Chapitre 38. « Now she's stronger than you know »

– Et t'as intérêt à courir hein, en plus ça te ferait du bien !

Quelle connasse celle-là ! Elle loupait pas une occasion pour m'en foutre plein la gueule. Mais c'était ce qui la rendait attachante.

Je me dépêchai d'aller chercher mon bigo chez moi. En entrant je découvris mon frangin dans mon salon :

– Qu'est-ce que tu branles ? demandai-je.

– J'avais laissé un pochon l'autre soir, m'expliqua Jehk, je passais le prendre pour aller chez le Fenek mais je le trouve aps.

Je hochai la tête et nous cherchâmes l'objet convoité ; c'était un bordel pas possible pour retrouver des trucs après les soirées.

Une dizaine de minutes plus tard, sous mes protestations, on abandonna les recherches et on se dirigea vers le RER.

En arrivant près du quai, je vis une petite renoie venir en courant dans notre direction et nous croiser. Pressée la gamine.

Puis quelques secondes plus tard, elle fit demi-tour et vint m'interpeller.

– Ta... Ta...

Elle arrivait plus à respirer la pauvre. Mon reuf et moi on se jeta mutuellement un regard dubitatif, puis je posai mes mains de chaque côté de ses bras pour la forcer à me regarder.

– Calme toi, respires, qu'est-ce qu'il y a ?

Après quelques secondes de lutte, elle parvint enfin à articuler :

– Ta copine... Elle... Je me faisais agresser et elle... Maintenant c'est elle qu'ils agressent.

Mon sang ne fit qu'un tour.

Je me précipitai vers le quai, suivi de près par mon petit reuf. J'avais rarement couru aussi vite dans ma vie.

Faites qu'elle aille bien, faites qu'elle aille bien, faites qu'elle aille bien.

Je me stoppai net en voyant Maëlle, collée à un mur, à quelques mètres de moi.

Deux gars étaient devant elle, l'un tirant l'autre qui, lui, agrippait la gorge de Maëlle. Même à cette distance je voyais que son visage saignait. Et putain le pire : certains de ses vêtement jonchaient le sol.

J'allais les tuer, putain j'allais les tuer.

Sans nous consulter, mon frère et moi on se précipita vers les deux fils de pute. Je pris naturellement celui qui agressait directement ma pote.

J'étais fou, je voyais plus rien autour de moi, juste la sous-race que j'avais devant moi. J'avais qu'une envie : qu'il crève sous mes coups.

J'entendis vaguement Maëlle m'appeler une première fois, puis une deuxième en essayant de me tirer en arrière.

Alors là il allait m'en falloir plus pour m'arrêter. Elle voulait quand même pas que je laisse cet enculé partir sans rien faire ?

À un moment donné j'avais entendu le nez du blond se casser sous mes coups.Putain, ce que ce bruit était apaisant !

– Mikael !

Je me retournai soudainement. C'était rare qu'elle utilise mon prénom en public. Elle m'avait comme ramené à la réalité.

Putain mais sérieux elle allait pas avoir pitié de ce fils de pute quand même ?

Au moment de me retourner je m'étais préparé à voir n'importe quelle émotion sur son visage : de la panique, de la tristesse, de la peur. Tout sauf celle que je vis en lui faisant face : de la rage. Elle avait clairement des envies de meurtre.

Avant que je comprenne ce qu'il se passait Maëlle était en train de ruer de coup son agresseur.

Quel con. À quel moment j'avais pu croire qu'elle ait peur ou qu'elle soit brisée par ce qui venait de lui arriver ? C'était Maëlle. Elle était folle de pas avoir réussi à se défendre.

Je la laissai se défouler sans intervenir. Mon frère avait fini de s'occuper du grand qui avait déguerpi sans attendre son pote. Puis, après un regard vers Jehk', je me décidai à écarter Maëlle de sa victime ; elle allait le tuer et j'étais clairement pas prêt à la voir tomber pour meurtre.

Elle essaya d'abord de se débattre et j'essayai de la calmer en la serrant contre moi :

– Maëlle je suis là. C'est fini. Crois-moi il est mieux vivant avec la honte de s'être fait hagar par une meuf que mort et la meuf en question en taule.

Je sentis chacun de ses muscles se relâcher petit à petit et elle glissa sur le sol, à mes pieds.

J'avais l'impression d'avoir désamorcé une bombe.

Je la soulevai pour la prendre de nouveau dans mes bras et mon reuf la rhabilla. J'annonçai à celui-ci qu'on rentrait chez moi, qu'il aille chez Nek sans nous.

– Tu leur dis rien, lui lança Maëlle d'un ton sans réplique.

Maëlle dans toute sa splendeur. Trop de fierté pour que le crew sache qu'elle s'était fait agresser. Par deux gars. Mais putain c'est eux qui avaient aucune fierté, fallait vraiment pas avoir de race pour se mettre à deux sur une meuf de la carrure de Maëlle. Parce que franchement, même si c'était une teigne, quand on la connaissait pas en apparence elle était juste toute mignonne et sans défense.

Mon frère hocha de la tête, mais un regard vers moi me fit comprendre qu'il déballerait tout une fois arrivé là-bas. C'était peut-être pas plus mal. Elle faisait partie de l'équipe et dans l'équipe on se racontait toutes nos galères, elle y couperait pas. Et puis aucun d'eux la trouvera faible, ils auront juste la haine de pas pouvoir avoir éclaté les gars eux-même.

Alors que nous nous dirigions vers chez moi, notre route croisa celle de la tipeu de tout à l'heure. Et forcément, Maëlle s'inquiéta plus pour l'état de la gamine que son propre état à elle, alors qu'elle avait l'arcade ouverte, le visage en sang et la joue gonflée par des coups.

– Ça va ma belle ? lui demanda-t-elle avec douceur avant de lui caresser le bras.

La gamine hocha la tête.

– T'es sûre ? Tu veux qu'on te ramène quelque part ?

– Je... je...

- Tu as quelque part où dormir ce soir ?

Nouveau hochement de tête.

Elle nous donna son adresse, et je dû à contrecœur la ramener aux côté de la handballeuse. Bordel, mais plus on perdait de temps plus je me disais que Maëlle se renfermait sur elle-même.

Une fois chez moi, on se regarda un long moment dans le blanc des yeux. Putain elle était vraiment dans un sale état.

Je savais pas quoi faire. Je voulais qu'on parle de ce qui s'était passé, mais je savais qu'elle l'avait déjà enfouie bien loin et qu'elle voulait juste oublier.

– Viens, faut te soigner, lui ordonnai-je finalement.

– T'inquiètes, c'est bon je me débrouille.

Ok, j'allais pas me sortir de cette merde sans gueuler, elle était trop butée :

– Maëlle maintenant t'arrêtes de faire la meuf et tu fais ce que j'te dis.

Elle me jugea un moment du regard et finit par me suivre dans la salle de bain, non sans marmonner dans sa barbe.

J'étais encore fin énervé qu'on ai pu lui faire du mal, j'arrivais pas à redescendre. Et je sentais qu'elle allait pas m'aider à me calmer en faisant comme si tout allait bien.

Elle s'assit sur le bord de la baignoire, j'essuyai le sang qui avait coulé sur la partie gauche de son visage avant de désinfecter sa plaie avec un coton. Putain c'était bien ouvert.

– Il va peut-être te falloir des points de sutures.

Elle repoussa ma proposition en soufflant :

– C'est mort, je passe pas six heures aux urgences pour de la couture.

Dans d'autres circonstances j'aurais pu sourire : il fallait limite qu'elle ai les boyaux qui ressortent pour considérer d'aller à l'hôpital.

Mais là je me retenais pour pas lui péter un câble dessus. C'était pas que de sa faute si j'avais les nerfs, je m'en voulais une grosse partie à moi-même.

J'aurais dû rester avec elle, pas aller chercher mon putain de phone. Ou alors j'aurais dû l'emmener avec moi. Putain mais pourquoi je l'avais laissée toute seule ? J'avais envie de me foutre des patates. Comment je l'aurais retrouvé si j'étais arrivé quelques secondes plus tard ? Les pires scénarios défilaient dans ma tête et j'avais envie de beuge.

J'avais désinfectée la plaie et mis un pansement dessus. Elle avait même pas grimacé. Dans une autre vie elle avait dû être gladiateur c'est pas possible.

Je caressai sa joue meurtrie et elle ferma les yeux sous le passage de ma main. Les enfoirés l'avaient pas loupée. Ça allait mettre un moment à dégonfler et elle devra mettre la tonne de maquillage pour cacher le bleu.

Je crois qu'elle se rendait pas compte à quel point ça me faisait du mal de la voir comme ça. Je supportais vraiment pas qu'on s'en prenne à elle. Elle était une des meilleures personnes que je connaissais et je comprenais pas qu'on veuille lui faire du mal. 

En silence, elle commença à caresser mes poings blessés. J'avais presque oublié que je les avais balancé à plusieurs reprises dans des os.

Je sais pas combien de temps on était resté comme ça, sans rien dire. Ce silence m'avait calmé. Ma colère était redescendue.

– Je peux prendre une douche ? demanda-t-elle enfin, d'une voix si basse que je me demandais comment je l'avais entendu.

J'acquiesçai. J'allais devoir attendre pour lui faire déballer tout ce qu'elle ressentait.

Je lui apportai des vêtements de rechange et quelques secondes après que je sois sorti de la salle de bain, mon téléphone sonna :

– Oh Bigo comment elle va ? Il s'est passé quoi ? Passes-moi Elma.

Bon, bah apparemment mon reuf était arrivé chez Feu.

– Gros t'inquiètes, je m'occupe d'elle. Je te rappelle dès que j'ai réussi à savoir ce qui se passe dans sa teuté.

Je raccrochai directement, sans laisser à Nek le temps de protester. J'avais pas le temps pour ça.

Assis sur mon canap', la tête dans les mains, je réfléchissais à la meilleure manière d'agir pour parler avec Maëlle. Je parvins vite à la conclusion qu'il y avait justement pas de meilleure manière, elle était trop imprévisible.

La handballeuse sortit finalement de la salle de bain, vêtue d'un de mes sweats et un de mes bas de survet'. Son regard était plein de détermination et je savais déjà qu'elle allait m'en faire baver.

– Viens t'asseoir.

Mon ton était sec. Je voulais vraiment pas lui faire du mal, mais j'avais appris au fil des mois que la douceur marchait pas avec elle.

Elle s'exécuta, une lueur de fierté nouvelle dans les yeux. Elle allait tout faire pour pas craquer.

– Arrêtes de faire comme si rien ne t'atteignait, tu t'es fait agressée, t'as le droit de souffler.

Elle soupira et ramena ses jambes sur le canap' pour s'installer en tailleur. Elle pouvait jamais s'asseoir correctement c'était ouf.

– Qu'est-ce que tu veux que je te dise ? Je vais bien, ça aurait pu être pire. Je l'ai cherché de toute façon. Quand j'ai vu qu'ils s'attaquaient à la gosse j'ai vrillé alors je suis allé les voir et j'ai un peu cherché la merde. Après j'ai foutu un coup de boule à l'autre et ça l'a encore plus énervé. Si j'avais pas été une grosse faible et que j'avais été capable de me défendre plus que ça, ce serait pas arrivé !

Elle avait craché ça avec dégoût. Je comprenais pas comment elle pouvait avoir aussi peu d'estime pour elle. Ça l'avait pas aidé de grandir entouré de mecs.

– T'es sérieuse là ? m'énervai-je. Ils étaient deux sur toi, à quel moment t'as été faible ? T'as vu ton gabarit ? Parce que quand t'as tabassé le petit babtou c'est pas de la faiblesse que j'ai vu, alors arrête de te rabaisser comme ça ! Et puis c'est pas de ça dont je voulais parler, je m'en fous de ce qu'il s'est passé exactement, je veux juste savoir comment tu te sens !

Elle baissa la tête en soufflant avec lassitude :

– Je... Je suis fatiguée... Je veux juste dormir Mika, s'il te plait.

Je l'avais jamais entendu parler d'une voix aussi faible et plaintive. Elle qui avait l'air d'être prête à me démonter quelques secondes auparavant... J'avais maintenant l'impression que des kilomètres nous séparaient, elle était épuisée.

En voulant à tout prix la faire parler j'avais oublié qu'on lui avait tapé dessus et qu'on l'avait sûrement touchée. Cette dernière pensée me fit frissonner : je savais pas exactement ce qu'ils avaient osé faire et les scénarios que je m'imaginais me rendaient fou.

Je fermai les yeux, désespéré par ma propre connerie. Elle était éprouvée physiquement et mentalement. Elle avait pas besoin de parler pour le moment, elle avait besoin de se reposer.

– Viens-là, lui dis-je finalement en l'attirant près de moi.

Elle se blottie contre mon sweat comme un animal blessé, et je sentis une chaleur nouvelle me prendre au bide. Ce seul geste m'avait montré qu'elle était pas toujours ce mur d'adamantium que rien n'atteignait. Elle parlait peut-être pas, mais elle cherchait quand même un minimum de réconfort. Elle avait abaissé ses défenses, et elle l'avait fait avec moi.

Je me demandais si c'était à ce moment là que je m'étais rendu compte que j'étais plus attaché à elle que ce que je croyais.

Elle s'accrocha à mon cou et je la soulevai tandis que ses jambes se nouaient autour de ma taille. J'aurais aussi bien pu porter une môme.

Quelques minutes plus tard on était glissés sous les draps et elle dormait déjà, recroquevillée sur elle-même.

J'arrivais pas à croire que c'était la même meuf forte et froide que j'avais rencontré en septembre. J'étais soulagé de la découvrir comme ça, finalement humaine.

Je crevais d'envie de la coller à moi pour la prendre dans mes bras mais j'osais pas. Après ce qu'elle avait vécu j'avais peur de la terroriser. Et puis on était juste potes et je savais qu'elle voulait pas qu'on rende les choses plus ambiguës qu'elles commençaient déjà à l'être.

Je finis par m'endormir rapidement, bercé par la respiration régulière de Maëlle.

Mais mon sommeil fut de courte durée puisque les gémissements de la handballeuse me réveillèrent rapidement.

– Maëlle, murmurai-je.

En la voyant comme ça, je sentis mon cœur se serrer. Ces fils de putes avaient vraiment réussi à percer sa carapace.

J'entendis un faible « nan » sortir de sa bouche pendant qu'elle gigotait faiblement. Elle avait l'air de se débattre et je pouvais pas la laisser comme ça.

Je secouai doucement son bras puis caressai sa joue pour essayer de la réveiller.

Elle sursauta violemment et se précipita hors du lit, le regard plein de terreur. Je pensais jamais voir ça sur son visage un jour ; Maëlle elle avait peur de rien.

Je m'approchai d'elle doucement, comme si je voulais apprivoiser un chat sauvage.

– Maëlle... Eh c'est moi... T'es en sécurité.

Je l'attirai doucement contre moi. Elle se laissa d'abord faire puis sursauta violemment lorsque mes bras se refermèrent autour d'elle.

Putain mais qu'est-ce qu'on lui avait fait ?

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