Chapitre 8
Ça fait dix minutes qu'on est au restaurant du chalet et qu'on attend nos plats.
Constantin et Alex sont assis en face de moi. Ça aurait pu être pire : Alex et Marysa aurait pu être assis devant moi et s'embrasser pendant tout le repas.
J'essaye de relativiser. D'éviter le regard d'Alex car à chaque fois que je lui jette un coup d'œil je manque de faire un arrêt cardiaque. Je tente surtout de faire abstraction des événements de ce matin.
Est-ce que je suis la seule à avoir trouvé la scène de l'ascenseur surréaliste ?
Apparemment oui.
Alex et Marysa se dévorent du regard en attendant nos plats. On dirait qu'ils se racontent mille et une chose en silence, c'est très désagréable.
Constantin a les yeux rivés sur son portable. Il semble jouer à un jeu, vu la manière dont ses doigts s'activent sur le clavier.
L'épisode avec le psychopathe a été balayé d'un coup de balai magique. Constantin et moi avons raconté l'histoire des trois tarés, puis l'électricité est revenue et ils ont déclaré que c'était l'heure de manger.
C'est ainsi que je me retrouve à baisser mon bonnet gris sur mes yeux, souhaitant disparaître six pieds sous terre. Mais une main l'enlève violemment.
Je tourne ma tête dans l'intention de protester, mais deux petits yeux verts-gris me réprimandent. Ma meilleure amie me fait signe de la tête de parler à Constantin.
Je lui mime avec mes doigts la manière dont il s'éclate sur son téléphone. Elle soupire, avant de passer les mains dans mes cheveux pour les recoiffer.
—Il faudrait penser à la brosse de temps en temps, peste-t-elle à voix basse.
Je fais exprès de bouger ma tignasse dans tous les sens pour l'embêter.
Alors qu'elle lache un soupir dépité, j'attrape une mèche que j'entoure autour de mon index avant de coincer le bout entre mes lèvres.
—Et arrête avec cette foutue manie ! me sermonne-t-elle.
Exprès je la mordille plus fort, impatiente que nos plats arrivent. J'ai faim.
Marysa pose ses coudes sur le bord de la table en bombant sa poitrine. Elle me jette un regard réprobateur parce que j'ai caché mes mains sous les manches de mon long pull noir et que j'ai les bras croisés contre ma poitrine. Mes seins sont inexistants pour les exhiber comme elle.
Elle a de la chance d'avoir une poitrine bien formée, ni trop petite ni trop grosse, et je dois avouer que son pull rose pâle avec un léger décolleté lui va à ravir.
Ok, j'ai aucune chance avec Alex. Même si un jour ils rompent.
Mais qu'est-ce que je raconte moi ?
Je suis heureuse pour elle.
—On ira se refaire une beauté avant l'activité de cette aprem, me chuchote-t-elle à l'oreille. D'ailleurs les gars, on fait quoi après ?
Constantin pose immédiatement son portable sur la table pour fouiller dans la poche arrière de son pantalon. Il en ressort un dépliant jaune.
Avec Alex, ils parcourent des yeux la liste d'activités du jour, et au bout de deux minutes le garçon aux yeux azurs déclare d'une voix suave qui me fait baver :
—Il y a une randonnée en vtt à 14 h, ou alors un parcours d'accrobranche.
Inutile de préciser qu'il s'est adressé uniquement à Marysa qui a gloussé comme une fille amoureuse. Une fois de plus je me sens inexistante autour de la table.
—VTT, je déclare de manière un peu agacée.
—Acrobranche, rétorque ma meilleure amie comme si j'avais parlé dans le vide.
Alex recoiffe sa mèche rebelle d'un geste affreusement sensuel, puis échange un sourire avec Marysa qui me donne envie de vomir.
Lorsqu'il lui lance un long regard rempli d'étincelles, je me suis jamais sentie aussi mal. Aussi invisible.
—Et toi Constantin tu veux faire quoi ? je tente d'une voix abattue mais avec un brin d'espoir quand même.
Il réajuste ses lunettes sur son nez comme s'il était embeté. Quand une légère grimace s'invite au coin de ses lèvres, quand son regard devient désolé, je comprends que l'accrobranche a obtenu la majorité.
Heureusement le serveur arrive à temps avant que j'avale ma mèche entière.
Une assiette très appétissante à l'arôme bien gras vient parfumer mes narines. N'ayant rien pris au petit déjeuner ce matin, je me jette sur ce fabuleux hamburger que je croque à pleine bouche.
Les autres semblent aussi affamés que moi car plus personne ne parle. Je saisis une poignée de frites que je trempe dans le kechup, quand mes yeux se posent sur un regard glacial juste derrière notre table.
Le psychopathe est assis avec ses deux amis, le garçon aux cheveux gris, ainsi que l'autre avec deux percings aux lèvres.
Une nouvelle fois déstabilisée par le regard noir qu'il me lance, je mange nerveusement mon hamburger.
Je surprends alors un regard doux de Constantin, mêlé à un petit sourire charmeur, qui me fait écarquiller les yeux.
Mince, il est passé en mode attaque.
Je réponds par un sourire crispé, avant de bifurquer sur Alex qui dévore des yeux sa belle à côté de moi.
Un soupir s'échappe de mes lèvres, et mon sandwich en paie les frais. Il est avalé sans ménagement avec une grosse quantité de frites en même temps. Oui je sais, c'est pas très glamour mais j'ai au moins cent de tension en ce moment même.
Constantin continue de m'adresser des sourires ambiguës, avec cette appréhension, ce petit malaise de ne pas trop savoir quoi dire.
J'avale mon dernier bout d'hamburger, pressée d'en finir. Puis je prends mon verre de coca, mais Constantin attrape sa serviette et tend la main vers ma bouche pour essuyer un coulis de sauce.
Je jette un bref regard au psychopathe assis à la table derrière nous.
Des éclairs jaillissent de ses yeux.
Je me lève de ma chaise en même temps que lui.
Il est debout de l'autre côté, pendant qu'une décharge incroyable de stress traverse mon corps. Je fixe le psychopathe avec une respiration haletante. Son regard est devenu dix fois plus sombre que d'habitude. Il me scrute debout derrière sa chaise prêt à me sauter dessus.
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