💍 CHAPITRE 44 💍
Durant tout le trajet le menant progressivement au Palais Royal tel un agneau que l'on mènerait à l'abattoir, Jonah ne put s'empêcher de se divertir l'esprit avec les derniers mots qu'il eut pour Joséphine. Il lui avait dit. Bon sang, il lui avait dit. Jamais encore le jeune Duc ne s'était senti si heureux et à la fois si effrayé par ce que pourrait lui réserver l'avenir. Il ne s'attendait pas non plus à une réponse de sa part car quelle réponse pourrait-elle lui apporter ? La réciprocité de ses sentiments ? Sa vision partagée de l'avenir ? Oh non, commençant à connaître la jeune femme, Jonah savait que Joséphine et lui étaient voués à emprunter des chemins de vie différents. Peut-être feraient-ils un petit bout de route ensemble ? Cela en était même certain, mais contrairement à ce qu'elle aimait lui faire croire, ils n'étaient pas voués à passer le reste de leurs jours côte à côte. Elle aspirait à une vie qu'il serait incapable de lui offrir, même indirectement et avec toute la bonne volonté du monde. Quant à elle, elle serait probablement dans l'incapacité d'être celle qu'il espérait qu'elle soit : Plus qu'une simple partenaire. Alors le petit jeu de charme, leurs moments passés ensemble, tout cela devait le satisfaire. De rares moments de bonheur, tous aussi précieux les uns que les autres, voilà ce qu'elle était en mesure de lui donner et dont il savait se satisfaire.
Arrivant au Palais, Jonah et Maximilien se séparèrent. L'un entrant dans la gueule du loup, la mort à l'âme, l'autre repartant à la maison après une longue promenade.
Les gardes apercevant le jeune Duc s'approcher d'eux, l'escortèrent immédiatement jusqu'à la Princesse Sophia. Voilà qu'il ne fut par rare pour les domestiques du Palais de croiser entre deux couloirs ou deux allés, le jeune Duc rendant visite à Son Altesse Royale. Cette simple vision donnant alors naissance aux plus folles rumeurs dû à l'imagination bien trop développée des petites gens du Palais.
Mais quelle ne fut pas la surprise du Duc de Varsox en découvrant la Princesse assise à une table à laquelle se trouvait le Comte Detina. Gardant pour lui son étonnement, le Duc s'approcha de la tablée tandis que la Princesse sourit légèrement à son arrivée.
- Je remarque que Monsieur le Duc daigne enfin nous honorer de sa présence, souligne la Princesse, Je vais finir par croire les rumeurs qui disent que vous êtes un homme occupé très cher.
- Serais-je un bon sujet si je ne l'étais pas ? rétorque le Duc en saluant la Princesse, Il ne me semble pas.
- Pourtant, une de mes dames de compagnie jurerait vous avoir vue plus tôt dans la journée, marchant au côté de votre proche conseiller.
- Une affaire de la plus haute importance m'attendait. Je suis certain que Son Altesse peut comprendre cela.
- Oh, j'ai eu vent des dernières nouvelles. En effet.
L'invitant à s'asseoir à la table, une domestique apporte sur un chariot une tasse ainsi qu'une cuillère dorée au jeune homme prit entre la Princesse et l'homme ayant hérité de tout son mépris.
- Je présume que les présentations sont inutiles, n'est-ce pas ? reprend Sophia, Vous devez vous connaître, non ?
- J'ai eu le plaisir de croiser Son Excellence quelques fois, mais je n'ai encore jamais eu l'occasion de lui adresser la parole, lance le Comte non sans cacher sa satisfaction
- Vous pouvez considérer cela comme chose faite à présent, siffle Jonah.
- Je comprends que Son Excellence peut trouver cela déshonorant de se trouver à la même table qu'un homme de mon acabit, mais je suis certain que nous pourrions profiter de cette après-midi pour apprendre à nous connaître et ainsi partir sur de bonnes bases vous et moi.
- Je vous demande pardon ? relève Jonah en posant sa tasse, Si tel est votre souhait, dites-moi Comte...Qu'est-il arrivé à votre cou ?
Posant la main sur ce dernier qu'il peinait grandement à dissimuler derrière un léger tissu en soi, quelques marques semblait néanmoins apparaître ici et là, laissant penser que l'homme avait été étranglé. Joséphine avait-elle pu être l'autrice de ces marques ? La force nécessaire pour étrangler un homme ayant son physique est grande alors comment la jeune Baronne s'y était-elle prise ? Voilà encore un mystérieux, mais plaisant secret dont elle s'était bien privée de lui raconter. Cependant, Jonah ne put s'empêcher de sourire, satisfait, un tantinet fier de son amie.
- Oh, fit le Comte, je crains avoir eu une mauvaise chute dans les escaliers de ma demeure de vacances. Je m'étais retiré quelques jours afin de me reposer et voilà qu'un malheureux incident m'arrive.
- Malheureux, en effet, reprit Jonah, Néanmoins j'avais cru comprendre que vous étiez un homme fortuné Monsieur le Comte. Peut-être que ce que l'on dit de vous s'éloigne de la réalité ou est extrêmement exagéré car quel homme laisserait sa demeure dépérir au point d'avoir des escaliers en si mauvais état.
Touché coulé. Devant les propos remplis de sous-entendus, le Comte savait d'ores et déjà que ce petit importun était au courant. Il savait également que le Duc s'était rallié à cette perfide femme qu'était Joséphine et que c'était certainement à cause de comportement comme le sien que les femmes manquaient aujourd'hui de discipline. Car c'est tout ce qui l'importait, donner une leçon à Joséphine Conquérant et sa scandaleuse fierté.
- En effet, les rumeurs, sourit le Duc afin de ne pas perdre la face, Mais Son Excellence est le mieux placé pour savoir ce que ces dernières peuvent faire à une réputation, non ? Après tout on vous dit dépossédé de vos terres.
- Vraiment ? reprit Jonah, Voilà quelque chose dont je ne suis pas au courant, mais peut-être devrais-je montrer certains documents à Monsieur pour qu'il puisse constater que tout est en ordre si vraiment il est si inquiet.
- Je n'aimerais guère vous déranger. Vous l'avez dit vous-même, vous êtes un homme très occupé.
Francis Detina avait trouvé en la personne de Jonah de Varsox un ennemi, même s'il ignorait encore de quelle taille. Mais tant que ce dernier est au côté de Joséphine alors rien ne lui sera possible. Cependant, il n'était pas avare d'idées pour frapper là où ça fait mal et devant un tel spectacle, Sophia assista au combat de coqs se déroulant sous ses yeux sans rien dire. Bien au contraire, la jeune princesse se délecta de chaque joute, pouffa de chaque mot. Bien évidemment que Jonah allait trouver pour chaque reproche du Comte une parade.
- Je devrais peut-être envisager de laisser ces Messieurs discuter et me retirer dans mes appartements, lance alors la Princesse pour s'interposer entre eux.
- Je prie pour que Son Altesse me pardonne, se plie le Comte, Voilà que je suis votre invité et je m'emporte devant vous.
- Je peux comprendre. Le Duc de Varsox nous fait tous cet effet, rit Sophia, Après tout, c'est un homme accompli que beaucoup envie. Cela ne doit pas être une position facile à maintenir. N'est-ce pas Duc ?
- Croyez-moi Votre Altesse, il en faudrait plus pour me perturber, lance le Duc.
- Cela est remarquable ! Même aux prises avec ce genre d'affaires familiales à régler, vous êtes toujours maître de vous-mêmes.
- En effet. Je ne sais pas ce que cherchez à accomplir celui ou celle ayant ressortie ce dossier, mais je crains qu'il m'est sous-estimé, sourit Jonah.
Cela ne pouvait être que de son fait. Il en avait presque la certitude à présent. Bien que Sophia ne l'ait pas directement avoué, son comportement et ses propos la trahissait à moitié. Que le dossier comportant l'acte de propriété et la promesse de son père au Baron Conquérant soit ressorti sur le bureau poussiéreux d'un petit notaire des bas quartiers, cela n'était pas un hasard. Il n'y croyait pas.
Et personne n'avait ce pouvoir en ville sauf peut-être la Princesse.
- Que dites-vous ? reprit Sophia en grimaçant.
- Je pense que l'artisan de cet acte doit être une personne s'ennuyant au plus haut point pour ainsi s'occuper des affaires d'autrui. Si seulement je pouvais savoir de qui il s'agit, peut-être pourrais-je envisager de l'embaucher, je manque cruellement de main d'oeuvre actuellement et je crains que mon conseiller ne fasse un malaise devant la charge de travail.
- Vous semblez être persuadé que cela soit du fait d'un individu quelconque et non le fruit d'une coïncidence.
Finissant sa tasse, Jonah la pose et plonge son regard inquisiteur dans les yeux illuminés par une pointe d'amusement de la Princesse.
- Je ne suis malheureusement pas assez naïf pour croire en la poussière de fée et aux histoires de princesses, Votre Altesse, dit-il dès plus sèchement, Les coïncidences n'existent pas.
- Quel dommage ! Moi qui ai prévu une soirée demain sur le thème de la féerie. Mais voilà que vous m'annoncez ne pas aimer les contes de fées. Je suis déçue. Pourtant dans ces derniers, toutes les histoires d'amour finissent bien, non ?
Parler en métaphore ou avoir des propos déguisés n'a jamais été le fort du Duc et pourtant, il n'eut pas de mal pour comprendre les paroles de la Princesse et comprenait son point. Cela lui rappela cette fois à la Galerie des Lumières où ils se mirent à échanger sur les fleurs du jardin. Tout n'était que conversations indirectes avec la jeune princesse et il n'y avait rien de plus irritant pour lui.
- Si elles finissent bien, c'est parce que les protagonistes se battent pour cela, souffle Jonah.
- Voilà que vous m'apprenez quelque chose, rajoute Sophia en fainéant l'ignorance la plus totale.
- Pourtant, n'êtes-vous pas une femme dès plus cultivée ? Là encore, le fruit des rumeurs sans nul doute. Cela nous affecte tous à ce que je vois.
Le regard de la Princesse passa brusquement de l'amusement à la sévérité. Elle ne dit rien, mais Jonah venait publiquement et devant témoin de l'insulter. Chose qu'elle ne laisserait pas passer. Même pas pour son jouet préféré. Peut-être avait-elle été trop clémente vis à vis de lui ? Peut-être était-il temps de lui faire plier l'échine car si elle ne pouvait pas l'avoir...Alors autant que personne ne l'ait à sa place. Cela serait pour elle, une marque d'échec qu'elle ne saurait supporter.
- Venez à ma fête, demain soir Duc. Je suis certaine que cela vous plaira. J'ai prévu un grand spectacle basé sur le thème des «retrouvailles».
- Je n'y manquerais pas dans ce cas. Cela semble vous tenir particulièrement à cœur, Princesse, alors je me dois de faire le déplacement.
- Accompagné, bien évidemment.
Bien évidemment. Où serait le plaisir de passer une dès plus affreuse et désastreuse soirée sinon ?
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