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『 Chapitre 28 : MÉCHANT ISAAC ! 』
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— Et bien moi, Ezra, je n'ai aucun souvenirs heureux ici, et tu sais pourquoi ?
Ezra ne répondit rien, se doutant que le blondinet lui donnerait la réponse.
— À cause de toi.
Ezra se retourna vivement, se défaisant de l'emprise d'Isaac. Il cherchait à voir si Isaac plaisantait ou non, mais son visage était toujours naturellement aussi fermé.
— On en a déjà parlé Isaac... j'ai dit que je regrettais cette époque, je me suis excusé et tu-
— Et tu penses que ça suffit ? rétorqua le blond d'un ton mauvais.
— Tu m'as dis que... que tu ne m'en avais jamais voulu, que tu m'avais pardonné.
Un rictus qu'Ezra ne put déchiffrer naquit sur les lèvres d'Isaac. La situation était irréaliste.
— Il faut croire que je t'ai menti.
Le coeur d'Ezra se brisa. Il le sentait tomber en milles morceaux, ses oreilles bourdonnaient, comme s'il refusait d'entendre les mots sans pitié que lui balançait Isaac. Lui qui avait toujours été gentil et compréhensif à son égard, Ezra ne comprenait pas se retournement si soudain.
— Pourquoi tu aurais fais ça ?
Le regard d'Isaac lâcha finalement le sien, comme s'il en avait assez de le regarder.
— Dès que je t'ai vu de nouveau, j'ai vu que tu avais changé et que tu étais plus sensible. Alors, prends ça comme une petite vengeance.
— « Ça » ? Tu as joué avec moi ?
— Sérieusement ? Tu as pris notre baiser au sérieux ?
Ezra n'en revenait pas. Pourquoi Isaac se comportait-il comme un abruti fini ?
— Je me suis simplement laissé porter par la situation.
— Mais-
— En début de semaine, tu embrassais Jayden, je ne vois pas pourquoi mon baiser aurait été différent, le coupa-t-il.
Isaac prenait les miettes qu'il restait de son coeur, pour les écraser encore plus. Il était infâme en ce moment, et Ezra aurait aimé ne pas avoir couru chez lui, ne pas l'avoir embrassé. Il aurait aimé revenir au début de semaine, quand il prenait le bus ensemble, main dans la main. Quand il s'est endormi sur son épaule, ou que Isaac l'avait enlacé en s'excusant d'être égoïste. Il aimerait tant revenir à ce moment là.
— Dis-moi que tu n'es pas sérieux Isaac...
Il tentait de capturer le regard d'Isaac, mais ce dernier refusait de le regarder. Une larme s'échappa du coin de l'oeil d'Ezra, suivi d'une autre, puis encore une autre, encore une, et encore une, jusqu'à qu'il ne puisse plus les arrêter.
— Tu es vraiment méchant Isaac.
— Moi, je suis méchant ?
Bien qu'il tentait de paraitre énervé, Ezra sentait qu'il n'était pas vraiment énervé. C'était plus comme si une force mystérieuse et inconnue le poussait à avoir ce comportement. Ses paroles sorties de la bouche du blond sonnaient fausses.
— Tu n'as pas idée de ce que j'ai vécu à cause de vous Ezra.
Le brun baissa la tête, et tenta de se boucher les deux oreilles avec ses mains, ne voulant plus écouter Isaac qui le détruisait de seconde en seconde. C'était sans compter sur ce dernier, qui attrapa ses deux poignets, pour lui retirer ses mains. Ezra se débattait de toute ses forces, et Isaac continuait de forcer sur ses poignets : de loin, ils avaient vraiment l'air de se battre. Isaac finit par pousser Ezra contre un mur, lui plaquant ses poignets de part et autre de sa tête, l'immobilisant complément.
— Tous les jours, pendant trois ans, je me levais la boule au ventre. Tous les matins, je tentais de faire croire à mes parents que j'étais malade. Il m'arrivait de me rendre malade moi-même pour ne pas aller en cours. À chaque fois que j'arrivais à l'école, je n'avais aucun répit, vous m'embêtiez le matin, pendant les cours, à la cantine, durant les récréations... et pourquoi ? Parce que j'avais quelques kilos en trop ? Ou peut-être parce que je fermais ma gueule et me laissait faire ?
— Isaac, arrête, le supplia le brun, le visage rempli de larmes.
— C'est fini maintenant Ezra. Je ne ferme plus ma gueule, et je ne me laisse plus faire. Tu sais, quand je ne t'ai pas vu le jour de la rentrée en sixième, je me suis senti vraiment soulagé.
Le blond baissa la tête un instant, semblant hésiter, cherchant ses mots. Il releva la tête quelques secondes après, les yeux encore plus noirs qu'habituellement.
— Je ne pensais pas te revoir un jour, et honnêtement j'aurais préféré ne jamais te revoir.
Pendant que Isaac crachait ses vérités au visage d'Ezra, il tentait de se débattre, mais le blond le bloquait complètement, il ne pouvait plus bouger.
— Arrête Isaac ! Tu l'as dis toi-même, je ne t'ai jamais vraiment harcelé... je suivais Andrew... et même si c'était mon meilleur ami, je-
— C'est trop facile de dire ça.
Isaac attrapa ses épaules pour le secouer violemment. Le dos d'Ezra heurta douloureusement le mur à maintes et maintes reprises, sans qu'il ne puisse rien faire.
— Justement Ezra, il était ton meilleur ami , mais tu n'as jamais rien fait pour l'arrêter ! Tu aurais pu lui dire d'arrêter, il t'aurait écouté !
Ezra baissa la tête ne pouvant contenir ses larmes, qui s'écrasaient maintenant sur le bitume.
— On... on s'amusait juste...
— Ce n'était vraiment pas drôle.
— Je le sais maintenant, et je suis vraiment désolé.
— Putain , mais ça ne suffit pas à effacer ma douleur !
Ezra rassembla toute ses forces, et réussit sans vraiment savoir comment, à repousser Isaac qui recula seulement de quelques pas, mais au moins, il avait les poignets libres.
— Alors, tu as décidé de te venger en me faisant tomber amoureux de toi, c'est ça ?
Les mots étaient enfin sortis. Amoureux. Oui, Ezra était éperdument amoureux d'Isaac. Chacun de ses gestes, il les aimait. Chacun de ses mots, il les aimait. Ce que les autres détestait chez Isaac, Ezra y aimait sans hésiter. Il aurait pu faire n'importe quoi pour lui, mais là, en cet instant, le blond qu'il chérissait tant s'amusait à le détruire.
— Tu... tu es amoureux de moi ? demanda Isaac perturbé.
Le regard d'Isaac se faisait fuyant, tandis qu'Ezra n'avait plus peur, il n'était plus gêné. Cependant, le blond semblait surpris par la déclaration du brun, comme s'il ne s'attendait pas à ça. L'air perdu qu'affichait Isaac, réussi d'une certaine manière à satisfaire Ezra.
— Tu ne le savais pas ? Tu es celui qui m'a demandé si je t'aimais, tu te rappelles ? C'est bon, tu as ta réponse.
— Je ne pensais pas, que tu serais assez idiot pour tomber amoureux de moi. Pour de vrai.
— Il faut croire que l'amour rend bête.
Isaac commença à rigoler doucement, toujours de manière sournoise et vicieuse.
—J'espère que ça te servira de leçon.
Il tourna le dos à Ezra et commença à s'en aller, mais le brun était décidé à ne pas se laisser faire lui aussi. Il rattrapa le blond, en attrapant son bras assez brusquement et le retourna face à lui, ce qui eu pour effet de le surprendre.
— Bordel Isaac, mais qu'est-ce que je dois faire pour que tu vois que je suis sincère ?
Ces mots frappèrent Isaac de pleins fouet. C'était la même situation.
« Qu'est-ce que je peux faire alors Isaac ? Hein ? Je dois faire quoi pour que tu vois ma sincérité à la fin ? »
Seth lui avait prononcé les mêmes mots avant de se suicider. Isaac n'avait pas su trouver les mots pour le sauver. Il était hors de question qu'il reproduise la même erreur avec Ezra, mais malgré cette prise de conscience, tout ce qu'il pouvait faire était de le rejeter.
— Lâche-moi Ezra...
— Pas question ! Je ne compte pas te lâcher Isaac !
Sans lui répondre, Isaac dégagea son bras sans grande difficulté, vu la force d'Ezra face à lui. Alors qu'il s'apprêtait à fuir à nouveau, le brun le rattrapa à nouveau, cette fois-ci en passant ses bras autour de sa taille, le ramenant contre lui dans une étreinte ferme et autoritaire. Ezra utilisa toutes ses forces pour maintenir Isaac contre lui, qui se débattait, tentant de le repousser en poussant au niveau de ses épaules, mais il tenait bon. Il devait tenir bon.
— Isaac, arrête de me repousser.
— Toi arrête ! Je ne serais jamais amoureux de toi !
Il poussa une énième fois Ezra, qui le lâcha face à ses mots si rude. De nouveau face à face, Isaac put alors voir le regard du brun s'éteindre. La petite étincelle qui brillait dans ses yeux venait de disparaitre. Par sa faute, mais il n'avait pas le choix.
— Qu'est-ce que j'ai fait de mal Isaac ?
Sa voix craqua, les larmes redoublèrent. Leurs coeurs se brisaient.
— D'accord, je t'ai pourri la vie, je le reconnais, mais tu es pareil Isaac. Dès que je fais un pas en avant vers toi, tu en fais trois en arrière.
Isaac lui répondait par le silence. Ça lui ressemblait mieux que la violence, cela dit.
— La première fois que j'ai tenté de m'excuser, tu t'es enfuis de la classe. Quand j'ai essayé de mieux te comprendre, malgré tout ce que j'entendais sur toi, tu as décidé de me mentir au lieu de directement me dire la vérité.
Une larme menaçait de tomber au coin de l'oeil d'Isaac, mais il la retint du mieux qu'il pu.
— Tu ne m'aimes pas, c'est ce que tu dis. Alors, pourquoi tu m'as demandé d'utiliser la guitare de Seth ?
— De quoi tu parles ?
Évidemment, dès que quelqu'un parlait de Seth, il se braquait.
— La guitare que tu as amené au club lundi... c'est celle de Seth, pas vrai ?
Le silence à nouveau confirma les doutes d'Ezra.
— Et tu comptes toujours nier tes sentiments pour moi ?
Ezra haussa la voix, il en avait marre du mutisme d'Isaac. Il voulait bien comprendre qu'Isaac lui en veuille encore, qu'il ait été boulversé par le suicide de son ex petit-copain, mais le brun estimait avoir déjà assez payé. Il ne pouvait pas encaisser éternellement la rancoeur du blond. Si sa haine était telle qu'il ne pouvait passer au dessus, alors pourquoi s'était-il rapproché de lui dans un premier temps ? Si le ballon de basket n'avait pas suffit à soulager Isaac, le fait qu'Ezra l'ait défendu publiquement contre Evan, ou alors qu'il ait prit la peine de connaitre sa version des rumeurs, ne voulait rien dire aux yeux d'Isaac.
— Ezra... je ne t'aime pas et je ne t'aimerais jamais, comprends-le.
— Tout ce que tu m'as dis jusqu'à maintenant, c'était des mensonges alors ? Tu disais que tu ne me détesterais jamais. Tu disais que j'étais spécial à tes yeux, que jamais tu ne supporterais de me faire du mal...
Isaac allait parler, mais Ezra était en train d"exploser.
— Tu ne crois pas que tu me fais du mal actuellement ?
— Ezra...
— Tu n'as cessé de me faire des crises de jalousie à chaque fois que j'étais avec Jayden. Même avec ça, tu refuses d'admettre que tu m'aimes ?
Ne pouvant admettre les paroles du brun, Isaac put seulement pousser Ezra qui fit quelques pas en arrière, les joues inondés de larmes.
— Arrête ! Je t'ai dis que je ne t'aimais pas !
— Très bien ! Mens-toi autant que tu veux, j'en ai rien à foutre ! Quand tu ouvriras les yeux, je ne serais plus là pour toi, exactement comme Seth !
En effet, c'était bas. Très bas, mais Ezra était à bout. Isaac aussi, et cette dernière phrase suffit à réveiller un étrange sentiment en lui. Bien qu'Ezra comptait pour lui, une colère soudaine s'empara de lui, et il se jeta sur le brun, le plaquant violemment sur le sol. Son poing se leva prêt à s'abattre sur le visage d'Ezra, mais sa main tremblait : il semblait hésiter.
— Vas-y frappe moi Isaac. Après les insultes, les coups, de mieux en mieux.
Le poing d'Isaac s'abattit sur le sol en goudron, abîmant ses phalanges qui devinrent rouges sang, à quelques centimètres du visage d'Ezra qui n'avait même pas cligné des yeux.
— Tu vois, tu es incapable de me blesser Isaac, preuve que tu m'ai-
Ezra se coupa sec en sentant une vive douleur le traverser. Sa tête venait de violemment basculer sur le côté. Isaac l'avait frappé pour le contredire, encore. Son point venait de s'abattre sur sa joue, et un goût de sang arriva dans la bouche d'Ezra. Pas seulement un goût de sang, puisque la seconde d'après il se tourna, pour cracher du sang. Isaac lui avait laissé une marque, qu'il allait devoir expliquer à son père et à ses amis.
— Ne parle pas comme si tu me connaissais, souffla Isaac.
Ezra tourna le regard vers lui, toujours à terre, la lèvre en sang et la joue rougie. Isaac était incapable de deviner ce qu'il se passait dans son regard, tant il y avait de nouvelles choses.
— Au début, je pensais que tu t'éloignais des gens pour les protéger. Maintenant, j'ai compris. Tu éloignes les gens pour te protéger. Sauf que visiblement, plus personne n'est là pour te protéger de toi même, et c'est bien fait pour toi. Tu es pathétique Isaac.
Il se releva en poussant Isaac qui était toujours au dessus de lui. Le blond bascula en arrière, retombant sur les fesses.
— Je suis désolé d'avoir parlé de Seth, visiblement c'était vraiment très déplacé de ma part.
Il commença à s'éloigner.
— Cependant, je maintiens ce que j'ai dis. Tu vas me perdre, et tu perdras tout le monde si tu continues ainsi.
Sans un regard en arrière, Ezra s'éloigna laissant Isaac seul, assis sur le bitume froid. Quand Ezra fut hors de sa vue, il ramena ses genoux contre son torse et se mit à pleurer. Toutes les larmes qu'il avait retenu, quand il avait fait pleurer Ezra, quand il lui avait avoué être amoureux de lui. Isaac venait de briser la personne qu'il aimait, et il s'était brisé par la même occasion.
C'était le meilleur choix à faire.
☆ ★ ☆
✎ Yena
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