Avenir Incertain

J'avoue que je ne sais pas pourquoi j'écris ça. Je ne sais même pas si je vais le mettre en ligne. Enfin, si vous lisez ces lignes c'est que j'ai finalement décider de le publier. Je ne sais même pas s'il y aura des gens qui vont lire, peut-être pas. Peut-être que je pousse un cri dans le vide qui aura comme unique réponse que son écho. Ou peut-être que je suis sur le point d'écrire le nouveau texte qui va secouer le monde entier, que l'on va entendre jusque dans les journaux télévisés. Bon, je m'emballe un peu.

Bref, je m'appelle Chloé, j'ai 19 ans et j'ai peur.

Non, je n'ai pas peur du monstre sous mon lit la nuit ou d'un quelconque individu. J'ai peur pour mon avenir. Depuis le collège j'avais une idée bien précise des études que je voulais faire, du métier que je voulais avoir, mais une fois arrivée en terminale, on a piétiné mes rêves. On m'a dit qu'avec mes résultats ça serait dommage de partir en BTS et de ne pas exploiter ces capacités dans une licence et que, de toute façon, avec la filière que j'avais emprunté, mon choix était tout bonnement irréalisable. Mes parents ont, malgré tout, continué à m'encourager dans la voie de mes rêves, en dépit de ce qu'en disaient les profs. Mais j'ai paniqué. Me voilà, à 17 ans, devant un énorme dilemme, ne sachant pas si mon instituteur avait raison ou si j'allais réussir avec brio dans cette voie. Je me retrouve donc comme face à un vide immense. Allais-je avoir le courage de sauter ? Non. J'ai préféré écouter les enseignants et partir en fac.

Et si nous sommes nombreux à avoir été déçus de constater que le lycée n'avait rien à voir avec celui des Totally Spies, il en est de même pour l'université. Pas de monsieur Keating, encore moins de Robin Williams, pour monter sur les tables et s'écrier « Ô Capitaine ! Mon Capitaine ». Seule la triste fin de Neil semble, malheureusement, représenter la réalité.

Au lieu d'une vie digne de films, me voilà comme prise au piège à osciller entre les transports en commun, les cours en amphithéâtre où je peine à me concentrer, les devoirs de groupe où l'on se retrouve trop souvent deux à tout faire, les chargés de TD ou les maîtres de conférence qui n'en ont que faire de nous et qui se contentent de lire des feuilles. Bien sûr il y a aussi les bons côtés : les supers rencontres, les fous rires, les cours intéressants et captivants, les présentations orales, certes stressantes, mais envoûtant de temps à autres les professeurs. Les bons côtés auraient pu l'emporter, si seulement c'était la voie que je voulais véritablement faire. Alors, avant même la fin du premier semestre, j'ai décidé d'abandonner. Que vais-je faire jusqu'à la rentrée de septembre ?

De décembre à janvier, les fêtes de fin d'année monopolisent tout mon temps. Puis de janvier à mars, je me retrouve à chercher du travail sans trop de convictions. Mais vient un premier événement qui chamboule absolument tout : le premier confinement. Je me focalise alors un peu plus sur la suite de mes études. Reprenons cette idée de BTS. Pas le même que celui rêvé au collège mais ce n'est pas grave. Bonne nouvelle fin mai : J'ai une école ! L'école que je voulais m'accepte, c'est super ! Reste plus qu'à trouver un patron, pas une mince affaire.

« D'habitude on prend, mais avec le COVID, vous comprenez, c'est difficile. »

« -Les BTS, ils ont un salaire ?

-Oui.

-Alors non, je ne prends pas. » (Oui, on m'a réellement dit ça.)

« Vous savez, avec le coronavirus, on ne sait pas où on en sera à la rentrée alors on ne peut pas se permettre de prendre un apprenti. »

« Désolé, nous avons déjà quelqu'un. »

« Non. »

Refus sur refus, je commence à désespérer, sans compter ceux qui me font espérer jusqu'à la dernière minute. Finalement, après une bonne centaine d'entreprises visitées, je ne reçois aucune réponse positive. Mais ce n'est pas grave, l'école propose tout de même de nous prendre même si on n'a pas de patrons et ce jusqu'en février ! Ah, sauf que ce n'est pas gratuit, plus de 500e par mois, autant dire que je ne peux pas me le permettre.

L'argent un grand problème aussi. On parle beaucoup des jeunes boursiers qui essayent de s'en sortir dans des chambres vétustes du CROUS, ou des jeunes riches qui peuvent prétendre à toutes les études qu'ils veulent tant qu'ils payent. Mais on parle assez peu des jeunes comme moi avec des parents trop riches pour prétendre à une bourse, mais pas assez pour être en mesure de payer un appartement à Lyon.

Bon et bien retour à la case départ : recherche d'emploi. En septembre j'ai eu une place à l'usine, rien de bien glorieux mais il n'y a pas de sots métiers après tout ! Au moins, le salaire me permet de payer ma voiture et de mettre beaucoup de côté. J'en profite tant que je suis chez mes parents et que je n'ai pas de dépenses. Mais voilà, 2021 vient de débuter, je me dis donc qu'il faut que je recommence mes recherches pour mes études. J'aime bien ce que je fais actuellement mais je n'aspire pas à la faire toute ma vie. J'ouvre alors internet et cherche des tests d'orientation mais aucun ne me convient, même pas celui de l'Onisep ; comment ça je devrais faire un choix entre Kennedy et Marilyn Monroe ?! L'un ayant marqué à jamais l'histoire des États-Unis par ses décisions et l'autre étant une icône du cinéma, impossible de faire un choix !

Bon alors que me dicte mon cœur ? Quel métier serait idéal ? C'est simple, un métier qui ferait appelle à ma créativité (mais surtout pas à ma capacité à dessiner sous peine de donner lieu à une véritable catastrophe), qui me permettrait de visiter le monde, de fuir la routine et que je pourrais exercer un peu n'importe où. Bon, ce n'est peut-être pas si simple que ça. J'ai bien pensé au journalisme, mais qu'est-ce que ça à l'air compliqué ! Seulement 14 écoles de journalisme reconnues en France ?! Jamais je ne pourrai y accéder, je pourrai essayer, il est vrai, mais avec peu d'espoirs d'y arriver. Bien évidemment le métier rêvé, comme une grande partie d'utilisateurs de cette plate-forme, est auteure.

Depuis toute petite j'écris. J'écrivais même avant de savoir écrire ! Je dictais mes histoires à ma sœur qui les couchait sur papier pour moi. J'ai toujours adoré raconter des histoires. Mais est-ce que les autres aiment les écouter ? J'ai bien un projet terminé depuis quelques mois maintenant. Il attend que je le corrige. Au début je disais que je préférais prendre du recul sur ce que j'avais fait avant de le relire. À l'heure actuelle, j'ai dû prendre tellement de recul que je dois me retrouver au Japon ! Je ne sais même pas pourquoi je n'ouvre pas ce roman endormi depuis un petit moment maintenant. Est-ce la peur de relire les premières pages et de me rendre compte que c'est complètement nul, qui me retient ? Ou bien la peur de le trouver génial mais de ne jamais réussir à le faire publier ? Toutes les personnes qui l'ont lu l'ont trouvé super, palpitant et captivant, mais il s'agit de membres de ma famille, ils ne sont probablement pas complètement objectifs.

Dans tous les cas, cette peur de l'échec me ronge. Et puis, à quoi bon se casser la tête d'essayer de faire de grandes études quand on a eu de cesse de nous répéter que de toutes façons, le bac ne sert plus à rien et que même avec un master, il ne faut pas espérer aspirer à quelque chose de grandiose. Que la plupart des métiers de 2030 n'existent même pas encore. Que la planète sur laquelle nous vivons se meurt petit à petit et que nous ne pouvons plus rien y faire. Lorsque je regarde autour de moi, notamment en ce début d'année 2021, je vois le positif s'éloigner de plus en plus, à mesure que mon innocence d'enfant disparaît. Est-ce donc à cela que nous sommes voués ? À devenir des robots bons à faire de longues études histoire d'être bien formatés pour finir par travailler dans des entreprises où nous devrons toujours et encore obéir à un supérieur qui ne voit que son chiffre d'affaire avant de rentrer à la maison où nous nous poserons devant les informations à avaler toujours plus de mauvaises nouvelles.

Non. Je refuse de penser que c'est l'avenir qui m'attend ! Cependant les choses demeurent les mêmes après ces quelques pages : je m'appelle Chloé, j'ai 19 ans et j'ai peur. 

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