Chapitre 4


Derek était frustré. Profondément frustré. Ne pas pouvoir parler, ne pas avoir pu expliquer à Deaton les tenants et les aboutissants de la situation... Bien sûr qu'il avait remarqué que Stiles n'allait pas très bien. Il avait essayé de lui faire comprendre, l'autre jour, qu'il pouvait se reposer, faire moins. Le problème était que Stiles avait compris... Dans le mauvais sens. Il avait cru que le loup cherchait à lui dire de se bouger, qu'il pensait qu'il ne faisait pas assez.

« T'as raison, faut que je m'active un peu. »

Non, il ne voulait pas qu'il s'active, pas après tout ce qu'il faisait déjà. Mais Derek ne pouvait pas lui faire comprendre, pas en étant seul et pas avec de simples grognements. Certes, Scott avait l'air de se soucier de lui la plupart du temps, mais ne faisait rien de concret. Il était temps que ça change.

Lorsque Stiles s'était effondré en voulant arrêter Malia, Derek avait vu rouge. Sa cousine était capricieuse, trop demandeuse. Elle avait très bien entendu le refus de Stiles, mais avait refusé de l'accepter. Et cet hyperactif, déjà épuisé – ça crevait les yeux pour lui qui l'observait sans arrêt – avait tout donné pour la calmer, sacrifiant le repos qu'il avait enfin décidé de s'accorder. Alors oui, quand il s'était écroulé au sol, Derek s'était littéralement jeté sur la coyote. Cousine ou pas, il s'en foutait. Pour lui, c'était de sa faute si Stiles avait perdu connaissance. A travers elle, c'était le comportement de tous les loups qu'il critiquait. Ils s'étaient battus, blessés et il avait fallu qu'au moins la moitié de leurs congénères intervienne pour les arrêter.

La panique de Stiles à son réveil l'avait touché. Encore une fois, il avait mal interprété les choses, mais Derek ne pouvait pas lui en vouloir : le jeune homme faisait ce qu'il pouvait avec les moyens du bord, ce n'était pas de sa faute s'il ne comprenait pas les grognements des loups. Et ce qu'il avait voulu à ce moment-là c'était les empêcher de continuer de se battre. Un objectif louable. Ce qui avait plutôt énervé Derek, c'était les excuses que leur avait présenté Stiles, comme si ce qui arrivait était de sa faute. Non, il n'avait rien à se reprocher mais ne s'en rendait même pas compte. Il allait vraiment falloir que tout cela change. Cette situation ne pouvait pas continuer ainsi.

Derek poussa la porte entrouverte à l'aide de sa tête et pénétra dans cette chambre seulement occupée par le bel endormi. La lumière passait encore un peu à travers les carreaux de la fenêtre et lui permettait de constater la pâleur maladive de l'adolescent, qui n'avait sans doute pas changé de position depuis que Deaton l'avait installé dans ce lit. Les draps étaient remontés jusqu'en haut de son torse, seuls ses bras étaient découverts. Il dormait. En grimpant sur le lit, Derek ne put s'empêcher de penser que le vétérinaire avait pris la bonne décision en le sédatant. C'était triste d'en arriver là, mais Stiles ne se rendait même pas compte d'à quel point il s'épuisait à la tâche. Tout comme les autres n'avaient pas pris conscience – jusqu'à l'intervention de l'émissaire – de ce qu'ils faisaient vivre à Stiles. Ils étaient tous trop demandeurs, trop exigeants, trop capricieux pour la plupart. Malia en était le parfait exemple.

Les oreilles rabattues, Derek s'allongea contre le flanc de Stiles et posa sa tête sur son ventre en glapissant. Cette situation ne lui plaisait pas du tout. D'accord, il avait peut-être été un peu dur avec lui par le passé, l'avait un peu trop souvent plaqué contre de pauvres murs innocents, lui avait potentiellement éclaté le nez contre le volant de son épave, néanmoins... L'hyperactif ne méritait pas ça. L'on devait se rendre compte de ses efforts, de tout ce qu'il donnait à la meute. Derek ne pouvait pas continuer à laisser passer ça. Alors, il déploya ses sens surnaturels et les battements calmes et réguliers du palpitant de Stiles l'apaisèrent aussitôt. Son rythme effréné lorsqu'il était éveillé lui avait fait peur. Il avait eu l'impression que son cœur pouvait lâcher à tout moment. Pas de doute, Stiles était vraiment épuisé et son corps dégageait trop de chaleur pour que cela soit normal. Derek espéra alors que sa fièvre baisse vite.

Alors même qu'il allait s'endormir, il entendit quelques-uns de ses congénères rentrer dans la pièce. Sans toutefois rouvrir les yeux, le loup noir sentit leurs odeurs emplies de peine et les laissa s'installer où ils le voulaient. Il savait qu'il allait devoir se montrer ferme avec eux et que des grognements en bonne et due forme seraient de rigueur. Néanmoins, pas ici, pas ce soir. Pas alors que Stiles dormait, sédaté par Deaton pour qu'il daigne enfin se reposer.

Stiles n'avait pas besoin d'une charge mentale supplémentaire pour le moment. Son état nécessitait que l'on prenne soin de lui et même si Derek était sous une forme qui ne lui permettait pas trop de soulager Stiles de ses responsabilités, il ferait tout ce qui était en son pouvoir pour l'aider.

xxx

Stiles ouvrit lentement les yeux avant de les refermer rapidement. La lourdeur de son geste était telle qu'il se demandait presque ce qui lui était arrivé. Presque. Parce que son esprit était encore trop embrumé pour lui permettre de réfléchir correctement. Tout ce dont il pouvait se rendre compte, c'est qu'il était épuisé et que même respirer lui semblait être un effort fou.

Peu à peu, les sensations lui revinrent, un peu comme lorsqu'il avait fait sa chute dans l'après-midi. Ma chute ? Oh, merde ! Stiles rouvrit brusquement les yeux et fit de son mieux pour ne pas les refermer tout de suite mis à part pour les cligner. Tout lui revint avec une violence folle. Derek. Malia. Leur bagarre. Sa chute. Son incompétence. N'avait-il pas demandé à Deaton de passer également ? Était-il venu ? De ça, il n'avait aucun souvenir. Et ce plafond... Il lui paraissait bien sombre. Son père avait-il repeint sa chambre en son absence ? Stiles voulut alors s'assoir mais un poids sur son ventre le bloqua. En se redressant légèrement malgré ses bras qui se mirent à trembler, Stiles tomba des nues. Un loup noir était à moitié allongé sur lui. Mais ce n'était pas tout. Des tas de loups l'entouraient. Il reconnut alors le premier, Derek. Puis les autres : Isaac, Scott, Jackson, Liam, Théo, et le reste... La moitié était sur le lit, l'entourant et une autre, au sol. Stiles était complètement perdu. Qu'est-ce que... ? Ses bras lâchèrent, il était trop faible et se rendit compte qu'il avait extrêmement froid. Soit cette chambre était mal isolée, soit il était malade et, par déni, Stiles préféra la première option. Bien sûr qu'il n'était pas malade, il allait très bien. Il était juste... Fatigué ? En réalité, il n'en savait rien et n'avait aucune idée de la raison pour laquelle il se trouvait ici, dans ce lit, probablement dans le manoir des Hale au vu de la présence des loups. Et puis... Pourquoi aurait-il dormi ici ? Son père était-il au courant ? Ça y est, les rouages se remettaient en marche dans son cerveau et il voulut se lever. Néanmoins, l'air endormi des loups ne lui donnait pas envie de bouger. Leur sommeil semblait si paisible... Stiles ne voulait pas les réveiller. Ils étaient mignons, certes, mais... Des choses à faire, il en avait des tonnes. Combien de temps avait-il dormi ? C'était un mystère. Secrètement, il espérait ne pas s'être reposé plus d'une heure.

Le jeune homme entendit soudainement un petit couinement et tenta à nouveau de se redresser, sur les coudes cette fois-ci. Le loup noir avait relevé la tête et le regardait de ses yeux cyan. Aussitôt, Stiles ressentit un pincement au cœur, ainsi qu'un sentiment d'urgence. Derek avait-il faim ? Soif ? Besoin de quelque chose ? Dans ce genre de moments, Stiles donnerait tout pour pouvoir communiquer avec les loups. Connaître leurs besoins serait ainsi infiniment plus simple. L'hyperactif remarqua également le fait que Derek semblait avoir été soigné. Un pansement sur le museau, un autre sur le dos, un bandage autour de la patte. Deaton était donc bien venu ? Pourquoi ne l'avait-il pas vu ? Stiles songea alors à la possibilité qu'il se soit endormi durant la visite du vétérinaire. Des tas d'hypothèses naquirent dans son esprit et il en garda une. Sans doute s'était-il dit qu'il pouvait se poser une minute pendant qu'Alan soignait le loup et la coyote. Stiles grimaça légèrement, une douleur à la tête le prenant. Voilà qu'à peine réveillé, il réfléchissait déjà beaucoup trop.

Le loup couina à nouveau, l'obligeant à reporter son attention sur lui. Mais qu'est-ce qu'il voulait ? Du coin de l'œil, Stiles vit les autres canidés lever la tête, bailler, se réveiller. Et l'anxiété le gagna. Oh merde. Il allait vraiment falloir qu'il s'active. Son souffle se fit légèrement plus court et ses doigts se resserrèrent sur les draps. Il ferma les yeux un instant et fit tout ce qui était en son pouvoir pour contrôler ses battements de cœur et ses émotions. Sous leur forme de loups, Stiles devinait qu'ils devaient encore mieux sentir ses émotions. Scott égal à lui-même, se mit à sautiller à côté du lit, la langue pendante, l'air enjoué. Et Stiles, lui, s'efforça de sourire un peu pour cacher son mal-être. Son ami et alpha étant aveugle, ça ne poserait pas trop de problèmes.

Stiles mit du temps à se lever, sa faiblesse étant extrêmement forte. A vrai dire, il commençait réellement à se demander ce qui avait pu lui arriver pour qu'il soit aussi... Pâteux. Ses bras étaient difficiles à bouger et ses jambes... Tenir dessus était difficile. En fait, c'était presque mission impossible.

- Mais putain pourquoi j'ai autant de mal... Souffla-t-il.

Autour de lui, plusieurs des loups glapirent et se levèrent. Le loup de jais resta proche de lui, dans l'expectative d'une potentielle chute. Trouvant de toute manière qu'il était un peu tôt pour qu'il tente de se mettre debout, Derek grogna doucement en le regardant. Le voir aussi perdu lui faisait mal au cœur, certes, mais il n'oubliait pas les recommandations de Deaton. Au-delà de ça, son inquiétude pour le jeune homme était passablement immense et il voyait bien que sa faiblesse n'était pas uniquement due au sédatif qui lui avait été administré la veille. Il tremblait, semblait tout sauf en forme, avait le temps beaucoup trop pâle et son rythme cardiaque était toujours un peu trop rapide. Certaines des paroles du vétérinaire lui revinrent en mémoire, ainsi qu'une réplique de Stiles. Il fallait qu'il mange, c'était impératif. C'était tel que sa maigreur commençait à se voir. La veste du jeune homme tombait légèrement, tout comme son t-shirt trop grand pour lui. Son épaule un peu trop osseuse était visible. Frissonnant de froid, Stiles réajusta ses vêtements et réussit à se mettre en position assise. Les grognements de Derek, il ne les comprenait pas alors, il les ignorait. Isaac vint prêter main forte à celui qui fut autrefois son alpha et se mit devant Stiles, assis.

- Isaac, tu m'gènes... Pousse-toi un peu s'il te plaît, lui demanda faiblement l'hyperactif.

Parce qu'il allait essayer de se lever pour de bon et avait peur de trébucher sur le loup. Derek regarda un instant Isaac avant de sortir de la pièce en courant sur ses quatre pattes. Stiles, qui n'y faisait pas vraiment attention, il forçait sur ses bras qui répondaient un peu mieux que ses jambes. Il allait mal, était clairement épuisé mais ne pouvait se résoudre à rester là alors que ses loups avaient probablement besoin de lui. Ils devaient avoir faim ! Stiles ne savait pas quelle heure il était, mais il se sentait clairement déphasé et ne saurait pas très bien se repérer dans le temps si on le lui demandait. Et puis cette fraîcheur ! Il avait toujours très froid et frissonna malgré sa veste. Il se frictionna faiblement les bras, abandonnant un instant sa tentative pour se lever. Isaac posa alors une patte sur son genou et Stiles eut du mal à fixer son regard sur lui. Finalement, il n'était plus si sûr qu'il s'agissait d'Isaac. Ses maux de tête reprenaient et son épuisement n'aidait pas.

- Jackson, ou... Théo, décale-toi, je risque de te faire mal en me levant...

Les loups couinèrent. Ca recommençait, il les confondait à nouveau et ce n'était pas vraiment bon signe. Isaac secoua la tête de gauche à droite comme un humain, histoire d'essayer de lui faire comprendre qu'il se trompait.

- De quoi, non ? Demanda faiblement l'hyperactif en poussant la patte du loup. Qu'est-ce que tu veux ?

Ce fut ce moment que Derek choisit pour revenir, une... Banane entre ses crocs. Il la déposa intacte sur les genoux de l'hyperactif qui le regarda, perdu, en frissonnant à nouveau. Bordel, ce qu'il avait froid... Isaac tourna la tête vers Derek et glapit pitoyablement pour lui faire comprendre que quelque chose n'allait pas. Stiles n'était pas... Il les confondait encore et son souffle était tout sauf régulier. Derek hocha la tête et posa un regard inquiet sur l'hyperactif qui ne le fixait déjà plus. Dieu qu'il était épuisé. Le jeune homme ferma les yeux un instant, incapable de résister à ses paupières si lourdes. Il se passa une main sur le front et constata qu'il était chaud. S'il avait possiblement de la fièvre, peut-être qu'il pouvait se permettre un peu de repos supplémentaire, juste un peu... Pas grand-chose, simplement de quoi lui permettre de se lever plus tard. Stiles avait beau être dans une espèce de déni, il comprenait bien que se mettre debout tout de suite ne servirait à rien, si ce n'est lui faire rencontrer le sol plus ou moins violemment. Alors, il prit une décision qu'il espérait ne pas regretter.

- Pardon, je... Je me rallonge, juste... Cinq minutes, pas plus et après je... Je rattraperai mon retard sur tout... Tout ça...

Les yeux à peine entrouverts et d'un geste fébrile, Stiles repoussa la banane qui tomba par terre et il se rallongea péniblement sous les draps en s'enroulant dedans. Il tremblait.

Les loups glapirent et s'allongèrent le plus possible autour du jeune homme malade pour lui procurer un peu de leur chaleur surnaturelle. Derek, contre le ventre de Stiles, pesta de ne pouvoir retrouver sa forme humaine. Être un loup dans ces conditions, c'était si frustrant ! Avec son air grognon et ses muscles imposants, nul doute qu'il aurait facilement pu montrer à Stiles qu'il devait se reposer sans angoisser à l'idée de s'occuper d'eux. Sous forme humaine, l'ancien alpha l'aurait volontiers aidé à réaliser toutes ses tâches, aurait tout fait pour le soulager et lui faire comprendre qu'il en faisait trop. Là, en loup, il sentit Stiles s'endormir si rapidement que son cœur se glaça. Dans quel état était-il réellement ? Il couina, le museau sur son ventre et garda ses sens éveillés. Au moindre changement, il courrait prévenir Deaton.

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