Chapitre 8 - Jonas
Chez Jonas, tout semblait s'enchaîner avec une rapidité écrasante. Les événements s'étaient précipités sans qu'il ne puisse reprendre son souffle. En descendant la côte menant à sa villa, il avait immédiatement aperçu les paparazzis qui l'attendaient comme des prédateurs affamés. Leurs objectifs braqués sur lui, prêts à saisir chaque geste, chaque expression. Dès qu'il avait tourné le coin, les flashs s'étaient mis à crépiter en rafale, aveuglants, intenses, comme s'ils voulaient percer la moindre parcelle de son intimité.
Il se souvient encore de leurs cris assourdissants, des questions hurlées, toutes centrées sur son prochain voyage en France. Aucun répit, aucun espace pour respirer. Il avait franchi le portail de sa villa en se sentant traqué, comme un animal encerclé par une meute. Une grimace de dégoût s'était peinte sur son visage alors qu'il montait les marches de son perron, le son des voix des journalistes encore résonnant à ses oreilles, comme une vague qui refusait de se retirer.
Une fois à l'intérieur, il referme la porte derrière lui, mais ce n'est qu'un bref soulagement. Même chez lui, il ne trouve pas la paix. Il sait pertinemment que ce chaos médiatique le poursuivra jusqu'en France. Son pays natal, autrefois un refuge, semble désormais une nouvelle arène où les curieux, les fans et les tabloïds vont l'attendre de pied ferme.
— Écoute, Yan, commence Jonas en se tournant vers son manager, l'agacement perçant dans sa voix, ne peut-on pas juste reporter ce voyage ?
Ses mots sont teintés de désespoir et de frustration, un mélange de peur et de colère qu'il tente de masquer, en vain. Je vais mieux... mais je n'ai pas envie de... d'affronter ça !
L'asiatique, toujours pragmatique, reste impassible. Il connaît Jonas depuis longtemps, suffisamment pour anticiper ses réticences.
— Tu n'es pas prêt à revenir sous les feux des projecteurs, dit-il d'un ton posé mais ferme, comme un rappel autoritaire.
Mais Jonas n'en peut plus de cette retenue forcée, de cette attente d'une reprise contrôlée.
— Mais tu m'envoies à l'abattoir ! réplique Jonas avec une pointe de panique.
Son visage se contracte alors qu'il s'imagine déjà les foules, les caméras, les murmures incessants.
— Tout le monde sait où je vais me rendre... et c'est une petite ville ! continue-t-il en haussant le ton, ses yeux s'embrasant de colère.
Yan, imperturbable, croise les bras sur sa poitrine, prêt à affronter la tempête.
— Oui, mais ils ont interdiction de te rencontrer avant le troisième mois de ton intervention là-bas, explique-t-il, avec un calme qui exaspère encore plus Jonas.
Jonas secoue la tête, incrédule.
— Et tu penses vraiment qu'ils vont respecter ça ? siffle-t-il, son ton est plein de sarcasme, son regard brûlant d'un mépris à peine voilé.
Il se passe une main nerveuse dans ses cheveux, cherchant désespérément un échappatoire à cette situation. Yan reste stoïque, mais un léger soupir échappe à ses lèvres.
— Oui, Jo.
Simple, presque détaché. Un mot, une réponse brève qui ne fait qu'attiser la fureur de Jonas.
— Mais, mon pauvre, tu vis chez les Bisounours ! lâche Jonas, presque avec un rire amer.
Ses mains tremblent légèrement, mais c'est l'adrénaline, la frustration. Il ne supporte plus cette mascarade, cette bulle étouffante où chaque décision semble lui échapper. L'asiatique tente de rester calme, mais il sent la situation lui glisser des mains.
— Jo... commence-t-il, essayant de désamorcer la situation, mais Jonas l'interrompt, sa voix tremblante de rage et de dégoût.
— On parle de paparazzi, Yan ! crie Jonas, son visage rougi par la colère. Ces hyènes sont capables du pire ! poursuit-il en se rapprochant de son manager, le regard perçant, comme pour lui faire comprendre l'étendue de sa crainte. Ils se moquent de tes interdictions, de tes lois, de ta bienséance ! Ils veulent du sang, des scandales... ils vivent pour ça ! crache-t-il, sa voix se brisant sous le poids de ses émotions.
Ne tenant plus, Jonas tourne les talons, traversant le salon en quelques pas rapides, et claque violemment la porte de la salle de bains. Le bruit résonne dans toute la maison, marquant la fin brutale de la conversation.
Yan reste figé, de l'autre côté de la porte. Il sait qu'il a touché un point sensible, mais il est aussi convaincu que Jonas doit traverser cette étape. Pourtant, il sent la frustration monter en lui. Jonas est obstiné, mais Yan ne peut pas se permettre de le laisser reculer maintenant. Il soupire longuement, passant une main nerveuse dans ses cheveux, essayant de maîtriser l'irritation qui commence à poindre.
Dans la salle de bains, Jonas se dévêt en silence, chacun de ses gestes plus brusque que le précédent. Il allume l'eau de la douche, et le jet froid sur sa peau l'arrache à sa rage. L'eau coule le long de son dos, apaisant légèrement l'incendie qui brûle en lui, mais pas assez pour éteindre totalement les flammes.
Les appels de Yan résonnent derrière la porte, mais Jonas les ignore volontairement, sa mâchoire serrée sous l'eau. Il a besoin de ce moment, de cet isolement. Habituellement, le jet d'eau suffit à calmer ses tourments, à apaiser cette tempête intérieure, mais aujourd'hui... la pression est trop forte. Ses mains, posées contre le carrelage froid, tremblent encore. Il ne sait plus quoi penser, ni comment affronter ce retour forcé en France. Les paparazzis, la célébrité, cette vie qu'il pensait avoir fuie... tout revient à la charge.
Mais au fond de lui, il sait que Yan a raison. Il doit faire face, à la fois à la célébrité et à ses propres démons, même si cela signifie retourner sur le devant de la scène. Pourtant, la peur reste là, collée à sa peau comme une ombre, inévitable et menaçante.
Après une bonne demi-heure sous le jet d'eau brûlant, Jonas émerge enfin, l'esprit apaisé mais le cœur encore lourd. Il sort de la salle de bains, enveloppé d'un nuage de buée, sa peau rougie par la chaleur. La vapeur s'échappe derrière lui, créant un contraste étrange avec l'atmosphère tendue du salon. La chaleur de l'eau, qu'il avait pourtant trouvée apaisante, devient soudain presque insupportable, comme un poids supplémentaire à porter.
Yan est toujours là, assis dans le fauteuil en face, le visage marqué par l'inquiétude. Il n'a pas bougé d'un pouce, ses yeux fixés sur la porte, attendant patiemment que Jonas se calme. L'air est lourd, imprégné d'une tension palpable. Lorsque Jonas apparaît, Yan se redresse légèrement.
— Ça va mieux ? demande-t-il, d'un ton plus doux que d'habitude, presque hésitant.
— Ouais... répond Jonas d'une voix rauque, sans vraiment y croire.
Il parcourt le salon, les traits tirés par la fatigue, ses épaules affaissées comme si le poids du monde reposait sur elles. Il ne jette même pas un regard à Yan, toujours assis, l'air soucieux. Sans un mot de plus, Jonas se dirige vers la cuisine, ses pieds glissant légèrement sur le sol humide.
Il ouvre le frigo d'un geste brusque et en sort une bouteille d'eau glacée. Le froid mordant du verre contre ses doigts est un contraste bienvenu avec la chaleur étouffante qui l'entoure encore. Il verse l'eau dans un verre, puis prend une longue gorgée, sentant le liquide glacial descendre dans sa gorge et apaiser la tension qui continue de le ronger de l'intérieur.
— Jo ? reprend Yan, en insistant un peu plus cette fois.
Le silence de Jonas commence à l'inquiéter davantage.
— Hmm.
Un simple grognement en réponse. Jonas n'a pas envie de parler, pas envie d'affronter à nouveau ce sujet qui le met tellement en difficulté.
Yan se lève alors, se rapprochant doucement de lui, sans forcer le contact, mais déterminé à faire passer son message. Il sait que ce voyage est nécessaire. Il sait aussi que Jonas se sent piégé, et cela le ronge. Mais les enjeux sont trop importants.
— C'est important que tu te rendes là-bas... dit Yan, la voix plus ferme, comme pour rappeler à Jonas que ce n'est pas qu'une simple formalité.
Jonas pose son verre sur le comptoir, son regard se perd dans le vide. Il le sait, bien sûr. Tout au fond de lui, il sait que ce voyage est incontournable. Mais cela n'en rend pas l'idée moins douloureuse.
— Je sais, murmure-t-il enfin, d'une voix presque inaudible.
L'asiatique, voyant une brèche, continue doucement mais sûrement.
— Je t'ai réservé un bon hôtel, commence-t-il, et tu auras un chauffeur privé, précise-t-il avec insistance, qui assurera également ta sécurité.
Il ajoute cette dernière partie avec un ton rassurant, espérant apaiser les craintes de son poulain. Jonas sourit, un sourire amer.
— Rien que ça, lâche-t-il avec une pointe d'ironie.
Le luxe, la sécurité, tout cet apparat... Cela ne lui parle plus. Ce n'est plus ce qui l'anime. Yan, exaspéré, lève les yeux au ciel.
— Jonas ! C'était ton rêve, le cinéma... cette vie ! insiste-t-il, presque désespéré de le voir douter de tout ce qu'il a bâti.
— Oui et non...
Jonas soupire profondément, ses épaules s'affaissant un peu plus.
— Je... C'est plus complexe que ça.
Il se passe une main nerveuse dans les cheveux, ses pensées s'embrouillant.
— Ce que je voulais, à l'origine, c'était autre chose...
L'asiatique fronce les sourcils, intrigué.
— Bah, explique-toi !
Son ton est pressant, mais Jonas sent bien que son ami est prêt à écouter, à comprendre ce qu'il n'a peut-être jamais vraiment partagé. Jonas tourne enfin les yeux vers Yan, et une ombre de tristesse traverse son regard.
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