CHAPITRE 31 : Jeux de mains, jeux de vilains...
Une semaine plus tard - ☀️
C'était trop dur... Beaucoup trop dur...
C'était définitivement impossible pour moi de rester éloignée de Jonathan. J'avais passé cette horrible dernière semaine à vivre dans la mauvaise humeur, et rien ni même les entraînements de Zayne ne parvenaient à plus m'irriter que je ne l'étais déjà.
Je ne cessais de croiser Jonathan et Ryn dans les couloirs du palais. Ils riaient, se souriaient et prenaient du bon temps. Mon partenaire semblait particulièrement bien apprécier l'effet qu'il avait sur moi. A chacune de ses vicieuses tentatives pour me faire craquer, il souriait malicieusement, le regard en coin du style "je sais que tu souffres : abandonne !".
C'était une vraie torture de les voir ensemble tous les jours, et j'en venais même à me demander si ce n'était pas mieux d'abandonner, ne serait-ce que pour ma santé mentale : je commençais à devenir dingue !
Quelle maudite blonde !
Mon âme-sœur, pourtant tout à fait au fait des désagréables sensations qu'il me procurait en agissant ainsi, ne chômait pas : et vas-y que je te rends jalouse à la moindre occasion en séduisant ta rivale, que je te taquine en exhibant ce que tu n'auras pas si tu ne déclares pas forfait !
Mais quelle torture !
Malheureusement pour moi, mon amour-propre et mon orgueil démesuré m'empêchaient de déclarer forfait. Je n'avais absolument pas envi d'aller ramper comme une folle en manque d'amour auprès de ce petit prétentieux !
Tranquillement assise sur la rebord de la fenêtre de la salle commune, je reposai ma tête de frustration contre la vitre transparente en soufflant bruyamment : face à moi, s'offrait un nouveau spectacle de Don Jonathan et Dona Ryn...
- Mais je t'assure, insista Ryn, il était tout tendu devant moi quand je lui ai dit ses quatre vérités !
Jonathan, assis dans un fauteuil moelleux en face d'elle, arbora une mine soucieuse. L'anecdote du différent entre la blonde et son frère ne semblait pas du tout lui plaire.
- J'en étais sûr, mon frère cache quelque chose...
- Je t'aiderais à découvrir son secret, ne t'en fait pas, tu peux compter sur moi, lui sourit-elle en le regardant.
Mon partenaire lui sourit.
- Merci, je sais que je peux compter sur toi...
Grrr ! Et moi alors, tu m'oublies ?
Il était à peine quinze heures de l'après-midi, et j'en venais déjà à perdre mon sang-froid. Et dire que j'étais venue en salle commune avec les autres Élus pour me détendre et restée zen...
- Mais merdeeeeee ! râla Alexei en ébouriffant ses cheveux blonds, j'en ai marre, j'ai encore perdu !
La rousse avança subtilement son fou en direction des pions de son âme-soeur, avant de faire tomber son roi d'un doigt.
- Échec et mat ! annonça-t-elle fièrement.
Son partenaire marmonna quelque chose en croisant les bras.
- Tu veux retenter ta chance ? plaisanta-t-elle la main sur la bouche.
Les autres Élus qui étaient à proximité, chacuns vaquant à ses occupations favorites, ricanèrent sans retenu.
- Tu ne vas tout de même pas l'humilier encore une fois ? se moqua Melkior qui gribouillait des notes sur un carnet. Le pauvre, c'est déjà sa sixième défaite consécutive...
- Tu devrais peut-être songer à le laisser respirer un peu non ? ironisa Grey.
Alexei souffla de nouveau en replaçant ses pions.
- Bon, allons-y, je suis sûr de te battre cette fois-ci !
- Si tu le dis...
Et les voilà replonger dans une septième partie d'échec dont je connaissais déjà l'immuable issue : une autre défaite d'Alexei le perdant.
En les observant jouer, je me remémorai alors la discussion productive que j'avais eu avec Idriss...
● Début du Flash Back ●
Ryn et Jonathan, encore ses deux individus que je n'arrêtais pas de croiser à chaques coins de rue, à chaque couloirs, dans chaques salles de cet immense palais. A croire que le hasard ne m'aimait pas...
Alors que je fuyais misérablement le couple d'idiots ambulants qui étalait leur faux bonheur sous mes yeux, je décidai d'aller me détendre à la bibliothèque. C'était en quelques sortes devenu mon refuge, depuis que Jonathan et moi avions échanger un baiser plein de passion qui avait accessoirement relancé notre "bataille-navale".
- Jonathan, tu vas me le payer... murmurai-je en m'affalant sur un petit canapé crème situé près d'une des nombreuses table basse de la bibliothèque.
Je décidai de m'y allonger en soufflant avec langueur pour exprimer mon désarroi.
Je fermai les yeux un instant pour mieux savourer le silence.
- Je vois que tu profites bien de ton temps libre Toki...
Je sursautai à ces paroles et portai mon attention vers l'inopinée personne qui venait de me déranger pendant ma "méditation intérieure".
- Idriss, soufflai-je en m'asseyant.
- Toki, me répondit-il en s'asseyant devant moi sur une chaise attrapée au passage.
Je n'avais absolument aucune envie de le voir et de le supporter, alors que j'avais déjà un nombre non négligeable de problèmes à régler.
- Oui ? C'est pour ?
- Pour passer un peu de temps ensemble...
Bon, Idriss ne semblait pas avoir de mauvaises intentions à mon égard en débarquant ici. Mais force est de constater qu'il n'avait toujours pas compris que je préférai Jonathan à lui et qu'il n'avait, pour ainsi dire, aucune chance.
Mais bon, j'étais beaucoup trop agacée par les manigances de son jeune frère pour songer à lui crier dessus afin de relâcher ma frustration, accumulée depuis bien trop longtemps.
- Je vois que tu ne me fais plus trop confiance, je me trompe ? me demanda-t-il en me fixant de son regard clair.
Quelle question ! Évidemment que je doutais de lui ! Depuis que Ryn avait fait miroiter ses véritables intentions, je me méfiais d'autant plus...
- Je t'avoue que j'ai comme un doute, fis-je sur un ton sarcastique.
Le premier prince souffla bruyamment en passant la main dans ses cheveux. Ce geste confirmait bien l'agacement d'Idriss pour mes propos. Mais que voulait-il ? Ce n'était pas de ma faute s'il était aussi suspect...
- Je note le ton sarcastique dans ta voix, ajouta-t-il en croisant les bras.
- Il faut dire que tu ne me facilites pas la tâche...
Me retrouver avec lui dans une même pièce close, ne me rassurait pas le moins du monde.
- Bon, Toki, je t'ai déjà dis ce que je ressentais pour toi, tu commençais à t'ouvrir à moi...
A ces mots, son regard se fit alors plus profond, plus sérieux, comme s'il voulait mettre les choses au claire. J'avalais difficilement ma salive.
- ...mais à cause de Malyce, tu ne me fais même plus confiance...
J'avoue que sur le moment je me sentis mal. La culpabilité a toujours eu le don de me mettre mal à l'aise en "m'agrippant" le coeur à pleines mains.
Mais qu'est-ce qui me disait qu'il ne s'agissait pas de l'une de ses viles machinations ?
Je précisai néanmoins avec insistance :
- J'ai du mal à te croire Idriss, jamais rien ne joue en ta faveur.
- Dans ce cas, faisons en sorte que ça change.
Mais de quoi parlait-il ?
- Comment ça ? demandai-je en fronçant les sourcils.
Idriss sourit.
- Je te propose un jeu, expliqua-t-il, tu peux me poser deux questions auxquelles je répondrai sincèrement et je t'en poserai à mon tour. Qu'en dis-tu ?
Le piège, ça sentait le piège à plein nez. Si jamais il posait une question trop indiscrète, je serais toute de même obligé de lui répondre... Mes secrets risqueraient d'être dévoilés.
Mais d'un autre côté, ce jeu me permettrait d'obtenir des informations peut-être capitales.
S'il s'avérait qu'Idriss connaissait le traître, je pourrais alors en informer l'impératrice sans aucuns doutes.
Tous les avantages et inconvénients possibles défilèrent en boucle dans ma tête. Je n'arrivai pas à me décider : mais cette occasion ne se représentera peut-être plus.
Je devais cependant la jouer fine pour éviter qu'il ne cerne mes véritables motivations.
- Qu'est-ce qui me dit que tu ne vas pas me mentir ? demandai-je méfiante.
Le premier prince arbora un faciès sans réelles émotions.
- Quel serait l'intérêt de te proposer ce jeu, si moi-même je ne respectais pas les règles ?
Son ton était froids, mais il retrouva son sourire l'instant d'après : c'était extrêmement déstabilisant.
- Alors ? Partante ?
Je mordis l'intérieur de ma joue. Décidément, il ne me laissait pas le choix...
- J'accepte.
- Parfait ! Tu peux commencer, se réjouit-il en s'installant confortablement sur sa chaise, le dos contre le dossier.
Je réfléchis un moment à ma première question. Je devais la formuler de telle sorte à ce qu'il y réponde correctement, et de manière claire.
- Quels sont tes intentions envers l'Empire de Territorium ?
Ma question eu l'effet escomptée, et Idriss, stupéfait, plissa les yeux de suspicion.
- C'est quoi cette question ?
- Contentes-toi d'y répondre, lui indiquai-je en croisant les bras.
Le premier prince laissa passer quelques secondes de silence, avant de me répondre :
- Je n'ai aucunes mauvaises intentions envers cet empire. Ils sont ma famille et ma maison, jamais je n'oserait leur causer quelques torts que se soient !
Malgré la sincérité qui transparaissait dans sa voix, je laissai tout de même le doute planer.
- En me posant cette question, tu sembles sous-entendre que j'aurais de mauvaises intentions envers ma propre patrie, Toki.
Je restai de marbre. Il était hors de question qu'il se mette à fouiner dans mon enquête ! Les choses étaient déjà assez compliquées comme ça avec son frère, pour qu'il s'y mette à son tour !
- Je n'ai absolument rien sous-entendu, mentis-je en prenant une grande respiration.
Idriss ricana en me regardant dans les yeux. Le genre de rire que l'on fait en face d'une personne pour lui faire comprendre qu'elle doit cesser se foutre de nous.
- Toki, j'ai comme l'impression que tu te méfies de quelque chose, et se "quelque chose" semble être dangereux...
- Je ne vois pas de quoi tu parles.
- Hum, pensa-t-il en fixant un point au loin derrière moi, à t'entendre m'interroger, on dirait que tu mènes une enquête...
Merde ! Il était beaucoup trop perspicace !
- Comme si j'en avais le temps avec tout ce qui se passe...tentai-je en détournant le regard.
- Tout ce qui se passe ici ? Toki, il n'y a même pas eu de portail depuis un bon moment déjà.
Il chauffait de plus en plus.
- E-et alors ?
- Et alors tu as tout le temps de mener ta petite enquête. Reste à savoir de quoi il s'agit...
Je commençai à stresser.
Idriss était bien la dernière des personnes à qui je souhaitais parler du traître du palais !
- Tu sembles chercher quelqu'un, hum, un traître peut-être ?
Touchée.
Je me sentais particulièrement vulnérable. Jonathan lui-même ne connaissait pas l'existence du traître au sein du palais de Territori. Maintenant que le pire des personnages était au parfum, les choses risquerait de grandement se complexifier.
- J'ai donc vu juste, conclut le premier prince en reportant son regard sur moi en arborant un air de satisfaction sur le visage, et tu pensais que le traître n'était autre que moi ? Tu me brises réellement le coeur...
C'est ça, sortez les violons...
Son petit numéro embrouillait ma perception des choses. Plaisantait-il ? Ou bien était-il sérieux ?
Ma première tentative ayant lamentablement échouée, je devais me rabattre sur ma seconde question.
- Voici ma deuxième question : De quoi parlais-tu avec Angelina le jour de l'Arène à mort ? C'est quoi la "phase deux" ? Pourquoi tu n'arrêtes pas de te trouver au mauvais endroit au mauvais moment ?
Les questions se bousculaient dans ma tête. Impossible de toutes les contenir, impossible d'en réguler le flux.
Idriss perdit subitement son sourire. Le thème de mes questions ne semblait pas du tout lui plaire.
- J'ai souvenir d'avoir convenu deux questions par personne.
Comme par hasard...
- Réponds à la première d'entre elles.
Le mage de vent se gratta le sommet du crâne.
- Hum, je ne m'en souviens pas précisément, mais je crois lui avoir demandé de te laisser tranquille et de ne plus t'importuner.
- C'est vraiment tout ?
- C'est tout.
Grrr ! Idriss ne m'avait rien appris de nouveau. Et le pire dans tout ça, c'est qu'il me mentait sans une once de remord. Il me mentait ouvertement sans même faire l'effort d'y croire !
Quelle idiote d'avoir cru un seul instant qu'il serait honnête avec moi !
Au moins, une certitude aussi claire que de l'eau de roche m'était apparue : Idriss était un individu louche, et son comportement amical envers moi n'en était que plus suspect.
Je devais impérativement rester sur mes gardes.
- C'est mon tour...
Surtout, je ne devais faire aucun faux pas...
- Je t'écoute.
Il prit à son tour un moment pour réfléchir à sa question avant de planter son regard dans le mien. J'étais anxieuse à l'idée de répondre à ses questions, mais le sourire étrange qu'il esquissait à cet instant même, me préoccupa davantage.
- Toki, que ressens-tu réellement pour moi ?
Question stupide, réponse stupide.
- Rien.
- Rien ?
Idriss sembla déçu sur le moment avant de reprendre, le regard sombre probablement voilé par la déception :
- Toki, je t'ai demandé d'être honnête.
- Ok...
- Alors ?
- Je ressens sans aucun doute et avec certitude, une extrême méfiance à ton égard, répondis-je simplement en croisant les jambes.
Je ne comprendrais probablement jamais pourquoi il tenait autant à connaitre mes sentiments pour lui. C'était pourtant simple à retenir non ?
Idriss me fixa durant quelques stressantes secondes avant de me sourire chaleureusement.
- C'est parce que je suis très mystérieux, plaisanta-t-il, mais n'est-ce pas ce qui fait mon charme ?
Je soufflai grossièrement en me pinçant l'arête du nez.
- Ta seconde question s'il-te-plaît...
- Bien, dis-moi, si jamais tu tombes sur le soi-disant "traître" qui grouillerait dans le palais, que comptes-tu faire de lui ? Le tuer ?
Sa question me laissa perplexe. C'est vrai que j'avais terriblement envie de mettre la main sur le traître, mais que se passera-t-il lorsque je l'aurai coincé ?
- Euh...
- Oui ?
Je me retrouvai incapable de répondre. Pas parce que je ne voulais pas, mais plutôt parce que je ne savais pas quoi dire.
Et puis d'abord, en quoi cela avantagerait Idriss de le savoir ? Je n'avais pas oublier que notre petit jeu n'en restait pas moins un échange d'informations précieuses, qui pour le moment n'était qu'à sens unique. Idriss aurait sûrement à y gagner s'il me posait cette question... Il n'était certainement pas stupide.
- Disons qu'il passera un salle quart d'heure si jamais je venais à tomber sur lui.
- Ouh, le pauvre...feigna Idriss en frémissant.
Le frère de Jonathan ne semblait pas prendre au sérieux les "menaces" que je proférais. À vrai dire, moi-même je n'y croyais pas...
- Mais dis-moi, insista-t-il, qu'en pense mon cher frère ? N'est-il pas inquiet de te voir ainsi prendre des risques au péril de ta vie ?
Et zut !
- On avait dit deux questions par personne Idriss, lui rappelai-je tendue, je ne suis pas obligée de te répondre.
Le frère de Jonathan m'observa de ses yeux perçant. Je me sentais légèrement menacée...
- Tu n'as pas besoin de me répondre Toki, je sais bien que tu ne lui a rien dit.
Le ton de sa voix laissait transparaître sa supériorité. Il avait un avantage certain sur moi, et pouvait l'utiliser à tout moment : je devais simplement prévenir Jonathan avant lui.
- Bon, je crois que nous en avons finit, précipitai-je en me levant promptement.
Je me dirigeai la boule au ventre vers la porte de la bibliothèque et en saisis la poignet. J'ouvris la porte, quand un vent violent la referma brusquement, empêchant alors toutes tentatives d'évasion.
- Mais qu'est-ce qu- ?!
Idriss la main en direction de la porte, venait de bloquer l'accès à la sortie avec sa magie de vent. Lentement, il s'approcha de moi et posa sa main sur la mienne, toujours sur la poignet de cette foutue porte qui refusait de s'ouvrire.
- Qu'est-ce que tu fais Idriss ?! paniquai-je en le regardant dans les yeux, ouvre cette porte tout de suite !
L'aîné des Kyros Teker me sourit intensément :
- Toki, je sais que tu m'aimes, même si tu le nies parce que tu es sous l'emprise du lien d'âme-soeur. Je sais que je t'attire et qu'il y a une connexion spéciale entre nous, et rien ne pourra la briser. Alors je t'attendrais, le temps que tu te rendes compte de ton erreur et que tu me reviennes, mon amour...
Je l'avais écouté avec une certaine contrariété.
Comment osait-il me dire qui aimer et que faire de mes sentiments ?!
- Je t'ai déjà dit que j'aimais ton frère, et ça ne changera pas !
- Toki...
- Arrête !
- Je sais que tu reviendras vers moi...
De la frustration. Beaucoup de frustration à ce moment là.
- Laisse-moi ! m'agaçai-je en ouvrant violemment la porte.
Idriss lâcha sa prise et je pu partir en courant.
● Fin du Flash Back ●
- Non mais c'est une blague ?! J'ai encore perdu ! s'agita Alexei en me tirant de mes souvenirs.
J'observai les autres autour de moi : aucuns d'entre eux ne semblaient avoir l'esprit aussi occupé que le mien. Mes problèmes étaient toujours compliqués...
- T'es vraiment nul mec ! se moqua Grey, comment peut-on perdre sept fois de suite ?!
- J'ai vraiment un karma pourri...
- Je te le fais pas dire, s'amusa Hypolit qui somnolait la tête posée sur les cuisses de Maestia.
- Pfff, c'est toujours moi, souffla-t-il en croisant les bras derrière sa tête.
Comme toujours l'atmosphère chaleureuse de notre groupe me détendit instantanément. Depuis qu'il n'y avait plus de portail ouvert, nous coulions des jours "paisibles" à nous détendre et à nous entraîner. C'en devenait presque barbant...
- Mais ce n'est pas possible ! s'indigna Anaïs en portant la main à sa bouche.
Je détournai mon regard vers le petit couple qui était assis sur le tapis brun en cercle autour de Ragnarok qui agitait ses bras dans tous les sens.
- Mais siiiii ! Je t'assure ! s'exclama-t-elle, il était tellement gros que son triple menton touchait le sol, et qu'il avait de la graisse partout sur lui !
Mais de quoi parlait-elle ?
Je me levai de la fenêtre pour me diriger vers le cercle de conte improvisé.
- Où vas-tu ? m'interpela Jonathan dans mon dos.
Ce dernier était pourtant bien occupé avec sa Ryn chéri...
- Là où je ne vous verrai pas. répondis-je froidement en me dirigeant vers les trois jeunes gens, pendant que Jonathan avait un air surpris sur le visage.
Tant mieux.
- De quoi parlez-vous ? demandai-je à Ragnarok en m'asseyant à côté de Grey.
Le jeune homme se tourna vers moi en portant la main à sa bouche.
- C'est Ragnarok qui nous raconte ses batailles contre les démons primaires... J'ai-j'ai des haut-le-coeur...
Je rigolai doucement.
- Alors ? Comment sont-ils ?
- Enorme ! Ils sont énormes ! s'excita-t-elle en mimant leur taille avec ses bras, je racontai tout à l'heure à Anaïs que l'un d'entre eux était super gras ! Il était si dodu que lorsque je l'ai décapité, c'était comme tranché dans du beurre mou !
Anaïs et Grey blêmir devant l'image, tandis que je rigolai à m'en tenir le ventre. L'image d'un morceau de beurre mou ambulant au triple menton décapité net par Ragnarok me fit partir en un fou rire.
C'était beaucoup trop drôle d'écouter les histoires plus farfelues les unes que les autres de notre démone à la faux, même si sa contractante et son partenaire étaient au final traumatisés.
- Mais le démon avec lequel j'ai pris le plus de plaisir devait être le démon tout bleu là...euh...celui qui avait une tête très particulière...
- Et qu'avait-elle de si particulier, demanda Grey avec hésitation.
- Quand je coupai sa tête, elle repoussaiiiiiiiit ! C'était trop bien ! J'ai pas arrêté de couper et recouper et re-recouper et recouper de nouveau ! C'était trop bien ! se remémora-t-elle.
J'avoue avoir eu un sourire forcé pendant de brèves secondes pour mieux cacher mon mal-être.
Mais nous avions perdu Anaïs et Grey : les pauvres étaient devenus blancs.
- Malheureusement, fit Ragnarok avec déception, Jormungand a gâché tout le fun en carbonisant le démon... Quel rabat-joie !!!!
J'étais presque sûre que son "fun" lui avait fait oublié son véritable objectif : tuer les démons.
Ragnarok continua de nous raconter des récits épiques tous aussi dégoûtants les uns que les autres, avec un plaisir qui me tordit l'estomac.
Malgré tout, une très agréable ambiance régnait dans la salle commune.
"toc toc"
On frappa à la porte.
- Entrez ! lança Agartha en relevant subitement la tête, cessant toute activité.
Nous reportâmes notre attention sur le maître mage Zayne qui pénétra dans la salle.
- Bonjour à tous, fit-il gaiement, je vois que vous profitez pleinement de vos agréables moments de tranquillité...
Le mage referma la porte et s'approcha de nous, vêtu d'une tunique blanche au longues manches qui lui donnait un air de Merlin.
- Que nous vaut cette visite mage ? demanda Maestia en caressant les cheveux d'Hypolit qui somnolait encore.
Le mage afficha un sourire qui traduisait une très grande joie.
- Je viens vous annoncer que vous entrerez à l'Académie de Territorium dans deux jours, et que le Bal d'entrée à lieu demain soir ! se réjouit-il fièrement.
Un bal ?
- Oh. mon. dieu. frémit Anaïs en tremblant d'excitation, un bal ! Oui ! C'est trop bien ! Mais il me faut une robe ! Mais quelle robe ?! Quel style ?! Quelle couleur ?! Et puis mes cheveux, comment je vais les coiffer ?!
Anaïs sautillait dans tous les sens. Jamais je ne l'avais encore vue aussi enthousiaste.
- Oh non, c'est repartit, souffla Grey en frappant son front.
- Q-qu'est-ce qu'elle a ? demandai-je encore un peu perturbée.
Grey se contenta d'ébouriffer ses cheveux déjà bien en bataille. Derrière lui, sa partenaire toujours excitée, poussait des cris suraiguës indéchiffrables.
- Alors, si tu prononces "bal", "mariage", "naissance", ou encore "anniversaire", tu obtiens ça...
- Ah d'accord...rigolai-je nerveusement.
Le mage Zayne se racla la gorge.
- Je suis ravi que vous le preniez de cette façon Miss Anaïs, dit-il, mais je vous rappelle tout de même que ce bal a pour but de présenter les nouveaux élèves qui entrerons à l'Académie peu après...
Alexei souffla.
- Mais à l'académie on va étudier non ?
Bravo Alexei ! Ton géni ainsi que ton intuition surdéveloppée nous ont permis de comprendre le véritable sens du mot "académie"...
- Tout à fait, sourit le mage, n'est-ce pas merveilleux ?
- Euh...ouais ouais, c'est merveilleux, mentit Alexei en détournant le regard.
Liz devait sûrement y être pour quelque chose...
- Je vous conseille de vous reposez un maximum, nous informa Zayne, la tradition veut que le bal commence à minuit, et que les cours commencent le lendemain après-midi ! Aussi, je demanderai d'être à l'heure pour votre premier cours là-bas.
Comment arriver à l'heure en cours alors que nous faisions la fête quelques heures auparavant ?!
Ces Territoriens étaient complétement malades...
- Et on fait quoi à un bal à part danser ? se demanda Ragnarok qui était toujours parmi nous.
- Hum, je dirai qu'on y trouve également des rafraîchissements et de quoi satisfaire notre appétit, songea Agartha en regardant le plafond.
- Et c'est tout ? Même pas de combats ?
- Et bien non, désolée...
- Pfff, c'est nul les bals, râla Ragnarok en pénétrant dans l'Hybris sans demander son reste.
Je ne comprenais pas comment il était possible d'autant apprécier le combat...
- Enfin bref, reprit le mage, tachez de vous trouvez un partenaire ainsi qu'une tenue de soirée convenable pour assister à cette réception d'une importance capitale. Sur ce, je vous laisse, je dois préparer vos cours de géographie, de géopolitique, de commerce...
Le mage continuait d'énumérer les matières, sur lesquelles nous travaillerons probablement, tout en quittant la pièce.
Je sentais déjà la bonne odeur de l'encre et des rêches feuilles d'évaluation...
- Oui !!! On va bien s'amuser !!!! s'écria Anaïs dont le niveau exaltation n'était toujours pas redescendu.
- C'est vrai que ça a l'air intéressant, intervint Melkior, nous pourrons officiellement nous présentez devant les élèves de l'Académie.
- En effet, acquiesça Agartha.
Tout le monde paraissait enthousiaste. Tous, sauf moi : qui sera mon partenaire ? Quelle tenue vais-je bien pouvoir mettre ?
Et comme si Anaïs lisait dans mes pensés, elle vint vers moi et saisit mes mains, une douce lueur (inquiétante ?) dans ses yeux pétillants.
- Toki ! Je m'occupe de tout : ta robe, ton maquillage, ta coiffure et tes chaussures ! Hein ? Dis oui ! S'te plaît !!!!
Décidément, elle ressemblait parfois à Ragnarok. C'est à ce demander si son caractère n'avait pas déteint sur elle...
- Euh...ok...
- Oui !!!!
De toute manière, je n'avais aucune robe de soirée dans ma valise. On m'avait quand même dit que j'allais me battre, pas que j'allais danser avant d'entrer à Poudlard !
Notre petite Anaïs réitéra son numéro avec les autres filles du groupe, et parvint à toutes nous enrôler dans son "cercle privé".
Le problème du "comment aller au bal ?" était réglé, ne restait plus que le "avec qui aller au bal ?".
- Tu m'accompagnes au bal ? demanda Liz à Alexei en rougissant.
Liz ! T'es trop forte !
En face, son partenaire esquissa un sourire.
- Nan ! J'ai pas env-aïeuuh !
- Ce n'était une demande mais plutôt un ordre...
- Maieuuh je rigolai, pas besoin de me violenter...
- Crétin...souffla Liz.
Et c'est ainsi que tous les Élus invitèrent toutes les Élus sans exception...
Bien évidemment, je n'étais pas assez stupide pour me dire que Jonathan ferait le premier pas et viendrait jusqu'à moi pour me le demander... Il était bien trop fier pour cela.
- Euh...Jonathan ? demandai-je alors qu'il parlait avec Ryn.
Je n'arrive pas à croire que j'allais faire ça...
- Oui ?
- T-tu accepterais de...
- De ? interrogea-t-il.
Allez Toki !
- De venir avec moi au bal !
Je n'arrivai pas à le croire... J-je l'ai fait...
J'attendis une réaction de sa part, mais il n'en fit rien. Intriguée, je le regardai un moment avant de me rendre compte que Ryn me regardait également.
Mais le regard de Ryn était celui d'une personne gênée, ou semblable à celui d'un enfant qui aurait volé quelque chose.
Je ne le sentais pas...
- Euh...désolée Toki, me dit mon partenaire, mais j'y vais déjà avec Ryn...
QUOI ?!
- Q-quoi ? bégayai-je de manière inaudible.
Mon coeur se serra violemment, et je me retins de ne pas m'effondrer, car à ce moment précis j'avais mal.
À ce moment précis, j'avais la rage.
À ce moment précis, je voulais tout casser, tout brûler, tout détruire.
Car je n'avais rien. Rien à part cette immense trou dans ma poitrine.
- Toki ?! Qu'est-ce qui t'arrive ?! paniqua Jormungand dans mon esprit, que se pass-
Je coupai automatiquement la communication. Je ne voulais pas l'entendre me faire la morale.
- Jonathan ?! s'étrangla Maestia, non mais qu'est-ce que tu fais ?!
L'incompréhension se lisait sur les visages de tous. Et, malgré leurs protestations, Jonathan ne voulut rien entendre : il avait "promit" à Ryn paraît-il.
Le bruit de leur conversation s'estompa peu à peu, laissant place aux seuls battements de mon coeur.
Ce qu'il venait de me faire était impardonnable. Il n'avait pas le droit. J'acceptai tout depuis le début, mais là c'était trop.
Je m'avançai vers Jonathan, toujours "anesthésiée" par la douleur, grâce à laquelle je ne ressentis rien d'autre qu'un grand vide.
- Vraiment ? Tu vas me laisser tomber pour cette pétasse ? demandai-je froidement à mon partenaire.
- Hey ! s'indigna Ryn, je ne te permets pas-
- Ta gueule. Apprends à rester à ta place quand il le faut, ne m'énerve pas plus.
Les Élus étaient bouche bée.
Mais cela n'était rien comparé à la douleur que je ressentais en ce moment, la même qu'à l'époque : cette douloureuse sensation que je cherchai à tout pris à éviter... Mais maintenant c'était trop tard...
- Oui, désolé Toki, affirma Jonathan, une promesse est une promesse.
- Bien. fis-je en tournant les talons, la douleur poignante me transperçant la poitrine.
Je me dirigeai sans un bruit vers la porte.
- Toki ! m'interpela Liz en m'attrapant le main, je suis tellement désolée...
- Ce n'est pas de ta faute. C'est juste moi et ma faiblesse.
Je lui fis un sourire forcée et me dégagea de sa prise sous le regard peiné et bouleversé des Élus.
Je tirai la porte afin de sortir, quand le premier prince apparut de l'autre côté, alors qu'il poussait la porte pour entrer. Il m'observa en souriant avant de perdre son sourire.
- Toki ? s'inquiéta-t-il en entrant dans la salle, c'est quoi cette tête ?
- Ton frère vient de me jeter comme une merde.
- Quoi ?
Je lui expliquai brièvement la situation devant les autres.
Je ne sais pas pourquoi je lui ai raconté. Peut-être cherchai-je une petite flamme chaude pour me réchauffer, ou bien une épaule sur laquelle pleurée ? Ou seulement une personne sur qui compter. Quelqu'un qui me traiterait comme je le mérite...
- Tu ne pouvais pas tomber plus bas mon frère, s'irrita Idriss, tu es déjà accompagnée d'une merveilleuse âme-soeur mais tu trouves tout de même l'audace d'aller forniquer ailleurs ?!
- Ce ne sont pas tes affaires Idriss ! s'énerva Jonathan, retournes donc comploter ailleurs !
- Ce sont ses affaires maintenant. indiquai-je en serrant le poing, j'en ai marre de souffrir à cause de toi Jonathan.
Je me tournai vers l'aîné.
- Idriss, accompagne-moi au bal !
Le premier prince fut extrêmement surpris, ce qui ajouta du charme à sa petite frimousse innocente du moment.
- Avec plaisir, me sourit-il en m'attrapant la main pour m'attirer hors de la salle.
Derrière moi, les contestations de Jonathan, les murmures des Élus, et la douleur d'avoir été rejetée.
Je marchai désormais dans le couloirs aux côtés d'Idriss. Peut-être avait-il raison, peut-être que mon lien d'âme-soeur m'empêchait de voir la réalité en face : Jonathan ne m'aimait peut-être pas vraiment...
Cet idiot m'avait briser le coeur, et je n'allais certainement pas le laisser s'en tirer comme ça.
La vraie bataille commence maintenant !
✴️
PDV Omniscient
Un peu plus tard, sur une planète lointaine, très lointaine devenue ennemie de Territorium ; un mystérieux personnage faisait les cents pas à n'en plus finir dans son étrange laboratoire.
"boum boum" On frappa à la porte.
Ce bruit de métal sourd frappé avec force l'irritait prodigieusement. Il n'avait toujours pas trouvé de solution à son problème, et continuait à se questionner.
- Entrez.
Un démon de deux mettre de haut et armé jusqu'au dent pénétra dans l'obscure pièce à peine éclairée par quelques bougies de cire noire.
- Que se passe-t-il de si urgent pour que tu me déranges ainsi ?
Le démon mit un genou à terre, faisant grincer le fer de son armure qui gémissait sous son poids.
- Seigneur Morteus, je viens vous transmettre le message de notre infiltré chez les Territoriens...
Morteus se réjouit de cette bonne nouvelle et s'installa confortablement sur son trône constitué d'os. Comme il appréciait ce trône, il prit un malin plaisir à caresser la tête d'une de ses nombreuses victimes qui lui servait d'accoudoir.
- Parle.
- Le mission semble se dérouler à merveille, même si un des Elus tente de lui mettre des bâtons dans les roues...
Ce mot irrita ces oreilles. Personne ne pouvait lui mettre des bâtons dans les roues. Son plan se déroulait parfaitement depuis très longtemps, il n'était pas permis qu'il échoue si près du but.
- Les Élus, huh ?
- Oui mon seigneur...
- Ces parasites ne méritent pas que je m'occupe d'eux personnellement...
- Cela va de soit mon seigneur...
- Mais ils me gênent affreusement...
Morteus avait déjà du mal à se procurer les ingrédients spéciaux, nécessaires à la réussite de son plan, il n'était pas envisageable que ces maudits Élus se mettent sur son chemin. Se débarrasser d'eux sans détour s'avérait être la meilleur solution. Ne restait plus qu'à choisir le bon moment...
- Autre chose ?
- Oui seigneur Morteus, notre contacte nous fait savoir qu'une réception dansante se déroulera demain soir très tardivement dans la nuit. Il espérait que v-
- Je sais.
Le démon se prosterna davantage devant le maître magicien de Pandémonium pour qui il avait un immense respect.
Morteus savait bien qu'il allait devoir s'occuper de ces Élus. Et une occasion en or venait de se présenter...
- Général.
- Oui mon seigneur...
- Préparer vos troupes à attaquer les Territoriens demain soir au lieu de la réception.
- Oui
- Prenez avec vous le plus de démons primaires possibles, de préférence ceux qui sont les plus affamés...
- O-oui...
- Je veux que se soit un massacre.
Le démon salua brièvement son seigneur avant de déguerpir le plus vite possible. De nouveau seul, Morteus se leva de son trône et s'approcha de son sceptre noir orné d'un cristal obscur qu'il agita, faisant miroiter sa magie noire.
- Élus, j'espère que vous apprécierez mon petit cadeau...
Il sourit au cadavre inerte qui gisait sur le sol, fruit d'une énième expérience ratée, et dévoila une dentition d'affreuses dents noires.
Morteus était heureux. Il allait se débarrasser des gêneurs en leur envoyant une belle surprise.
Mais le pire dans tout ça, c'est qu'ils ne le savaient même pas...
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Hello! 😘
Voici un autre chapitre !
Que pensez-vous d'Idriss ?
De la réaction de Toki ?
Du comportement de Jonathan ?
De la surprise de Morteus ?
N'hésitez pas à voter, commenter et partager ! 😉
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