Chapitre trente-six : "Un..deux..trois..."
Sept ans plus tôt
"Devine quoi !" Je souris à Niall en rentrant de l'école.
Nous vivons l'un à côté de l'autre depuis des années, alors ensemble à la maison n'est pas nouveau. D'habitude, Niall ne rentre même pas chez lui, nous allons directement chez moi pour traîner ensemble. Mais malheureusement, ses parents ne se soucient pas réellement de son absence, quand il rentre chez lui après être venu chez moi sans les prévenir, ils ne lui disent généralement rien, et c'est souvent le cas.
Je sais que la famille de Niall est différente. Elle n'est pas comme la mienne. Même si je suis enfant unique, je ne me sens jamais seule avec mes deux parents. Ils sont toujours tellement concentrés sur moi et sur les choses que je fais qu'il n'est pas possible que je me sente ignorée.
Quant à Niall, il a un frère et une sœur très âgés. Sa sœur aînée, Indiana, est partie à Chicago et elle ne revient presque jamais rendre visite à sa famille. Son frère aîné, Jonah, est parti à l'université, mais il a fini par se droguer et est finalement devenu un problème pour sa famille. Jonah entre et sort de cure de désintoxication très souvent. Ses parents sont tellement préoccupés par Jonah que Niall est devenu l'oublié de sa famille. C'est en partie pour cette raison que mes parents se préoccupent tant de Niall. Sinon, nous sommes devenus tous les deux très proches l'un de l'autre, comme un frère et une sœur, mais en mieux.
"Quoi ?" me demande-t-il.
"Mes parents m'emmènent à New York la semaine prochaine !" Je lui souris.
"C'est à propos de cette histoire d'agence de mannequins ?" me demande Niall en roulant des yeux.
Je hoche la tête en sautant joyeusement. Le mannequinat est quelque chose que les gens m'ont toujours dit de faire. Mais en tant qu'enfant, on ne prend jamais ces choses au sérieux. L'épouse de mon enseignant est une recruteuse de mannequins et elle pense que j'ai un certain look que sa compagnie aimerait. J'ai pris une photo portrait pour elle qui a été remis à la compagnie.
Quelques semaines plus tard, la compagnie a appelé mes parents pour les informer d'un casting à New York. Mes parents ont d'abord pensé que c'était une escroquerie, même si je les ai suppliés d'y croire. Ce n'est que lorsque la femme de mon professeur leur a parlé qu'ils ont accepté de m'emmener à New York. Ma mère est plus enthousiaste que mon père. Après tout, je suis sa petite fille.
"Tu n'es pas excité pour moi ?" Je le pousse légèrement sur le côté avec mon épaule.
"Non." m'avoue-t-il.
"Pourquoi ?" Je fronce les sourcils.
"Parce que tu vas déménager dans la ville et m'oublier." Niall hausse les épaules.
"Ça n'arrivera jamais ! Tu seras toujours mon meilleur ami." J'hoche la tête.
En lui disant ça, je le pense vraiment. Je veux que notre amitié reste ainsi. J'ai d'autres amis à l'école et dans le quartier, mais ce n'est pas pareil qu'avec Niall. Je n'ai pas de filtre avec Niall comme avec d'autres personnes, et j'aime ça.
Nous marchons tous les deux dans mon mon allée et nous entrons dans ma maison. Je laisse tomber mon sac de livres à côté du canapé en passant dans mon salon, comme Niall. Comme d'habitude, nous allons directement à la cuisine. Le goûter après l'école est toujours une nécessité. Mais en entrant dans la cuisine, nous voyons ma mère qui se tient là avec le fixe entre ses mains. L'expression qu'elle tient est quelque chose que je n'avais jamais vu auparavant venant d'elle. Elle a l'air à la fois terrifiée et triste.
En entendant nos pas, son regard s'éloigne du téléphone. Je peux voir ses yeux scintiller à cause des larmes mouillées qui se forment dans ses yeux.
"Qu'est-ce qui ne va pas, maman ?" Je lui demande.
Aussitôt, ses yeux s'éloignent de moi.
"Je dois y aller." dit-elle en posant le fixe sur le comptoir de la cuisine et en s'éloignant de la pièce, ce qui me fait courir après elle.
"Où est-ce que tu vas ?" Je demande après elle.
"Il y a eu un accident." me répond-elle d'un ton plus calme en saisissant ses clés de voiture sur la table du salon.
"Avec qui ?" Je continue à la pousser pour obtenir des réponses supplémentaires.
Elle se me regarde finalement de nouveau. Ses yeux brillent encore.
"Ton père." murmure-t-elle.
Mon corps entier se fige à ce moment-là. J'ai l'impression d'oublier de respirer. J'oublie comment traiter les choses dans mon esprit. J'oublie comment réagir dans une telle situation.
"Je dois y aller." Elle répète.
"On peut venir avec vous Mme Reed." suggère Niall.
"Non, vous deux restez ici." fit ma mère avant de nous fermer la porte d'entrée au nez.
Je ne cours pas après elle. Mes pieds sont encore collés au sol. Je sens Niall essayer de me tirer dessus mais je refuse de bouger. Soudain, je sens que je me fais décoller les pieds. Je regarde autour de moi et je vois Niall me porter jusqu'au canapé du salon.
"Parle-moi." me supplie Niall.
"Qu'est-ce qui va se passer avec mon père, Niall ?" Je lui demande comme s'il connaissait toutes les réponses aux questions que j'ai en tête.
"Je ne sais pas Cai." m'avoue-t-il en brossant mes cheveux bruns avec ses doigts.
Je serre Niall dans mes bras et je reste comme ça pendant des heures. Finalement, le sommeil prend le dessus sur moi et je m'écroule dans les bras maigres de Niall. Les deux heures suivantes, je ne rêve pas vraiment. Je pense juste dans ma propre inconscience.
Je suis tellement absorbée par mon petit monde que je ne réalise pas que ça m'est arrivé à moi, à ma famille. Ma famille a toujours été si unie. Mais je sens en moi que cet accident va changer les choses. Je n'avais simplement pas réaliser que ça changerait tout.
...
Je signe mon nom au bas de tous les documents et j'essuie rapidement la larme qui coule sur mon visage. Je regarde l'infirmière prendre les papiers de mes mains puis sortir de la chambre d'hôpital. Il ne reste que mon père et moi dans la chambre. Alors que je tiens sa main immobile, d'autres larmes commencent à remplir mes yeux.
Je me sens comme une criminelle. J'ai renoncé à sa vie en signant. J'ai l'impression d'abandonner mon père. Il méritait tellement mieux que ce qu'il lui est arrivé.
"Je suis désolée, je ne sais pas quoi faire d'autre." Je pleure dans sa main.
J'aurais aimé qu'il soit capable de me voir faire mon premier photoshoot de mannequin. J'aurais aimé qu'il soit là pour mon première défilé. J'aurais aimé qu'il me voit sur scène. J'aurais aimé qu'il soit là pour me donner des conseils pour les fois où j'ai pleuré pour un garçon, Harry en particulier. J'aurais souhaité qu'il soit là le jour où je descendrai l'allée. J'aurais aimé qu'il rencontre ses futurs petits-enfants.
Mais cela n'est jamais arrivé et n'arrivera jamais à cause de la situation.
Je fais donc la seule chose que je sais faire à ce moment-là qui peut nous rapprocher, le plus possible. Je lui chante une chanson.
In the arms of the Angel (Dans les bras de l'Ange)
Fly away from here (S'envoler loin d'ici)
From this dark cold hotel room (De cette chambre d'hôtel sombre et froide)
And the endlessness that you fear (Et de cette éternité que tu crains)
You are pulled from the wreckage of your silent reverie (Tu as été tiré des ruines de ton rêve silencieux)
You're in the arms of the Angel (Tu es dans les bras de l'Ange)
May you find some comfort here (Puisses-tu y trouver du réconfort)
"C'était magnifique." dit quelqu'un à la porte.
Je tourne la tête, tout tenant la main de mon père, et je vois Harry appuyé parfaitement contre le cadre de la porte. Il est la personne qu'il me fallait. Il est une petite distraction par rapport à ce qui se passe autour de moi. Harry est ma distraction comme je suis la sienne.
"J'attends juste d'avoir le courage de me lancer." Je hausse les épaules, ma voix se brise un peu à la fin.
"Il n'y a pas de précipitation Cailin." Il m'assure en se dirigeant vers moi.
"Mais j'ai l'impression de l'abandonner, Harry." Je pleure.
Harry prend un tabouret qui se trouve près du mur et l'apporte à côté de moi en prenant place dessus.
"Mais ce n'est pas le cas. Tu t'es accrochée si longtemps. Souviens-toi que même le médecin a dit qu'ils avaient tout fait correctement." fit-il en m'attirant contre sa poitrine.
Je hoche la tête en me souvenant de la conversation que j'ai eue avec le médecin. Je serre la chemise d'Harry, saisissant tout le confort que je peux prendre. À ce moment-là, j'ai l'impression d'être la seule personne au monde à ressentir cette douleur. La douleur de perdre quelqu'un que l'on aime. Mais ensuite, la culpabilité s'installe en moi. Harry sait exactement ce que je ressens. Il a perdu sa mère.
"Comment tu as fait face à la perte de ta mère ?" Je lui demande en espérant qu'il puisse m'aider à comprendre.
Mais Harry reste silencieux pendant une minute ou deux. Je prie pour qu'il ne s'en prenne pas à moi pour avoir posé une question aussi personnelle. Je sais comme est Harry mais j'espère qu'il comprend la situation.
"Il y a d'abord eu le déni. Je ne voulais pas croire qu'elle était vraiment partie." murmure-t-il.
Le déni. Je ne peux qu'imaginer Harry à ce stade. Il vit dans le déni la moitié du temps de toute façon, mais avec sa mère, ça ne pouvait être que bien pire.
"Puis la colère. J'étais furieux contre tout le monde et contre tout ce qui m'entourait. Je m'en suis pris à tellement de gens pour ce qui s'est passé et j'ai fini par m'en prendre à moi-même." m'explique-t-il en s'agrippant à moi, en espérant obtenir du réconfort pour lui aussi.
Imaginer Harry dans cet état d'esprit est inquiétant. C'est déjà le genre de gars que tout le monde sait qu'il ne vaut mieux pas embêter. Mais un Harry haineux n'est pas quelque chose que je voudrais voir.
Alors qu'il s'accroche à moi, je réalise quelque chose. Je réalise à quel point Harry est devenu important dans ma vie. Avec le début que nous avons eu, je n'aurais jamais pensé que nous deviendrons aussi proches, non seulement dans une relation mais aussi en général. Je n'aurais jamais pensé qu'Harry serait celui qui serait à mes côtés dans une telle situation.
"Mademoiselle Reed, vous êtes prête ?" me demande l'infirmière en rentrant dans la pièce.
Je lui jette un coup d'œil, puis mon regard se repose sur Harry et je m'éloigne de son étreinte. Je le regarde pour un peu d'encouragement et je reçois un signe de tête en retour. Je regarde ensuite l'infirmière et j'acquiesce en essuyant mes larmes.
L'infirmière se dirige lentement vers la machine qui maintient mon père en vie, et je ne peux pas m'empêcher de sentir mon cœur battre plus vite. Pile au moment voulu, Harry me saisit directement mon autre main et la caresse avec son pouce. Je jette un coup d'œil à la porte et je vois Cathy. Il est clair, à l'expression de son visage, qu'elle essaie de ne pas pleurer. Elle ressent le besoin de professionnalisme et je ne peux pas lui en vouloir.
"Trois..deux..un..." L'infirmière fait un compte à rebours, ce qui me fait me sentir encore plus mal.
Le bruit suivant entendu que j'entends est celui du moniteur cardiaque avec l'électrocardiogramme plat causant des larmes qui coulent sur mon visage sans arrêt. Je ferme les yeux et je grimpe sur les genoux de Harry en l'agrippant de toutes mes forces. Les bras d'Harry s'enroulent autour de mon corps, me réconfortant.
"On peut y aller ?" Je supplie Harry après quelques minutes de pleurs.
Harry hoche la tête et m'aide à me lever de la chaise. Alors qu'il me fait sortir de la chambre d'hôpital, je jette un dernier regard à mon père.
"Je t'aime." Je lui chuchote.
Dès que nous sortons de la salle, je suis surprise. Ma mère se tient près de la fenêtre de la chambre et regarde toute la scène. Elle me regarde ensuite pleurer à chaudes larmes. Aucun mot ne s'échappe de ses lèvres.
Je ne sais pas ce qu'elle fait ici. Ce n'est pas comme si elle se soucie réellement de toute la situation. Elle a une nouvelle vie, une nouvelle famille.
Je secoue la tête et je m'accroche contre Harry, m'éloignant d'elle aussi vite que possible.
À l'extérieur de l'hôpital, nous sommes accueillis par un groupe de photographes. Les flashs sont incessants et je ne peux que me couvrir le visage en espérant que mes larmes ne soient pas visibles. Harry met ses bras autour de moi et me couvre le visage de ses mains. Je peux l'entendre crier sur les paparazzis, mais ils semblent seulement lui répondre.
Je les sens nous bousculer, essayant de me forcer à regarder l'objectif de leurs appareils photo. Je veux qu'ils disparaissent tous. Etre laissée seule pour faire mon deuil est tout ce que je veux et ce dont j'ai besoin.
Ce n'est que lorsque je suis à l'arrière de la moto de Harry et sur la route que je peux me détendre. Je peux pleurer encore une fois sans que personne ne m'arrête.
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