🌼 CHAPITRE 3 🌼

Cela faisait bel et bien deux semaines que le jeune Duc évitait avec plus ou moins de succès les invitations venant de toutes parts de la capitale. Bien qu'elles furent nombreuses depuis son retour en ville, cela s'était grandement accéléré depuis qu'on le savait proche de la Baronne. Il n'était donc pas étrange ni même étonnant que certaines personnes l'invite uniquement pour satisfaire leur propre curiosité car qui n'aimerait pas avoir un petit peu d'avance sur les autres ? Et puis ne dit-on pas que le malheur des uns fait le bonheur des autres ? Malgré tout, s'il y a bien une invitation qu'il ne pouvait ignorer, c'était celle provenant du Palais. Depuis quelques temps maintenant, la Princesse avait manifesté un certain intérêt à son égard, sans prendre la peine de s'en dissimuler et à présent que la Baronne n'était plus là pour accaparer son temps ou tout du moins lui servir d'excuse, Jonah fut contraint plus que jamais de se rendre au Palais.

Bien qu'il n'eut aucune envie particulière d'y aller, le voilà que ses pieds le conduisirent jusqu'à l'entrée de ce qui semblait être pour lui, les portes de l'Enfer.

- Je commençais à croire que vous m'évitiez, annonce une voix en arrivant derrière lui.

Escortée et suivie par une dizaine de personnes allant de la dame de compagnie, à la domestique en passant par le garde royal, la Princesse Sophia dans sa plus belle robe d'apparat finit par faire son apparition.

- Je n'oserais guère Votre Altesse, s'incline le Duc en la voyant s'approcher de lui, Revenez-vous de l'extérieur ?

- J'avais effectivement rendez-vous, mais voyant le temps aussi splendide, l'envie me prends de vouloir continuer à me promener. Me feriez-vous l'honneur ?

Avait-il autre choix que celui d'accepter de prendre sa main tendue à son égard devant tant de témoins ? Retenant un soupir de lassitude, Jonah s'approche de la jeune Princesse et la laisse délibérément enrouler son bras autour du sien, le tenant fermement avant que cette dernière ne finisse par congédier absolument tout son entourage.

Marchant dans les jardins, souriant et jouant sur les apparences devant les quelques nobles qu'ils croisèrent, Sophia et Jonah pouvaient passer au yeux de tous pour le couple parfait. D'ailleurs, plus d'un serait satisfait d'apprendre que ces jeunes gens se sont rapprochés. Mais la vérité était hélas bien loin de cela car dès qu'ils furent à l'abri des yeux et des oreilles indiscrètes, Sophia marqua un arrêt dans sa marche.

- Vous êtes si peu loquasse que cela rends votre compagnie bien pauvre, Duc.

- Son Altesse doit m'excuser, je suis un homme de peu de mots. Peut-être devriez-vous appeler quelqu'un de plus approprié car j'ai malheureusement peur de gâcher une si belle journée.

- Croyez-vous que je vous ai fait venir jusque-là uniquement pour parader autour de votre bras ? lance Sophia

- Si ce n'est cela, que puis-je donc faire pour vous satisfaire ? Vous n'êtes pas sans savoir que je suis un homme occupé et je ne peux guère prendre le temps de me promener lors d'une après-midi ensoleillée, soupire Jonah

- Votre temps si précieux était sans doute, il n'y a pas si longtemps, dédié à une certaine fugitive ?

Voilà donc ce qui la motivait et la raison de leur entretien. Pourquoi Sophia s'intéressait-elle autant à Joséphine ? Pourquoi Diable une Princesse qui avait tout désirait tant en apprendre plus sur une jeune femme s'étant battue corps et âme pour avoir le peu de choses qu'elle possédait ?

- Sachez, Votre Altesse, que si vous vous intéressée à Joséphine Conquérant, je ne peux guère vous aider.

- Vraiment ? Pourtant, on m'a informé que vous étiez une des rare personne à l'avoir vue avant qu'elle ne disparaisse et très honnêtement ? Cela me contrarie car vous pourriez être en possession d'informations concernant l'endroit où elle se situe aujourd'hui. Voyez-vous, non pas que je sous-estimais la Baronne, mais c'est fâcheux que je ne puisse, en tant que future souveraine de ce pays, rendre justice comme cela devrait être fait.

- Cessons ce petit jeu vous et moi. Nous savons tous deux que vous voulez écarter Joséphine pour je ne sais quelles raisons.

- Mais la raison est simple mon cher, Duc. N'avez-vous donc rien entendu des dernières rumeurs ?

Laquelle exactement ? Ce n'est pas ce qui manque en ce moment. Les rumeurs changent, viennent et disparaissent au rythme de la météo et cela devient ennuyeux et particulièrement difficile de suivre le moindre petit potin circulant dans le milieu mondain.

- La Baronne et moi convoitons la même chose est cela est...Fort gênant. Voyez-vous, j'ai une certaine réputation et j'aimerais la préserver. Je n'ai donc pas pour habitude de ne pas obtenir ce que je désire.

- Voilà le discours d'une enfant gâtée. En outre, sachez que je ne suis guère un objet et que je suis doué de sentiments, Votre Altesse. Vous semblez oublier ce détail-là.

- Oh, donc vous savez, rit Sophia en agitant son éventail devant elle

Il sait. Ou plutôt, il aurait aimé l'oublier, mais comment pourrait-il avec tout ce qu'il s'est passé ? Néanmoins, Jonah eut cru que la Princesse, douée de raison, saurait à un moment donné abandonner s'il lui montrait sa cordiale indifférence. Peut-être finirait-elle par comprendre et s'intéresser à une personne digne d'elle.

- Votre Altesse, je me permet d'insister sur cela, mais sachez que je ne puis vous offrir ce que vous désirez, l'informe Jonah

- Peut-être vous méprenez-vous sur un détail : Je ne cherche pas l'amour. Cela est une chose, à mon sens tout à fait...comment pourrais-je le qualifier ? D'inutile. C'est cela, inutile.

- Alors que voulez-vous de moi ?

- Un mariage de convenance ? Ainsi mes parents ne me vendront pas à je ne sais quelle alliance politique ridicule qu'il faille maintenir pour le bien du Royaume et en échange, grâce aux nobles qui me mangent dans la main, je pourrais faire de vous l'homme le plus influent du Royaume. Une position qui, ma foi si je m'en souviens bien...Vous permettrez par exemple de récupérer un certain petit lopin de terre.

Bien que Sophia sortit ces quelques mots de façon tout à fait innocente, ils n'en étaient pas moins lourds de sens pour Jonah et il finit par comprendre que d'une façon ou d'une autre, elle était au courant pour sa situation. Peut-être était-elle même au courant de ce notaire, des papiers ayant finit chez Joséphine et de...Et si c'était elle ? Si depuis le début c'était elle qui était derrière tout ça ?

- Ne faites pas cette tête là, Duc, dit-elle en souriant, Cela ne devrait plus être une surprise à présent.

- Je ne le suis guère, Votre Altesse, mais je suis étonné qu'en tant que future souveraine de notre si beau royaume, justement, vous ayez à cœur de vous occuper des affaires de vos sujets.

- Disons que je m'intéresse tout particulièrement aux affaires remuant le bien être du Royaume. Comme il est étrange que depuis que je sois revenue ici, toute agitation qui eut lieu fut liée de près ou de loin à deux personnages. Vous et la Baronne. On pourrait croire que vous êtes si au centre de l'attention que vous pourriez faire la pluie et le beau temps.

- Vous nous flattez un petit peu trop et accordez très certainement trop d'importance à certaines rumeurs.

- Pourtant, vous plus que quiconque devriez savoir qu'aujourd'hui nous sommes dans une guerre à l'information. Certes, nos frontières ne sont plus aussi agitées qu'elles ne le furent pendant un temps, et cela nous permet de dormir sereinement, néanmoins nous ne pouvons nous dormir sur nos deux oreilles car des individus mal attentionnés rôdent dans l'ombre.

- Et tuent sans le moindre préavis, complète Jonah

- C'est pour cela que nous devons arrêter toute menace susceptible de nuire à la paix que nous avons durement gagnée, continue Sophia.

- Vous savez aussi bien que moi que Joséphine n'est pas une menace pour le Royaume et qu'elle est innocente. Cependant, vous vous obstinez à vouloir en faire un exemple. Cela ne peut être qualifié de «justice», mais plutôt de «vengeance personnelle».

- Interprétez-le comme vous le souhaitez, cette femme n'est que charme à vos yeux. Vous ne voyez pas la plus grande image.

- Croyez bien que si et c'est justement pour cela que je serais toujours de son côté.

- Voilà une bien jolie promesse que vous faites, mais vous ne pouvez pas savoir ce que l'avenir vous réserve. Un jour peut-être, cette personne à qui vous semblez tout pardonner et accorder votre confiance, vous trahira.

Non. S'il y a bien une personne capable de le trahir, ce n'est certainement pas elle. A vrai dire, cela serait même plutôt l'inverse. Quelque part, ne l'a-t-il pas trahis en n'essayant pas plus ardemment de la défendre ? Tout ce qu'il a fait pour elle, c'est de lui faire abandonner tout ce pour quoi elle s'est battue toute sa vie. Il lui a demandé de laisser derrière elle, sa famille, ses rêves et ses espoirs. Comment pouvait-il ne pas se sentir coupable ? Lui qui se disait «Duc». Lui qui se disait grand. Voilà qu'il a été bien incapable de lui tendre la main. Quand bien même il y aurait eu procès, il aurait pu intervenir, l'empêcher d'une façon ou d'une autre ou bien même engager le meilleur avocat de la ville, peu importe combien cela lui aurait coûté.

Néanmoins, la savoir enfermée dans une prison humide, pour la deuxième fois, recevant probablement un des pire traitement qui soit, ne le ravit guère. Alors il lui a demandé de partir. Il l'a supplié de s'en aller et à présent, il n'a pas la moindre idée d'où elle peut se trouver. Bien qu'il y eut en deux semaines de nombreuses rumeurs à son sujet, chaque enquête qu'il a menée dans la plus grande des discrétions n'a absolument rien donné.

Joséphine s'est cachée aux yeux de tous et elle l'a fait avec un si grand brio qu'il en vient à se demander si cela était seulement possible pour une simple fille de marchand. Seul un criminel aurait ce talent là.

- Vous semblez égaré dans vos pensées. Aurais-je touché une corde sensible ? demande Sophia dans un léger sourire sarcastique.

- Nullement. A présent, Princesse, vous plus que quiconque devriez savoir que je ne suis guère le genre d'homme à avoir peur pour si peu.

- Tant mieux. Parce que je ne suis pas le genre de femme à abandonner facilement.

- Que dois-je comprendre ?

- Soyons honnêtes vous et moi. Combien de temps pensez-vous qu'une femme seule peut demeurer cacher alors qu'une partie du Royaume est à sa recherche ? Des avis de recherche ont été placardés dans chaque ville et village aux alentours, d'avantage de force a été mobilisée...Ce n'est qu'une question de temps à présent. Nous finirons par la retrouver et par la juger le moment venu. Joséphine ne peut fuir éternellement. Ou bien...

Laissant planer le reste de sa phrase, Sophia sourit à Jonah tandis que sa main vient se poser de nouveau sur son bras.

- Ou bien dans ma plus grande clémence, je pourrais abandonner les charges qui pèsent contre elle par le manque évident de preuves.

- Nous y voilà, soupire Jonah.

Il se doutait bien qu'elle ne l'aurait pas fait venir jusqu'ici si ce n'était pour assouvir un de ses tordus besoins. Il y avait des gens bien compliqués dans ce monde et la Princesse en faisant sans nul doute partit. Chacune de ses actions semblait réfléchie et pourtant il paraissait qu'il lui manquait à chaque fois un brin de sens, de logique. Telle une enfant voulant assouvir un caprice et changeant d'avis l'instant suivant.

- Je réitère ma question pour la troisième fois : Que voulez-vous de moi, Votre Altesse ? siffla amèrement Jonah

- Je vous l'ai déjà dit, mais vous ne semblez guère me prêter une oreille attentive. Evitez-moi un mariage de convenance et j'abandonnerais les charges contre Joséphine Conquérant au nom de la famille royale.

- Ne soyez pas ridicule, soupira-t-il en levant les yeux

- Je suis pour le moins sérieuse à ce sujet. Dois-je vous l'écrire pour que vous ayez une trace de ma bonne volonté ?

- Je ne vais pas vous épouser, Princesse, gronda-t-il en s'éloignant d'elle.

Lâchant un soupire plus grand qu'elle volontairement et faisant mine d'être déçue, Sophia détourna les talons. Elle savait pertinemment qu'à cet instant, elle avait l'ascendance sur lui. Elle le savait et elle comptait bel et le bien le faire craquer ici et maintenant. Qu'il le veuille ou non, le Duc de Varsox finirait là où est sa véritable place : A ses côtés.

- Je présume alors que nous n'y pouvons rien. Le premier régiment vient de rentrer d'une longue mission à la frontière nord. Certains soldats s'ennuieraient apparemment et il serait dommage de ne pas profiter de leur talent. En outre, les officiers de police étant pris également avec toutes sortes d'incidents... Alloué un petit groupe à traquer et ramener, de force, une criminelle peut être une judicieuse idée.

- Me feriez-vous chanter ? Allez-vous sérieusement vous abaisser à cela ? s'étonne Jonah en s'approchant d'elle furieux

- N'écoutez-vous donc rien de ce que je vous dis depuis tout à l'heure ? Je suis une femme obstinée et je n'ai pas pour habitude que l'on me dise «non».

Le voyant prit dans sa toile, Sophia jubile tandis que sa main vient se poser sur le visage plus que contrarié de Jonah qui ne peut que le fusiller du regard.

- Réfléchissez Duc, l'avenir de Joséphine repose entre vos mains à présent. L'autoriseriez-vous à retrouver sa vie ? Ou allez-vous vous obstinez et la condamner ?

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