Chapitre 53. « Moi j'm'étonne même plus quand tu pètes un câble »

Coucou ! J'espère que vos vacances se passent bien ! Juste un petit message pour vous dire que je suis toujours en vacances mais qu'en rentrant chez moi il se pourrait que je ne puisse pas publier : apparemment je n'ai plus de connexion. Mais j'essaye d'écrire un maximum de brouillons pour les poster avec la connexion de mes potes la semaine prochaine !

Plein de bisous !

PS : Et merci beaucoup de continuer à me suivre ! 11 500 lectures je... Merci, juste merci.

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Le printemps avait officiellement signé son arrivée depuis longtemps mais ce n'était qu'en mai que les températures avaient décidé de suivre. J'avais enfin pu ranger mon manteau une bonne fois pour toute sans craindre de devoir le ressortir.

J'allai assister aujourd'hui à ma première session de Planète Rap auprès de ma petite bande et j'en étais ravie. Je savais déjà ce qu'ils valaient en freestyle puisqu'ils me cassaient les oreilles à la première occasion, mais j'avais hâte qu'ils le fassent partager à d'autre.

Les mots d'ordre du jour : patience et tolérance. Ne pas trop faire attention à leur comportement une fois en studio. Ils seraient défoncés et ingérables. Je savais que mon mec allait être insupportable.

Et comme promis, ils avaient tout défoncé. Enfin, c'est ce que j'en pensais en tout cas, mais je n'étais pas forcément la personne la plus objective.

Calée dans un coin du studio dans l'angle mort des caméras, buvant quelques gorgées de la bouteille d'alcool qui circulait, j'avais pu voir mes amis se déchaîner sur les micros. J'avais mal au cou et aux joues à force de bouger la tête au rythme des beats et de sourire en les voyants s'amuser ; j'étais tellement heureuse de les voir apprécier leur moment. Si ça n'avait été qu'eux et moi je me serais déhanchée  et aurais tenté un freestyle avec eux (sans prétention aucune, je me débrouillais d'ailleurs plutôt bien à force de rapper avec eux).

Aux trois quarts de leur session, Doum's était venu me voir, les yeux rougis par la beuh :

– Viens rapper un ceau-mor avec nous Elma ! avait-il dit en essayant de couvrir les voix de nos amis.

Mes yeux s'étaient écarquillé tout seuls et j'avais vivement secoué la tête de gauche à droite :

– T'as trop fumé Morgan, tu me feras pas rapper dans un micro devant autant de monde.

– Allez ! Vas-y après wAllah le prochain album on le fait avec toi !

Je rigolai tout en le repoussant, puis je lui montrai qu'un micro s'était libéré pour lui :

– Allez dégage, vas donc montrer tes talents !

Bon, c'étaient mes potes, certes, mais il fallait avouer qu'ils étaient doués. L'alchimie qu'il y avait entre eux était impressionnante. J'aurais pu rester des heures à les écouter tout démonter, je ne savais vraiment pas ce qui me retenait de les rejoindre.

- Si moi je te demande de rapper avec nous ça marche ?

Une casquette s'était posée sur ma tête et je sursautai en entendant Deen me parler dans l'oreille. Furtif ce con.

Je me tournai vers lui, et vis à ses yeux vitreux qu'il était littéralement explosé.

– Crois pas que parce qu'on sort ensemble t'es privilégié, lui dis-je avec un air de défi.

Il abandonna bien vite - probablement trop défoncé pour en avoir quelque chose à foutre et pressé de rejoindre ses potes - et me pinça les fesses avant de récupérer sa casquette et de retourner vers le reste du crew :

– Pouffiasse.

– Connard.


[...]


Le lendemain avait été compliqué : après leur session, je m'étais laissée entraînée par mes amis dans leurs conneries et la journée s'était finie sur une soirée de laquelle j'étais rentrée tard, bourrée et défoncée.

Il allait vraiment falloir que je change de rythme car je n'allais pas tenir longtemps à cette allure.

Je rentrai donc chez moi à midi, sans aucune énergie, toujours en train de végéter. J'avais jusqu'à dix-sept heure pour me reposer, heure à laquelle se déroulerait mon entraînement.

Une fois passée la dernière marche, essoufflée, j'aperçus une silhouette en contre-jour qui semblait assise à côté de ma porte. À mon approche, celle-ci se leva, et je pu découvrir Hugo.

– Moingeon ! m'exclamai-je comme une cinglée en me jetant dans ses bras.

Mon ami me souleva et me serra fort contre lui avant de me reposer sur le sol.

– Qu'est-ce que tu fous là ?

– T'avais dit que j'étais le bienvenu alors je suis venu...

– Tout va bien ? m'inquiétai-je.

Il n'avait pas l'air au meilleur de sa forme. Ses cheveux noirs étaient toujours naturellement en bataille mais les cernes sous ses grands yeux verts attirèrent mon attention. Depuis combien de temps il a pas dormi ?

– Ouais t'inquiètes, tu me manquais, c'est tout.

J'ouvris la porte et l'invitai à entrer, ne croyant pas un seul mot qui sortait de sa bouche. Nous nous connaissions depuis la maternelle et je savais reconnaître quand il mentait.

– Tournes toi et attends-moi là, il faut que je range un truc, lui dis-je.

Il acquiesça, sachant très bien que je cachais tout ce qui portait la couleur rouge, et fit face à la porte.

– C'est bon.

Je nous servis à boire et nous nous installâmes autour de ma petite table.

– Et la vraie version maintenant ? insistai-je. T'es pas là parce que je te manquais, je te connais.

Hugo fit semblant de ne pas comprendre et évita mon regard. Il essayait aussi de ne pas regarder trop à sa gauche, chose qui pouvait paraître bizarre pour les personnes qui ne connaissaient pas sa condition. Mais je savais très bien ce qu'il évitait de voir.

– Arrêtes Hugo, tu vas pas me dire qu'en pleine semaine de cours tu t'es dit que t'allais monter sur Paris juste pour me voir ?

Mon ami soupira en se frottant l'arrière de la tête avec agacement, sachant très bien que je n'allais pas le lâcher. Il savait aussi que l'usage des prénoms signifiait qu'on n'avait pas envie de plaisanter.

– Je voulais pas t'inquiéter, ça va je gère. C'est juste que ma mère elle me saoule et j'avais besoin de prendre l'air. Par contre tu me manques aussi, c'est pas un mytho ça.

Je lui souris faiblement. Lui aussi me manquait.

– Qu'est-ce qu'elle a fait encore ta mère ?

Mon ami soupira, visiblement lassé de l'attitude de sa figure maternelle :

– Oh bah rien de plus que d'habitude hein, elle veut me foutre en HP, comme d'hab'. Sauf que là elle a l'air un peu plus déter que d'habitude.

– Putain mais je comprends pas, tu vis même pas chez elle, m'emportai-je. Y'a que ta sœur qui serait légitime d'avoir des envies de te mettre en HP, pas ta mère.

Les relations entre Hugo et Mme Moingeon n'avaient jamais été faciles à cause des nombreuses conneries que notre bande faisait, mais tout s'était aggravé lorsque la maladie s'était déclarée. Sa mère l'avait plus ou moins abandonné, partant du principe qu'elle avait perdu son fils, et sa grande sœur s'était occupé de lui, seule. Il vivait maintenant chez elle le temps de finir ses études et de trouver un emploi stable.

– Je sais pas, je cherche plus à comprendre. Enfin bref, en tout cas ça explique ma venue, me dit-il en souriant.

Je ne pu m'empêcher de lui rendre son sourire en voyant ses fossettes se creuser. Il avait hérité des pires parents le pauvre. Raphaël et moi avions un père génial, Tarek avait Khadija et un père en or, et Hugo n'avait personne. Ses parents avaient divorcé lorsqu'il était encore bébé et on pouvait compter sur les doigts de la main le nombre de fois où son père avait fait quelque chose pour lui. La seule compensation qu'il avait, c'était qu'il voyait en mon père une figure paternelle et en Khadija une figure maternelle. Je ne les remercierai jamais assez d'être autant présent pour mes frères et moi.

– Mais sinon ça va en ce moment ? demandai-je finalement. Pas de rechute ?

Je n'aimais pas le savoir loin de moi avec ses délires. J'étais l'une de seules personnes à savoir ce qui se passait dans sa tête et nos discussions à ce propos me manquaient, j'étais moins rassurée.

– Pas de rechute, t'inquiètes. Pas d'hallucinations en moins, mais tant qu'il y a en a pas en plus ça me va, rigola-t-il, y'a pas de place pour plus.

Il jetait de petits coup d'œil mal assurés vers sa gauche de temps en temps, comme pour vérifier que le clown qu'il voyait de temps en temps ne s'y trouvait pas. Celui-ci était souvent déclenché par le rouge, et nous faisions toujours attention de ne pas porter cette couleur lorsque nous étions avec Hugo.

– Bon, on se matte un film et on parle de nos histoires de cœur ? me proposa-t-il.

Il eut droit à mon sourire pour seule réponse. J'allais en avoir des choses à lui dire, il n'était pas au bout de ses surprises.


[...]


Je sortis de l'entraînement à vingt heure, épuisée. J'avais passé mon temps libre avec Hugo au lieu de dormir et même si rien ne s'était vu sur le terrain, mon corps m'en voulait. J'avais hâte de retrouver mon appartement, et les pizzas qu'Hugo était censé avoir commandé.

Dans le RER, je ne pouvais m'empêcher de sourire comme une gourde ; j'étais vraiment très heureuse d'avoir Hugo avec moi ce soir. Sa seule présence m'avait fait réaliser à quel point Tarek et lui me manquaient. Ce qui me fit remarquer que je m'étais vraiment bien acclimaté à Paris grâce à mes nouveaux amis, et c'était probablement eux qui rendaient l'absence de mes frères moins insupportable.

Je n'eus pas à aller plus loin que l'embrasure de ma porte d'entrée pour réaliser qu'Hugo allait mal.

Recroquevillé par terre au fond de la pièce, ses yeux étaient noirs et sondaient les environs. Il transpirait à grosses gouttes et tenait un couteau dans la main.

Dangereux Maëlle, rappelles-toi la dernière fois. La cicatrice sur mon ventre me picota rien qu'au souvenir de la pointe du canif d'Hugo sur mon ventre, quelques années en arrière. J'avais heureusement réussi à le faire revenir à la réalité avant qu'il n'aille plus loin, et je m'en étais sortie avec une simple entaille. Cette histoire était restée entre lui et moi.

Je fermai la porte, posai mon sac de sport délicatement sur le sol et levai les mains en l'air pour montrer à mon ami que je ne lui voulais aucun mal :

– Hugo, c'est moi, c'est Maëlle, dis-je calmement.

Il ne m'avait visiblement pas encore repéré puisqu'il bondit sur ses pieds et se mit bien en équilibre sur ses appuis, comme une bête sauvage prête à attaquer.

Putain et je n'avais rien pour me défendre.

– Menteur ! hurla Hugo. Je sais qui vous êtes ! Je vous avais dit de me laisser tranquille !

Ok, improvises, il faut que tu saches pour qui il te prend. Il y a une chance sur deux pour que ce soit une histoire d'alien.

– Je te promets que je mens pas, je suis pas avec eux. Moi tout ce que je veux c'est t'aider.

Il secoua la tête de gauche à droite, terrifié. Je sentis mon cœur se briser en mille morceau en le voyant dans un tel état. S'il vous plaît, rendez-moi mon frère, suppliai-je intérieurement.

– Regardes, viens toucher ma peau, tu verras que je suis pas comme eux.

Il ne s'approcha pas. Je tentai alors un pas en avant, mais ça n'eut comme conséquence que de le faire bondir en arrière, sur ses gardes.

Je savais qu'il ne suffisait que d'un pas de travers pour que s'en soit fini de Maëlle Duprés-Clarkson.

– Hugo, regardes-moi. Je vais aller à la cuisine prendre un couteau et je vais te montrer que mon sang il est comme le tiens. Tu te rappelles ? C'est toi qui m'avait dit que leur sang n'était pas rouge.

Mon ami regarda tout autour de lui, ne sachant pas quoi faire. Finalement, opina du chef, et je me dirigeai lentement vers un tiroir d'où je sortis un couteau.

– Viens voir, tentai-je.

Il s'approcha lentement, brandissant toujours son propre couteau dans sa main.

Allez Maëlle, t'as pas le choix, m'encourageai-je en posant le couteau sur mon avant-bras.

D'un geste vif, je fis glisser la lame sur ma peau, et du sang ne tarda pas à couler. Pas beaucoup, mais suffisamment pour convaincre mon ami.

Hugo lâcha subitement son couteau, comme si le manche l'avait soudainement brûlé, et je vis au changement dans ses yeux qu'il était presque de retour parmi nous.

– Je suis désolé, sanglota-t-il, je vous ai pris pour quelqu'un d'autre.

D'un pas léger et maîtrisé, je me dirigeai vers lui lentement, et une fois assez proche et ayant jugé que le danger était écarté, je le pris dans mes bras :

– C'est pas de ta faute arrêtes. Ça va aller, je suis là, t'inquiètes pas.

Mais au moment où ses sanglots s'arrêtèrent, la porte de mon appartement s'ouvrit, faisant sursauter Hugo, et un grand con s'engouffra dans mon appartement :

– Yo ma grosse ! s'exclama-t-il. Euh... qu'est-ce qui se passe ? s'inquiéta-t-il avec les yeux écarquillés en voyant le couteau au sol.

Mon sang ne fit qu'un tour. Il fallait qu'il sorte. Maintenant.

Je me précipitai vers mon copain et le poussai hors de mon appartement mais il résista.

– Mika bouges s'il te plait, je t'expliquerai plus tard mais il faut que tu sortes.

– Qu'est-ce que t'as au bras ?

Sa voix était emplie d'inquiétude mais je continuai de le pousser de toute mes forces alors que je sentais Hugo m'échapper.

– Vous les aidez ? s'énerva ce dernier. Mais vous êtes malade ? C'est eux l'ennemi !

– Maëlle c'est quoi ce zbeul ? Qu'est-ce qu'il t'a fait ?

– On peut pas leur faire confiance ! Ils vont tous nous tuer !

Je ne savais pas où donner de la tête, je continuais à pousser Deen tout en regardant Hugo prendre son couteau.

Putain et ce con ne comprenait pas que je le protégeais.

Pris d'un élan d'adrénaline mon faible corps parvint enfin à pousser Deen dans le couloir tandis qu'Hugo se ruait sur nous, et je tournai le verrou.

J'entendis la voix grave du rappeur m'appeler et menacer d'appeler la police mais je m'en fichais complètement. J'avais réussi à l'éloigner du couteau et j'avais un gros stress en moins.

Maintenant il n'y avait plus qu'une chose à faire, et je détestais cette idée. Je n'avais eu à me servir de la violence avec Hugo qu'une fois et j'avais eu horreur de le faire.

J'esquivai mon ami qui avait de nouveau des yeux plus sombres que jamais, et lui assénai un coup de poing. Désolée Hugo...

Sonné, mon ami perdit l'équilibre et par la même, son couteau. Je donnai un coup de pied dans celui-ci pour l'éloigner le plus possible du garçon.

– Hugo, regardes-moi, c'est Maëlle, lui dis-je doucement en restant en équilibre sur mes appuis, prête à esquiver une salve de coups de poings.

– Je me ferai pas avoir deux fois, grogna-t-il.

De grands coups répétés à ma porte me déconcentrèrent et je me pris un coup de poing dans le ventre.

Le souffle coupé, j'étais pliée en deux sur le sol.

– Hugo putain c'est moi, tentai-je d'articuler avec le peu d'air que j'avais à disposition.

Je savais ce qu'il me restait à faire s'il ne se calmait pas. À ma connaissance, seul Tarek avait déjà utilisé ce stratagème mais je ne l'avais jamais fait et je n'en avais aucune envie.

Je me relevai et donnai un autre coup de poing dans le visage de mon ami. Du sang coula de son arcade et je m'en voulu immédiatement. Mais pas pour longtemps puisqu'Hugo m'envoya un deuxième coup de poing dans le ventre, me faisant m'étaler une nouvelle fois sur le sol.

Ok, j'ai pas le choix, parvins-je à penser tout en me tenant le ventre, tentant par tous les moyens de reprendre mon souffle.

Haletante, je rampai jusqu'à mon lit et en sortit une couverture rouge avant de la brandir devant moi.

La réaction de mon ami ne se fit pas attendre et me brisa le cœur.

Si le rouge excitait les taureaux, cela faisait perdre pied à Hugo.

Il se recroquevilla immédiatement sur le sol alors que la porte de mon appartement s'ouvrait à la volée, laissant entrer Deen et Raphaël.

Grimaçante, je tentai de me relever mais en fus empêchée par le corps de Deen qui me serrait contre lui.

– Tu casses les couilles putain ! s'exclama-t-il finalement avant de se relever et de faire les cents pas dans la pièce.

Oulah il était bien énervé.

Sauf que je n'en avais strictement rien à faire et je rejoignis mon frère auprès d'Hugo.

Je serrai mon ami toujours recroquevillé comme un enfant contre moi. J'avais envie de pleurer. Je me détestais de lui avoir fait du mal.

– Je suis désolée, dis-je faiblement, le cœur au bord des lèvres. Je suis vraiment désolée mon Hugo, je savais plus quoi faire.

Les yeux fermés pour éviter ce qui allait se trouver à sa gauche, Hugo releva la tête et m'embrassa la tempe à plusieurs reprises en me serrant la main :

– T'as eu raison, me rassura-t-il faiblement. Je préférerais crever que de te faire du mal Mel. Je suis désolé.

Malgré ses paroles rassurantes, je savais que je venais de signer l'entrée de mon frère en hôpital psychiatrique et que j'allai m'en vouloir jusqu'à la fin de ma vie.

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