Jungkook ne pouvait pas y croire.

Taehyung.

Son patron.

Un homme qu'il trouvait magnifique.

Était en train de l'enlacer à ce moment même. Dans le couloir où ils pouvaient être vus de tous.

Incroyable, non ? Mais vrai.

Après l'avoir étreint de nombreuses minutes, Taehyung se recula finalement, les yeux regardant partout, à part Jungkook.

Il doit être timide, pensa Jungkook. C'est mignon.

- Tu veux venir dans ma chambre ? demanda le châtain d'une voix gênée. Je- euh.. Pour que tu puisses te calmer, évidemment.

- Oui, merci, répondit Jungkook, amusé par le comportement de Taehyung. C'était la première fois qu'il voyait son patron agir de la sorte et sans mentir, il adorait.

Ils entrèrent donc tous les deux dans la chambre de Taehyung, et se posèrent chacun sur un siège, l'un face à l'autre.

- On peut parler d'autres choses, si tu veux, commença Taehyung, dans une tentative de changement de sujet. Tu veux me parler de ta famille, par exemple ?

Aïe. Changement de sujet raté.

Jungkook fit une grimace qui ne passa pas inaperçu aux yeux du châtain.

- Ah mince ! s'excusa Taehyung. Sujet sensible ?

Jungkook acquiesça lentement.

- Je n'ai plus contact avec mes parents, avoua-t-il.

- Tu- enfin, si tu veux en parler avec quelqu'un, sache que je suis là.

- Je vous en suis reconnaissant, le remercia Jungkook.

Un long silence suivit ensuite la prise de parole de Jungkook.

Alors, décidant de faire confiance à l'homme qui était assis en face de lui, Jungkook prit une grande inspiration et décida de raconter une partie de l'explication de ses mauvaises relations avec ses parents.

- Si ça ne vous dérange pas, est ce que je peux vous en parler maintenant ? questionna le brun.

- Non, bien sûr, vas-y ! Mais tu ne te forces pas, non ? Si tu ne veux pas m'en parler tu as le droit, tu sais, le rassura Taehyung.

- Non, non, ne vous inquiétez pas, je veux vous en parler. Donc, je... Enfin... Mes parents...

- Prends ton temps, Jungkook. Je suis là, je t'écoute, alors parle seulement quand tu es prêt.

Les paroles de Taehyung rassurèrent immédiatement Jungkook. Le châtain était si bienveillant avec lui, cela faisait longtemps que personne n'avait été aussi gentil avec lui. Alors, cette fois-ci avec détermination, il commença à tout expliquer à Taehyung.

- J'ai toujours eu une très bonne relation avec mes parents. On habitait tous les trois dans une petite maison, et dès que j'ai eu l'âge pour, je suis allé les aider pour travailler. On travaillait tous ensemble dans la maison d'une riche famille près de chez nous. Ma mère était femme de chambre, mon père jardinier, et moi, comme vous le savez, j'étais valet. Et puis, un jour, ils ont découvert quelque chose sur moi. Et ça ne leur a pas plu du tout. Je suis désolé, mais je ne peux pas vous dire ce que c'est, j'ai déjà trop souffert à cause de ça, lui expliqua Jungkook, d'une voix stressée.

- Je comprends, Jungkook, le calma Taehyung, tu fais ce que tu veux.

- Je crois que c'est à partir de ce jour qu'ils ne m'ont plus considéré comme leur fils. Ils ont dit que je n'étais pas normal, que j'étais une erreur de la nature. Et puis ils m'ont viré de chez moi.

Une larme solitaire coula sur la joue de Jungkook, qu'il essuya avec le dos de sa main. Il avait déjà assez pleuré aujourd'hui, il n'allait pas recommencer.

- Je me suis retrouvé seul, presque sans argent, dans la rue. J'étais terrifié, monsieur. J'ai réussi à me payer une chambre d'hôtel et de quoi manger, mais mes économies étaient très faibles, mes parents ne m'ont rien laissé garder. J'ai essayé de retrouver le plus rapidement un nouveau travail, mais c'est difficile de nos jours, se plaignit Jungkook. Et puis, au bout d'un moment, je n'ai plus eu d'argent, avoua le valet d'une voix honteuse – alors qu'il n'avait pourtant rien à se reprocher – et j'ai dû dormir une nuit dehors.

Taehyung était complètement affligé par ce que Jungkook lui racontait. Ce jeune homme, pourtant si adorable, avait vécu tant de choses à un si jeune âge. A côté de lui, Taehyung se sentait gâté par ce que la vie lui avait donné, alors qu'il avait lui aussi traversé des choses dont il préférait ne pas parler.

- Et puis, finit finalement Jungkook, j'ai trouvé un journal par terre et quelqu'un a bien voulu me lire votre annonce, à laquelle j'ai répondu tout de suite. Si je ne l'avais pas trouvée, je serais mort à l'heure qu'il est, ajouta-t-il avec un calme presque désarmant. Parfois, je me demande s'ils s'en veulent. Si le soir, avant de dormir, ils se demandent si leur fils est toujours en vie. Ou si ça ne les intéresse vraiment plus. Et je ne peux m'empêcher de me demander s'ils vont bien. J'ai peur qu'ils soient morts, et que je n'en sache jamais rien. Même après ce qu'ils m'ont fait, je ne peux m'abstenir de m'inquiéter pour eux.

Jungkook laissait parler son cœur. Il avait gardé tout cela pour lui-même pendant longtemps, et il avait besoin d'une oreille pour l'écouter.

- Je suis tellement désolé Jungkook, se lamenta Taehyung. Je te promets que plus rien de tout ça n'arrivera. Je te le jure, assura-t-il en plantant son regard dans celui de son valet.

Et puis, comme encouragé par ce que Jungkook lui avait dit, Taehyung décida lui aussi de parler de ce qui lui rongeait le cœur depuis si longtemps. Peut-être que cela le libèrerait du poids qu'il portait sur ses épaules depuis ce jour-là.

- Moi aussi, dit Taehyung.

- Vous aussi quoi, monsieur ? demanda Jungkook, n'ayant pas compris la précédente prise de parole de son patron.

- Moi aussi, je m'inquiète chaque jour pour quelqu'un de ma famille, commença-t-il à avouer.

- Comment ça ? questionna le valet, toujours aussi perdu.

- Je ne sais pas si on t'a mis au courant, mais j'ai un frère. Il s'appelle Seokjin, et il aura 27 ans cette année.

- Ah bon ? Mais il n'habite plus chez vous ?

- Non. Cela fait plus de 10 ans qu'il n'a pas passé le pas de la porte de notre maison, commença-t-il à expliquer. As-tu entendu parler de la guerre d'Autriche ?

- Je crois bien, oui, réfléchi Jungkook. Mais très peu, j'étais encore très jeune quand elle a commencé, et toujours adolescent lorsqu'elle s'est terminée.

- Mon frère a combattu là-bas. Il a été appelé au tout début de la guerre, et je ne l'ai plus jamais revu depuis.

- Oh... Je suis désolé, monsieur, le réconforta le domestique, touché par la douleur qu'exprimait son patron.

- Ne t'excuse pas. Un jour, peut-être un mois après son départ, nous avons reçu une lettre. Une simple lettre, tu te rends compte, Jungkook !

Jungkook opina de la tête pour la forme.

- Porté disparu. Voilà ce que disait la lettre. Mon frère était porté disparu. Et ni moi, ni personne, ne pouvait rien y faire. Au début j'étais incroyablement mal, j'ai pleuré pendant des jours et des jours. Et puis je me suis rendu compte de quelque chose. Mon frère, mon Seokjin, était simplement porté disparu, personne n'avait jamais dit qu'il était décédé. Chaque jour, j'ai l'espoir qu'il entrera dans cette maison. Qu'il arrivera avec son sourire en s'excusant de nous avoir inquiété pendant de si longues années.

Jungkook était désemparé. Son patron semblait y croire si fort qu'il ne voulait pas le blesser en lui disant que si Seokjin n'était pas rentré après toutes ces années, c'était probablement parce qu'il ne reviendrait jamais. Mais Taehyung semblait être complètement certain que son frère mettait simplement un peu plus de temps que prévu. Il ressemblait à un enfant qui avait tellement pensé à quelque chose qu'il avait fini par y croire.

- Tu sais, continua son employeur, Seokjin a toujours été très proche de moi. Comme tu as probablement pu le voir, je n'ai pas une très bonne relation avec mon père, et ce, depuis toujours. Mais Jin, lui, a toujours été adorable avec moi. Quand on était petits, il m'accompagnait souvent jouer dehors et plus que simplement mon grand frère, c'était aussi mon meilleur ami. Depuis qu'il est parti, je me sens complètement seul. Mais je suis certain qu'il reviendra bientôt.

Jungkook était obligé de briser ses rêves en éclats. Il ne pouvait pas le laisser croire ça. Le voir perdre un peu plus espoir chaque jour sans son frère, jusqu'à ce qu'il sombre entièrement dans la tristesse.

- Monsieur, commença prudemment le valet, je- enfin- je veux dire que...

- Qu'est ce qu'il y a Jungkook ?

- Si votre frère n'est pas rentré après toutes ces années, dit-il d'une à peine plus forte qu'un murmure, c'est probablement qu'il est...

- Qu'il est quoi ? demanda sèchement Taehyung.

- Mort.

Le mot résonna plusieurs secondes entre les deux jeunes hommes.

Et puis le visage de Taehyung se décomposa.

- Ne dit pas ça ! hurla-t-il à Jungkook.

Jungkook se leva et recula de plusieurs pas, surpris pas le ton de son patron. Il s'arrêta seulement quand il sentit le mur cogner contre son dos.

Le temps sembla s'arrêter, alors que leurs yeux ne se quittaient pas.

Et puis Taehyung éclata en sanglots.

- Ne dis pas ça, pleura-t-il, sa voix redevenue douce, ne sois pas comme mon père, je t'en conjure. Depuis le jour où l'on a reçu cette lettre, il n'a plus jamais prononcé son nom. Il a même changé sa chambre pour en faire son bureau. Il l'a complètement oublié.

- Vous ne pouvez pas lui en vouloir, monsieur, expliqua Jungkook. Si vous, votre manière d'accepter ça, est de faire comme si votre frère allait revenir, votre père a fait complètement l'inverse. En le bannissant complètement de son esprit, il voulait moins souffrir.

Les sanglots de Taehyung reprirent de plus belle.

- Je sais qu'il ne reviendra pas, Jungkook, mais j'ai tellement envie d'y croire, sanglota-t-il. Il me manque chaque jour un peu plus.

Jungkook, dans une tentative de réconfort, s'assit sur le canapé, à côté de Taehyung.

Et dans un élan de courage, il posa sa main sur la sienne.

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Bonjour !

Je vous retrouve aujourd'hui avec le chapitre 7, qui, je l'espère, vous a plu !

Pour vous donner quelques infos en plus : la guerre d'Autriche a bien existée, elle s'est déroulée entre 1740 et 1748. Cela signifie donc que Seokjin y est parti au tout début. Elle opposait la France (et ses alliés) et l'Autriche (et ses alliés aussi).

Il y a pas mal d'infos dans ce chapitre, mais j'espère que vous l'avez aimé quand même !

A mercredi ^^

Elsa