser à un serpent. À un de ceux qui ondulent tout doucement pour qu'on ne puisse pas voir l'attaque venir.
Habillé d'un survêt blanc et bleu Lacoste, il a l'allure d'un gosse de riche. Tout frais, bien coiffé, propre sur lui. Et le boss il n'aime pas ça. Il prend les gens de la rue, pas les bourges qui veulent se révolter contre leurs parents pétés de fric.
Pourquoi il est ici ? Le boss a décidé de l'intégrer dans une mission?
D'un air méfiant, je vais m'asseoir entre Jean et Blaise, juste en face du bureau du boss.
J'ignore le petit sourire débile que ce prénommé Matt me lance, et allume une clope en saluant le boss d'un signe de la tête.
Le gosse de riche s'avance pour serrer les mains de mes équipiers.
Quand ce con me tend la main, je le fixe d'un œil mauvais.
Apparemment il n'a pas retenu qu'on me touchait pas. Tout le monde le sait. Mais il n'a pas intégré l'info.
Imperturbable, il range sa main dans sa poche, et penche son visage à quelques centimètres du mien pour me souffler :
—Tu ne salues pas les membres de ton clan ?
Je ne dis rien. Même si je meurs d'envie de lui exploser la tronche, là tout de suite.
Il remet son dos bien droit en me regardant de haut, plein d'arrogance.
—Toujours aussi bavard.
Je croise son regard de batard qui me défie.
Je sais pas ce qu'il cherche, mais je pense pas pouvoir me contenir plus longtemps.
Il sait qui je suis. Ma réputation me précède. C'est l'avantage avec un passé comme le mien. On me connaît. On me respecte. On me fuit.
Alors que je crache la fumée en l'assassinant du regard, il me donne une petite tape sur l'épaule.
Je me lève du fauteuil , et lui décoche un direct du droit en pleine face.
Ne. Me. Touche. Pas.
Il porte aussitôt sa main à son nez ensanglanté. Depuis le temps que ça me démangeait.
Il relève la tête pour me fusiller du regard.
S'il cherche à me faire peur, c'est raté.
Je le menace avec un regard noir, mais je reçois un coup de poing en plein ventre. J'en ai la respiration coupée. Le fils de pute.
Je tente de lui rendre son coup, mais Blaise intercepte mon poing avant qu'il ne rencontre son visage.
—Assez ! crie le boss.
Je devisage Matt avec une haine intense. Il me renvoie un sourire satisfait, en essuyant le sang qui dégouline sur son visage.
Heureusement pour lui, je suis pas d'humeur à me battre. Pas aujourd'hui.
J'ai d'autres priorités plus importantes dans les heures qui vont suivre.
Pendant que Warwick nous ordonne de nous asseoir en fermant nos gueules, je jure entre mes dents.
Tôt ou tard, ce Matt va me le payer. Ce n'est qu'une question de temps. Pour l'instant, je dois garder la tête froide et mon objectif bien en vu : devenir un Player.
—Matt ici présent, reprend le boss en me fixant les sourcils froncés, va vous présenter la prochaine mission.
Quoi ?
Face à mon regard halluciné, Warwick durcit le ton :
—Vous le laissez parler, et après je vous dirais qui va faire quoi.
Je lache un soupir de soulagement.
Si Matt est ici c'est pour intégrer une équipe. Reste à savoir laquelle.
Je croise les bras sur le torse avec un petit sourire aux lèvres. Le boss ne fera jamais entrer un novice dans l'équipe des Players. Ce qui veut dire qu'il a enfin accepté que je change de bord.
À moi l'action.
Le connard en survet retire le mouchoir imbibé de sang de son visage pour le jeter à la poubelle. Il va se placer à la droite de Warwick en souriant de toutes ses dents.
Tu peux sourire mon gars, bientôt tu verras ce que ça fait d'être dans l'équipe des losers.
—Il y a une semaine, explique-t-il, j'ai fais la connaissance d'un alcoolo qui squattait un bar de la gare. Et il m'a raconté une histoire très intéressante.
Je jette un coup d'œil à Jean et Blaise assis à côté de moi, qui semblent intéressés par notre prochaine mission.
—Il y a quatre ans de ça, il avait trop bu. Il a foncé droit sur une gamine de neuf ans, pour soi-disant s'amuser. Le problème c'est que non seulement il est sorti de prison pour comportement exemplaire, mais c'est surtout ce qu'il a l'intention de faire.
Matt nous adresse un sourire maléfique comme s'il allait nous annoncer la mission du siècle.
Redescend sur terre mec. Toutes nos missions sont deguelasses.
—Il m'a avoué, poursuit-il avec des yeux brillants, qu'il a tout perdu à cause de cette famille qui l'a envoyé au trou. Et son but avant de mourir, est de tuer leur deuxième fille pour les faire souffrir.
Les sourcils du boss se froncent, laissant paraître un léger pli au niveau du front.
—Merci Matt, tu peux t'asseoir.
Le boss nous informe alors que notre mission sera de protéger la jeune fille : Jeanne Castello.
Matt quant à lui, va intégrer l'équipe des Players, qui seront chargés de piéger Bertrand Naume pour qu'il retourne au trou.
Je bondis de ma chaise dès que j'entends la deuxième partie des infos.
—Vous partirez samedi matin dans les Alpes, continue le boss comme si j'étais pas debout en train de bouillir sur place. Mitch vous enverra les infos sur vos portables. Dégagez maintenant, sauf toi Sam.
J'entends le grincement des sièges. Les trois autres sortent du bureau tels des lapins qui veulent échapper au prédateur, alors que je reste cloué sur place, la colère plein les yeux.
—Fais pas le con, me menace le boss.
Je fixe son regard glacial qui me remet bien à ma place.
—T'es un bon élément dans le clan, Sam. Je veux pas te perdre.
Je serre les poings.
—T'es pas prêt pour intégrer les Players, alors que Matt si.
Il prend une grande respiration en fronçant les sourcils.
—Il tient à la vie, lui.
Je sais pas quoi dire, mon cerveau ne fonctionne plus, ni ma putain de bouche d'ailleurs.
Par contre la rage qui vibre en moi vient de se multiplier.
Je lui tourne le dos et me dirige vers la sortie, quand il m'interpelle une dernière fois :
—Reste bien à ta place, Sam. Je ne le répéterai pas.
Je donne un violent coup de pied à la porte pour la faire ouvrir.
Qu'il aille se faire foutre avec ses règles du jeu. Je vais fixer mes propres règles.
À partir d'aujourd'hui je ne suis plus un Angel.
Mais un Player.
~~~
Salut à tous !
J'espère que ce flashback vous a plu, et que vous comprendrez mieux les réactions de Sam avec Jeanne 😢
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