Chapitre 66. « My mind's on fire, imprisoned by the thoughts of what you do »

Putain d'handballeuse de mes couilles.

J'avais répété cette phrase dans ma tête une bonne cinquantaine de fois depuis qu'elle s'était barré en juillet.

Je savais que j'aurais dû la retenir et lui dire ce que je ressentais pour elle, je m'en mordais les doigts putain. Mais c'était facile de dire ça maintenant que c'était plus possible de le faire. Je savais très bien que si on me remettait dans la même situation maintenant je ferai exactement la même chose : je la laisserai me dire au-revoir froidement, je la regarderai se blottir contre son reuf et essayer de pas chialer, je regarderai les Cavaliers de l'Apocalypse se faire un dernier câlin groupé, je laisserai Nekfeu la prendre dans ses bras, puis je regarderai disparaître sa queue de cheval et ses valises au bout de l'aéroport.

Quand elle s'était mêlée à la foule et que je l'avais perdu de vue, je m'étais vite fait dit que si son avion se crashait je le regretterai toute ma vie. Puis mon reuf m'avait donné une tape fraternelle sur l'omoplate et j'avais chassé cette pensé le plus vite possible pour faire bonne figure devant tout le monde.

Je la détestais et puis c'est tout.

Les semaines qui avaient suivi j'avais pas branlé grand chose. J'avais enchaîné quelques festivals avec les gars, j'étais allé à une compet' de Raph, j'avais passé presque tout mon temps à alterner entre stud' pour les gars et la salle, j'avais passé pas mal de temps dans le Sud, ken pas mal de tasspé.

Je refumais aussi beaucoup ; je m'étais un peu calmé depuis quelques temps, la maladie de Raphaël aidant à réfléchir, mais depuis qu'elle s'était barré j'en avais plus rien à branler, j'en avais besoin pour apaiser un peu mon seum intergalactique.

En plus cette conne avait oublié des trucs chez moi, à croire qu'elle l'avait fait exprès pour que je l'oublie pas. Quelques jours après son départ j'avais retrouvé sa tasse ridicule avec une licorne qui chiait des arc-en-ciel qui apparaissait quand elle se réchauffait. J'avais eu un petit sourire amusé et exaspéré, puis je m'étais rappelé qu'elle s'était barré et je l'avais rangé bien au fond du placard.

L'autre jour j'avais retrouvé un de ses bouquins sous le bordel qui trônait sur ma table basse, Le Fléau. Par curiosité j'avais commencé à le lire, puis j'avais été bien pris par l'histoire. Arrivé au milieu du bouquin, j'étais tombé sur un post-it avec l'écriture de Maëlle et j'avais eu le malheur de le lire : cette saloperie faisait une liste de tous les personnages qui allaient crever avant la fin.

À ce moment-là je m'étais rendu compte que j'allais galérer à l'oublier ; pas seulement parce qu'elle avait laissé sa trace partout, mais surtout parce que même en me faisant spoiler j'avais pas pu m'empêcher de penser avec attendrissement que c'était une connasse et qu'elle était géniale.

Depuis quelques semaines ça allait mieux ; j'évitais de trop aller sur la conversation qu'elle avait nommé « L apostrophe », j'avais rencontré une meuf, Hana, elle était bien cool, tout à fait mon style et puis j'essayais de passer du temps loin de Paname. J'étais retourné aux US avec Eff et mon reuf, ça avait été putain de bien.

Puis on était rentré, et début décembre l'Euro de handball avec commencé. Dès les premiers matchs les gars voulaient pas en louper un. Et forcément il fallait qu'ils les regardent en réssoi à chaque fois. J'en avais boycotté quelques unes du coup, mais je pouvais pas non plus éviter mes reufs tous les deux-trois soirs juste parce que je voulais pas voir mon ex sur un écran.

En tout cas, tous les efforts que j'avais fait pour l'oublier ou du moins me dire qu'elle en valait pas la peine avaient été réduit à néant. Le jour de l'anniv' de Raph, et donc de Maëlle, on avait le cul posé devant France-Monténégro, et même si j'essayais de me rappeler pourquoi je la détestais, la voir se déchaîner sur le terrain avait ravivé mon admiration et je m'étais rendu compte que je la détestais pas tant que ça.

– C'est une bonne équipe le Monténégro ? demanda Nek à Raph.

– Ouais, ça va, c'est pas les plus mauvaises de leur groupe. Mais on est meilleurs.

– De toute façon elles sont qualifiées là nan ? s'assura Antoine. Elles ont battu la Slovaquie et la Serbie.

J'avais boycotté le match contre la Serbie, deux jours plus tôt. Je m'étais fait déglinguer par les gars le lendemain quand j'étais venu pour voir le match de la Norvège de Stine ; askip les françaises avaient démonté les serbes avec un 27-16 et Maëlle avait marqué huit buts. Tant pis, je m'en battais les couilles.

– Ouais ouais, là il faut juste qu'elles les battent pour rester à la tête du groupe et tomber contre des équipes moins bonnes pour le tour préliminaire.

– Putain j'y capte rien moi, souffla Lo. Ils se prennent beaucoup trop la tête à l'organisation, le plus simple ce serait de donner la médaille d'or à la France direct !

Raphaël rigola puis tenta d'expliquer toutes les phases de qualification à Lo, et Framal fit signe à tout le monde de se taire alors que les bleues arrivaient une à une sur le terrain.

Lorsque Maëlle débarqua en trottinant sous les applaudissement des supporters français, les filles l'acclamèrent et les gars l'encouragèrent comme si elle pouvait les entendre.

La Marseillaise tarda pas à retentir et la caméra à se déplacer verticalement sur le visage de toutes les joueuses ; quand elle se posa sur le visage de Maëlle, mon bide se serra un peu et je me mis une claque mentale pour me punir de ressentir encore des trucs. Mais putain elle était rayonnante ; tandis que certaines joueuses faisaient la gueule tellement elles étaient concentrées, Maëlle pouvait pas s'empêcher de sourire toute en chantant, ses longs cheveux châtains réunis dans une queue de cheval, et son putain d'œil de cyborg ressortait de ouf à la caméra. On pouvait lire sur son visage qu'elle vivait son rêve. Mais putain ça m'aurait quand même vachement arrangé qu'elle soit moche.

Pendant l'hymne du Monténégro, je vis Lissa se blottir contre le Fenek ; ces deux-là s'étaient grave rapproché depuis le départ de la handballeuse :

– Elle me manque putain, se plaignit la petite renoi.

Le Fenek passa son bras autour de ses épaules et lui frotta affectueusement le bras. Je savais pas trop ce qu'il se passait entre eux et si Nek était encore avec Agathe, mais fallait que j'enquête.

Le coup d'envoi retentit, les monténégrines en attaque et les françaises en défense.

Y'avait un bordel pas possible dans l'appart, ça gueulait de partout, ça encourageait les joueuses, ça insultait les arbitres, ça se levait quand on mettait un but, ça braillait des « ça c'est ma championne putain » quand Maëlle marquait ; un putain de zoo.

J'avais même pas essayé de pas me prendre au jeu, je me surpris bien cinq fois à me lever du canap en gueulant des « mais d'où ?! » en même temps que mes reufs quand les arbitres sifflaient un truc tandis que Raph se marrait de notre mauvaise foi à tous.

Putain et puis Maëlle était brillante, elle était omniprésente sur le terrain, on voyait qu'elle, comme d'hab'.

Elle avait progressé de ouf en trois mois, ça lui avait vraiment fait du bien de changer d'équipe. À force de traîner au palais des sports à Paname je m'étais vachement intéressé à ce sport et aux performances de Maëlle, et du coup c'était flagrant pour moi qu'elle avait développé encore plus de technique qu'elle en avait avant.

J'étais archi fier, mais putain c'était plus ma meuf.

J'espérais toujours que c'était pas la meuf de quelqu'un d'autre, et j'avais appris des gars que c'était pas le cas. Apparemment elle comptait pas rencontrer qui que ce soit, pas pour un an seulement en tout cas. Au moins elle risquait pas de tej' un pauvre norvégien ou une pauvre norvégienne comme une merde juste avant de rentrer en France.

J'étais vraiment la dernière des merdes de penser ça ; j'avais une meuf depuis quelques semaines et je me retrouvais à espérer que mon ex fasse pas pareil. C'était pas cool, ni pour Hana ni pour Maëlle. Mais bon, je pouvais pas m'en empêcher.

– MAIS OUI PUTAIN !!

Le cri de Raph me sortit de mes pensées. Lui qui avait l'habitude de regarder sa jumelle jouer en silence, en l'analysant, je me demandais ce qu'il venait de se passer.

Le replay en slow-mo montra Maëlle à sept mètres pour jouer une faute, le pied gauche derrière la ligne, la jambe droite étendue derrière elle. Son bras droit portant le ballon s'étira une première fois dans une feinte en direction du but, puis revint en arrière pour reprendre de l'élan et cette fois-ci la balle partit s'écraser au sol devant les pieds de la gardienne avant de tournoyer sur la droite pour rejoindre les filets. Une roucoulette propre comme elle savait les faire. Pas étonnant que Raph ait bondit sur ses pieds, je comprenais qu'il soit fier du talent de sa reus.

– Ce poignet, mais ce poignet putain, continua-t-il à s'exclamer. Je comprendrais jamais comment elle fait ! Ça me faisait tellement rager quand on jouait ensemble !

– Tu penses que t'aurais pu arriver à son niveau si y'avait pas eu la muco ? demanda Mekra.

Raph secoua négativement la tête en buvant une gorgée de bière :

– Nan, j'étais chaud aussi grâce à notre père mais j'ai jamais eu son talent. Ça a toujours été un putain de monstre !

La mi-temps fut sifflée quelques temps après et je me levai pour aller fumer dehors. Je fus vite rejoint par Nek, et je savais déjà autour de quoi la discussion allait tourner ; je tirai donc une bonne latte en avance.

– T'étais pas obligé de venir kho, me dit-il en s'allumant une garo. En vrai je comprends que tu veuilles éviter au max de la voir.

– Je vais pas m'empêcher de vous voir à cause d'elle, je peux faire la part des choses.

Il acquiesça et s'accouda à la rambarde.

– Pourquoi t'es avec Hana ?

C'était par un reproche, ça sonnait juste comme une vraie interrogation.

La réponse me vint tout de suite : pour oublier Maëlle.

– Je sais pas, elle est sympa, plutôt bonne, je suis bien avec elle.

– Kho tu passes ton temps à la tromper, je comprends pas pourquoi tu t'es remis en couple.

Je haussai les épaules ; à vrai dire, je savais pas non plus, surtout qu'avant Maëlle j'avais archi pas envie de me poser.

Le Fenek insista pas plus, finit sa cigarette et retourna à l'intérieur se poser à côté d'Alice.

Je savais que j'étais chiant en ce moment ; j'étais tout le temps de mauvais poil et faisais preuve d'une amabilité tout à fait relative. Bon, je continuais quand même à déconner et à m'amuser avec mes zins mais je me rendais compte que j'étais aigri. Peut-être ça le pire, c'est que j'en étais conscient mais que je m'en battais les reins.

Une fois mon joint terminé, je retournai à l'intérieur pour subir la deuxième mi-temps durant laquelle je luttai pour rien ressentir en voyant mon ex exceller sur le terrain.

Après la victoire de la France, quelques jeux d'alcool et quelques pètes, je checkai mes khos pour rentrer chez moi.

Je grognai en voyant les talons dans mon entrée, signe qu'Hana s'était une fois de plus incrustée. Je me glissai toutefois dans le lit à côté d'elle en essayant de pas la réveiller, et m'assoupis quelques minutes plus tard.

Le lendemain matin, je me réveillai grincheux et mes pensées revinrent encore et toujours vers Maëlle. Putain de merde, j'en pouvais plus de penser à elle et à me demander ce qu'elle était en train de faire et avec qui. Il fallait vraiment que je passe à autre chose.

– Tu penses à quoi ?

La voix sensuelle appartenant à la femme allongée à côté de moi n'avait rien à voir avec la petite voix de la handballeuse, et elle me rappela immédiatement à la réalité.

– Rien, juste un truc avec le stud' c'est tout.

Hana se retourna et se blottit plus près contre moi.

J'allais pas me plaindre non plus, j'avais franchement pas perdu au change. Physiquement, c'était la meuf parfaite. En plus je m'ennuyais vraiment pas au pieu, c'était une lionne. Et puis elle était pas méchante et elle était folle de moi.

Du coup je pouvais pas m'empêcher de m'en vouloir. J'avais la meuf de mes rêves dans mon pieu et il m'arrivait encore de penser à une putain de gamine de quartier garçon manqué hyperactive, fan de rock et de rap. Qu'est-ce qui allait pas chez moi ?

– Tu fais quoi aujourd'hui ? demanda la belle brune.

– Je vais en stud' avec Nek, il taff toujours l'album.

– Je peux venir ?

– Nan, tu vas te faire chier, en plus on sera sûrement défoncés.

La vérité c'était que les gars l'aimaient pas trop. Le truc c'est que ça les aurait pas dérangé si y'avait pas eu Maëlle avant ; ils s'étaient habitué à trop bien. Mais pourtant ils avaient jamais eu de problème avec Alice et Stine non plus. Peut-être parce que la handballeuse nous avait menacé de nous hagar si on les faisait chier.

Je me préparai et annonçai mon départ. Ma copine vint m'embrasser avec fougue :

– Je t'aime.

Je me contentai de l'embrasser une dernière fois.

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