Chapitre 3


Anna descendit du minibus. Elle poussa le petit portail qui menait à la cour de récréation et pénétra dans l'enceinte de l'école. Ses amies l'aperçurent immédiatement et coururent vers elle. Elles la serrèrent dans leur bras.

-Je leur ai dit ce qui s'était passé. annonça Jade.
-C'est bien. fit Anna.
-Tu vas bien ? demanda une petite fille.
-A peu près.
-Où est-ce que tu habites maintenant ?
-A l'orphelinat.
-Ah, comme là où était ton frère ?
-Oui, le même.
-Et, c'est bien ?

Anna hocha les épaules. Ses amies ne semblaient pas se rendre compte de ce qui lui était arrivé. Elles étaient curieuses de s'avoir ce qui s'était passé sans même se demander ce que ressentait Anna à l'évocation de ces moments. Pour elles, très peu de choses changeaient après tout et elles seraient vite passé à autre chose.

Anna se sentit soudain différente de ses amies. Elle se sentait au-dessus de toute cette agitation. Elle répondait laconiquement aux questions de ces camarades mais son esprit n'était pas réellement dans la conversation.

Quand Anna rentra en classe, la maîtresse s'avança vers elle. Mme Hadel avait évidemment été informée de la raison de son absence.

-Je comprends ce que tu peux ressentir Anna. Je serai moins exigeante avec toi, ne t'inquiète pas. Si tu as un problème, tu peux venir me parler, même dans plusieurs mois. Je sais qu'on ne se remets jamais totalement de ces choses là.

Anna acquiesça. Elle était au bord des larmes. Qu'est ce qui se passerait si un jour la maîtresse se mettait à parler de police ou si elle voyait un film où des enfants perdaient leurs parents ? Se mettrait t'elle à pleurer en pleine classe ?

-La directrice voudrait te voir à la récréation de ce midi. termina Mme Hadel.

-Bonjour Anna, assieds toi.
-Bonjour.
-Bien, tout d'abord, je voulais te voir pour te dire que je suis désolée.

La petite fille baissa la tête.

"Sache, que si tu as un problème, nous sommes là pour t'aider. Mme Hadel t'a déjà dit que nous serons moins exigeant avec toi. Nous pourrons t'aider si tu commences à avoir des difficultés scolaires suite au drame que tu as vécu."

Anna avait toujours eu peur de la directrice qui représentait l'autorité suprême. Chaque début d'année elle faisait un discours avec des mots trop compliqués pour la moitié des élèves de l'école. Apparemment cette façon de bien tourner les phrases était encrée en elle.

"Tu peux pleurer, ne t'inquiète pas. Tes camarades n'auront pas à te juger et nous ferons tout pour qu'ils te laissent tranquille. Nous n'avons pas fait d'annonce publique du décès de tes parents, c'est à toi de décider à qui tu veux le dire."

Anna avait déjà entendu ses parents critiquer la pédagogie de la directrice. Elle était parfaite pour remplir des papiers mais beaucoup moins pour s'occuper des enfants.

-Ton orphelinat a donné son accord pour que tu consultes la psychologue de notre établissement. Tu auras donc rendez-vous tout les midis, de 12h30 à 13h.
-D'accord. dit simplement Anna.
-Tu peux y aller. Tes rendez- vous commencent aujourd'hui. Le bureau de la psychologue se trouve juste à côté du mien. La porte à gauche.
Anna hocha la tête puis se leva. Il était 12h. Elle retrouva ses copines dans les rangs de la cantine. Elle parla peu durant le repas et se dépêcha pour être à l'heure à son rendez-vous.
***

Anna conjuguait le verbe "être" à l'imparfait, assise au petit bureau de sa chambre d'orphelinat quand un éducateur entra dans sa chambre.

-Bonjour Anna, je m'appelle Marc. Alors comment s'est passée ta journée ?
-Ça va. Je suis contente d'avoir revu mes copines. fit la petite fille en levant le nez de son cahier.
-Tu as eu un rendez-vous avec la directrice ? demanda Marc.
-Oui, elle m'a dit qu'elle était désolé et que je devais choisir si je disais aux autres ce qui s'était passé.
-Bien, et as-tu un rendez-vous avec la psychologue ?
-Euh, oui. Je ne sais plus comment elle s'appelle.
-Ce n'est pas grave. sourit l'éducateur. Comment ça s'est passé ?
-C'était...bizarre.
-C'est un peu normal. Mais tu me sembles plus bavarde. On m'a dit qu'à ton arrivée, tu te contentais de répondre le plus simplement possible aux questions.
-Oui, je ne voulais pas parler.
-C'est la psychologue qui t'as délié la langue ? questionna Marc en s'asseyant près de la petite fille.
-Je ne sais pas.
-C'est peut-être aussi le fait d'être retourné à l'école.
-Peut-être.
-Que t'ont dit les maîtresses ? Elles t'ont donné des devoirs ? demanda l'homme en se penchant sur le cahier d'Anna.
-Oui, Mme Hadel m'a donné les calculs. Mais elle a dit que je n'étais pas obligée de les faire.
-Mais tu es en train de faire de la conjugaison là ?
-Euh, oui. J'ai fini les calculs alors je fais la conjugaison qu'elle a donné aux autres.
-D'accord. Et comment te sens-tu quand tu fais tes devoirs ?

Anna réfléchit.

"Normale." Oui, pour une fois depuis quelques jours, quelque chose lui paraissait normal dans sa vie.

-J'ai décidé de faire la conjugaison pour être comme les autres...et pour ne pas qu'ils se plaignent. ajouta t'elle.
-Je pense que retrouver une vie normale t'aidera à te remettre plutôt que de te faire sentir que tu es différente en t'enlevant du travail ou en assouplissant les règles pour toi.
-Vous êtes psychologue, vous aussi ?
-Non, je suis éducateur mais à la longue j'ai appris à comprendre les enfants. rit Marc. Bon, montre moi ton travail.... Et tutoies-moi.
Anna tendit son cahier à l'homme qui l'inspecta.
-Parfait, aucune faute. Il te reste dix minutes avant que tu puisses sortir. Veux-tu que je te raconte une petite histoire ?
-Une petite histoire ? s'interrogea Anna en fronçant les sourcils.
-Oui, écoute. La ville de Thèbes était gardée par le Sphinx. Quand quelqu'un voulait entrer il lui posait cette question : Qui marche le matin sur quatre pattes, le midi sur deux et le soir sur trois ? Si il répondait mal, il le renvoyait. Alors si tu veux sortir de ta chambre, tu dois répondre à la question.
-Ah c'est une énigme, je croyais que tu voulais me raconter une histoire comme Blanche-Neige.
-Non, tu es une grande fille. Alors tu connais la réponse ?
Anna réfléchit. Elle aimait les énigmes et savait qu'il ne fallait pas prendre les questions au premier degré. Elle retourna les mots dans tout les sens et s'écria au bout de quelques minutes de réflexion :
-J'ai trouvé, c'est l'Homme ! Car le matin de sa vie, quand il est bébé, il marche à quatre pattes. Le midi, quand il est adulte, il marche sur ses deux jambes. Et le soir de sa vie, quand il est vieux, il a une canne.
-Bien tu es très forte. Je crois que je n'ai jamais vu quelqu'un répondre correctement à cette énigme. Tu la connaissais ?
-Non. Tu en as une autre ? demanda la petite fille qui commençait à s'amuser.
-Oui, écoute. Une princesse est prisonnière dans un donjon. Elle demande à ses gardiens : "Plus j'ai de gardiens, moins je suis gardé. Moins j'ai de gardiens, plus je suis gardé. Qui suis-je ?"
-Hem, un secret ?
-Oui, bravo. Encore plus impressionnant que l'autre. Tu es forte en énigme. Tu as l'esprit logique.
-Papa disait que je ferait une bonne enquêtrice dans la police.
-Est-ce que tu es forte à l'école ? demanda Marc pour éviter qu'Anna ne pense à ses parents.
-Oui, j'ai des bonnes notes. J'adore les maths et les sciences. Je regardais des reportages des fois sur le corps humain.
-J'ai une énigme mathématiques. Comment peut-on arriver à un résultat de 1000 avec huit 8 ? C'est une simple addition.
- Heu, il ne faut pas utiliser les huit comme ça. Il faut en faire quelque chose. Les regrouper peut-être ?
-Comment ça ?
-Si je fais 88+88+88+8+8; ça fait...

Anna posa l'opération.

-280. Hem, et si je fais 888+88, ça fait.... 976. Il me manque trois huit et 24 points... réfléchit tout haut la petite fille.

-Il faut faire 888+88+8+8+8. annonça fièrement Anna.

-Bien ! la félicita l'éducateur avec un grand sourire. Bon, je te laisse. Tu peux sortir maintenant.

Anna rendit visite à son frère puis essaya de faire connaissance avec les filles de son âge.
***

De jours en jours, les deux enfants s'adaptèrent à leur nouvelle vie. Ils allaient à l'école, revenait à l'orphelinat faisaient leur devoirs puis jouaient ensemble et avec d'autres enfants du centre. Anna fêta ses neuf ans six semaines après son arrivée au centre. Marc avait pris l'habitude de venir voir la petite fille. Il vérifiait ses devoirs mais lui proposait aussi des énigmes de temps en temps.

Un jour il la trouva perchée à l'envers sur son lit. La petite fille faisait de la gymnastique. Elle se redressa précipitamment, effectua un saut puis une roulade et rejoignit l'éducateur. Celui-ci rit et tenta de l'attraper mais elle se déroba et exécuta une roue. Marc souriait. Il savait qu'Anna faisait du sport régulièrement et était assez musclée pour son âge mais pas qu'elle était aussi souple et rapide.

-Hello Marc !
-Hello Anna ! Tu reviens de ton cours d'anglais ?
-Yes ! I learn news verbs !
-I learnt. C'est du prétérit.

Marc était bilingue en anglais et aidait Anna à progresser car elle suivait toujours les cours de Sarah.

-Ah oui ! Sarah a dit qu'on apprendrait ça en fin d'année.
-Déjà ! Tu as un bon niveau j'imagine !
-Peut-être, je sais pas.
-Bon, montre-moi tes devoirs."

***

Voici le chapitre réécrit ! N'oubliez pas de voter si ça vous plaît et de commentez pour donner votre avis ou si vous voyez la différence.

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