Chapitre 131. « Je suis en vie, et ça n'a pas de prix »
Coucou ! Et oui, me revoilà, je sais que ça fait longtemps, mais je n'ai rien réussi à écrire avant. J'espère que vous allez tous bien depuis le temps !
Bon, je vais pas vous cacher que c'est surement l'avant-dernier chapitre avant l'épilogue... Même si ça me brise le cœur, toutes les bonnes choses ont une fin...
Je ne sais pas quand sortira le prochain chapitre. Etant donné que ce sera le dernier, je vous avoue que je l'écris et le réécris depuis un moment sans être satisfaite parce que je veux qu'il soit parfait... Vous le méritez. Mais j'essaierai de faire de mon mieux pour ne pas trop vous faire attendre.
Enfin bref, bonne lecture, et bonne nuit à mes insomniaques ! (c'est très paradoxal comme phrase)
PS : pour les curieux, c'est à cause de/grâce à Grégory Lemarchal (le chanteur de la musique du titre) que j'ai découvert la mucoviscidose quand j'étais toute petite, et c'est de lui que découle toute l'histoire de Raph. RIP d'ailleurs, j'étais fan de lui du haut de mes six ans. Enfin bref !
Plein de bisous ! ❤
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– Oh bordel, je suis stressée comme si c'était le mien !
Deen rigola derrière moi tandis que je faisais les cent pas dans le salon de mes arrières-grand-parents, attendant que Sohel soit enfin prêt.
Avec toute la détermination du monde, Ines, Alice, Julia, Raphaël et moi avions réussi à organiser un mariage hivernal pour mon frère jumeau et sa fiancée.
Puisqu'il devait originalement se dérouler durant l'été mais que la greffe de Raph l'avait empêché, tous les plans avaient dû être abandonnés.
Le mariage aurait dû avoir lieu à la mairie de Dijon, puis une cérémonie aurait dû se dérouler sur la propriété de mes arrières-grands-parents, en pleine nature, et nous étions enfin supposé tous nous déplacer dans la salle des fêtes de leur petit village. L'étape « pleine nature » avait dû être abandonnée, la décoration de la salle dut être changée du tout au tout pour laisser place à une ambiance hivernale, les plats durent laisser place à d'autres, et certains invités n'étaient plus disponibles, nous obligeant à revoir les plans de table.
Et puis c'était sans parler de ma tenue ; maintenant que j'étais devenue une baleine, j'avais dû changer de robe pour laisser de la place pour mon alien. J'étais désormais presque à terme, et je n'en pouvais plus.
À force de persévérance, nous étions donc finalement parvenu à organiser un mariage en vraiment très peu de temps, et j'espérais qu'il allait être parfait.
– C'est un peu le tiens au final, fit Deen
Assis sur le canapé, il faisait rebondir Zoé sur ses genoux.
– Vu toute l'énergie et la volonté que t'y as mis, compléta-t-il.
Il était beau dans son costume. Vraiment très beau. Si le mariage avait été dans mes plans, j'aurais presque eu envie de l'épouser.
Je n'eus pas le temps de lui répondre puisque Sohel descendit en trombe des escaliers, un large sourire sur son visage. Il s'arrêta net en me voyant :
– Ouaaah ! T'es trop jolie Mel !
Les larmes me montèrent automatiquement aux yeux, et comme il en avait l'habitude depuis plusieurs semaines, Deen éclata de rire :
– Oh merde, c'est vraiment le meilleur truc, fit-il entre deux hoquets de rire.
Zoé le suivit - elle était complètement fan de mon copain et copiait tout ce qu'il faisait - et je le fusillai du regard. Mais je sentais que mes larmes étaient vraiment prêtes à couler.
– Bah qu'est-ce qu'il y a Mel ? s'inquiéta Sohel en se précipitant pour me prendre dans ses petits bras. Ça va pas ? Je voulais pas te rendre triste.
En face de nous, Deen était toujours mort de rire.
Forcément il n'y avait que moi que ce bébé faisait passer pour une fragile. Quelle injustice !
– Je suis pas triste Crapaud. C'est parce que ça m'a fait très plaisir ce que tu m'as dit.
– Mais d'habitude tu pleures pas, fit-il en fronçant les sourcils. Tu pleures jamais.
Deen s'était calmé mais me regardait d'un air moqueur ; j'allais lui démonter sa gueule.
– C'est à cause du bébé, lui expliquai-je. Il joue avec mes émotions.
– Ah oui ! s'exclama-t-il en s'écartant de moi. Maman ça lui faisait pareil, elle pleurait tout le temps en voyant la pub de Nutella parce que Papa il voulait plus en acheter.
Deen et moi éclatâmes de rire en même temps ; ma tante était quand même arrivée à un autre niveau que le mien.
– Arrête de te moquer de ma sœur ! s'exclama Sohel en allant taper Deen de ses petites mains.
Merci Soso. Au moins je pouvais compter sur lui.
Deen tenta de se débattre mais se laissa plus faire qu'autre chose, et Sohel, sous mes encouragements, gagna la bataille et leva finalement les poings d'un air triomphant.
– Au fait si on te demande pourquoi je chiale tout le temps, fis-je à l'intention du rappeur, tu dis bien que c'est à cause du bébé, je veux pas qu'on croit que je suis une fragile.
– Mais oui, mais oui, fit-il en faisant danser ses sourcils.
Je soupirai : qu'avais-je fait pour mériter un copain pareil ?
– Moi veux me marier avec toi plus tard, fit Zoé en regardant Deen avec des yeux émerveillés.
Le rappeur eut un air attendrit :
– Je suis pas sûr que ta sœur elle soit très contente.
– Si, c'est bon je te le laisse ma Zo. Il est pas ouf comme copain.
Deen me regarda d'un air faussement outré et il allait répliquer lorsque la voix de Papé raisonna :
– Arrêtez d'dire des conneries, tout le monde sait bien que le prochain mariage ce s'ra l'vot !
Je me précipitai vers mon arrière-grand-père pour l'aider à marcher ; il n'était plus tout jeune et je savais que ses jambes le faisaient souffrir.
– Lâche-moi, j'suis pas un p'tit vieux, me rembarra-t-il.
Deen ricana derrière moi, et j'eus un sourire amusé en levant les yeux au ciel : il ne changerait jamais.
Il se laissa pourtant faire, et ce fut quelques minutes plus tard, lorsque Mamé arriva toute apprêtée, me répétant une dizaine de fois que j'étais magnifique, que nous pûmes nous mettre en route.
– C'est moi dans le coffre ! s'exclama Sohel.
– Personne ne va dans le coffre, protesta Mamé. Maëlle prendra Zoé sur ses genoux, il y aura de la place pour tout le monde.
Sohel se renfrogna quelque peu.
– Quelle rabat-joie la vieille, grommela Papé alors que je nous dirigeais vers la voiture.
Je ne pus m'empêcher de rire ; c'était vraiment le meilleur.
– Ah, et une chose ma grande, murmura-t-il en s'arrêtant, l'air beaucoup plus sérieux.
Il me regarda dans les yeux et je crus déceler de la tendresse dans son sourire :
– Tu es vraiment resplendissante ma chérie. J'ai hâte de rencontrer mon arrière-arrière-petit enfant.
Sur ce, il se remit en marche, laissant mes yeux s'emplirent d'eau de nouveau.
[...]
Marcel faillit encore me faire pleurer lorsque je vis mon frère pour la première fois dans son costume à la mairie ; et lorsque je vis les airs fiers de ses quatre témoins, Tarek, Hugo, Hakim et Idriss ; ou lorsque Sohel et Zoé apportèrent timidement les alliances sous les regards attendris des mariés ; puis lorsqu'Ines et lui se dirent « oui » ; et enfin lorsqu'ils sortirent sous les multiples « youyou » de leur famille.
J'étais terriblement fière de mon frère jumeau. Je peinais encore à croire qu'à peine deux mois plus tôt, nous avions tous été sur le point de le perdre. Et maintenant, même si je savais que sa maladie compliquerait les choses, j'espérais vraiment qu'un miracle se produirait et qu'Ines et lui parviendraient à avoir un bébé.
Nous étions maintenant tous réunis dans la salle des fêtes du village de mes arrières-grands-parents ; si Alice et Julia avaient d'abord douté que tout le monde puisse y tenir, Ines et moi nous étions révélées avoir raison : mon frère et elle avait invité un cercle très restreint de leur famille, mais beaucoup d'amis, et tout le monde tenait.
– Il est vraiment trop mignon, j'ai envie de le bouffer !
Cela faisait plus de vingt minutes que je tenais Elyas dans mes bras, sous l'œil attentif de son père.
Sanya n'était pas là et, le cœur brisé par ce que mon meilleur ami m'avait raconté quelques jours plus tôt, j'essayais tant bien que mal d'apporter à mon neveu tout l'amour qu'il méritait.
J'étais vraiment fan de ce bébé ; il était toujours calme, attentif à tout ce qui se passait autour de lui, très curieux, et ce sourire... Mon dieu ce sourire... Je savais déjà qu'il allait pouvoir me demander tout ce qu'il voudrait, je céderai toujours.
– Ouais bah prête, m'ordonna Hugo. Chacun son tour, c'est mon neveu aussi !
– T'as qu'à aller en kidnapper un.
– Vas-y fais pas ta gamine, tu vas en avoir un vrai en plus, partage un peu !
Je rigolai avant de lui passer Elyas sans oublier de lui tirer la langue.
Nos disputes avaient évolué au même rythme que le temps : enfant, nous nous battions pour des manettes de playstation, adolescents nous nous disputions pour des joints, aujourd'hui nous nous battions pour un bébé.
Regardant Clément et Hugo s'occuper d'Elyas d'un air attendrit, je me demandait à quoi ressemblerait notre famille le jour où nous aurions tous des enfants. Bien qu'il m'arrive de regretter un peu ma liberté des dernières années, j'avais tout de même très hâte de voir l'évolution de tout ce petit monde.
Entre le plat et le fromage, les témoins furent appelés pour faire leur discours.
Ceux d'Idriss et de Tarek furent très pudiques mais néanmoins vraiment touchants ; je me doutais qu'ils réservaient leur plus belle déclaration lorsqu'ils pourraient s'exprimer devant Raphaël uniquement.
Hugo nous fit un discours magnifique, retraçant son amitié avec Raphaël, exprimant la place qu'il prenait dans sa vie et dans son cœur, et lui promettant d'être toujours là pour lui. Une larme s'échappa de mon œil, et je vis que mon frère jumeau luttait comme jamais contre l'émotion.
À ma grande surprise, Hakim nous époustoufla avec ses mots. « Cœur de pierre, je nique l'amour ». Si auparavant je doutais légèrement de la véracité de cette phrase, aujourd'hui tous mes doutes s'étaient envolés ; l'expérience d'avoir presque perdu Raph avait probablement poussé Hakim à lui ouvrir son cœur aujourd'hui, même si c'était devant une soixantaine de personnes. Car comme il l'avait dit : « J'ai rarement eu autant envie de tout niquer que le jour où on t'a endormi. Ce soir-là, j'ai maudit ce putain de mektoub de t'avoir mis toi et ta reus sur mon chemin ». Et bien moi je ne regrettais pas une seule seconde d'avoir croisé ta route Hakim, et je savais que Raphaël non plus.
Puis on m'appela à mon tour et, le cœur battant à mille à l'heure, je m'étais dirigée jusqu'à la petite scène.
Je toussotai légèrement avant de me lancer, sondant la salle des yeux ; bordel, qu'est-ce que c'était impressionnant.
– Euh... Alors..., commençai-je avec hésitation. Pour ceux qui ne me connaissent pas, Maëlle, la sœur jumelle de Raphaël, enchantée.
Quelques petits ricanements raisonnèrent et un « Ouais Elma ! » fusa de je ne sais où.
Une multitude de matchs devant des milliers de personnes, et je n'étais pas foutue d'assurer un discours dans une salle des fêtes.
Mais je savais où je devais regarder pour me sentir à l'aise ; il me suffisait de regarder dans les yeux bleus de mon frère jumeau pour toujours me sentir à ma place et en sécurité :
– J'ai passé des nuits entières à essayer d'écrire ce discours. J'ai gâché une quantité de papier phénoménale, pardon aux forêts ; j'ai rendu mon copain fou, merci à lui de ne pas m'avoir quitté ; j'ai écouté des tonnes de musiques, de rien Spotify ; et pourtant j'ai rien réussi à écrire qui puisse réellement être à la hauteur de ce que je ressens pour toi Raphy. Donc, me voilà sur scène alors que j'ai toujours refusé les invitations de nos amis rappeurs, en roue libre complète.
Je marquai une petite pause, tentant de réfléchir à la structure de la suite de mon discours.
Je lâchai finalement des yeux le sourire bienveillant de mon frère pour parcourir la salle du regard, afin de m'adresser à tout le monde :
– Raphy et Mel, c'est une histoire qui remonte bientôt vingt-six ans en arrière. On était pas prévu au programme, et même si on a rendu la vie de nos parents dure, je suis très heureuse qu'ils ne se soient pas débarrassé de nous. Parce que j'aurais eu l'opportunité de connaître la meilleure personne que cette terre ai jamais porté, et je suis plus que fière d'être sa sœur jumelle. Aussi loin que je me souvienne, on a toujours été fusionnels. On nous a appris à parler pour qu'on puisse inventer notre propre langage, et je suis sûre qu'aujourd'hui encore, si je lui dis « Patoukna », il comprendra ce que je veux dire.
Je jetai un rapide coup d'œil à Raphaël pour être sûre qu'il ai bien compris, et je le vis ricaner tandis que les gens à notre table semblaient lui poser des questions. Nous eûmes un petit sourire complice.
– Notre relation a vite été perçue comme malsaine par les adultes autour de nous, et on a eu droit à des rendez-vous chez un psychologue dès notre plus jeune âge. Mais lui et moi savions très bien que personne ne pourrait jamais nous comprendre. Encore aujourd'hui, je suis intimement convaincue que nous sommes les seules personnes à pouvoir nous comprendre totalement. Et pour moi, c'est loin d'être malsain. Parce qu'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours eu un meilleur ami sur qui compter, une épaule sur laquelle pleurer, une compagnie avec laquelle dormir, des bras rassurants pour me réconforter, un frère avec lequel rire, un jumeau avec lequel faire mes bêtises.
Je sentais que ma gorge commençait à se nouer petit à petit, et songeai que je devrais probablement terminer mon discours assez vite avant de me mettre à pleurer :
– Raphaël, sans aucune objectivité, je dois l'admettre, c'est le meilleur Être humain qu'il vous sera amené à rencontrer. Il est généreux, drôle, passionné, gentil, intelligent, courageux, altruiste, aimant, bienveillant, empathique, honnête, et loyal... Il serait prêt à mourir pour n'importe lequel de ses proches, et il est tellement aimé par tout le monde, que tout le monde serait prêt à mourir pour lui. Alors croyez-moi quand je vous dis que vous êtes les personnes les plus chanceuses du monde, vous, dont le trajet a croisé la route de Raphaël Duprés-Clarkson.
Allez, plus que quelques phrases, et ce serait les chutes du Niagara sur scène.
Pour ce que j'avais à dire ensuite, je rivai de nouveau mes yeux dans ceux de Raph :
– Raphy, commençai-je, la gorge plus nouée que jamais. Je suis tellement fière de toi putain, t'as pas idée. Dès ta naissance, la vie t'as dit que tu rencontrerais sa jumelle, mais toi... Toi pendant vingt-cinq ans t'as envoyé la mort se faire mettre, à force de courage et de détermination, mais surtout de soif de vivre. Les mots seront jamais assez fort pour exprimer à quel point je suis heureuse qu'on m'ai donné l'opportunité d'être ta sœur jumelle. Tu t'en es tellement bien sortit... T'as construit de magnifiques relations avec tes frères de Dijon et de Paris, tu es celui qui a le plus réussi dans ses études malgré les obstacles, tu nous combles tous tous les jours de ta présence, et maintenant tu as Ines... Je ne dirai pas que c'est ta plus belle réussite parce qu'elle était déjà exceptionnelle avant de t'avoir rencontré. Mais en tout cas, c'est ta plus belle trouvaille ; je ne pouvais pas rêver meilleure personne pour partager la vie de mon frère.
Raphaël se tourna vers sa femme avec un sourire tendre et embrassa sa tempe en fermant les yeux.
– Ines, continuai-je. J'aimerais te demander de prendre soin de mon frère parce que c'est la personne la plus importante de ma vie. Mais je vais pas le faire, parce que je sais que tu le fais déjà depuis très longtemps, et parce que je sais que tu continueras à le faire pendant longtemps. Parce que personne ne peut lutter contre l'envie de combler Raph de joie et d'amour au quotidien. Certains ont essayé, mais ils sont vite tombés raides dingues de lui. Je sais que c'est votre cas à tous, ne vous mentez pas à vous-mêmes.
Quelques légers rires fusèrent dans l'assemblée, puis je me décidai enfin à conclure :
– Bref, mon discours devient beaucoup trop long, fis-je avec hésitation. Mon Raphy, mon meilleur ami, mon frère jumeau... Aucun mot ne pourra jamais décrire à quel point tu es important pour moi. Ce matin, en m'habillant, complètement stressée, j'ai remarqué qu'il y a quelque chose qu'on ne s'était jamais dit dans des situations normales. Pour nous pousser à exprimer nos sentiments, il a toujours fallu que l'un d'entre nous ait manqué disparaître à tout jamais. Alors, Raphaël... Je t'aime. Je t'aime plus que tout au monde, et bordel, qu'est-ce que je suis fière d'assister à ton mariage aujourd'hui.
Une cinquantaine d'applaudissements et une vague de cris m'assaillirent lorsque je m'écartai enfin du micro.
Des larmes menaçaient de s'échapper de mes yeux alors que mon cœur allait exploser d'amour pour mon frère. Et pour une fois, ce n'était pas à cause du bébé ; j'avais réellement envie de m'effondrer de bonheur.
Raphaël perçut immédiatement ma fébrilité, puisqu'il bondit de sa chaise pour venir me prendre dans ses bras. Alors que ceux-ci se refermaient avec fermeté derrière mon dos, je me laissai aller contre lui, sanglotant quelque peu.
– Je t'aime aussi, me murmura-t-il. Plus que tout.
Lorsque je m'écartai de lui, je vis que ses larmes avaient coulé elles aussi. Alors doucement, je plaçai mes paumes de part à d'autre de son visage et essuyai les petites traces d'eau avec mes pouces. Raphaël fit la même chose avec moi avant d'embrasser mon front :
– Je suis super fier d'être ton frère aussi, déclara-t-il avant de me prendre dans ses bras.
Je ne sais pas combien de temps nous restâmes serrés l'un contre l'autre puisque nous perdions souvent la notion du temps dans cette position, mais ce fut assez pour qu'Idriss s'impatiente :
– Bon c'est fini les Bisounours ? On a faim là !
Raphaël et moi rigolâmes avant de rejoindre nos places, et je vis en croisant les yeux du rappeur Kabyle qu'il avait l'air tout aussi ému que le reste de l'assemblée.
Je fronçai même les yeux en voyant Deen avec le visage un peu fermé au loin, et m'empressai de lui envoyer un message :
Ça va pas ?
Mika : Si, ça m'a juste fait un truc de vous voir comme ça. Vous avez l'air enfin heureux, et je crois que c'est la première fois que je te vois autant pleurer de joie
Mon cœur se gonfla d'amour, et je lui adressai un sourire, me retenant bien de le taquiner quant à ce petit moment confession. L'alcool l'avait désinhibé, et la raison de son émotion était trop légitime pour me moquer de lui.
Alors je décidai de me désinhiber seule :
Je t'aime
Mika : Fragile
J'eus un petit éclat de rire et lui montrai mon majeur de loin.
Plus tard pendant la soirée, parcourant la salle des yeux, je détaillai chacune des personnes pour lesquelles je portais un amour fou, le sourire aux lèvres.
Autour de la table principale, Ines et Raphaël discutaient avec animation avec les parents et la sœur d'Ines. On voyait à leur regard que sa famille adorait son mari. Ma belle-sœur, habillée d'une magnifique robe dorée, avait la tête posée contre le torse de mon frère, un sourire attendrit sur les lèvres. Je savais qu'elle peinait encore à croire que son mari était bien vivant à côté d'elle.
À la table près de la fenêtre, mon père et Jared - le plus jeune de ses fils sur ses genoux - pleuraient de rire ensemble et parlaient fort, comme les deux Américains qu'ils étaient. Fanny regardait son homme d'un air à la fois désespéré et amoureux, et semblait les critiquer gentiment avec Erin, la femme de Jared. Idriss et Théo ne tardèrent pas à débarquer à leur table et furent joyeusement accueillis par mon père et mon oncle.
Assis à la table derrière eux, Ken couvait Alice d'un regard amoureux tandis que ma petite sœur dansait avec un Sohel rayonnant de joie de vivre, Julia à ses côtés jouant et dansant avec les enfants de Jared et Meghan.
Ivan, Eff, Maxime et Deen - ainsi que son éternel pot-de-colle Zoé sur les genoux - avaient quant à eux migré à la table de mes arrières-grands-parents. Maxime, Deen et Eff étaient morts de rire en écoutant Papé parler avec passion, et Ivan semblait discuter avec Mamé avec douceur, un sourire bienveillant sur le visage de celle-ci. L'impatience me gagna en pensant que les trois abrutis qui servaient de frère à Deen allaient être des tontons parfait pour notre bébé.
Moh, Louis, Alpha et Hugz se livraient quant à eux à une bataille de beer pong improvisée avec les frères et les cousines d'Ines. Si quelques cousines d'Ines jouaient vraiment, je levai tout de même les yeux au ciel de désespoir en me demandant pourquoi Lo et Hugz avaient accepté de jouer à un tel jeu avec une majorité de personne ne buvant pas d'alcool.
Suivant Alice du regard, je la vis s'asseoir à côté de Clément et poser sa tête sur l'épaule de ce dernier. Le rappeur lui adressa un sourire bienveillant avant d'entourer ses épaules de son bras, et continua à discuter avec animation avec Morgan, Antoine, et Kamel, probablement d'un sujet tournant autour du rap.
Le Clément d'Hugo, quant à lui, papotait avec Hakim et Stine. Ces derniers semblaient avoir fait la paix depuis le départ de la Norvégienne en Hongrie, mais je pouvais encore voir dans leurs yeux que les choses pouvaient déraper à n'importe quel moment. J'eus un léger soupir nostalgique en les voyant : j'aurais beaucoup aimé les voir un jour en couple, et même si Stine avait la chance d'évoluer dans un club immense, j'avais du mal à voir ce côté positif de leur éloignement.
J'eus un petit rire en apercevant Tarek et Hugo comploter dans leur coin en regardant mes grands-parents d'un air joueur. Je ne savais pas ce qu'ils avaient prévu de faire, mais à vingt-six ans, ils aimaient visiblement toujours autant torturer ceux qu'ils considéraient comme leurs grands-parents à eux aussi. Younes, l'un des petits frères de Tarek, semblait aussi de la partie.
Mon rire s'accentua en voyant Khadija les regarder d'un air mauvais, écoutant parler son mari d'une oreille distraite : il n'allait pas lui falloir beaucoup de temps pour bondir de sa chaise et aller retourner une claque à chacun de ces trois abrutis.
Mes pensées furent vérifiées puisque, quelques secondes plus tard, alors qu'Hugo, Tarek et Younes s'approchaient de mes grands-parents, Khadija fondit sur eux avant de les engueuler, leur assénant une claque derrière la tête. Mes amis, morts de rire, se rassirent à mes côtés, laissant Younes rejoindre ses deux autres frères.
– Vous êtes des gros gamins, rigolai-je.
– Elle a vraiment des yeux de lynx, ricana Tarek. Jamais elle nous lâchera !
– « Je n'arrive pas à croire que tu sois père, âne immature que tu es ! »
J'explosai de rire devant l'imitation d'Hugo, et Tarek faillis cracher son verre de vin rouge.
– Ma daronne c'est la meilleure, fit-il fièrement en rigolant.
Une chaise fut violemment tirée entre Tarek et Hugo, et Raphaël s'avachit dessus :
– Ouais, je suis bien d'accord, elle mérite mieux que toi comme fils !
Tarek et mon jumeau se battirent quelques secondes, puis Raphaël coupa court à leurs chamailleries pour adopter un air plus sérieux :
– Du coup... Sanya ? fit-il avec beaucoup d'hésitation.
Le visage de Tarek se ferma, et son regard se dirigea automatiquement vers la porte menant à la petite pièce où les bébés et certains enfants étaient en train de dormir.
Il ne répondit pas pour autant.
– On sera toujours là pour toi frérot, lui dit solennellement Raphaël, posant une main réconfortante sur la nuque du Kabyle.
– Je sais, fit tristement ce dernier.
– T'es un père génial, fit Hugo. Ce petit bout il pouvait pas tomber sur une meilleure famille que la tienne. Parce qu'il faut pas forcément être mille pour former une famille. Je te jure, je pense que si plusieurs années en arrière on m'avait dit que t'allais être daron, j'aurais flippé ma race pour ton gosse. Mais là... Putain je crois qu'aucun môme pourra recevoir autant d'amour que ce que tu lui donneras. Tu l'aimes à la folie et ça se voit. Donc je m'en fais vraiment pas pour lui, ni pour toi. Parce que je sais qu'il te le rendra.
Tarek lança un regard furtif embué de larmes à Hugo avant de renifler et de lever les yeux au ciel pour éviter de les laisser couler.
Je me contentais de passer mes doigts dans ses cheveux avec affection, et pour une fois, il ne me repoussa pas.
– Putain, souffla-t-il finalement.
Il resta silencieux quelques secondes, tentant de retrouver une contenance, puis il se redressa fièrement et nous sourit :
– J'vous aime les gars.
– On t'aime aussi, fit notre petit groupe de manière plus ou moins synchronisée.
Puis, comme pour nous appuyer, Marcel me donna un coup de pied.
J'avais hâte qu'il ou elle rencontre ces trois tontons que j'aimais d'un amour fou. Plus que hâte.
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