Chapitre 99. « When life leaves us blind, love keeps us kind »
Coucou ! Je vous écris juste un petit mot pour vous dire que, étant donné que je reprend les cours lundi, la suite de la publication sera loin d'être régulière. J'aurai probablement très peu de temps pour moi et j'aimerais alterner entre Jim Morrison et It's My Life. Idéalement, je pense quand même pouvoir poster une fois par semaine, même si ça fait peu. Voilà, je voulais autant vous prévenir.
Et je sais que j'abuse un peu avec Linkin Park dans les titres de chapitre, mais Chester me manque ! 😭😂
Bref ! Bisous ❤
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Dans un train en direction de Dijon, j'étais dans le flou le plus total depuis quelques heures. Mon esprit était embrumé. Une seule chose retentissait encore et encore dans mes oreilles : les sanglots de la pauvre Kate et la terrible nouvelle qu'elle avait eu tant de mal à prononcer ; Alexis était mort.
Je n'arrivais plus vraiment à savoir comment je me sentais, j'avais l'impression d'être triste mais sans le ressentir réellement. J'étais...
Vide. Voilà comment je me sentais. Comme si toutes les tragédies qui avaient parsemé ma vie avaient épuisé mon empathie.
Mais je me souvenais bien d'une chose : j'avais été terrifiée. En raccrochant, mes mains s'étaient mises à trembler de manière incontrôlable, j'en avais presque lâché mon téléphone. J'avais finalement réussi à me calmer, puis j'étais allée... Qu'est-ce que j'étais allée faire déjà ?
Regardant par la vitre les arbres défiler à toute allure, les événements des heures précédentes me revenaient sous forme de flashback, comme si j'avais été ivre et que je venais seulement de me réveiller.
Kate avait appelé... Des larmes m'étaient monté aux yeux, sans pour autant s'écouler... J'avais eu peur, terriblement peur... Mais pourquoi ?
Et puis j'avais quitté mon appartement dans un état de transe ; le rôle d'un zombie n'aurait pas été mieux incarné que par moi quelques heures plus tôt.
Ah oui, Raphaël m'avait rattrapé, il m'avait demandé ce qu'il n'allait pas... Je ne me souvenais même pas de ce que je lui avais répondu.
La vérité je crois ? Oui c'est ça. Je lui avais annoncé la mort d'Alexis, je lui avais sourit en lui soutenant que j'allais bien, il avait semblé me croire...
Parce qu'il me semblait que j'allais bien à ce moment-là, j'étais simplement perdue. Et effrayée, mais je ne savais toujours pas par quoi...
Mon jumeau m'avait presque obligé à rester avec lui et Idriss mais j'avais refusé, préférant aller chez Deen.
Ah voilà ! J'étais ensuite allé chez Deen. Raphaël m'avait laissé partir, pensant probablement que j'avais davantage besoin de mon copain que de lui.
Ma gorge se serra en repensant ce que j'étais allé faire chez Deen, et je fermai les yeux. Je me souvenais enfin de la raison pour laquelle j'avais eu si peur.
La voix si insupportable de la SNCF retentit dans le TGV, me faisant sortir de mes pensées.
Après avoir pris une grande inspiration, le cœur lourd, je m'emparai de mon petit sac de sport dans lequel j'avais machinalement fourré quelques affaires.
Le cerveau débranché, mes pieds me guidèrent tout seul. Je pris d'abord le bus sans me soucier de payer, puis je descendis pour attendre un second bus.
Cette maison n'était pas là avant si ?
Ou alors ses volets n'étaient pas rouges...
Ah non ! Il y avait tout simplement une haie avant, cachant la maison en question.
« Mel, qu'est-ce que tu me fais là ? »
Les paroles de Deen me revinrent soudainement en tête.
Il avait eut l'air en colère. Vraiment très en colère. Je l'avais rarement vu dans un tel état contre moi.
Le bus se présenta finalement au bout de quelques minutes et je montai dedans, toujours dans un état second.
20h32. J'avais de la chance d'avoir pu trouver un bus à cette heure-là dans cette ville de mort.
Les arrêts défilèrent, puis j'appuyai finalement sur le bouton rouge pour demander mon arrêt. Je sortis du bus, rabattis la capuche de mon sweat sur ma tête et glissai mes mains dans les poches de ma veste en cuir. Le vent d'hiver fouettait mon visage et je tentais tant bien que mal d'enfouir mon nez dans mon écharpe.
Une paire de minutes plus tard, j'arrivai devant la maison de mon père. Je sentais déjà ma gorge se serrer à l'idée qu'il me faille parler et expliquer ma venue. J'espérais ne pas craquer, mon père ne m'avait presque jamais vu pleurer.
J'appuyai sur la poignée mais fus finalement contrainte de sonner lorsque je me rendis compte que celle-ci était fermée.
Faites que Soso et Zo soient couchés, je vous en supplie.
La clé tourna dans la serrure, puis la porte s'ouvrit et le visage de mon père apparut. Il sembla d'abord surpris de me voir, puis heureux, puis ses traits se tendirent au fur et à mesure.
Il n'eut pas le temps de parler que déjà je me précipitais pour me blottir contre lui, avant d'y fondre en larmes. Ses bras vinrent rapidement se refermer autour de moi avec force :
– Hey, what's wrong sweatheart ?
Je n'avais vraiment pas la force de parler et fus prise d'un violent sanglot. Mon père m'embarqua à l'intérieur et claqua la porte avec son pied sans jamais me lâcher, raffermissant même son étreinte.
– Chut... Mel, tout va bien... Dis-moi ce qu'il se passe, me chuchota-t-il en m'embrassant la tête à plusieurs reprises.
Alors que je ne parvenais toujours pas à parler, il me porta jusqu'au salon où il s'assit sur le canapé et m'installa en travers de ses jambes avant de me bercer comme si j'avais quatre ans.
– Je suis là mon cœur, je te lâche pas, calme-toi...
Je savais de quoi j'avais l'air, comme ça, à vingt-quatre ans dans les bras de mon papa. J'avais un peu honte de craquer devant lui, cet homme devant qui j'avais toujours tout fait pour garder une façade de fille indestructible. Mais aujourd'hui, je n'avais plus la force de faire semblant, et tant pis si mon père était déçu de moi.
– Calme-toi mon bébé, s'il te plaît, me supplia-t-il tout en resserrant son étreinte alors qu'il me berçait. Mel, parle-moi...
Son ton se voulait doux, mais je sentais qu'une certaine inquiétude perçait dans sa voix. Ce fut probablement cette constatation qui eut raison de mes sanglots.
Car je finis enfin par me calmer, le pouce de mon père faisant de légers aller et retours sur ma joue tandis qu'il alternait entre mots apaisants et baisers sur mes cheveux, et j'essuyai finalement mes larmes en m'écartant doucement de son torse.
– Ça va mieux ? me demanda-t-il doucement, ses yeux bleus emplis d'inquiétude.
Je hochai doucement la tête. Maintenant que j'avais tout lâché, oui. Même si je détestais ça, ça faisait quand même du bien de relâcher la pression de temps en temps.
– T'es gelée, je vais te chercher un truc, bouge pas.
Il me souleva de ses genoux pour me déposer avec une facilité déconcertante sur le canapé, puis revint quelques secondes plus tard avec un paquet de mouchoirs et un plaid, avant de m'enrouler dedans comme il aurait pu le faire avec un des petits. Je le soupçonnais d'apprécier ce genre de moment où il pouvait de nouveau jouer son rôle de papa-poule.
Je lui fis un sourire pour tenter de le rassurer :
– Merci.
–Tu m'expliques maintenant ? Tu m'as fait flipper, la dernière fois que je t'ai vu pleurer tu devais avoir neuf ans et encore...
Même avec lui, j'avais toujours eu tendance à me cacher, mais ce soir et après tout le temps qu'avait passé Deen à essayer de me débloquer depuis que je le connaissais, je n'avais pas pu m'empêcher de pleurer.
Deen... Sa seule évocation faisait monter mes larmes de nouveau.
– Alexis... Il est mort, soufflai-je. Et j'ai... J'ai... J'ai rompu avec Deen.
Le prénom de mon copain s'étrangla dans ma gorge et mon père m'attira vivement contre lui, un bras autour de moi et sa paume gardant ma tête sur son torse.
Je n'avais vraiment pas l'habitude de pleurer autant, et je me demandais comment mes yeux pouvaient contenir autant d'eau.
Il fallait quand même que je me ressaisisse, j'étais plus forte que ça.
Je m'écartai une nouvelle fois de mon père en essuyant rageusement mes larmes.
– Pourquoi t'as fait ça Mel ? me demanda-t-il doucement.
– Parce que j'ai peur.
– Peur de quoi ?
– De le perdre...
Mon père ferma les yeux en soupirant d'un air empathique, semblant comprendre où je voulais en venir :
– Alexis... C'était ton ex c'est ça ?
J'acquiesçai en tentant de refouler mes larmes ; trop de pleurs pour une soirée.
– Qu'est-ce qui s'est passé ?
Me remémorant les paroles de Kate, les quelques mots qu'elle avait réussi à sortir entre ses sanglots, je lui expliquai :
– Un anévrisme. C'était génétique, et indétectable à moins qu'il ai eu l'occasion de faire des examens avant. Ça aurait très bien pu ne jamais péter.
– Putain de merde... Maëlle, je suis désolé, soupira mon père d'un air contrit.
– Putain il allait avoir vingt-six ans...
J'étais plus en colère que triste. Pourquoi des personnes aussi formidables qu'Alexis nous étaient enlevées alors que des centaines de pédophiles, de meurtriers et de violeurs étaient encore en pleine santé ?
– Mais c'est pas pour ça que t'as pleuré pas vrai ?
Je relevai la tête pour capter le regard azur de mon père, les yeux écarquillés.
– Mel, je te connais par cœur. On a connu des quantités de décès et je t'ai jamais vu verser une seule larme.
Un léger silence s'installa durant lequel je me refusais à exprimer tout ce qui me passait par la tête, regardant mes doigts plutôt que les yeux sondeurs de mon père.
– Mel, regarde-moi.
Mon père ne me laissa même pas le temps de m'exécuter et pris mon visage délicatement dans ses mains :
– C'est pas en repoussant Deen que tu vas empêcher la vie de lui mettre des bâtons dans les roues. S'il doit lui arriver quelque chose, il lui arrivera quelque chose. Je t'en supplie, ne te ferme pas par peur de le perdre. Ne laisse pas la peur le repousser, s'il te plaît. Je l'ai fait avant toi, pendant trop longtemps, et ça m'a jamais rendu heureux. Et je veux pas voir ma petite fille malheureuse.
Une larme s'échappa d'un de mes yeux et mon père la chassa avec son pouce.
– Je lui ai dit des choses horribles...
– Il comprendra quand tu lui auras expliqué.
– Nan, il veut plus de moi, il m'a clairement dit que c'était la dernière fois que je fuyais.
– Est-ce qu'il le pensait ?
Son ton voulait laisser entendre que sa question était rhétorique, mais la réponse était toute autre que celle qu'il attendait probablement :
– Ça a été virulent. On s'est jamais engueulé aussi violemment avant, on s'est vraiment dit des choses horribles tous les deux... Je pense que je pourrai pas le récupérer, j'ai été trop loin. Je sais qu'il en peut plus de moi maintenant. Il... Avant que je parte il m'a dit qu'il me détestait...
– Eh Mel... Je prétends pas le connaître mieux que toi, mais par contre je sais comment un mec fonctionne, crois-le ou pas j'en suis un.
Il réussit à me décrocher un léger sourire.
– Ce genre de paroles ça veut souvent dire tout le contraire, continua-t-il. Après, encore une fois, je sais sûrement moins bien que toi comment il pense, mais s'il te plaît, laisse pas ses mots t'empêcher d'essayer de le récupérer ok ?
J'acquiesçai doucement ; comme d'habitude, mon père avait raison.
– T'as faim ? me demanda-t-il finalement en remettant une mèche de mes cheveux derrière mon oreille.
J'acquiesçai une nouvelle fois et un large sourire prit place sur son visage :
– Cool, ça veut dire que ça va pas si mal que ça !
– T'es tout seul ?
– Nan, les petits sont couchés. Mais Fanny fait soirée chez une pote à elle.
Tout s'expliquait.
Mon père se ramena finalement avec un paquet de Curly le temps que la pizza qu'il avait sorti du congélateur soit prête, puis je passai la soirée blottie dans ses bras devant La septième compagnie.
Je dus probablement m'endormir dans ses bras puisque je me réveillai en sursaut dans mon lit vers une heure du matin, sans aucun souvenir d'avoir vu la fin de ce film que je connaissais par cœur, au chaud sous ma couette. J'avais vraiment le meilleur père du monde.
Le sommeil dissipé, et la réalité s'immisçant de nouveau petit à petit dans mon esprit, mon cœur se serra une nouvelle fois et une boule se forma dans ma gorge.
Deen me manquait. Il m'avait manqué durant les semaines où nous ne nous voyions que très brièvement, mais là c'était différent. Parce que je savais au fond de moi que c'était probablement fini. Pour de bon.
Même si mon père avait quelque peu réussi à me convaincre de rappeler le rappeur, mes résolutions de la soirées s'étaient envolées : j'avais trop peur pour lui, trop peur de le perdre.
Je n'étais pas superstitieuse, ni même fataliste, mais inconsciemment, j'avais l'impression que je gâchais tout ce que je touchais. Ou qu'on me prenait tout ce que j'aimais.
Mon oncle Adam, que j'idolâtrais étant petite.
Ma mère, que j'aimais plus que tout, évidemment.
Joshua, ce petit frère qui n'avait même pas eu le temps d'émettre un seul son.
Ali. Bordel, ça faisait encore un mal de chien.
Alexis, le premier garçon que j'avais réellement aimé.
Et Raphaël, qui m'abandonnera beaucoup trop tôt dans un futur proche.
Alors oui, j'avais peur que Deen me soit arraché aussi. J'étais même terrifiée. Je préférais l'éloigner de ma vie maintenant pour empêcher une énième tragédie d'arriver, plutôt que de souffrir encore. Même si ça faisait terriblement mal, j'avais au moins la satisfaction de le savoir vivant, bien que loin de moi.
C'était stupide, mais je ne pouvais m'empêcher de réfléchir ainsi.
Des petits pas hésitants sur le parquet de ma chambre me tirèrent de ma réflexion. Je n'eus pas le temps de regarder qui venait d'arriver au milieu de la pièce que déjà Sohel se glissait sous ma couette et posait sa tête sur le creux de mon épaule :
– Ça va aller Mel, chuchota-t-il. Moi je suis là...
Je ne pus empêcher une petite larme de s'échapper de mes yeux, et serrai mon petit frère contre moi. Faites qu'on ne m'enlève jamais ce petit humain. Jamais.
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