Chapitre 96. « Let it be Christmas everyday »

– Mel, debout, debout, debout, debout ! C'est Noël !

J'avais totalement oublié ce que ça faisait de se réveiller dans la même maison que Sohel. Mon petit frère sautait sur mon lit, m'écrasant parfois un pied au passage, puis il se laissa tomber entièrement sur moi avant de s'élancer sur le lit de mon jumeau :

– Raphy, Raphy, Raphy, debouuuuut !

Mon frère grogna quelques mots inintelligible puis fut pris d'une quinte de toux, et j'entendis Sohel lui faire un bisous avant qu'il ne change de nouveau de cible pour venir se glisser sous ma couette à mes côtés, sa tête sur ma poitrine et ses petits bras autour de mon cou :

– Allez Mel, viens ouvrir les cadeaux avec moi, me supplia-t-il.

Mes paupières s'ouvrirent finalement pour découvrir ses yeux de chien battu, et je passai ma main dans ses cheveux avant de lui embrasser le front.

– Tu crois que le Père Noël il est passé pour toi Crapaud ?

Sohel leva les yeux au ciel d'un air excédé :

– Il existe pas le Père Noël.

J'écarquillai les yeux ; c'était nouveau ça.

– C'est Tonton je l'ai vu cacher les cadeaux après qu'il les a acheté avant les vacances.

– C'est un boulet Tonton hein ?

Mon petit frère hocha vivement la tête avec un grand sourire, puis il refit sa moue de chien battu pour essayer de me sortir du lit. S'il pensait que ça allait marcher...

Et bien il avait totalement raison ! Comme d'habitude, je cédai à sa petite bouille, et le laissai m'entraîner en me tirant par la main.

– Tu viens Raphy ? s'exclama-t-il.

– Laisse-le se réveiller doucement, lui répondis-je, il nous rejoindra après.

En bas, Zoé pleurait apparemment dans les bras de mon père :

– Je comprends pas ce qu'elle a, disait celui-ci. Elle a dormi, elle a mangé, elle a été au pot, sa couche est propre... Là je sèche.

La voix de Fanny lui répondit d'un air moqueur :

– C'est parce qu'elle est aussi chiante que toi mon amour, elle grogne sans aucune raison.

– Tu rigoles ? Je me souviens comment t'étais à son âge, tu chialais pour un rien !

– C'était pour attirer l'attention d'Adam et de Chloé, ils étaient trop occupés à s'engueuler, je faisais avec les moyens du bord.

Lorsque Sohel et moi arrivâmes dans le salon, mon père rigolait et Fanny l'embrassait. Ils étaient vraiment trop beau ensemble.

– Moi aussi j'veux un câlin, s'exclama Soso avant de courir vers nos parents pour entourer leurs jambes de ses petits bras.

– Qui te dit que nous on en veut un ? répliqua mon père d'un air taquin.

Mais Sohel eut l'air vexé et se renfrogna.

Depuis cette histoire d'adoption je voyais bien qu'il essayait d'analyser le comportement de mon père pour savoir s'il allait accepter sa demande ou pas. Il n'avait pas trop confiance en lui et chaque petite plaisanterie de mon père lui faisait perdre encore plus confiance, alors qu'il n'avait jamais été timide avec lui. 

Le problème, c'était que mon père se croyait drôle, et ne voyait pas le mal puisque pour lui il était évident aux yeux de tout le monde qu'il aimait Sohel comme un fils. 

Vivement le mois de mars et l'anniversaire de mon père !

Sohel retira ses bras de nos parents, baissa les yeux, et partit à l'étage.

– Bah qu'est-ce qui lui arrive ? s'étonna mon père. Je l'ai pas vexé quand même ?

Fanny et moi n'eûmes même pas à répondre puisque mon père se rembrunit d'un coup et se rendit compte tout seul de l'état de Sohel :

– Soso, viens là mon grand !

Sohel débarqua quelques secondes plus tard, tirant Raphaël par la main.

– Jour', marmonna celui-ci.

Fanny embrassa Raph d'un air inquiet en passant une main dans ses cheveux tandis que mon père ignora totalement mon jumeau et s'accroupit rapidement devant Sohel, posant une main sur sa joue :

– Je rigolais toute à l'heure hein, bien sûr que je veux un câlin de mon p'tit bonhomme !

Il ne laissa même pas le temps à Sohel de réagir et le prit dans ses bras en frottant affectueusement son dos avant de se relever et de lui embrasser la tête :

– Tout le monde est prêt pour les cadeaux ?

Les petites fossettes de Sohel se creusèrent et mon père esquissa un sourire satisfait :

– Ah bah voilà, je préfère ça, lança-t-il en lui ébouriffant les cheveux avant de le poser au pied du sapin.

– C'est pour moi tout ça ? lança Sohel d'un air joueur.

– Nan, c'est pour moi, déclara Raph. Je suis la seule personne de cette famille qui mérite des cadeaux.

– Soso, fais comme moi, lui lançai-je, et je tirai la langue à mon jumeau, suivie par mon petit frère.

Raph ne pu s'empêcher de rigoler face à nos deux grimaces, et leva les yeux au ciel en me regardant.

Les cadeaux furent ensuite distribués ; comme tous les ans, nous n'attendions pas le reste de la famille pour le faire. De toute façon, à part nos arrières-grands-parents et nos grands-parents, nous savions tous que nous détestions ce genre de réunion de famille. Fanny aimait beaucoup ses cousins, mais tout le monde préférait être ailleurs. Pourtant les trois quarts de la famille fêtaient Noël de leur côté ; la seule raison pour laquelle une minorité d'entre nous nous rassemblions encore était parce que nos arrières-grands-parents ne pouvaient pas se partager entre la cinquantaine de membre de la famille.

Raphaël eut droit à un nouveau télescope beaucoup plus performant ainsi qu'à du matériel d'escalade tout neuf ; Sohel reçut un vélo, des Playmobiles et des jeux vidéos ; Fanny eut droit à des bijoux de joaillier, des bijoux confectionnés main par Sohel, et un coffret de sa série préférée ; mon père reçut un nouveau portable et des dessins ; et on m'offrit de nouvelles baskets de course, et des nouvelles Dr Martens - je remerciai directement Fanny pour cette dernière idée, me doutant bien qu'elle ne venait pas de mon père.

Alors que Zoé galérait à ouvrir ses paquets avec ses petites mains, Sohel fut le premier à aller aider sa petite sœur :

– Attends, je vais t'aider Zozo. Regarde, tire avec moi ! Voilà...

Zoé eut l'air ravi d'être aidé par son grand frère et j'eus un sourire attendris devant cette scène ; ils étaient vraiment adorables.

Lorsqu'elle découvrit un panier de basket, Zoé sautilla sur place comme une puce, un grand sourire sur le visage. Je sentais qu'elle allait passer l'après-midi à mettre des paniers avec Sohel. Elle ne s'intéressa que très peu à la suite de ses cadeaux, mais fut ravie de trouver des jeux de société et une nouvelle poussette pour ses poupons.

Nous nous affairâmes ensuite tous dans la cuisine, devant accueillir une vingtaine de personnes pour le repas : nos trois arrières-grands-parents, nos grands-parents, quelques cousins et leurs enfants, et pour la première fois, Tarek et Hugo.

Une fois le repas préparé, je me chargeai d'habiller Sohel. J'adorais faire ça, m'occuper de mon petit frère me manquait terriblement. Je ne pus m'empêcher d'être très fière de mon travail, et m'empressai de poster la photo sur mon deuxième compte Instagram ; je n'avais pas l'habitude de faire ce genre de choses mais mon compte privé était uniquement suivi par mes proches.

Je coiffai ensuite tant bien que mal ses cheveux indisciplinés, Sohel voulant faire disparaître ses boucles pour Noël. J'avais essayé de négocier, le trouvant vraiment adorable avec ses petites boucles brunes, mais son « non » avait été catégorique.

Il s'admira ensuite dans le miroir :

– Ouah ! J'suis trop beau !

J'éclatai de rire face à l'admiration qui perçait dans sa voix. Au moins, il était bien dans sa peau !

Je m'éclipsai ensuite dans la salle de bain pour me préparer, Zoé assise sur la cuvette des toilettes fermée et faisant attention à tous mes faits et gestes d'un air admiratif.

– Moi aussi je veux ! déclara-t-elle en pointant mon mascara du doigt alors que je me maquillais légèrement.

– C'est pas pour maintenant ma Zo', t'es trop petite pour le moment, répliquai-je en la prenant dans mes bras avant de déposer un bisous sur sa petite joue de hamster.

J'installai ma petite sœur sur mon lit, puis enfilai une robe pull noire aux épaules dénudées et laissai mes cheveux ondulés retomber sur mes épaules.

– Ma grande sœur, c'est la pus belle, déclara Zoé d'un air fier.

Est-ce qu'un seul des gosses de cette maison était capable de ne pas être mignon ?

– Nan, c'est toi la plus belle ma Zozo.

Le visage de ma petite sœur s'éclaira d'un large sourire face à mon compliment. C'était vrai quoi ! Ses beaux cheveux roux faisaient ressortir son petit teint rose, et la petite robe blanche que sa mère lui avait choisit était adorable. Et ses yeux bleus... Mon dieu, c'était le combo parfait !

– Putain de merde, t'es trop belle, fit-une voix masculine derrière moi.

Je me marrai en me retournant. Les compliments de Raph !

– T'es pas mal non plus dans ton genre, répliquai-je, et nous rigolâmes comme deux abrutis.

Alors que je mettais ma deuxième boucle d'oreille, la sonnette retentit, et mes deux frères se précipitèrent en bas.

– Et Zoé bande de cons ?

– Maëlle Siobhan Isabelle Duprés-Clarkson, tu jure pas devant ma fille : entendis-je hurler mon père au rez-de-chaussée.

Sur mon lit, Zoé était morte de rire.

– Tu verras si tu rigoleras autant quand ce sera ton nom au complet qu'il prononcera, marmonnai-je.

À peine arrivées en bas, Tarek se précipita dans notre direction :

– Aaah ! Enfin y'a ma Clarkson préférée !

Je levai les yeux au ciel en lui tendant Zoé ; son humour de merde et lui étaient si prévisibles.

Il couvrit ma sœur de bisous, tandis que Zoé se tordait de rire, puis feignit un air surpris en me voyant :

– Ah, salut Maëlle.

Je ne pus m'empêcher de rire face à sa gaminerie, et lui assénai une claque derrière la tête avant d'aller prendre Hugo dans mes bras :

– Joyeux Noël, mon meilleur ami préféré.

Il me serra contre lui en ricanant :

– T'as entendu ça Bouhied ? Va chier.

Hugo se reçut une claque derrière la tête par mon père :

– On jure pas devant Zoé, faut que je vous le répète combien de fois putain ?

Mon ami et moi écarquillâmes les yeux et ceux de mon père se fermèrent lorsqu'il se rendit compte de sa connerie :

– J'arriverai jamais à être un père décent de toute façon, soupira-t-il. Bon allez, aidez-nous à mettre la table, je vous ai pas invité pour rien, j'avais besoin de main d'œuvre.

Nous nous exécutâmes tous et vers midi, tout était prêt.

Mais un détail sur la table attira mon attention :

– Pourquoi y'a si peu de couverts du côtés des enfants ? On attend pas au moins quatre cousins de Fanny et onze gosses ?

Mon père et Fanny s'échangèrent un regard perdu ; ils nous cachaient définitivement quelque chose.

– Julien vient pas, sembla improviser mon père. Donc il y a déjà ses trois mômes en moins.

– Ouais, mais ça fait toujours deux couverts de trop, fit remarquer mon frère.

– Bon, vous voulez pas aller chercher le crémant et le blanc ? demanda Fanny.

Hugo et Tarek adressèrent un regard dubitatif à nos parents :

– Vous cachez quelque chose, fit Tarek. Et je découvrirai de quoi il s'agit...

J'éclatai de rire en entendant son ton digne d'un épisode de Scooby-Doo.

– Fais ce que je te dis au lieu de raconter des conneries, lui ordonna mon père en ricanant, et Tarek s'exécuta.

Une petite demi-heure plus tard, nous accueillions nos grands-parents, puis nos arrières-grands-parents. Papé et Mamé furent ravis de retrouver Tarek et Hugo, et ces derniers se firent un malin plaisir de mal se comporter devant notre arrière-grand-mère démoniaque.

Je profitai d'un Tarek beaucoup trop à l'aise dans son rôle de racaille pour voir toutes les notifications reçues à propos de la photo de Sohel, et craquai une nouvelle fois en voyant sa petite bouille :

Aimé par raph_dupclark et 68 autres personnes

maëllescred « Dis Mel, est-ce que je ressemble à Mikael ? ». Cet enfant a beaucoup trop d'estime pour toi deenburbigo, faut que je le remette dans le droit chemin

tyler_clrksn d'où t'affiche mon fils comme ça toi ?

    -> maëllescred c'est pour montrer au monde à quel point il est beau

deenburbigo tu lui as répondu quoi ?

    -> maëllescred qu'il était 100 fois mieux que toi

nekensoumsoum c'était pas moi son idole à la base ?

aliceboitl il est si chou, j'veux le même à la maison !!!!


Le sourire aux lèvres, je relevai vivement la tête en entendant la sonnette retentir. Enfin ! Je crevais de faim !

Raphaël fut le premier à rejoindre la porte tandis que j'allais chercher Sohel et Zoé dans leur chambres. J'avais quand même vraiment la flemme de voir les cousins de Fanny et leurs enfants.

Mais quelle ne fut pas ma surprise lorsque j'entendis Raphaël s'exclamer en bas :

– Mais nan !

Ses paroles furent aussitôt suivies par des cris de joie, et Sohel se précipita en bas, moi sur ses talons.

Je faillis lâcher Zoé lorsque je vis les personnes présentes dans le salon.

Mon père et Fanny n'avaient pas du tout l'air surpris, et je me doutais qu'ils étaient à l'origine de cette surprise.

Ok, procède par étapes Maëlle. 1 : poser Zoé au sol. 2 : courir et sauter dans ses bras.

Je suivis mes propres consignes et sautai au cou de mon oncle en entourant son bassin de mes jambes comme un koala.

Wow ! s'exclama Jared avec surprise avant de refermer ses bras autour de moi en rigolant. It's nice to see you too kiddo !

Qu'est-ce qu'il m'avait manqué ! Ma famille et la sienne s'étaient vus pour Thanksgiving, mais Raphaël et moi n'avions pas pu lâcher les cours et mon boulot pour voyager avec eux, alors j'étais vraiment ravie de les voir ici.

Jared me déposa finalement sur le sol, un grand sourire aux lèvres, puis j'embrassai sa femme et leurs quatre enfants.

Mais mon frère et moi n'étions pas au bout de nos surprises, puisque quelques minutes plus tard, Megan - la sœur aînée de Jared - et son mari débarquaient les mains pleines de cadeaux, suivis par leurs deux enfants et par Granny, sa sœur et son mari. Aucun signe de Nick à l'horizon puisqu'ils avaient divorcé quelques semaines après les derniers incidents.

Ce jour-là, je passai l'un des meilleurs Noël de ma vie. Même si l'absence d'Adam et de ma mère se faisait toujours ressentir, la présence de notre famille américaine apporta quelque chose en plus.

Nous passâmes notre temps à rigoler.

Jared et mon père se comportaient comme des enfants et se faisaient un malin plaisir à embêter Megan le plus possible, comme lorsqu'ils étaient petits.

Nos petits-cousins n'arrêtaient pas de nous coller Raphaël et moi, et je tentais de m'occuper de chacun d'eux sans négliger Sohel qui semblait un peu jaloux. Mais celui-ci s'amusa quand même bien avec Aaliyah, Caleb et Corey, les trois plus jeunes de Jared. Et les enfants de Megan ainsi que l'aînée de Jared passaient leur temps à jouer les parents avec Zoé.

Tarek passa son temps à raconter des conneries avec Papé, son meilleur allié dans cette famille, pour le plus grand malheur de Mamé.

Hugo garda un grand sourire fixé sur le visage toute la journée ; il y avait bien longtemps que je ne l'avais pas vu si heureux. Ma famille sembla le considérer comme un membre à part entière des Clarkson. Mon père s'adressait à lui comme à un fils et mettait en avant les qualités d'Hugo comme un père fier.

En fin de journée, comme mon père et Fanny l'avaient apparemment prévu, nous nous dirigeâmes tous chez Papé et Mamé, là où tout le monde pourrait dormir. Nous fîmes une petite balade dans le village puis rentrâmes boire des chocolats chauds au coin du feu.

À 23h, heure à laquelle Deen et moi avions prévu d'ouvrir nos cadeaux respectifs, je m'isolai dans la cabane dans la forêt pour déballer le sien, après avoir tant bien que mal esquivé et fuis la marmaille pour me retrouver enfin seule.

Il s'agissait d'un grand paquet rose arborant des princesses et des fées - ce qui me fit lever les yeux au ciel en rigolant - et il pesait quand même son poids.

Le paquet déchiré, je tombai sur l'intégralité des albums de Queen en vinyle.

Putain, ça avait dû lui coûter une blinde ! Je me souvenais l'avoir vu avec lui dans un vieux disquaire à Paris. Je ne me rappelais plus du prix exact, mais me souvenais très bien avoir faillis m'étouffer en voyant les trois chiffres.

Un petit papier était collé sur le coffret, et je le décollai avant de l'ouvrir. Il arborait simplement quelques mots : « Joyeux Noël ma grosse »

J'étais catégorique, j'avais le meilleur copain du monde. Et ce Noël était de loin l'un des meilleurs de ma vie.

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