🌼 CHAPITRE 36 🌼

S'il y avait bien une pièce dans la maisonnée qui préservait bien des secrets, ce fut celle se situant de l'autre côté du couloir, non loin du hall d'entrée. Aujourd'hui, ce petit cagibi sert notamment à garder balais, brosses et sceaux, mais passé le matériel domestique, derrière un tas de serviettes empilées, se trouvait un levier. Peu de gens savait ce que ce dernier ouvrait, mais les plus vieux domestiques se rappelait que durant l'époque où feu Monsieur le Baron fut encore en vie, bien des choses y furent cachées.

« Un jour, bien que cela te déplaise, tu devras à ton tour prendre les armes pour protéger cette famille Joséphine.»

Ces paroles, jamais elle ne les avaient comprises. Joséphine idolâtrait son père, mais il avait parfois des phases où il lui paraissait fou, sortant des phrases ou des mots dont elle ne comprenait pas le sens. Ils n'étaient qu'une petite famille se situant au bas de l'échelle sociale alors pourquoi diable aurait-elle à se battre ? Pourquoi avoir eu une telle éducation où habituellement les jeunes filles de son âge apprenait le piano ou la broderie tandis qu'elle recevait secrètement un maître d'armes dans le fond de son jardin ? Des questions à cette époque, elle s'en posait, mais elle s'exécutait quand même en étant persuadé que c'était la chose à faire car si son père en avait décidé ainsi c'est qu'il devait avoir une raison.

Raison qu'aujourd'hui seulement elle comprenait.

- Que faites-vous ? questionna une voix

- Oh Seigneur ! paniqua la jeune femme sursautant la main sur le cœur

Se retournant vivement afin de dévisager son interlocuteur, elle y trouva le Prince charmeur appuyé contre l'encadrement du placard bien trop étroit pour deux.

- Est-ce une épée que je vois là ? Que comptez-vous faire ? s'inquiéta Lucien

- Dois-je nécessairement vous répondre ?

- Étant donné que je me tiens devant la seule entrée, mais aussi la seule sortie de ce petit placard à balai...Oui. A moins que vous ne vouliez me passer sur le corps, ce qui ne serait pas de refus, mais...

A peine avait-il eut le temps de terminer sa phrase qu'il sentit quelque chose appuyer contre son entrejambe. Ses yeux se baissèrent pour constater la dangerosité de la situation, un sourire aux lèvres.

- Avez-vous un quelconque désire de me faire eunuque ma chère ? souligna-t-il en pointant du doigt le fourreau dirigé à son égard

- Je dois bien admettre que l'idée m'a traversé l'esprit plus d'une fois depuis que je vous ai rencontré, répondit Joséphine.

- Oseriez-vous ? Je nous pensais amis.

- Un ami se pousserait gentiment de mon chemin. Sachez, Votre Altesse, que je ne suis pas d'humeur plaisante et que je n'ai guère le temps pour vos jeux.

- Pourquoi ? Comptez-vous vous rendre quelque part ?

Bien entendu et il savait très exactement ce à quoi qu'elle pensait à cet instant. Peut-être même pouvait-il lire en elle, hélas il ne pouvait décemment pas la laisser partir. Pas dans un tel état de colère où elle ne saurait prendre de raisonnables décisions. Jonah le tuerait si Lucien la laissait se mettre volontairement en danger et s'il venait à lui arriver malheur. Non pas qu'il ne se fasse pas de souci pour son ami, mais il le savait suffisamment débrouillard et bagarreur pour se dépatouiller tout seul. Il faudrait être fou pour s'en prendre au seul homme du Royaume ayant eu une éducation aussi drastique que militaire.

En revanche, il ne pouvait miser tous ses espoirs sur la jeune femme au regard brûlant se trouvant devant lui. Elle était fougueuse, impatiente et très certainement furieuse. Mais c'est la fureur qui conduit à l'erreur.

- Je comprends. Vous avez soif de vengeance et vous bouillonnez de l'intérieur, mais sachez que votre présent état ne vous apportera pas satisfaction et nuira à votre quête. Peut-être ne suis-je pour vous qu'un gigolo traînant dans les bordels, mais sachez, Madame, que je m'efforce également de vous protéger. Vous ne feriez qu'aggraver les choses et je vous conjure de m'écouter. Si toutefois, vous estimez pouvoir vous passer de mon expertise alors privez-moi de mon appareil génital sur le champ car je ne bougerais pas, dit-il en poussant légèrement de la main le fourreau de l'arme menaçant l'existence de sa descendance.

- M'aideriez-vous ? Vous qui aimez tant rester dans l'ombre ? arqua Joséphine

- Vous avez mené bien des batailles seule, mais celle-ci, vous n'êtes pas obligée de la mener par vous-même. Je veux et peux vous aider, insista le Prince

- Dans ce cas, il y a quelque chose que vous devriez savoir.

Alors qu'elle hésita longuement à lui raconter ce qu'il s'était tout récemment passé, Joséphine se mit soudainement à parler. Elle passa de sa rencontre avec le Prince Amir, à la découverte faite sur les siens sans oublier l'étrange requête de la Princesse Sophia. Toutes ces histoires de royauté étaient à en perdre la tête, mais au fond, tout avait un lien avec un passé encore incertain.

- Donc si je comprends bien, vous êtes promise à deux hommes ! rigola Lucien avachit dans un fauteuil

- N'avez-vous dont rien écouté ?

- Bien sûr que si, Votre Altesse, souligna-t-il en s'appliquant sur chaque syllabe de son titre.

- Ne commencez pas. Je n'ai aucun désir d'être Princesse. Je veux dire, regardez-moi, ai-je l'air d'en être une ?

Avec ses cheveux décoiffés, ses jupons déchirés sur le bas, son visage marqué par les récentes épreuves qu'elle venait de traverser et surtout cette épée dont elle ne semblait pas vouloir se séparer...Non, Joséphine ne représentait en rien l'image que l'on pourrait se faire d'une personne de sang royal. Néanmoins, c'était cette image que Lucien affectionnant tant car ainsi, elle lui rappelait une certaine personne.

- Et donc ? Pour en revenir à nos moutons...Comptez-vous accepter la requête de Sophia, vous glisser parmi les membres de la délégation et une fois arrivée sur place retourné le pays dans son intégralité ?

- S'il le faut.

- Ce n'est que pure folie. Et dieu seul sait que ces gens feraient à Jonah. En outre, nous ne connaissons pas leurs motivations. Bien que vous ayez rejeté l'enfant chéri du Sultanat, je doute que cela soit le seul motif de s'en prendre au Duc. Cela paraît même très peu probable. Néanmoins, il y a un lien entre la délégation et l'enlèvement, je ne le nie pas.

- Alors que préconisez-vous ? Visiblement, cette affaire demeure dans votre champ d'expertise donc je présume que vous avez une idée, attendit Joséphine

- J'ai même un plan !

Car quiconque se rendant en territoire ennemi non préparé, finit par y rester et cela, Lucien ne le savait que trop bien, l'ayant lui-même appris à ses dépends.

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