🌼 CHAPITRE 56 🌼

- Alors épousez-moi. Ici et maintenant, épousez-moi.

Pour beaucoup, cela aurait pu paraître pour des mots précipités, dit à la hâte dans une situation paraissant désespérée et pourtant Joséphine y pensa chaque mot. Il n'y avait rien de plus important présentement pour elle que cette folle proposition car après tout, toute sa vie n'avait été que folie alors qu'est-ce que cela pouvait-il changer ? Cela faisait maintenant des mois qu'elle avait coupé l'herbe sous le pied à Jonah et lui avait demandé de l'épouser. Des mois qu'ils étaient tous deux dans une sorte d'entre-deux dans lequel aucun d'eux ne savait quoi dire ou quoi faire. Le mariage ? Cela n'était pour elle qu'une étape de plus à franchir. Une étape. Quand elle y pensa, elle se mise soudainement à rire aux éclats. Il n'y avait rien de conventionnel dans ce qu'elle venait de faire, ni même de très féminin car en temps normal, c'est à la jeune femme d'attendre que l'homme fasse le premier pas. Mais cela se saurait si Joséphine était une jeune femme comme une autre et cela se saurait si l'une ne pouvait changer les traditions trop vieilles et trop obsolètes d'une société visiblement dépassée par le changement approchant. Il n'y avait rien qui pouvait interdire à une femme de demander la main d'un homme et quand bien même un obstacle existerait, Joséphine le franchirait. Elle était déterminée à aller jusqu'au bout de sa démarche et faire de cet homme...le sien.

- Par quoi commençons ? reprit-elle tout sourire

- Êtes-vous seulement sérieuse ? Vous voulez que nous fassions cela ici et maintenant ?

- Ai-je un jour manqué de sérieux, Votre Excellence ? bouda Joséphine, Après tout ce temps, cela me vexerait presque.

- Non, nullement, c'est juste que...bafouilla-t-il

Joséphine émit un léger rire quand elle vit la pointe des oreilles de son fiancé devenir plus rouge que sa propre robe. Il y avait quelque chose de naturellement timide et pur chez le Duc que cela en devenait amusant. Un homme ayant eu une vie comme la sienne ne devrait plus avoir cette partie-ci en lui et pourtant...Jonah agissait encore comme un petit garçon amoureux pour la première fois.

- Je pensais seulement que nous ferions cela à l'approche de l'hiver afin de pouvoir, vous savez, régler nos dernières affaires, poursuivit le Duc en se raclant la gorge

Devant un tel rappel, Joséphine émit un léger soupire. Pendant un bref moment elle s'était cru libérée. Libérée de toutes ces entraves et de tous ces poids dont l'histoire l'avait chargée. Mais que nenni, il y a encore un point final qui mérite d'être écrit car tout le monde le sait, les histoires ne se terminent qu'au moment où le méchant n'est plus. Ou la méchante en l'occurrence.

- Il est vrai, il faut que nous en finissions. Vous et moi, souffla Joséphine en s'affalant dans le canapé

- Et cette fois, hors de question de se séparer.

L'embrassant sur le revers de la main, Joséphine se perdit dans ses pensées. Elle ne savait encore comment coincer Sacha de Varsox pour ses crimes. Il était évident qu'elle ne pourrait compter sur un aveu de sa part à moins de le lui arracher et il était fort probable que cette femme soit derrière le propre enlèvement de son neveu. Peut-être même espérait-elle secrètement qu'un quelconque mal lui soit fait et ainsi aurait-elle pu se débarrasser de lui. Hélas, rien de tout ceci ne s'était passé.

Se relevant brutalement comme frappée par la foudre, une idée venait de lui traverser l'esprit.

- Il se pourrait que nous pouvons en finir plus rapidement que nous le pensons !

Bien que Jonah ne dit rien, sa tête se pencha légèrement sur le côté, visiblement intrigué par le sous-entendu de sa bien aimée. A quoi pouvait-elle bien penser ? La connaissant, cela n'allait guère l'enchanter, mais avait-il le choix ? Lui plus que quiconque désirait mettre un terme aux agissements de sa tante si tentait qu'il pouvait encore considéré cette femme comme un membre à part entière de sa famille.

- Je suis toute ouïe, fit Jonah

- Demandons l'appui d'Amir. Au vue de ses dires, il sait probablement quelque chose ou mieux encore...a probablement tout ce qu'il nous faut pour arrêter votre tante.

«Amir». Encore une fois, cela le fit tiquer.

- Pouvez-vous ne pas l'appeler par son prénom ? demanda Jonah en fronçant les sourcils

- Pourquoi ? Cela vous contrarie-t-il ?

- Absolument.

- A tout hasard, seriez-vous jaloux ?

- Ne devrais-je pas ? La femme que j'aime appelle un homme titré par son prénom comme s'il lui était particulièrement familier. Cela me titille.

- Oh, vous êtes titillé, reprit Joséphine visiblement amusée

- N'en riez pas.

- Et pourquoi pas ? Je vous savais possessif, mais jaloux, cela me surprend ! Surtout après ce que je viens de vous dire. N'avez-vous dont pas écouté un traître mot de ce que je vous ai dit ?

- J'ai écouté et entendu, mais il n'empêche. Si vous l'appelez par son prénom, j'en demande d'en faire tout autant pour moi !

«Un petit garçon». Cette simple pensée fit sourire Joséphine tandis qu'elle le vit croiser les bras, faisant mine de bouder.

- Vos désirs sont des ordres Monseigneur...Jonah, se plia-t-elle en attendant la moindre de ses réactions.

- Juste Jonah, la corrige-t-il, Allez-y, essayez !

Et bien qu'elle se moqua légèrement de lui précédemment, Joséphine ressentit soudainement un élan de pudeur l'empêchant de dire le nom tant désiré en sa présence. Il n'y avait pas de tâche plus infantile que celle-ci et pourtant, ses lèvres se retrouvèrent comme brusquement scellées par une force invisible. Quelle était donc cette sorcellerie ?

Amusée et à la fois terriblement embarrassée, elle sourit, puis rit, mais pas un mot ne sortit alors que les yeux de Jonah, tout pétillants et retenant un sourire ravi, ne la lâchèrent pas d'une micro-seconde.

- Cessez donc de me dévisager ainsi, vous me déconcentrez ! chercha-t-elle comme excuse

- Suis-je supposé détourner les talons et fermer les yeux afin de vous aider dans ce qui semble être une terrible tâche ?

- Probablement, cela m'aiderait oui, en effet.

- Eh bien je ne le ferait point ! Je veux vous entendre dire mon nom. Ce n'est tout de même pas la première fois que vous le prononcez. Je sais que vous l'avez déjà fait.

- Mais pas avec vous me regardant comme si j'étais une sorte de friandise appétissante !

- Est-ce de ma faute si je vous trouve belle et charmante ? Non.

- Dans ce cas, est-ce de ma faute, si je suis belle et charmante ? Non plus.

Ils se dévisagèrent, sourirent et détournèrent un instant les yeux l'un de l'autre, les joues visiblement en feu par ce peu d'intimité qu'ils essayaient tant bien que mal de s'accorder.

- Vous me désespérez, soupira Amir en levant les yeux au ciel, Même deux enfants n'agiraient pas de la sorte !

Surprit par sa présence, Joséphine et Jonah se retournèrent pour remarquer que le Prince se tenait appuyé contre l'encadrement de la porte, les dévisageant avec toute l'exaspération du monde.

- Dites son nom que l'on en finisse et que cela abrège mes souffrances ! dit-il en levant les yeux au ciel

- Avec vous pour témoin ? Je n'y arriverais pas plus, fit remarquer Joséphine, Et puis-je savoir depuis combien de temps vous vous trouvez là ?

- Suffisamment pour penser que vous êtes tous deux bien prudes pour deux personnes apparemment fiancées.

- La pudeur a-t-elle un quelconque rapport avec ceci ? reprit la jeune femme

Amir s'avançant vers elle fit quelques pas en sa direction avant d'être arrêté net dans sa démarche par la main de Jonah venue s'agripper à son bras.

- Pas un pas de plus, Votre Altesse, prévenu le Duc

- Auriez-vous peur qu'une trop grande proximité change quoique ce soit entre nous ? Je vous assure, Votre Excellence, nous avons été proches sous plus d'un rapport et plus d'une fois, je me suis surpris à rencontrer un mur, expliqua-t-il en regardant Joséphine

Finalement, le prince se défait de l'emprise du Duc avant de rejoindre son bureau, dévisageant les deux personnes restées plantés devant.

- Mettons-nous au travail, voulez-vous ? Nous avons une harpie à arrêter. A moins que jouer les amoureux transits soit plus important pour vous, bien entendu. 

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