Chapitre 11
Deaton arrêta de se battre. Deux heures. Il avait passé deux heures à essayer de convaincre Stiles de la véracité de l'humanité et du côté réel de Derek. Mais l'hyperactif n'avait rien voulu entendre, et continuer de croire à l'existence plus qu'imaginaire du spectre du loup semblait étonnamment plus le rassurer qu'imaginer qu'il était réellement là. C'était comme si cette présence illusoire lui permettait de se montrer un peu moins fort, alors qu'un humain-garou réel l'obligerait à se tendre et à se donner à fond pour ne pas donner cette image de lui, pourtant réelle, d'un adolescent plus qu'épuisé. C'était sa manière à lui de se préserver.
Toutefois, Deaton se débrouilla pour lui trouver un traitement et enjoignit Derek à augmenter petit à petit les doses concernant la nourriture. Stiles remangeait et c'était une bonne chose, mais la quantité qu'il ingurgitait était encore bien insuffisante, ce qui faisait qu'il avait bien du mal à se requinquer et à récupérer un semblant d'énergie. Si l'on couplait à cela son sommeil très en retard, il n'était guère étonnant de constater sa faiblesse constante. Elle n'augmentait pas, ne diminuait pas, elle restait stable. Il fallait donc donner un petit coup de pouce à l'hyperactif.
A un moment, le vétérinaire fit coucher Stiles pour qu'il continue de se reposer un peu. C'était primordial et il fallait qu'il continue ces siestes improvisées de temps à autres. Il lui faudrait du temps avant de rattraper tout ce sommeil perdu. Ainsi, Deaton put en profiter pour parler en privé à Derek, d'un sujet légèrement différent.
En fait, il n'y avait pas de nouveau concernant l'état du shérif Stilinski. Il était toujours dans le coma et les médecins étaient encore incapables de se prononcer quant à la suite. Pour l'instant, c'était trop flou et il était maintenu dans cet état végétatif avec, cette fois, une interdiction de visite. Dans son état, les médecins avaient jugé inutile de les maintenir et ainsi, ils espéraient voir des signes d'amélioration, misant tout sur une guérison complètement isolée. Bien évidemment, il allait de soi que Stiles ne devait pas être au courant de cela pour l'instant, étant donné que ça ne l'aiderait pas vraiment à guérir de son côté. Derek serra les dents mais accepta les conditions du vétérinaire. L'un comme l'autre désirait ardemment que Stiles se rétablisse et s'il fallait pour cela lui mentir un peu, simplement le temps qu'il aille mieux, il n'y avait pas de problèmes.
La visite de Deaton se conclut par ses recommandations habituelles vis-à-vis de Derek. De son côté, il devait également faire attention à ne pas se surmener.
xxx
Derek soupira de soulagement. Il avait fait manger Stiles à son réveil et, petit plus, il avait très légèrement augmenté la quantité de nourriture dans son assiette. L'hyperactif n'avait, au départ, ingurgité qu'un tier de ce qu'il avait sous les yeux. Mais le loup avait insisté et il ne restait plus grand-chose. Conscient que c'était un progrès, il ne le força pas à finir et le félicita doucement. Le seul problème, c'est que Stiles ne réagit pas vraiment. Il ne souriait pas et son regard fixait régulièrement le vide, comme s'il n'était pas vraiment là.
L'autre différence, c'est qu'il faisait bien moins attention à la meute. Il ne l'avait pas oubliée, mais il semblait s'en éloigner. Derek avait l'impression que Stiles commençait enfin à, doucement, penser à lui. Il rechignait moins à manger, moins à se coucher, moins à se poser. Derek ne se détachait de lui que lorsqu'il s'endormait, pour la simple et bonne raison qu'il se consacrait entièrement à lui lorsqu'il était réveillé. Le reste du temps, il s'occupait de la meute qui se faisait toute petite. On voyait, on avait entendu les différentes conversations avec Deaton, on comprenait.
Derek en était content, même s'il aurait aimé qu'ils comprennent plus tôt.
Bien avant qu'ils laissent Stiles s'évanouir pour la première fois.
- Allez, viens, dit-il d'une voix posée en passant un bras autour de lui.
Stiles était capable de marcher, mais sa faiblesse était toujours immense et il lui faudrait du temps pour pouvoir se déplacer seul, sans aide. Il en était là, à dépendre de Derek parce qu'il s'était laissé couler.
- J'veux pas retourner dormir.
Derek tourna la tête vers lui et haussa un sourcil. Quelque chose était différent. D'ordinaire, Stiles faisait tout un débat sur l'inutilité de son repos au profit de la meute, mais c'était bien la première fois qu'il émettait le souhait de ne pas le faire, simplement parce qu'il n'en avait pas envie. En un sens, il émettait un avis, sans prendre sa situation en compte. Il s'opposait à lui, simplement parce qu'il n'était pas d'accord. Et là, l'instinct de Derek l'alerta doucement. Il y avait quelque chose à creuser.
- Qu'est-ce que tu veux faire ? Lui demanda-t-il.
- Je sais pas, lui répondit évasivement l'hyperactif. Je suppose que parler à une hallucination est une activité en soi, déjà bien plus palpitante que de dormir sans arrêt.
Quelque chose titilla Derek, qui se demanda s'il n'y avait pas une occasion à saisir. Il se souvenait fort bien de ce dont le fils du shérif avait commencé à lui faire part l'autre jour. Peut-être que... ? Oui. Sans se préoccuper de quoi que ce soit d'autre, il se mit soudainement à le porter et, malgré ses protestations, l'emmena à l'étage.
- Mais je t'ai dit que je voulais pas dormir ! Rouspéta faiblement l'hyperactif, dont les yeux restaient cernés.
- Tu vas pas dormir, on va discuter, répondit simplement le loup, dont l'inquiétude ne quittait pas le regard.
Porter Stiles n'était pas un problème et il se surprenait à apprécier – un peu, juste un peu –, le fait de l'avoir dans ses bras. Il n'aimait juste pas sentir cette trop grande légèreté. C'était toujours la même chose lorsqu'il le portait : il se concentrait involontairement sur sa maigreur, son poids perdu. C'était plus fort que lui et il espérait que Stiles accepterait rapidement de se remplumer. Enfin non, il n'avait pas le choix. Il le nourrirait de force s'il le fallait. Il voulait juste... Ne plus avoir l'impression qu'il pourrait le casser au moindre mouvement brusque.
Avec douceur, il finit par le déposer sur le lit de la chambre qu'il occupait depuis déjà quelques jours. Ses gestes presque trop précis traduisaient sa peur de mal faire, tout comme de faire mal. Un parallèle proche. L'hyperactif ancra son regard ambré dans le sien et Derek n'y lut pas grand-chose, si ce n'est une perplexité immense. La confusion l'accompagnait.
- On pouvait aussi discuter en bas, fit-il remarquer. Enfin, les autres m'auraient regardé comme si j'étais un alien, mais...
- Je préférais qu'on soit tranquilles.
- Qu'est-ce que ça change, qu'on soit tranquilles ou pas ? T'existes pas.
Ces mots résonnèrent dans le cœur de Derek, qui faillit mal le prendre. Mais il se rappela du fait que Stiles ne voulait toujours pas comprendre qu'il était réellement là et, dans le fond, il savait pourquoi. L'hyperactif, trop instable émotionnellement et toujours bien trop fatigué pour raisonner rationnellement, se protégeait. Encore une fois, il se permettait un relâchement clair, parce que... Qu'y avait-il de mal à avouer ses faiblesses au fruit de son imagination ? C'était bien moins honteux de le montrer directement à la meute. Avant ses multiples évanouissements, il faisait tout pour en montrer le moins possible, parce qu'il voulait faire au mieux, parce qu'il ne voulait pas passer pour plus faible qu'il ne l'était. Là, c'était bien plus simple. En réalité, il était seul – ça, c'était ce qu'il croyait – et ne voyait pas de mal à ne pas faire semblant devant les loups. Derek devait tirer cela à son avantage. Il était vrai qu'en sa présence, Stiles était bien moins sur la défensive, bien plus naturel. Il se relâchait, acceptait son soutien, sans savoir qu'il était réel. Physique. Moral. Tangible. Le loup s'assit à côté de lui et tenta quelque chose.
- C'est parce que les autres existent, que tu ne leur dis rien ?
Par cette question, il faisait référence à bien des choses, mais avait bien fait attention à la laisser ouverte, pour voir ce que Stiles pourrait lui dire. S'il était plus enclin à se confier à une hallucination, il était toutefois possible qu'il se braque à un moment ou à un autre. Et cela, Derek voulait l'éviter.
Stiles eut l'air surpris un instant et détourna le regard. La tristesse se fit une place dans son odeur, comme si le loup lui avait rappelé sa souffrance avec cette simple question. Bien sûr, ce n'était pas son but, mais il était certain que l'hyperactif avait beaucoup de choses à dire et que sa guérison n'était pas seulement physique. Il fallait qu'il veuille guérir, qu'il se débarrasse de cette espèce de poids qui semblait le maintenir sous l'eau.
- Plus ou moins.
Stiles se recula et installa un coussin contre le mur, derrière son dos. En réalité, il mourrait d'envie de s'allonger et de dormir, mais il en avait assez de ne faire que ça. Il eut l'air de réfléchir un instant.
- Disons que... Je ne pense pas que ça puisse les intéresser. Toi, tu t'y intéresses parce que t'es le fruit de mon imagination et que dans le fond... Je sais que j'ai envie qu'on me demande de parler.
D'un regard, Derek l'encouragea à continuer. C'était bien plus simple que ce qu'il pensait, mais il n'allait pas s'en plaindre. De son côté, il imita le plus jeune et mit un coussin derrière son dos, tout en se rapprochant un peu de l'hyperactif. D'un geste évasif, il posa sa main sur son front avant de la ramener vers lui d'un air satisfait. Sa fièvre avait un peu baissé. Nouvelle petite victoire. Stiles eut un sourire timide à ce geste, avant d'à nouveau détourner le regard et de poursuivre d'une petite voix triste :
- Tu vois ? T'es trop parfait pour être réel.
Un soupir, puis :
- Personne ne me demande comment je vais. J'aimerais bien qu'on me parle et pas juste pour me demander des recherches. J'aimerais bien qu'on prenne de mes nouvelles et qu'on se contente pas d'un oui, je... C'est facile de mentir, même à des loups. Vous avez une ouïe de fou, mais soit vous l'utilisez pas, soit vous ignorez ce qu'elle vous fait percevoir. En soi, je vous comprends.
Le surpris teinta le regard bleu de Derek. Stiles était-il réellement en train de lui avouer, sans hésiter, qu'il allait mal et qu'il mentait éhontément sur ce sujet à ses amis ? Mais le pire n'était pas là. Cette amertume qu'il lisait dans son regard... Oui, il y avait beaucoup à creuser. Le fait qu'on n'essaie effectivement pas de démêler le vrai du faux le concernant était une preuve irréfutable du manque d'attention qu'on lui accordait. Scott, Isaac, Malia, Jackson... Oui. Avant cette histoire, ils le voyaient tous les jours, lui parlaient tous les jours. Et ils ne s'intéressaient pas vraiment à ce qu'il pouvait ressentir, pour la simple et bonne raison qu'ils l'avaient oublié, dans un sens. Derek, de son côté, était assez distant et ne restait pas souvent avec la meute. Il aimait avoir sa tranquillité, son calme, sa solitude. Se retrouver ainsi, sous forme de loup, avec la meute, ç'avait été difficile. C'était s'adapter à un genre d'existence dont il n'était pas fan. Mais il ne regrettait pas d'avoir subi cette transformation inopinée. Sans cela, se serait-il intéressé à Stiles, cet hyperactif qui n'avait cessé de l'énerver, de le provoquer sciemment à chaque réunion ? Derek émit mentalement une hypothèse. Et si tout ça, c'était pour endormir sa vigilance ? Et si, désabusé, l'hyperactif, après avoir lancé des signaux d'à l'aide, avait décidé que tout cela n'avait plus d'importance et qu'il était temps de passer à autre chose, d'enterrer ce qui le rendait mal ? Bien sûr qu'il allait mal, mais si on ne le remarquait pas, à quoi bon essayer de parler ? Là, sa croyance quant à la présence fantomatique de Derek était un plus pour le loup.
- Je vous comprends parce que... C'est chiant. Devoir s'intéresser à une personne parce que vous sentez qu'elle ne va pas bien alors que dans le fond, vous n'en avez pas envie, c'est... Chiant, oui. C'est vous forcer à faire quelque chose que vous ne voulez pas. C'est assez pervers, les pouvoirs d'un loup-garou. Vous êtes globalement mieux partout, mais vous êtes obligés de sentir des choses concernant les autres, des choses que vous aimeriez mieux ignorer.
C'était une analyse qui se valait, mais Derek n'était pas d'accord. Néanmoins, il ne dit rien. Stiles allait poursuivre et il était hors de question qu'il le coupe, pas alors qu'il était si bien lancé.
- C'est pas grand-chose, mais... C'est un peu lourd, parfois, continua l'hyperactif en regardant l'extérieur au travers de la fenêtre. T'es là, tu dois sourire pour sauver les apparences, parce que ça te protège de l'indifférence. C'est pas facile d'être un simple humain dans une meute de loups. C'est pas facile d'être inférieur.
- Tu n'es pas inférieur, ne put s'empêcher d'intervenir le loup.
Stiles eut un rire amer.
- Bien sûr que si. Même Lydia a plus de poids que moi. Elle est... Quelque chose, fit-il en souriant légèrement, se rappelant de cette époque où il avait utilisé ces termes pour la désigner.
Lorsque l'on ne savait pas encore qu'elle était une banshee.
- Quand ton oncle m'a proposé la morsure, j'ai... J'ai refusé. C'était tentant d'être plus beau, plus fort, plus rapide, meilleur en tout, mais je me suis dit... Que je pouvais faire tout autant, en restant humain, en gardant ma nature. Parfois, je regrette cette décision. Si j'avais accepté, à l'heure actuelle, je serais comme vous, j'aurais la même importance que tout le monde.
- Stiles, tu es important.
L'hyperactif tourna la tête vers lui. Ses yeux brillaient, et pas de joie. Le cœur de Derek rata un battement.
- Ah ouais ? Je sauterais d'un pont qu'ils ne s'en rendraient même pas compte.
Sa voix était empreinte d'une douleur indicible et ses mots, si durs, si vrais, brisèrent le cœur de Derek. Il savait. Il savait que la meute entendait Stiles.
- J'ai hésité, tu sais ? Pas à sauter d'un pont, mais à partir. Je ne savais pas où aller mais j'étais prêt. J'avais préparé mes affaires, il ne me restait plus qu'à prendre ma décision finale. Mais vous êtes tous devenus des loups et j'ai... J'ai pas pu me résoudre à vous abandonner dans cet état. Peut-être que je ne suis pas grand-chose à vos yeux, mais je vous aime, tous. Je vous aime à en crever.
Mais son regard ne disait pas que ça. Il y avait quelque chose que Stiles gardait pour lui. Le cœur serré, Derek était bouche bée. Il ne savait pas comment réagir face à de telles révélation et une telle... Déclaration ? En soi, c'en était une. Stiles adorait la meute, ce n'était pas nouveau, mais ce que comprit Derek l'était.
- Tu as repoussé tes limites parce que tu voulais qu'on soit bien, tu te fichais des conséquences, souffla-t-il.
C'était un fait avéré, mais Derek ne disait pas tout ce qu'il pensait. Stiles s'était donné corps et âme, simplement parce qu'il les aimait et qu'il voulait... Un peu d'amour amical, de reconnaissance. Ou simplement parce qu'il voulait rendre cette situation plus supportable pour les loups, ces loups qu'il aimait tant. Il donnait, sans rien recevoir en retour. Il minimisait son importance et l'attitude de la meute l'avait plus ou moins conforté dans ce fait. Il fallait que ça change. Maintenant qu'il était au courant, Derek devait agir.
- Et je m'en fiche toujours, souffla Stiles alors qu'une première larme s'était mise à couler sur sa joue. J'pourrai donner ma vie pour eux. Pour vous.
Ce « vous » sonnait étrange, comme s'il voulait dire quelque chose d'autre, mais restait qu'il ne mentait pas. Son cœur n'avait eu à déplorer aucun raté.
Instinctivement, Derek se rapprocha et son pouce vint cueillir cette larme qui avait un drôle d'effet sur lui. C'était la première fois qu'il voyait réellement Stiles pleurer, près de lui, alors qu'il lui parlait. La peau de son pouce était un peu rêche, légèrement caleuse mais l'hyperactif n'avait pas l'air de s'en soucier, c'était tout l'inverse. Il se pencha, poussa son visage vers la main de Derek, se rapprocha de lui, finit par poser, après une légère hésitation, sa tête sur son épaule. Le bras du loup s'enroula automatiquement autour de lui et Stiles se lova contre le loup, avec un besoin visible.
- J'voulais tout faire pour que la meute manque de rien, j'me disais que je pouvais y arriver. Mais j'y arrive pas. J'arrive pas à tenir...
- C'est fini, Stiles. Tu n'as plus à en faire autant, fit Derek d'un ton doux en lui caressant les cheveux.
- Non c'est pas fini, renifla l'hyperactif. Ils sont encore sous cette forme, toi t'es pas réellement là et... Qu'est-ce tu crois qu'il va se passer, après ? Comment faire pour leur faire retrouver leur forme humaine ? Et... Et moi ? J'vais retourner chez moi, seul. J'vais décrocher quand on m'appelle, faire... Faire des putains de recherches, encore et encore, jusqu'à... Jusqu'à quoi ? Et le soir, j'vais continuer de pas dormir, parce que... Parce que quand mon père sera guéri, il va continuer de ramener ses conquêtes, et...
- Ses conquêtes ? L'interrompit Derek sans faire exprès, alors qu'il tentait d'assimiler ce flot d'informations.
Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas entendu Stiles parler autant. Autant dire que, ses confessions mises à part, il arrivait à prendre Derek au dépourvu, si bien qu'il ne savait pas quoi dire.
- Bah ouais, il... Les seules fois où il rentre, c'est pour baiser. Je le vois jamais, mais je l'entends beaucoup. Parfois, je le croise quand je vais le voir au poste mais... C'est tout, tu vois ? Même mon propre père a tendance à oublier de faire attention à moi, rit tristement Stiles. Mais je le comprends, faut bien qu'il pense à refaire sa vie et si ça peut l'y aider, qui suis-je pour lui faire la moindre remarque ? Il a ses propres problèmes et n'a que le boulot à la bouche, pourquoi j'irais lui parler des miens ? Je le verrais, il partirait, il reviendrait avec la voisine du quartier. C'est tout. Moi, je suis où dans tout ça ? Je vais où ? Je sais qu'il est dans le coma, je sais que c'est pas bien de dire du mal de lui mais j'en peux plus, j'en peux plus...
Il fit une pause, savoura l'étreinte de son fantôme alors qu'il ajoutait, la voix cassée :
- Moi aussi j'ai des sentiments, moi aussi j'ai des problèmes, moi aussi je suis fatigué... J'compte pour personne, je me casse le cul pour les autres et je leur en veux même pas, mais j'en peux plus...
Ayant mal pour l'hyperactif, le loup le serra contre lui et continua de caresser ses cheveux châtains. Il assimilait doucement toutes ces informations qui avaient bien trop de sens pour être fausses. Pour l'instant, il ne dit rien, mais essaya tant bien que mal d'apporter tout cet amour dont l'hyperactif manquait cruellement. Stiles se pelotonna contre lui et le serra fort, comme s'il avait peur qu'il disparaisse.
Comme s'il avait peur que son illusion s'envole.
- J'veux dormir... Souffla-t-il alors que les larmes coulaient doucement sur son visage complètement défait.
Il ne sanglotait pas, mais sa voix était brisée. Il voulait dormir, oui, mais pas juste parce qu'il était fatigué. Il voulait oublier qu'un jour, il se réveillerait sans voir son hallucination à ses côtés. Il avait besoin d'aide et celle-ci disparaîtrait le jour où son esprit irait mieux, le jour où il serait moins épuisé.
- Alors dors, entendit-il.
Stiles aimait cette voix qui prenait des accents doux, juste pour le calmer. Il aimait ces bras dont il avait tant rêvé. Il aimait cette étreinte dont il avait tant besoin. Mais ce qu'il aimait par-dessus tout, c'était avoir l'impression de compter. Pour quelqu'un qui n'existait pas, mais ce n'était pas grave. Il en profiterait jusqu'à ce qu'elle disparaisse. Il ferma les yeux. Il pourrait s'endormir, là, dans ce cocon protecteur. Et c'était ce qu'il allait faire. Sans doute se réveillerait-il seul – son illusion ne lui apparaissait pas toujours tout de suite – et ce serait difficile, mais tant pis.
- Je reste avec toi, Stiles, souffla la voix.
- Pour combien de temps ? Murmura-t-il douloureusement.
Derek ne répondit pas tout de suite, mais se surprit à déposer un baiser protecteur sur ses cheveux. Il avait mal au cœur, profondément, mais ce n'était pas le moment de s'apitoyer. C'était Stiles qui souffrait, Stiles qui devait comprendre que tout ce qu'il pensait était faux. D'un autre côté, Derek savait qu'il devrait remettre les pendules à l'heure du côté de la meute, qui avait sans doute tout entendu et c'était tant mieux. Leur ouvrir les yeux à leur tour ne leur ferait pas de mal.
- Je ne partirai pas, finit-il par lui dire doucement, sans cesser ses caresses.
Stiles couina, comme si ces paroles lui faisaient mal. Pour autant, il ne bougea pas, resta fermement accroché à sa bouée de sauvetage.
- Dis pas des choses comme ça... Se plaignit-il sans rouvrir les yeux.
- Pourquoi ?
- Parce que tu respecteras pas ta parole. Quand j'aurai retrouvé toute ma tête, quand j'irai mieux, tu disparaîtras. Tu seras plus là et je serai de nouveau seul.
Stiles décrocha l'une de ses mains une seconde, le temps d'essuyer ses joues sommairement. Puis, il se lova d'autant plus contre le loup, qui gardait un air interdit, comme s'il ne savait pas comment réagir. Comme s'il avait beaucoup trop de choses à assimiler. Il se permit toutefois une chose : il resserra doucement son étreinte sur l'hyperactif, en se promettant de lui prouver qu'il avait son importance et qu'il ne serait plus seul. Maintenant qu'il savait, il allait faire quelque chose. S'il avait obtenu les confessions de Stiles sans forcer, ce qui était une bonne chose, l'hyperactif continuait de le considérer comme une hallucination et ça, ce n'était pas top.
- Tu vois ? Tu peux pas être réel. Le vrai Derek m'aurait envoyé balader depuis longtemps, souffla Stiles en riant amèrement.
Le loup accusa le coup. Ok, ça faisait mal, mais il comprenait. Il l'avait mérité. Autrefois, il fallait avouer qu'il n'était pas des plus tendres, en particulier avec lui, mais il était sûr d'une chose, et pas des moindres.
- Tu te trompes, fit-il en rentrant dans son jeu. Le vrai Derek te serrerait dans ses bras comme je le fais actuellement.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top