🌼 CHAPITRE 26 🌼
Bien que les paroles de Lucien rejouèrent en boucle dans l'esprit torturé de Joséphine, elle qui cherchait désespérément de quelle grande occasion mentionnée par Lucien, s'agissait-il ? Etait-ce un anniversaire ? Pas qu'elle s'en souvienne. Bien qu'elle ait l'esprit particulièrement occupé ces derniers jours, elle n'aurait tout de même pas oublié un anniversaire en particulier, encore faudrait-il qu'elle connaisse celui du Duc. Alors quoi ?
Se préparant petit à petit avec l'aide de Ninon qui ne pouvait cesser de sourire, la jeune femme devint particulièrement suspicieuse de sa dame de compagnie tandis que cette dernière lui lança quelques regards amusés à travers le miroir.
- Pourrais-je avoir le plaisir de savoir ce qui te fais tant sourire Ninon ?
- Ne puis-je pas être tout simplement heureuse, Madame ?
- La dernière fois que tu as autant souris, c'était il me semble pour mes dix-huit ans quand toute la maison a tenté de me faire une surprise.
- Surprise pour le moins gâchée par Mademoiselle Ambre qui ne sait guère tenir sa langue, pesta la domestique en souvenir de ce moment
- Ninon, je...lança alors Joséphine dans l'espoir de lui tirer les vers du nez
- Oh, mais que vois-je ?! s'exclama Ninon, L'heure tourne, nous devrions nous dépêcher !
Profitant du court instant de répits qu'engendra l'excitation de Ninon, celle-ci attrapa le manteau posé sur le rebord du lit de Joséphine avant de lui déposer délicatement sur les épaules. Un sourire béat s'afficha alors quand elle aperçu dans la rue, une voiture garée devant leur maison. L'heure était venue.
- Pressons, pressons ! Nous ne voudrions pas être en retard ! poursuit-elle en poussant légèrement Joséphine à travers l'escalier.
- Tu me hâtes tellement que je risque de tomber en marchant sur mes jupons.
- Oh non. Nous ne voudrions pas que vous abîmiez votre si jolie visage ! Mais hâtons le pas tout de même.
A quand remontait la dernière fois que Joséphine avait pu voir une telle hâte chez Ninon ? Elle ne s'en souvenait guère. D'ailleurs à peine avait-elle franchis le seuil de sa porte, que Lucien venu lui tendre son bras, l'attendant à même le pallier.
- Si Madame veut bien se donner la peine, je serais votre escorte pour cette fabuleuse et incroyable soirée !
Décidément, toute cette histoire semblait devenir de plus en plus bizarre et bien qu'elle prit le temps d'y penser sur le trajet la menant vers le parc à peine éclairé, ce n'est qu'en descendant et en voyant Lucien la conduire jusqu'à l'entrée de ce dernier, qu'elle comprit.
- Je ne peux malheureusement m'aventurer davantage, mais je vous souhaite, Madame, un formidable voyage.
S'avançant seule dans le parc, Joséphine découvre bouquets et guirlandes accrochées et suspendues ici et là à travers son chemin. Du tronc des arbres aux quelques poteaux métalliques se trouvant éparpillés dans le parc. Puis, sa course s'arrête quand devant le saule pleurer, un homme à la silhouette bien familière l'attends, muni d'un bouquet de roses.
Jonah se tenait là. A quelques mètres d'elle, tout fringuant, souriant comme un enfant à la veille de Noël et la regardant avec tant d'amour qu'il fut difficile pour Joséphine de ne pas lui rendre sa tendresse.
- Aux dernières nouvelles, je vous pensais partit vers de nouvelles aventures ! souligna Joséphine en arrivant à sa hauteur.
- Aux dernières nouvelles, je vous pensais trop occupée pour m'accorder votre soirée, souri Jonah.
Tous deux échangèrent un rire avant que Jonah ne prenne la main de Joséphine afin de l'emmener derrière les feuillages tombant du saule pleureur. A l'intérieur, cachés par un rideau de végétation, une véritable installation. Couverture, petits cousins, paniers repas, bouteille de vin et bougies éparpillées ici et là. Aucun détail n'avait été laissé au hasard.
- Je vois que vous aimez vivre dans le danger, ria Joséphine amusée en pointa du doigt le feuillage de l'arbre suspendu à quelques millimètre à peine d'une flammèche
- Mince !
Se précipitant afin d'éloigner le bougeoir, le Duc adresse un sourire gênée à la jeune femme se trouvant derrière lui qui n'a de cesse de le regarder.
- Cela serait dommage que je mette le feu au parc indépendamment de ma volonté, souligna Jonah
- En effet, cela serait dommage. Mais dites-moi, que faisons-nous ici au beau milieu de la nuit ?
Sa question ne manqua pas de l'étonné tandis qu'il la dévisagea visiblement surpris. Puis, il comprit. Contrairement à lui, elle ne s'en souvenait pas. Peut-être n'avait-elle pas fait attention ou peut-être bien n'était-elle pas du genre à prêter une quelconque signification à ce genre de chose, mais pour lui, oh oui pour lui, cette date avait été marquante. Sous bien des aspects.
- Et si nous commencions par nous installer ? reprit Jonah, écartant ainsi malicieusement la question que Joséphine venait de lui poser.
Détail qui par ailleurs n'échappa pas à la jeune femme qui le rejoint en s'asseyant sur la couverture dépliée sous ses pieds.
Jonah, au petit soin, pris la peine d'ouvrir la bouteille de vin, tendant alors un verre à son invitée qui ne put s'empêcher de sourire tout en plissant les yeux comme si elle suspectait quoique ce soit. Mais ce ne fut nullement le cas. Alors elle garda le silence, passant en rapidement en revue tous les événements lui venant à l'esprit.
- Vous ne trouverez pas, siffla Jonah comme s'il lisait dans son esprit.
- Je ne vois absolument pas de quoi vous voulez parler, rétorqua t-elle
- Allons bon, je lis en vous comme dans un livre ouvert Joséphine. Je sais très exactement à quoi vous penser.
- Vous m'en direz tant ! Dans ce cas, à quoi suis-je en train de penser actuellement ?
Finissant son service et posant la bouteille à côté de lui dans le panier, le jeune Duc approcha son visage de celui de la jeune femme qui ne pouvait retenir un rictus amusé. Un rictus trahissant de loin ses pensées.
- «Ne pense à rien. Ne pense à rien. Ne pense à rien». Je suis certain que vous vous dites cela, finit-il par avouer.
Surprise qu'il devine effectivement sa pensée volée sur l'instant, Joséphine sourit. Pouvait-il seulement savoir ô combien il lui était difficile de ne penser à rien, elle qui avait un esprit particulièrement actif.
- Êtes-vous magicien ?
- Dois-je l'être forcément pour vous impressionner ?
- Si je ne vous connaissais pas Votre Excellence, je pourrais croire que vous êtes en train de me séduire.
- Et puis-je vous demander si cela fonctionne d'une manière ou d'une autre ?
- Hélas, fit Joséphine en s'écartant soudainement de lui, je crains que mon cœur ne soit déjà pris.
- Bigre ! Puis-je savoir quel heureux chanceux a su conquérir ce dernier ?
- Cela ne vous servirait à rien, vous ne lui arrivez même pas à la cheville.
Vexé, Jonah s'écarta à son tour, prenant une moue d'enfant battu à son propre jeu.
- Cependant, je peux constater que vous n'êtes pas venue avec votre chevalier servant. Je dirais même, que le fait que vous soyez venue rencontrer un homme inconnu, la nuit, dans un parc désert, cela en dit long sur vous Madame, pesta-t-il
- Oh, mais sachez, Monsieur, que je suis pleine de surprises et que je pourrais encore vous en réserver quelques unes. Si je suis venue c'est tout simplement par curiosité vis à vis de cette étrange invitation. Rien de plus.
- Voilà des mots bien blessants à entendre, moi qui me donne tant de mal pour vous plaire.
- Si cela peut vous rassurer, vous y arrivez à merveille.
- Néanmoins, je serais curieux de savoir quel homme, aussi brave soit-il, a pu réussir l'exploit de conquérir votre cœur ?
Devant sa question, Joséphine sourit. Elle n'a pas souvenir du moment où elle s'est tout bonnement rendu compte de ses sentiments, mais quand ce fut le cas, elle eut l'étrange impression que ces derniers avaient toujours été là. Ancrés au plus profond d'elle-même. L'amour, était en soit, une chose bien mystérieuse même pour elle.
- Un homme honnête et bon. Droit. Loyal. Tendre. Compatissant. Courageux. Ce dernier a tant de qualités, qu'il m'est soudainement difficile de toutes les énumérer, lança Joséphine
- A vous entendre, on pourrait presque croire qu'il est dépourvu de tous défauts, s'amusa Jonah
- Non, mais ces derniers sont amoindris par ses qualités. Je ne connais guère meilleur homme que lui.
Leur séparation fut brève, mais Dieu seul sait qu'elle lui avait manquée. Cette façon dont elle le dévisageait avec amusement, ce léger sourire satisfait qu'elle tentait désespérément de lui cacher, cette malice qu'il pouvait apercevoir dans ses mots. Il y avait tant de choses chez cette femme qui lui plaisait. Tant qu'il ne saurait tout énumérer.
Cependant, Jonah savait que leur retrouvailles seraient brèves alors qu'il devait repartir au petit matin, mais il ne se voyait pas repartir en guerre sans s'être donné la peine de la voir, ne serait-ce que provisoirement.
- Allez-vous enfin me dire ce que nous faisons ici ? réclama Joséphine en le sortant de ses pensées
- C'est ici même que je vous ai avoué mon amour. Que je vous ai dit haut et fort que ma situation m'importait peu et qu'il était plus important pour moi de vous avoir à mes côtés plutôt que toute autre chose. Vous m'avez, sans le savoir, ouvert les yeux sur tant de sujets. Vous m'avez fait comprendre tant de choses et entrevoir le monde d'une autre façon. Vous rencontrer, Joséphine, a été la chose la plus merveilleuse qu'il me soit arrivé. A plusieurs reprises je vous ai fait savoir mon amour à votre égard. Maintes fois, je pensais, certainement tel un idiot, que mes mots suffiraient pour vous lier à moi dans une sorte de promesse invisible car bien que nous soyons présentement tous deux pris par nos responsabilités respectives, j'ai toujours pensé finir le reste de mes jours avec vous. Je compte bel et bien vous épouser. Faire de vous ma femme et la Duchesse la plus heureuse de ce Royaume. J'ai tant de plans en tête, tant d'envies et de désirs vous concernant que je ne saurais par lequel commencer.
Puis il s'arrêta. Brusquement. Il s'arrêta et posa sa main sur sa joue, caressant son visage par la même occasion. A cet instant, elle lui parut être la chose la plus précieuse et la plus fragile de son existence. A cet instant, la tenant ainsi, une peur soudaine lui traversa l'esprit. Et si Joséphine venait à ne plus être à sa portée ? Voilà une chose bien terrifiante.
- Mais avant cela, je sais que je dois être un homme digne de vous, de la femme que vous êtes. Je ne peux me contenter de me tenir à vos côtés, de vous tenir ainsi dans le creux de ma main. Cela serait alors renier ce que je suis. C'est tout du moins, ce que vous m'avez apprit. Vous m'avez apprit à être un homme meilleur, ambitieux, fort et courageux. Vous m'avez vanté et prêté tant de qualités que je ne pensais guère mériter. Pourtant, vous me voyez comme une meilleure version de l'homme que je suis réellement et c'est ce dernier que j'aspire à être. Par conséquent, ce n'est qu'en étant cette version finale de moi que je viendrais vous retrouver le moment venu.
Une lettre n'aurait jamais suffit au Duc pour transcrire tout ce qu'il avait à lui dire. Toutes ces choses lourdes et pesantes sur son cœur. Toutes ces choses qui font qu'il n'y a pas une seule journée où Jonah ne pensait pas à Joséphine.
- Vous m'avez demandé ce que nous faisions ici et sachez que ceci est une partie de réponse car nous nous réunissons également après trois mois de rencontre. Il y a trois mois, jour pour jour, nous nous retrouvions tous deux sur ce balcon lors de cette insipide soirée que vous avez su rendre si colorée et amusante. Votre rencontre, Joséphine Conquérant, a rendu ma vie si amusante et colorée. Vous, ma chère, m'avait changé.
Approchant délicatement son visage afin de l'embrasser, la jeune femme, prise de court par son discours n'a pour seule réponse que d'être la première à se précipiter vers lui, les faisant ainsi tous deux basculer à même le sol. Comment pouvait-il lui dire cela avec tant de facilité et d'aisance, elle qui peinait grandement à lui déclarer ses sentiments ?
- Je vous aime, Jonah, je vous aime profondément, sincèrement et follement. Je suis folle d'amour pour vous, sachez-le !
- Serions-nous alors tous deux fous de brûler du même feu ardent ?
- Qu'importe ce que nous sommes, qu'importe l'étiquette que l'on nous affable, cela ne changera rien. Je vous aime !
- Dans ce cas, pouvez-vous me faire une promesse ?
Se redressant légèrement, bien qu'appuyé sur ses coudes tandis que la jeune femme était toujours allongée sur lui, Jonah prit un instant pour la regarder comme s'il gravait sur le moment un portrait d'elle et du moindre de ses traits. Joséphine a toujours été belle, mais ce soir, les cheveux couverts de feuilles, les mèches rebelles ressortant de partout et les joues frappées de rouge, elle était splendide.
- Promettez-moi de m'attendre.
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