ix. jim
ix. jim
«- [...] et elles ont ajouté que tu étais une imbécile heureuse. C'est tout. »
Yin se leva en me jetant un regard de compassion. Déjà, venir me voir en commençant par «j'ai-cru-bon-venir-te-dire-que», ça n'allait pas m'intéresser. Pourquoi m'énerver pour quelques mots? De toute manière, ces filles allaient le regretter, un jour ou l'autre. Je n'étais pas Gemma Barns.
J'étais pire.
Et anonyme.
Je m'appelle Himalaya. Mon prénom vient du fait que j'étais censée avoir un frère aîné mais il était mort, à ses deux ans. Ouais, je ne l'avais pas connu.
Il s'appelait Everest.
Mes parents, deux alpinistes doués s'étaient rencontrés lorsqu'ils avaient montés le mont Everest. Rien de moins. Voilà, maintenant si vous n'arrivez pas à remonter à l'origine de nos prénoms, à mon frère et moi, ce n'est plus mon problème.
Bref, revenons-en aux filles qui vont en baver dans quelques temps. La dernière fois qu'une fille avait osé m'insulter dans mon dos, la-dite fille avait perdu contrôle de son compte Facebook; étrangement. Si, encore une fois, vous avez de la difficulté à faire le lien entre la fille et moi, ce n'est plus mon problème.
J'étais douée dans l'informatique, ou plutôt dans le hack. Le piratage.
Je n'aimais pas nécessairement faire du mal aux autres, mais j'avais le défaut de toujours vouloir dire le dernier mot. Défaut qui aurait souvent pu me poser d'énormes problèmes. Heureusement, rien.
En tout cas, à défaut d'avoir un désir de vengeance constant, j'étais une fille bien simple. J'aimais jouer dans le gazon avec Mag, de son petit nom. Mag, diminutif de Magritte, était mon chiot. Mes deux vieux ayant un goût prononcer pour l'art et mon père étant peintre, j'avais grandie avec des tableaux allant du Picasso au Dalí, d'un bout à l'autre de la maison. Mon favori était un de Magritte, celui de deux amoureux s'embrassant, leur visages cachés par un drap. Il était affiché à deux endroits; dans ma chambre et dans le hall d'entrée. Je n'aurais su dire pourquoi cette peinture me passionnait autant, ce n'était pourtant pas la Joconde ou les vingts-quatre tableaux composant humblement Le Cycle de Marie de Médicis. Je m'y connaissais en art, mais pour une fille comme moi, ça me paraissait naturel.
J'étais moi-même.
J'étais qui j'étais, je pensais que j'étais moi-même donc je l'étais. Je pense donc je suis, contrairement à l'horrible Jim. Mon ex-meilleur ami.
Jim était, depuis ma tendre enfance, un petit garçon exceptionnel. Je l'avais rencontré au CPE, quand on mangeait encore du tofu sans dégueuler. Ouais, nos parents bios sans qu'on s'en rendre vraiment compte; sans qu'on aie déjà développés nos goûts. En même temps, je les remerciais intérieurement de me laisser manger ce que je voulais, maintenant.
Jim avait toujours été passionné par les poèmes. Il aimait, quand nous eûmes 8 ans, écrire ses propres poèmes, s'efforçant à essayer de les faire rimer. Il m'en avait écrit des dizaines, tous enfermés dans une boîte au motif fleuri cachée sous mon lit. Jim aimait véritablement écrire ses vers, sur du beau papier parchemin «jauni», comme il disait.
Quand nous avons débuté le lycée, il s'est rendu compte que l'école avait créer une machine de triage géante.
Les populaires, les tronches, les bad-boys, les meufs trop maquillées, les sportifs, les hipsters, les drogués, les geeks, les rejets et moi.
J'avais eu le droit à ma classe à part.
Et j'aimais bien être unique comme ça.
Sauf que Jim, lui, n'avait pas aimé être classé avec moi. Il avait arrêter d'écrire ses poèmes. Il avait arrêter de lire de gros romans, avec de belles phrases. Il avait arrêter d'être Jim, et de m'aimer.
Jim m'avait laisser seule, comme un vieux bout de tissu.
Il m'avait abandonné.
Dans la classe, je le voyais gribouillé des bouts de vers et entremêler des rimes complexes sur un coin de cahier, mais aussitôt fini, il effaçait, regardait autour pour s'assurer que personne ne l'avait aperçut et continuait à marmonner avec son voisin de table.
Jim était devenu un miroir, reflétant ce que les gens voulaient voir, disant ce qu'ils voulaient entendre.
Jim était devenu populaire, sportif, un vrai garçon; tombeur, charmeur. Une douzaine de filles traînant à ses côtés, gloussants à chacune de ses remarques.
Jim était devenu qu'un miroir cassé, sans originalité.
Et moi,
j'étais restée Himalaya.
***
Hey!
Alors voilà, on parle ici de Jim. Sincèrement, j'ai créé Jim, m'inspirant de la plupart des gens d'aujourd'hui et, vis-à-vis Himalaya, Jim reflète beaucoup l'image d'un cliché pourtant réel et omniprésent. Aussi, bonne nouvelle du jour, j'ai obtenu un 97% sur une légende que j'ai écrite. Je suis super fière!
Bonne lecture!
Lou xx
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