Thé noir à la bergamote
Je vais essayer (je dis bien essayer) de poster tous les dix jours comme les chapitres sont plutôt courts, mais je vous préviens que mon autre dramione passera quand même en priorité... ;)
Thé noir à la bergamote
Beaucoup de choses allaient mal dans la vie d'Hermione Granger. Et elle n'était plus très sûre d'avoir le courage nécessaire pour faire face à tout.
- Granger ?
Elle parut soudain se rendre compte qu'elle n'avait pas bougé depuis plusieurs minutes, debout au milieu du couloir.
Comme par hasard, elle tombait sur Malefoy. Un problème de plus à rajouter ; la liste était si courte.
- Bonjour Malefoy, répondit-elle.
- Bonjour.
Elle devinait à son ton qu'il était embêté, elle bouleversait ses petites habitudes. Pas de surnoms ridicules ce matin. C'était bien la seule pensée qui eut pu lui tirer un sourire.
- Tu es là depuis longtemps ? reprit-il.
- Cinq heures.
- Les premiers agents arrivent à cinq heures et demi.
Elle faillit soupirer en l'entendant répondre ça.
- Ah, cinq heures et demi alors.
Il remua dans son dos et elle se décida à se retourner. Il était à quelques pas, au niveau du bureau du secrétaire, sur lequel il avait posé sa mallette. Toujours avec son costume impeccable et son air fermé.
- Ça va ?
La question ne lui plaisait pas, et à elle non plus. Si elle ouvrait la bouche, elle fondait en larmes, si elle s'en allait, elle fondait en larmes, et puis si elle réfléchissait à une réponse, elle fondait en larmes.
Alors elle se contenta d'essayer de ne pas pleurer. Mais ce fut impossible et elle sentit une grosse larme rouler sur sa joue qu'elle s'empressa d'essuyer.
Il était gêné maintenant. Pleurer, c'était un signe de faiblesse pour lui. Pour elle, c'était justement la faiblesse que de tout garder pour soi sans jamais faire confiance aux autres.
- Ça ne va pas, conclut-il inutilement.
Il y eu un moment de battement. Le soleil se leva encore un peu et maintenant, elle voyait l'expression exacte de son visage. Il avait les yeux qui fuyaient, tenait une tasse du bout des doigts. Au final, la même tête que lorsque le directeur lui avait annoncé qu'il prenait une semaine de congé pour la mort de sa femme.
A la fois, c'était quelque chose de sérieux, à prendre avec des pincettes, mais aussi un changement dans ses habitudes qui l'avait embêté. Exactement cette tête-là.
- Bien, reprit Hermione dans un reniflement après un petit silence. Bonne journée à toi, moi, je retourne dans mon bureau.
- Attends, tu ne veux pas du café ?
Elle considéra un instant sa demande, stupéfaite.
Elle ne lui avait pas pardonné. Non, c'était très différent de travailler avec quelqu'un et de parler de ses erreurs du passé.
Au départ, l'idée de travailler avec lui l'avait révulsée. Elle était au procès, elle avait vu combien il était détruit, mais son empathie se battait férocement avec ses souvenirs insupportables. Les premières semaines avaient été très éprouvantes pour elle, sur les nerfs, sautant sur la moindre occasion pour se défouler.
Harry et Ginny l'avaient prise pour une folle au départ, Ron s'était fait un plaisir de l'écouter se plaindre de Malefoy.
Puis, petit à petit, il avait fait de efforts. Des vrais efforts. Alors elle en avait fait aussi, doucement. Il l'agaçait pour plusieurs choses, mais elle était épuisée de se battre pour des idioties, alors elle avait laissé tombé.
Aujourd'hui, elle aurait dit qu'ils étaient des rivaux, comme toujours, mais avec un semblant de respect entre eux. Elle s'était habituée à le voir, à l'entendre tous les jours, à travailler avec lui. Ils réfléchissant ensemble, elle râlait, il la narguait, puis, ils trouvaient des solutions, se partageaient le travail.
Somme toute, c'était vivable. Seulement, elle sentait ce petit malaise presque palpable lorsqu'ils n'étaient que tous les deux, tous leurs non-dits paraissaient prendre une place étouffante.
Comme cette fois-ci.
- Oui, je veux bien, s'entendit-elle répondre.
Il avança alors de quelques pas et lui remit la tasse qu'il tenait.
- Température optimale. Il est brûlant quand je sors de chez moi, mais le temps de transplaner et de prendre l'ascenseur, il est parfait.
C'était dit avec une pointe d'arrogance qu'elle désespérait de jamais ôter de sa voix.
- Merci.
Puis, elle l'avala d'une traite en se disant que ça réchaufferait ses entrailles. Elle lui rendit le gobelet vide, la gorge en feu, et il avait de nouveau un sourire narquois.
- C'est fort, hein.
Pour rien au monde elle ne l'aurait avoué mais oui, c'était fort.
La scène semblait un peu irréelle. Malefoy qui lui donnait son café dans le jour qui se levait doucement. Elle se disait qu'il était vraiment temps de retourner à son bureau, qu'il fallait arrêter de penser, quand il lâcha :
- Pourquoi t'es là ?
Immédiatement, son ton la fit revenir au gamin de Poudlard. C'était une question franche, posée comme s'ils se connaissaient vraiment depuis dix ans. Ce n'était pas le ton ennuyant et léger des jours habituels où ils se supportaient en sachant qu'ils avaient beaucoup à se dire.
Ici, sa phrase signifiait « Je sais que tu ne voudra sûrement pas me répondre, alors je pose directement la question. »
Mais Hermione avait besoin de parler, tant pis si c'était Malefoy. D'ailleurs, c'était bien lui qui l'appelait Jolie-cœur, presque à raison.
Après la guerre, elle s'était mise avec Ron. Pendant deux ans, ils s'étaient reconstruit ensemble, ils avaient rit, pleuré, s'étaient battus contre eux-même, s'étaient réinventés. Deux ans pour se reconstruire, deux ans à s'aimer.
Puis, petit à petit, comme si tout avait toujours dû être comme ça, ils n'avaient plus eu besoin de l'autre de cette façon. Elle aimait toujours l'aider cuisiner avec les objets modus et il l'entraînait toujours aux échecs. Mais ils n'avaient plus besoin de ça.
Ils s'en étaient rendus compte un jour, en buvant du café en terrasse. Ron avait expliqué pourquoi il trouvait la fille là-bas jolie, Hermione avait parlé du serveur.
Il y avait eu un moment où ils s'étaient regardés droits dans les yeux avant qu'Hermione ne parte dans de grandes explications pleines de gestes. Ron l'avait calmée avec un sourire et c'était elle qui avait commencé à pleurer.
Leur amour, c'était de l'amitié. Ils s'étaient quittés légers, presque comme s'ils savaient que ça allait se passer comme ça. Et Hermione avait eu de nouveau deux meilleurs amis.
Peu de temps après, Ron quittait le département de contrôle et de régulation des créatures magiques pour commencer sa formation d'Auror. Il avait été la première personne de son département avec qui elle sortait.
Un peu plus tard, elle s'était mise avec Sean.
Malefoy s'était moqué en disant qu'elle allait faire tout le département, et avait commencé à l'appeler Jolie-coeur. Et comme il ne croyait apparement pas en ses relations amoureuses, il avait commencé à lui rappeler que « Jamais deux sans trois ».
- Tu avais raison pour Jolie-coeur, je crois.
Elle souffla ces mots en sachant qu'elle n'aurait peut-être pas dû. Simplement, elle se sentait complètement perdue, complètement seule. Comme si elle ratait tout ce qu'elle entreprenait.
- Ça ne va pas, avec Sean ? Maintenant que tu le dis, ça fait un bout de temps que je n'ai pas entendu de « chérie » ou « amour ».
La phrase la blessa. Si même lui s'en rendait compte. Hermione se mordit la joue. Au moins, elle ne soupirerait pas.
- Tu veux autre chose ? demanda-t-il brusquement.
Le silence et la situation le gênaient. Compte tenu des possibilités restreintes de Malefoy en matière d'aide, non, elle n'avait besoin de rien d'autre.
S'il avait été quelqu'un d'autre, peut-être qu'elle lui aurait raconté ses malheurs, mais c'était Malefoy. Il n'aurait pas compris, ni su écouter d'ailleurs. Et elle était lasse de tout ça.
- Non, c'est bon. Merci pour le café, je vais retourner à mon bureau.
Il récupéra sa tasse avant de la nettoyer d'un coup de baguette.
- Potter arrive dans presque un quart d'heure, dit-il en attrapant sa mallette sans la regarder, avant de disparaître dans son bureau.
Hermione resta stupéfaite qu'il sache exactement à quelle heure Harry arrivait. Surprise presque qu'il ne se soit pas moqué.
Elle devait se faire au fait qu'il avait changé. Il se moquait d'elle régulièrement, mais pas de sa véritable tristesse. Il avait gagné en tact. D'accord, il était toujours arrogant mais il ne méprisait plus que ceux qui étaient méprisables par leur comportement. Il avait toujours une démarche aristocrate, un air ennuyé ou fermé et il continuait à se décharger de la plus grande charge de travail possible.
Mais il avait changé.
Hermione tourna les talons pour retourner à son bureau, le soleil se déchirait maintenant en plusieurs couleurs sur les fenêtres.
À quelle heure arrivait-il au final, pour savoir tout ça ?Et pourquoi venait-il aussi tôt, depuis combien de temps ?
Sa curiosité maladive reprenait le dessus quand elle se résigna dans une grimace à, comme le lui avait conseillé Malefoy, attendre Harry pour le noyer de ses problèmes.
~o~
Ginny n'était jamais en retard et pourtant, toujours la deuxième. Chaque fois qu'elle mettait les pieds chez « Krewell & Co. », Hermione était déjà assise à leur table habituelle, remuant distraitement son thé.
Noir et à la bergamote, comme toujours.
Ginny posa son parapluie à l'entrée avant de traverser le bar. C'était petit, calme, dans le coin d'une ruelle du Londres sorcier. Il y avait plusieurs fontaines et cascades d'alcools ou de jus, de thé, tombant le long des murs ou au milieu de la salle. Les immenses baies vitrées laissaient passer une lumière jaunâtre, comme si c'était en permanence le crépuscule des jours d'été.
- C'est fatiguant de se tuer pour être à l'heure en sachant qu'on sera presque en retard, lança-t-elle dans un soupir dramatique en se laissant tomber en face d'Hermione.
- Mmh. Je t'ai commandé ton chocolat.
Elle désigna d'un signe de tête le liquide fumante devant Ginny.
- Merci. Mais sincèrement, reprit cette dernière en posant ses mains sur sa tasse pour les réchauffer, pourquoi toujours septs minutes d'avance ?
Hermione haussa les épaules.
- Je ne sais pas. Je déteste être en retard.
- Sans blague, répliqua Ginny en levant les yeux au ciel avant d'avaler une gorgée de chocolat.
Hermione avait l'air fatiguée, chose rare. D'habitude, elle débordait d'idées et se reposait assez peu. Pour une fois, elle avait l'air usée.
- C'est allé ta journée ? Harry m'a dit que pas vraiment.
C'était tout Ginny de faire les questions et les réponse.
Sa journée avait été désastreuse en vérité. Après la rencontre avec Malefoy, elle avait attendu Harry qui l'avait écouté se plaindre, puis se mettre en colère toute seule, sans vraiment savoir quoi dire. Elle avait eu le temps de faire la moitié de ses propres dossiers avant de se rappeler qu'elle avait une autre chose à faire, ce dont elle allait parler à Ginny :
- On a décidé de se séparer avec Sean.
La rouquine resta un instant sans bouger, les lèvres au bord de sa tasse avant de la reposer brusquement sur la table, s'en renversant dessus.
- Merde, souffla-t-elle avant d'agiter sa baguette.
Puis, elle se redressa, coudes sur la table, regardant Hermione droit dans les yeux.
- Vous vous séparez ? Juste comme ça ?
- Pas juste comme ça, répondit-elle en haussant les épaules, le visage tiré. Ça fait un bout de temps que ça ne va plus.
- Depuis quand ?
- Je ne sais pas, deux mois ? Peut-être trois.
Elle n'avait même pas les larmes aux yeux, elle se sentait simplement perdue. Elle avait pleuré hier soir, ce matin, et encore avant de venir au café, elle était vide. Et puis régulièrement ces derniers temps. Maintenant, elle essayait de faire face, comme toujours.
- Pourquoi tu ne m'en a pas parlé ?
- Je pensais que ça allait s'arranger. Tu sais, reprit-elle avec un pauvre sourire, au début, c'était vraiment génial. Sean est intelligent, amusant et la plupart des sujets qui me tiennent à cœur lui tiennent aussi à cœur. Vraiment, on avait de grands discussions, beaucoup de rires.
Ginny hoche la tête, ne sachant plus vraiment quoi répondre.
- Et puis petit à petit, tu perds les illusions du départ. Il est très casanier, c'est compliqué de le faire sortir, même pour vous voir. Il se laisse aussi tout le temps marcher sur les pieds, par tout le monde. Il est trop gentil, trop fragile. Ça a fini par m'agacer de toujours devoir batailler pour faire autre chose qu'aller au boulot et retourner à la maison ou de devoir me battre à sa place à chaque fois.
- Mais ce n'est pas pour ça que tu l'as quitté.
Ginny la connaissait assez pour savoir que l'important venait toujours à la fin.
Hermione hocha tristement la tête. Non, ce n'était pas le pire. On s'habitue à certains défauts, mais pas celui-là.
- Pendant la guerre, il était aux États-unis, il a travaillé pour le M.A.C.U.S.A. Là-bas, les choses se sont passées très différemment. Il n'a jamais vu de Mangemort par exemple. Il ne sait pas ce que ça fait, et moi j'ai pourtant besoin qu'il sache. J'ai besoin de quelqu'un avec qui parler de ça, qui comprenne que la cicatrice sur mon bras me brûle, que mes nuits ne sont pas calmes.
Elle voulut ajouter quelque chose mais s'arrêta à temps. Ginny n'avait certes, pas vécu les mêmes choses qu'elle non plus, mais elle se doutait que cependant, elle avait elle aussi sa part de cicatrices.
Sean disait que ça passera mais non, ça ne passera pas. Le temps atténuera, mais ça ne passera pas.
- Moi, j'ai besoin de quelqu'un qui me comprend, reprit-elle avec la voix cassée. J'ai besoin qu'il veuille en parler, ça ne suffit plus d'écouter. J'ai envie qu'il réponde, qu'il comprenne que ça n'ira pas mieux du jour au lendemain et surtout qu'il arrête de me répéter que ça ira.
Ginny agita la tête sans savoir quoi répondre.
Hermione avait l'air à la fois en colère, triste et perdue. Comme si elle ne savait plus ce qu'il convenait de faire.
- Et toi, avec Harry ? finit-elle par demander après sa dernière gorgée de thé.
- Ça va. Ça va même très bien.
Parfois le bonheur des autres suffisaient à lui remonter le moral. Elle se disait que si elle ne réussissait pas, au moins, eux étaient heureux.
- Il part très tôt tout de même, continua Ginny en remuant son chocolat.
- Oui, il passe toujours par mon bureau. Je lui fais ses papiers, il est toujours à la ramasse avec ça, comme à Poudlard. Enfin, en ce moment, ça m'évitait surtout de... penser.
La rouquine parut vouloir dire quelque chose mais se rabattit sur une gorgée de son chocolat. Elle ne savait plus vraiment quoi faire. La dernière fois c'était son frère, elle le connaissait au moins. Sean, elle avait juste le souvenir d'un homme plus âgé qu'elle de sept ans, un peu timide et très méticuleux. Rien de très intéressant.
Pourtant elle aurait voulu dire quelque chose.
- Comme à Poudlard, répéta-t-elle en espérant changer la conversation. D'ailleurs, tu sais qu'il casse toujours ses lunettes tous les trois jours ?
Hermione fronça les sourcils et Ginny se lança dans une explication rocambolesque. Les lunettes de Harry n'étaient pas un sujet particulièrement passionnant, mais elles avaient au moins le mérite de mener à d'autres anecdotes et de faire oublier et le temps et l'état du cœur de Hermione.
Elles restèrent quelques heures, comme d'habitude, au milieu des rires et des tintements des verres. Ginny partit la première, récupérant son parapluie. Elle était d'une ponctualité admirable.
Hermione régla l'addition avant de sortir à son tour. L'avantage avec la pluie, c'était qu'elle pouvait se convaincre que l'eau sur sa tête provenait uniquement du ciel.
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