💍 CHAPITRE 50 💍

Cela avait été d'une rapidité sans nom. A peine les deux officiers avaient-ils franchis le pallier de la porte d'entrée de la maison des Conquérant qu'ils ressortirent en quelques instants accompagnés de Joséphine elle-même. Dans la voiture et malgré ses questions incessantes, pas un mot supplémentaire ne lui fut transmis et elle comprit que quelque chose n'allait pas. Comment pouvait-elle être suspecte ? Pire comment le Comte pouvait-il être mort ? Etait-ce vrai ? Cela voudrait dire que quelqu'un s'en serait prit à lui dans la nuit entre la fin des festivités et le petit matin ? Mais qui ? Non...le «qui» était assez aisé à définir car cet homme avait tant d'ennemis qu'en faire une liste serait une perte de temps. Et dans cette liste, Joséphine arrivait probablement en tête avec sa petite escarmouche précédente. A cet instant, elle vient à regretter son geste, non ses paroles. Néanmoins, un sentiment de frustration venu l'envahir. Elle regrettait en effet qu'il ne soit pas mort de sa main. Cela serait-il arrivé si Jonah n'était pas intervenu ? L'aurait-elle fait ? L'aurait-elle tué devant toute l'assemblée ? Probablement. Elle en rêvait.

Néanmoins, un rêve n'est guère suffisant pour accuser quelqu'un ni même pour le suspecter alors il devait forcément y avoir autre chose, un élément qui lui échappait, mais quoi ? Ce n'est pas comme s'ils avaient la moindre preuve contre elle et quand bien même cela serait le cas, elle aurait Jonah pour témoin.

Cependant, rien du scénario qu'elle s'était secrètement imaginé sur le chemin ne se déroula car à peine fut-elle arrivée au commissariat qu'on l'emmena dans une pièce sentant le renfermé et l'humidité. On l'a fit s'asseoir sur une chaise en bois et patienter là deux heures durant. Deux longues heures. Deux heures où elle ne fit que tourner en rond tel un animal en cage. Que se passait-il ? Pourquoi personne ne venait à elle ? Etait-ce trop demandé d'avoir ne serait-ce qu'une once d'information ?

- Madame la Baronne ? Je suis l'Inspecteur Veraldi. Je vous remercie de votre patience, informe une voix en entrant dans la pièce

- Ce n'est pas comme si j'avais eu le choix. Inspecteur, auriez-vous l'obligeance de me dire ce que je fais ici et pourquoi deux de vos hommes sont venus chez moi de si bon matin ?

- Je présume que mes hommes ont dû au moins vous dire les raisons de votre présence Madame.

- Je crains malheureusement qu'il y ait erreur sur la personne. Comment pourrais-je être suspecte dans le cadre d'un homicide ?

L'inspecteur ne dit pas un mot et sortit de la poche de sa veste un collier tâché de sang. Collier devant lequel Joséphine laissa échappé un léger cri de surprise.

- Je présume que vous reconnaissez ceci.

- Où avez-vous trouvé cela ? lui demande-t-elle alors

- Malheureusement, je crains que nous ne pouvions inverser nos positions. Je vais être celui qui pose les questions. Donc...reconnaissez-vous ce collier comment étant le vôtre ?

- C'est exact. J'ai dû malencontreusement le perdre hier lors de ma course à travers les jardins du Palais.

- Étrange coïncidence alors qu'il ait été retrouvé dans les mains du Comte Detina après que vous l'ayez justement menacé de mort devant une bonne centaine de témoins.

A cet instant, les pièces du puzzle qui semblaient manquer à Joséphine semblaient comme se réunir d'elle-même et elle comprit alors pourquoi deux officiers sont venus la chercher ce matin. Quelle amusante histoire !

- Puis-je savoir ce qui vous fait rire ? demande l'inspecteur curieux

- Ne le prenez pas mal, mais je trouve la situation plutôt risible. Vous êtes inspecteur de police donc je ne vais certainement pas vous apprendre à faire votre métier, mais...ne trouvez-vous pas cela un peu trop facile ?

- C'est-à-dire.

- La famille Detina détient la main mise sur la majorité des finances du Royaume. Francis était un homme à la réputation...que l'on ne décrit plus. Je ne suis certainement pas la seule ayant un contentieux avec cet homme.

- Est-ce une forme d'aveu de votre part ?

- Nullement, néanmoins je peux vous dire clairement que je ne l'ai pas tué, bien que j'en rêvais. Cet homme est ...était un monstre et quiconque s'en est pris à lui mérite mon admiration.

- Êtes-vous seulement consciente de la situation dans laquelle vous êtes ? A cet instant, nous sommes entrain d'éplucher votre alibi auprès de Son Excellence.

- Vous pouvez. Je n'ai rien à me reprocher. Néanmoins, si je l'avais fais, j'aurai rendu un fier service à la nation en la débarrassant d'une ordure pareille.

- Je vous prierais de modérer vos propos Madame.

Alors Francis Detina était mort ? Bel et bien mort ? Et quiconque était derrière cela tentait désespérément de faire porter le chapeau à Joséphine d'une façon ou d'une autre. Mais qui ? Qui aurait grand intérêt à la voir enfermée ? Qui se serait donné la peine de parcourir les jardins à travers le collier de sa mère qu'elle a égaré sans même s'en rendre compte avant ce matin ?

Soudain, on vient frapper à la porte de la salle d'interrogatoire tandis qu'un nouvel officier fait son entrée.

- Inspecteur, puis-je ... ?

- Je reviens. Je vous prierais de rester à votre place Madame.

- Aurais-je des talents de magicienne pour m'éclipser en plus de ceux d'assassin dont j'ignore tout ? souligne sarcastiquement Joséphine.

La porte se referme derrière les deux hommes et la voilà qui bondit hors de sa chaise. Peu importe la façon dont elle se rejoue les événements, rien ne lui paraît différent et ce n'est pas comme si sa mémoire lui faisait présentement défaut. Certes, elle l'a menacé. Certes, elle l'a malmené dans la forêt et son corps portait encore des marques de leur altercation, elle l'avait remarqué, mais qui aurait pu s'en prendre à lui ? Et pourquoi lui faire porter le chapeau pour cela ?

Quelques minutes plus tard à peine, l'inspecteur Veraldi revient l'air contrarié.

- Son Excellence affirme avoir passé la nuit avec vous et chez vous. Le confirmez-vous ?

- Oui.

- Qu'avez-vous fait durant la nuit ?

- Je vous demande pardon ? s'insurge Joséphine

- Qu'avez-vous fait ? Il n'y a rien de plus facile que de s'éclipser discrètement d'une chambre et ...

- Ma vie privée ne vous regarde aucunement à ce que je sache !

- Votre refus d'obtempérer pourrait vous coûter cher Madame.

- Et votre manque de délicatesse est affligeant. Vous venez chez moi sans ménagement, vous semblez m'accuser d'un crime que je n'ai guère commis étant donné qu'un témoin valide mon alibi et malgré tout cela vous avez encore le toupet de questionner ma vie privée.

- Je ne fais que mon travail Madame et par conséquent je vous demanderais de me répondre. Si vous ne le voulez pas, je me verrais dans l'obligation de vous conduire en cellule.

- Et sous quel motif ? Coupable peut-être ?

C'est à peine si elle arrive à en croire ses oreilles. Il y a encore quelques heures de cela, Joséphine était allongée à côté de Jonah, l'air béa et pleinement heureuse. Il y a encore quelques heures, rien de tout cela ne lui était ne serait-ce qu'envisageable. Voilà que sa vie entière semble devenir une grande et catastrophique fiction.

- Non, nous n'avons pas fait que dormir, Inspecteur. Nous avons partagé tous deux, un moment.

- Bien.

- Bien ?

- Vous allez pouvoir partir Madame, mais je vais vous demander de rester en ville les prochains jours. Sait-on jamais que de nouveaux éléments pourraient faire surface, informe-t-il

- Suis-je toujours suspecte ? s'étonne-t-elle

- «Toujours» ? relève-t-il alors en haussant un sourcil, Vous n'avez jamais cessé de l'être. A ce stade, l'enquête ne fait que commencer et nous allons faire tout notre possible pour découvrir ce qu'il s'est réellement passé. En attendant, au vu de votre comportement bien agité, de vos menaces précédentes et de ce collier étrangement égaré...Vous êtes à ce jour notre suspecte numéro une, je le crains.

Et voilà qu'une heure plus tard, Joséphine sortie du commissariat, retrouvant Jonah l'attendant de pied ferme dans la rue et la conduisant jusque dans une voiture afin de la ramener chez elle. Elle peinait encore à comprendre ou bien même à réaliser ce qui venait de se passer. Pourtant, elle était innocente.

- Je vais de ce pas chercher le meilleur avocat de la ville et vous n'aurez alors...se précipite Jonah

- Non...Je vous remercie, sincèrement, mais cela ne sera pas nécessaire. Je suis innocente, je n'ai rien à cacher et...

- Et ? Que se passe-t-il ?

Le collier. Elle avait égaré le collier de sa mère. Le dernier souvenir qu'il lui restait d'elle et qui n'était à présent plus à elle. Ce collier dont elle chérissait si fortement le souvenir était à présent un objet de malheur. Comment avait-il pu finir dans les mains du Comte ? Tant de questions semblaient tourner et retourner son esprit que Joséphine prit un instant pour se cogner la tête contre la paroi de la voiture devant le Duc surpris de son geste et cherchant encore à comprendre ce qu'elle pensait.

- Joséphine ?

- Quelqu'un cherche à m'incriminer. J'ai perdu hier soir dans les jardins, le collier de ma mère et il a été retrouvé ce matin dans les mains du Comte.

- Et je présume que cela leur sert de preuve ?

- Oui...avoue-t-elle tout bas.

Mais qui aurait tout intérêt à se débarrasser d'elle ? A cet instant, Jonah ne put penser qu'à deux personnes : Sa tante et la Princesse. Plus d'une fois Sopha avait tenté de s'en prendre à Joséphine et les mots que sa tante eut la veille également ne pouvaient que le laisser à croire qu'elle aurait son rôle à jouer dans cette macabre histoire. Cherchait-elle à l'éloigner du Duché comme elle l'avait fait avec lui ? Que cherchait-elle à protéger en les empêchant de venir ? A quoi pouvait-elle bien se raccrocher encore ?

- Joséphine, lance Jonah en attrapant ses mains glacées par l'angoisse et le stress, Je veux que vous rentriez chez vous. Je veux que vous vous reposiez et je veux que vous mettiez toute cette histoire derrière vous.

- Comment le pourrais-je ? Je...

- Ayez confiance en moi. J'ai une idée.

Malheureusement, toutes les idées ne sont pas bonnes à suivre et tandis que Joséphine fut reconduite chez elle, Jonah donna l'ordre d'être déposé jusqu'à l'hôtel dans lequel résidait sa tante. C'est sans ménagement que le jeune homme venu trouver l'objet de ses cauchemars, assise sur la terrasse et profitant d'un thé alors que toutes les tables autour d'elle ont été désertées. Il est fort à parier qu'elle a demandé à avoir l'espace pour elle seule. A peine arrive-t-il à sa hauteur, que sa tante lui lance alors un regard amusé.

- Je t'attendais. Légèrement plus en avance en revanche, souligne-t-elle

- Êtes-vous derrière tout ça ? Avez-vous quoique ce soit à voir avec le fait que Joséphine soit...

- Jonah ? Baisse d'un ton veux-tu ? Sais-tu seulement à qui tu t'adresses ? Je suis déjà bien assez bonne de perdre mon temps à t'écouter de bon matin.

- Ne vous ai-je pas prévenu ? Que si vous touchiez...

- Mais ai-je touché à quoique ce soit mon garçon ? As-tu la moindre preuve de ce que tu avances ou te plaît-il de venir m'importuner ?

Bien évidemment que non, mais il ne pouvait s'empêcher d'y penser. Elle ne le disait pas explicitement, mais cette femme était derrière tout ça. D'une façon ou d'une autre, cela devait être de son fait. Jonah y croyait. Après tout, elle a tout a y gagner de ne pas voir Joséphine hériter pleinement des terres du Duché.

- Vous êtes méprisable, souffle Jonah en serrant les poings.

- Vraiment ? Pourtant ai-je fait quelque chose ? En revanche, à ta place je ne devrais pas m'attarder par ici. Certaines choses ont tendance à aller vite, notamment un procès pouvant faire un exemple à la Nation car ce n'est pas la première fois que la très jeune Baronne s'en prends à un proche de la famille royale, non ?

«Oh non». Pendant un court instant, les images de cette après-midi lui revinrent. La Princesse et le Comte assis l'un à côté de l'autre et discutant. Etaient-ils seulement proches ? Bien sûr que non, mais Sophia ne laissera certainement pas une occasion pareille passer. Elle se servira de Joséphine pour faire un exemple...Elle la condamnera et...

Repartant en courant en direction de la maison des Conquérant, le jeune Duc perdit presque son souffle en arrivant sur le pas de la porte tandis que Ninon chamboulée vient lui ouvrir.

- Où est-elle ?

- A l'étage, mais des gardes sont venus il y a quelques minutes et...

Enjambant les marches de l'escalier deux par deux, il finit par arriver sur le pas de la porte de Joséphine tandis que cette dernière se tenait au milieu, presque immobile, pâle.

- Joséphine. Joséphine regardez-moi. Joséphine !

La secouant dans tous les sens, cette dernière le suivait à peine du regard.

- Il vous faut quitter cette maison. Immédiatement. Il vous faut fuir. Est-ce que vous comprenez ce que je vous dis ?

- Fuir ? réalise-t-elle.

- Vous devez fuir et rapidement, insiste Jonah

- Mais je ne peux pas partir, j'ai...je veux dire...bafouille-t-elle

- Fuyez. Je m'occuperais de tout, je vous en fait la promesse. Je veux qu'à cet instant, vous ne pensiez qu'à vous. Je veux que vous partiez d'ici en courant.

- Mais pour aller où ?

- N'importe où ! Où vous voulez, je vous retrouverais, je vous le promets. Le moment venu, je viendrais vous chercher. Je viendrais à vous, dit-il en préparant à la hâte quelques affaires qu'il attrapait ici et là

- Non ! Arrêtez, que faites-vous ? l'interromps-t-elle

- Nous n'avons vraiment pas le temps pour ça, lui dit-il en l'attrapant par les épaules, Vous devez me faire confiance. Je vous en conjure, Joséphine...Faites-moi confiance.

Perdue, Joséphine ne peut s'empêcher de le regarder s'agiter autour d'elle sans rien dire. Sans rien faire. Elle ne pouvait pas partir. Elle ne devait pas. Cette maison représentait tout ce dont son père s'est battu. Cette maison représentait tout ce dont pourquoi elle était née. Elle ne pouvait pas laisser Thomas et Ambre derrière elle. Elle ne pouvait...

- Fuyez Joséphine. Ninon !

La domestique réceptionne au vol un sac que le jeune homme lui jette et la supplie d'entraîner Joséphine jusqu'aux portes de la ville au moins. Elle devait partir et se cacher. Elle devait se faire oublier. Etre là où ni Sophia ni Sacha ne pourraient lui mettre la main dessus. Ni même lui car il savait qu'à l'instant où l'occasion se présenterait, il foncerait la retrouver.

- Partez maintenant, lui ordonne Jonah.

- Mais, je ne...

- Je veillerais sur votre famille. Sur votre maison. Sur vous. Je vous le promet. Je viendrais pour vous. Je viendrais vous trouver peu importe où vous vous cachez. Je viendrais et à ce moment-là, et seulement à ce moment-là, vous et moi...On se mariera.

Mais pour l'instant il lui faut partir. Vite. Pour l'instant il lui faut détourner les talons. Pour l'instant il lui faut se faire oublier.

Mais un jour viendra, où tout cela, elle leur fera payer.

Un jour viendra où Joséphine se retrouvera de nouveau là.

***********************************************************

NDA : Et voilà nous y sommes ! "Joséphine" prends officiellement fin avec ce 50ème chapitre. Que d'aventures dites donc ! Je n'imaginais pas que l'histoire me prendrait genre...5 mois d'écriture et autant d'énergie, je suis...vidée, mais également très fière ! 

Je sais que cette fin un peu abrupte va faire plus d'un malheureux, mais attendez...Je suis comme les scènes post-génériques, restez jusqu'à la fin, vous aurez un petit quelque chose en bonus. 

Un énorme merci à vous tous et toutes qui avez prit le temps de lire Joséphine, de la découvrir et d'avoir eut un petit coup de coeur pour son aventure avec Jonah. Cela m'a fait extrêmement plaisir de découvrir vos commentaires, rire aussi et parfois un simple petit mot à suffit à refaire ma journée et c'est ce qui m'a permit de m'accrocher assez longtemps à cette histoire pour l'écrire jusqu'au bout. Vous avez été mon coup de boost ! Donc quelque part...Je m'en veux de vous laisser comme ça, mais que voulez-vous...Pour se retrouver, il faut savoir se quitter non ?

D'ailleurs, moi je vous laisse avec un petit visuel pour vos beaux yeux et vous dit à bientôt !

Si jamais vous voulez un peu plus d'infos sur ce qui arrive...N'hésitez pas à venir me faire coucou sur Twitter (manon_seg) ou Instagram (les_mondes_de_manon).

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top