Chapitre 87

Le lendemain...

Jonathan – 16:13 : Je suis désolé, Nelly... je n'ai pas réfléchi. J'avais besoin de toi. Je t'aime. Je ne veux pas te perdre. Pardonne-moi !

Jonathan – 18:56 : Mon avion partira le 23 novembre, en fin de journée. Je ne t'ennuierai plus. Pardonne-moi.

Jonathan – 00:09 : Je n'arrête pas de penser à toi. Je me demande si notre relation est du passé. Après tout ce que nous avons traversé, je n'ose y croire. Je t'écris alors que je n'ai rien d'exceptionnel à t'écrire, tu me manques... Je ferme les yeux histoire d'oublier ton absence... mais je n'arrive pas à dormir.

Jonathan – 08:37 : As-tu réussi à dormir ? Moi, si peu... tu envahis mes pensées, et, pourtant, cette idée n'a rien de désagréable. Je n'arrive pas à m'imaginer sans toi. Je crois que je n'ai jamais été capable de le faire...

Nelly, les yeux cernés par la fatigue émotionnelle, fixe l'écran de son téléphone. Les mots de Jonathan défilent sous ses yeux, chaque phrase résonnant comme une onde qui ébranle ses défenses. Elle pourrait le bloquer, effacer les messages, mais elle n'en fait rien. Elle est là, immobile, figée entre le passé et le présent. Une partie d'elle veut répondre, veut lui dire qu'elle l'aime encore, qu'elle l'a toujours aimé. Mais une autre partie... une partie plus sombre, plus terrifiée, la retient. Cette peur viscérale de souffrir à nouveau la maintient silencieuse. Elle est seule dans la maison. Bertrand n'est toujours pas rentré. Les murs semblent se refermer sur elle, et chaque minute passée à lire les messages de Jonathan la plonge dans un abîme de confusion.

Elle craque. En un instant, elle attrape son téléphone, ses doigts tremblants en composant le numéro de Leticia, sa meilleure amie. Elle a besoin de parler, de vider son cœur. Leticia décroche après quelques sonneries, et dès qu'elle entend la voix cassée de Nelly, elle sait que quelque chose ne va pas. Alors elle accourt et en quelques minutes elle retrouve Nel chez elle.

Là, Nelly lui explique tout, les messages, le retour inattendu de Jonathan dans sa vie, et l'effet dévastateur que cela a sur elle.

— Et tu ne lui réponds pas ? demande Leticia, la voix troublée, presque inquiète, en écoutant son amie raconter les détails avec une détresse palpable.

Nelly se mord la lèvre, son regard se perdant dans le vide. Elle sent une boule se former dans sa gorge, une douleur lancinante qu'elle tente de repousser depuis des jours. Elle secoue doucement la tête, ses lèvres serrées pour contenir ses sanglots. Comment pourrait-elle répondre ? Comment pourrait-elle avouer ce qu'elle ressent vraiment, alors qu'elle-même est perdue dans ce tumulte d'émotions contradictoires ?

Elle sait qu'elle l'aime. Elle n'a jamais cessé de l'aimer. Mais l'idée de se laisser à nouveau entraîner dans cette histoire, de s'ouvrir à lui après tant de blessures... c'est tout simplement trop.

— Mais tu l'aimes ! insiste Leticia, la voix plus ferme cette fois, comme pour la forcer à affronter cette vérité qu'elle ne veut pas admettre.

C'est cette phrase qui brise ses dernières résistances. Nelly éclate en sanglots, ses épaules secouées par des spasmes qu'elle ne peut plus contenir. Elle cache son visage dans ses mains, sentant le poids des treize dernières années s'abattre sur elle comme une tempête qu'elle a si longtemps contenue. Elle est amoureuse de Jonathan, c'est un fait. Depuis le tout début. Treize longues années où elle a vécu dans cette ombre, tentant de l'oublier, de faire son deuil comme une veuve qui aurait perdu son époux. Sauf qu'ici, il n'est jamais vraiment mort.

Il est là, quelque part dans cette ville, à attendre un signe d'elle, à espérer un pardon qu'elle n'est pas encore prête à lui accorder.

— Nel, tu ne peux pas continuer comme ça, souffle Leticia, sa voix plus douce, plus compatissante maintenant. Je sais que tu souffres, mais rester enfermée dans cette douleur ne te mènera nulle part.

Nelly hoche la tête sans conviction. Elle est épuisée. La bataille entre son cœur et sa raison fait rage en elle. Chaque message de Jonathan la ramène à un passé qu'elle croyait avoir enterré, mais qui revient sans cesse, comme une vague qui n'en finit pas de frapper la côte.

— Je sais que Maddy ne l'approuve pas, poursuit Leticia, faisant référence à la sœur de Nel, plus protectrice. Mais elle ne le connaît pas...

— Toi, si, peut-être ?

La voix de Nelly tremble à peine, mais la tension est palpable. Elle se recroqueville légèrement sur elle-même, comme si la conversation avec Leticia mettait à nu ses plus grandes peurs. Elle fixe le sol, incapable de soutenir le regard de son amie.

— Non, effectivement... mais toi, Nelly, tu le connais, non ?

Leticia s'approche d'elle, sa voix douce mais ferme, cherchant à percer la brume de confusion dans laquelle Nelly semble s'enliser.

— Tu penses qu'il te ment ?

Nelly lève lentement les yeux. Un flot de souvenirs la traverse : Jonathan, son sourire, leurs moments volés, ses promesses, mais aussi ses erreurs. Tout cela défile dans son esprit en un instant.

— Non... murmure-t-elle, presque honteuse d'admettre la vérité. Non, elle ne croit pas qu'il lui ment. Il a toujours été honnête, même quand cela faisait mal.

Leticia, encourageant cette ouverture, pose une main réconfortante sur le bras de son amie.

— Alors, qu'est-ce que tu attends ?

Cette question résonne lourdement. Nelly ferme les yeux, sentant le poids de ses choix passés et futurs peser sur elle. Que peut-elle bien attendre ? Jonathan lui a dit qu'il l'aimait. Il a annulé son mariage pour elle. Et pourtant, elle hésite encore.

— C'est trop tard... lâche-t-elle enfin, la gorge nouée. Il va devenir père. Même si son mariage est annulé, ce n'est qu'une question de temps avant que...

Elle s'interrompt, incapable de prononcer ces mots qui la hantent.

—De mon côté, il y a Bertrand, ma famille, ma vie... Je suis en train de tout détruire pour rien !

Sa voix se brise sous le poids de ses propres dilemmes. Les larmes roulent silencieusement sur ses joues, témoins de la lutte intérieure qu'elle ne parvient plus à contenir. Elle s'agrippe au coussin sur ses genoux, comme si c'était la seule chose qui la maintenait à flot. Leticia la regarde avec une infinie tendresse, consciente que les mots ne suffiront peut-être pas à apaiser cette tempête émotionnelle. Mais elle tente tout de même, sa voix douce comme un baume sur les blessures de son amie.

— Oh, ma chérie... est-ce vraiment ce que tu penses ?

Nelly baisse la tête, ses épaules secouées de sanglots, trop fatiguée pour répondre. Elle ne sait plus ce qu'elle pense. Tout se mélange dans son esprit : ses sentiments pour Jonathan, son devoir envers Bertrand, l'enfant qu'il va avoir avec une autre. Elle est prise dans un tourbillon d'incertitudes qui l'étouffe peu à peu.

— Je ne sais plus ce que je pense... avoue-t-elle enfin, sa voix à peine un souffle. Les mots sont douloureux à prononcer, mais elle ne peut plus faire semblant. Je suis perdue, Leti...

Les larmes redoublent, et Nelly s'effondre complètement dans les bras de son amie, laissant sa douleur éclater sans retenue. Leticia ne sait plus comment agir pour soulager sa souffrance. Elle la serre contre elle, la berçant doucement, essayant de lui offrir le peu de réconfort qu'elle peut.

Dans un coin de la pièce, Louis observe la scène, silencieux. Le petit garçon, dans son parc, a arrêté de jouer, un cube coloré suspendu dans sa petite main. Il regarde sa mère avec une curiosité mêlée d'incompréhension. Leticia, apercevant l'enfant, sourit doucement, son cœur se serrant pour Nelly.

— Hé, mon bonhomme ! l'appelle-t-elle avec tendresse, sa voix plus joyeuse pour apaiser l'atmosphère. Tu veux voir maman ?

Louis tend ses bras vers Leticia, ses grands yeux innocents remplis d'attente. Elle se lève du canapé et s'approche du parc, ses pas légers, comme si elle ne voulait pas briser cet instant délicat entre Nelly et sa peine. Elle attrape doucement le petit garçon et le serre contre elle. Le contact du petit corps chaud dans ses bras lui rappelle l'importance de la vie qui continue, malgré tout. Elle le porte vers sa mère, et lui murmure quelques mots doux à l'oreille pour le rassurer.

— Viens voir maman, mon trésor... dit-elle en déposant Louis sur les genoux de Nelly.

Nelly, en dépit de ses larmes, esquisse un faible sourire en voyant son fils. Le regard innocent de Louis, ses petits bras qui la cherchent, apportent un réconfort inattendu. Elle l'embrasse sur la tête, inhalant son odeur de bébé qui l'ancre un peu plus dans le présent.

— Tu vois... tout n'est pas noir dans ta vie, murmure Leticia en se rasseyant à ses côtés. Tu as aussi ce petit être de lumière.

Nelly regarde son fils, les doigts de l'enfant jouant avec une mèche de ses cheveux. Un sourire doux mais triste étire ses lèvres. Elle sait que Leticia a raison. Louis est sa lumière, sa raison de continuer, malgré la tourmente qui déchire son cœur.

Mais cela ne change pas la confusion qu'elle ressent, ni les sentiments conflictuels qui la dévorent.

— Je sais, dit-elle enfin, en caressant tendrement les boucles de son fils. Mais parfois, même la lumière ne suffit pas à dissiper l'obscurité.

Leticia soupire doucement, attristée par les tourments de son amie. Elle aurait tant voulu avoir les mots magiques, ceux qui pourraient effacer toute cette douleur. Mais l'amour est complexe, et les choix que Nelly doit faire, personne ne peut les faire à sa place.

— Il est revenu, Nel. Il est revenu pour toi. Et tu comptes vraiment l'ignorer ? Tu comptes rester malheureuse, à le fuir toute ta vie ? Leticia marque une pause, comme pour lui laisser le temps de réfléchir. Je sais que c'est effrayant, mais parfois, il faut affronter ce qui nous fait peur pour pouvoir enfin être libre.

Les larmes de Nelly coulent encore, mais ses sanglots se calment peu à peu. Elle sait que Leticia a raison. Tout en elle hurle de le rejoindre, de répondre à ses messages, de se jeter dans ses bras comme si le temps n'avait jamais passé. Mais elle est paralysée par la peur. Peur de souffrir à nouveau, peur de revivre ce qu'elle a déjà traversé. Peur de s'abandonner à lui et d'être à nouveau brisée. Peur de Bertrand...

— Qu'est-ce que je dois faire, Leti ? demande-t-elle dans un souffle, perdue, vulnérable. Je... je ne sais pas comment lui faire face.

Leticia, de l'autre côté de la ligne, reste silencieuse un instant. Elle comprend la douleur de son amie, mais elle sait aussi que parfois, l'amour mérite qu'on prenne des risques.

— Tu sais ce que tu ressens, Nel, lui répond-elle finalement, sa voix douce mais ferme. La question n'est pas de savoir ce que tu dois faire. La vraie question, c'est : es-tu prête à affronter ce que tu ressens vraiment ?

Nelly laisse cette question planer dans l'air. Les battements de son cœur s'accélèrent à l'idée de se confronter à cette vérité, mais elle sait qu'elle ne pourra pas continuer à fuir indéfiniment.

— Quoi que tu décides, je serai toujours là pour toi, lui promet Leticia, sa voix empreinte d'une sincérité profonde. Mais tu dois te demander ce que tu veux vraiment. Pour toi. Pas pour Jonathan, pas pour Bertrand... mais pour toi.

Nelly acquiesce silencieusement, ses doigts continuant de jouer machinalement dans les cheveux de son fils. Elle sait qu'elle devra affronter cette décision tôt ou tard. Mais pour l'instant, tout ce qu'elle veut, c'est un instant de paix, un instant de répit dans ce tourbillon d'émotions qui menace de l'engloutir. Elle serre Louis un peu plus fort contre elle, comme pour se rappeler qu'il y a encore des raisons de tenir, des raisons de se battre.

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