Chapitre 120. « La vie c'est random mon gava »

La fin de l'année passa à une vitesse folle. 

Pour ma part, j'alternai entre fac et handball. Certaines semaines n'étaient pas très chargées en cours et me permettaient donc de souffler beaucoup plus que depuis ces dernières années. Seul point sombre au tableau : Mr. Richard, mon prof de traduction audiovisuelle. Beaucoup trop avenant avec toutes les filles, il lui était parfois arrivé d'avoir la main baladeuse avec certaines d'entre elles. Je n'avais encore rien subi, mais il valait mieux pour lui qu'il reste loin de moi, car un coup de pied était vite parti.

Deen passait de plus en plus de temps en studio, et nous ne nous voyions que très peu chez lui ou chez moi, et souvent pour s'engueuler. Évidemment, tout finissait toujours bien, mais j'avais hâte que son album sorte ; j'en avais marre de ne jamais le voir, ou de seulement sentir sa présence lorsqu'il rentrait tôt le matin, quelques heures seulement avant que je ne parte en cours. Mais je ne pouvais rien lui reprocher ; il était à fond dans son travail, et j'avais hâte de pouvoir entendre ce qu'il avait produit. Je savais d'avance que ça allait beaucoup me plaire. Car oui, encore une fois, le rappeur avait refusé que j'écoute un seul de ses sons, et m'avait expressément interdit de venir assister aux enregistrements. J'avais réussi à soutirer quelques informations à Maxime, mais rien de formidable.

Raphaël travaillait comme un fou pour réussir son doctorat, plus passionné que jamais. Je savais qu'il envisageait de plus en plus la possibilité d'aller vivre en Suisse pour pouvoir travailler au CERN. J'étais persuadée qu'il en avait les capacités et que son travail allait payer. Ines, quant à elle, l'encourageait toujours autant, tout en continuant sa petite vie d'historienne de l'art. Les filles et moi aidions toujours les futurs mariés à planifier leur mariage, et avions très hâte que l'été arrive.

Alice était toujours psychologue pour enfant, Julia professeure d'Espagnol - Théo n'était d'ailleurs pas resté aussi longtemps que ses frères au Japon pour rester auprès de sa femme -, et Stine était toujours la meilleure buteuse de notre équipe.

Les garçons du S-Crew étaient donc toujours au Japon, et n'allaient pas tarder à rentrer pour clôturer la tournée de Ken, et entamer l'année prochaine une nouvelle tournée avec Destins Liés.

Et en parlant du S-Croums... Doums et Adèle nous avaient annoncé qu'ils attendaient un bébé pour 2017. Je ne savais pas ce qu'ils avaient tous en ce moment, mais l'expression « Jamais deux sans trois » commençait à me faire peur.

Ah oui, et petit détail pas si anodin : on m'avait appelé pour jouer le Championnat d'Europe. J'avais été aux anges, et ne m'étais jamais sentie aussi conquérante qu'au moment de cette annonce : putain, avec tout ce qui m'était arrivé cette année, la douleur physique et mentale, les pronostics pessimistes des médecins, et les heures de souffrance pour retrouver ma mobilité, tout le mal que je m'étais donné pour réussir à rejouer un jour avait payé.

Bon, et puis, sans surprise, Stine avait été sélectionnée par la Norvège aussi.

J'avais hâte de retrouver l'équipe internationale et l'ambiance des Palais des Sports remplis aux couleurs de chaque nation. Vraiment hâte.


[...]


En décembre arrivèrent le Bercy de Ken et la sortie de son album surprise, Cyborg.

Ce soir-là, les filles présente avec moi dans le public me frappèrent lorsque je n'affichai pas le même air surpris qu'elles : mon ami m'avait effectivement parlé de son projet quelques jours auparavant.

Aussitôt le concert terminé, nous rejoignîmes nos amis en coulisses, un air fier sur le visage. 

Bercy. 

Ils l'avaient fait. J'étais si fière de Ken et de tous les autres gars. Sachant d'où ils venaient et les galères qu'ils avaient surmonté. Ils venaient maintenant de conclure un concert à Bercy, devant des milliers de spectateurs.

À peine les avions nous rejoint que les yeux de Ken se posèrent aussitôt sur Alice, sondeurs. Plus tard dans la soirée, ma petite sœur me tira par la main pour m'emmener à l'extérieur des loges, puis du bâtiment.

Près des camionnettes de la maintenance, je la sondai avec curiosité :

– Qu'est-ce qui t'arrives ?

L'air perdue, Alice sortit un petit objet de sa poche, et me tendit un vieil IPod Shuffle bleu :

– Il m'a glissé ça dans la main tout à l'heure. Je crois que c'est son album.

– Et ?

– Je sais pas quoi faire, soupira-t-elle.

– Bah si, lançai-je comme si c'était évident. Tu vas l'écouter.

– Tu comprends pas, fit-elle avant de faire les cents pas, mal à l'aise. Je l'avais pas vu depuis des semaines. De l'avoir revu, ça m'a fait trop bizarre. Alors écouter les sons qu'il a enregistré quand on était plus ensemble... Je crois que je suis pas prête Malou...

– Tu le seras jamais. Mais, s'il te l'a donné maintenant, c'est qu'il veut que tu l'entendes avant tous les autres. Parce qu'en soi, il sort demain, donc tu pourrais l'écouter à ce moment-là. Mais son geste, ça veut vraiment dire qu'il tient à ce que tu sois une des premières à l'entendre. Et à lui donner ton ressentis, accessoirement.

Ma petite sœur resta silencieuse quelques secondes, les yeux dans le vide, puis elle ancra des yeux désespérés dans les miens :

– J'ai peur Malou.

– Je sais, fis-je en prenant délicatement une de ses tresses entre mes doigts. Mais je suis là.

– Tu l'écoutes avec moi ? 

Je secouai négativement la tête et lui adressai un sourire encourageant : 

– C'est à toi qu'il la donné, pas à moi. Mais je peux rester à côté de toi si tu veux.

Tandis que, prenant son courage à deux mains, mon amie lançait la première musique, je retournai brièvement à l'intérieur pour prévenir notre groupe que nous étions à l'extérieur. À la vue de leurs airs défoncés et au bruit qu'ils faisaient, je me dis qu'Alice aurait même le temps d'écouter l'album deux fois.

Nous restâmes quelques minutes dans le froid de décembre, puis décidâmes de migrer à l'intérieur, au calme.

Alice passa par toutes les expressions faciales, souriant avec joie, tristesse ou amusement, son visage se tendant à certains moments, et elle versa même quelques larmes. Ce ne fut qu'à la fin de son écoute qu'elle s'effondra totalement.

Alors ni une ni deux, assise sur le sol à côté d'elle, j'entourai ses épaules pour la faire basculer contre moi, et elle explosa en sanglot dans mes bras, brisant mon cœur au passage. Je détestais voir ma petite sœur dans cet état, elle qui était si mignonne et méritait tout l'amour du monde.

Après lui avoir doucement intimé de se calmer une dizaine de fois tout en caressant ses cheveux et en la berçant, Alice finit par s'apaiser et sécha ses larmes :

– J'en peux plus de me sentir comme ça à cause de lui, lâcha-t-elle.

– Comment ?

– Amoureuse.

J'acquiesçai d'un air triste, la laissant se moucher avant de continuer :

– Je l'aime tellement, ça me fait si mal... J'arrive pas à ne pas penser à lui, je rêverais d'être de nouveau dans ses bras, mais on se fait tellement de mal. Je pensais que la distance aiderait, mais pas du tout, j'ai pas arrêté de penser à lui quand il était au Japon. J'ai essayé de sortir avec d'autres gars, mais y'avait rien à faire, tout me rappelait lui. Et maintenant ça ! Pas de nouvelles pendant des semaines, et il lâche tout dans un album ? J'ai envie de le frapper, t'imagines même pas ! Et le pire c'est que je crois que j'ai envie de lui sauter au cou et de faire comme si on se découvrait pour la première fois, et ça, ça me donne encore plus envie de le frapper. Quoi que je fasse, j'arrive pas à le détester, et je me déteste pour ça.

L'autoflagellation de ma petite sœur s'arrêta soudainement, toutes les deux surprises par un bruit en direction de la porte.

Nos têtes se tournèrent dans cette direction en même temps, et nous découvrîmes toutes deux un Ken hésitant :

– Je... On vous a cherché dehors et vous y étiez pas, fit-il d'un air très peu sûr de lui.

Je le connaissais assez pour savoir qu'il avait tout entendu de notre discussion.

Le rappeur et Alice ne se quittèrent pas des yeux. C'était comme si je n'appartenais plus à la même dimension qu'eux : tout passait par leur regard, et ils avaient complètement oublié ma présence. 

Je me retirai donc doucement, espérant de tout cœur qu'après cette soirée, ils allaient se marier.

Oui, bon, je pouvais toujours rêver !


[...]


– Putain Mel, tes godasses sérieux !

Je levai les yeux dans mon canapé en entendant l'aimable arrivée de mon copain.

Je revenais de l'Euro de hand en Suède, j'y avais passé trois semaines - et en était revenue avec une médaille de bronze autour du coup accessoirement -, Deen et moi ne nous voyions presque jamais, nous allions bientôt partir chacun de notre côté dans notre famille pour les fêtes de fin d'année, et il fallait déjà qu'il commence à m'embrouiller.

– C'est encore chez moi quand même, fis-je nonchalamment.

– Ouais, bah vu le temps que je passe ici et le nombre de fois où je t'ai dit que ça me saoulait, tu pourrais faire un effort.

Les joies de sortir avec un râleur professionnel. De simples chaussures en vrac dans l'entrée pouvaient le faire grogner.

– Je suis contente de te voir aussi sinon, lançai-je sarcastiquement.

Il ne me répondit pas et se contenta d'enlever ses pompes.

– Réponds pas surtout.

– Ça va, laisse moi le temps d'arriver aussi nan ?

Oh putain, je sentais qu'on allait passer une bonne soirée.

Deen vint finalement me checker puis m'embrassa furtivement.

– Quel romantisme, marmonnai-je alors qu'il se dirigeait dans la cuisine, surement pour chercher quelque chose à manger.

Je l'entendis s'arrêter quelques secondes, mais il se remit rapidement en marche sans rien dire.

C'était toujours comme ça les embrouilles entre nous. Il suffisait que l'un des deux fasse une remarque à l'autre sur le mauvais ton ou au mauvais moment, et le deuxième ferait tout pour être d'aussi mauvaise foi pour pousser l'autre à bout et ne jamais reconnaître ses torts. Lui comme moi avions parfaitement conscience de notre comportement immature, mais aucun des deux n'était prêt à l'abandonner.

Alors oui, je savais d'avance que ma prochaine phrase était une provocation puérile, mais je ne pouvais pas m'en empêcher ; je n'avais pas aimé la façon dont il était arrivé dans mon appartement, m'agressant alors que je n'avais rien demandé :

– Ce serait bien que tu fasses les courses un jour, râlai-je alors qu'il revenait de la cuisine avec un paquet de cookies dans les mains. Parce que vider mes placards tu sais faire, mais y'a plus personne quand il s'agit de les remplir.

Deen s'immobilisa, à moitié assis sur le canapé, et fixa le vide devant lui d'un air énervé. Prise d'une fierté mesquine, je me reconcentrai sur mon film.

– Tu veux que je me casse ou c'est comment ? me demanda-t-il finalement. Parce que je suis pas encore installé, je reprends mes affaires et je retourne à Auber', mon reuf sera peut-être plus content de me voir que toi.

À savoir qu'ils avaient passé la journée ensemble en studio.

– Nan, fis-je simplement, sans développer.

Je n'avais pas envie qu'il parte, je voulais simplement lui remettre dans la tronche son amabilité tout à fait relative.

– Bah casse pas les couilles alors, râla-t-il en s'enfonçant dans le canapé.

Alors là.

Je me redressai subitement :

– C'est toi qui casse les couilles à peine rentré là ! J'étais tranquille, j'avais mon aprèm de libre, j'ai vu ton message, je me suis dit « ah cool, on va pouvoir se voir », et le premier truc que tu balances c'est que MES pompes, dans MON entrée, chez MOI, TE font chier.

– Ah parce que si je me casse la gueule à cause de ton bordel - après t'avoir demandé une dizaine de fois de ranger ça, et juste ça d'ailleurs -, et que je me pète le radius faudra que je te dise « c'est pas grave chérie, j'ai deux poignets mais qu'une seule femme », c'est ça ?

Qu'il m'appelle une seule fois « sa femme » et je lui faisais la grève du sex.

– Putain mais t'es de mauvaise foi c'est ouf ! Tu peux demander les choses gentiment nan ? Au lieu de débarquer en me reprochant des trucs. Ça fait quand même trois jours qu'on s'est pas vu et on est en train de s'embrouiller pour de la merde !

– Si t'étais pas si chiante aussi, fit-il plus calmement, fixant la télé.

Serrant les dents, je restai silencieuse quelques secondes. Cette engueulade était d'un ridicule ! Mais d'un autre côté je me disais que c'était ce que les gens qui s'aimaient et qui vivaient ensemble faisaient : ils s'embrouillaient pour de la merde.

– Putain on pourra jamais habiter ensemble, lâchai-je au bout de quelques minutes de silence dans un soupir.

– On parie ?

Je me retournai subitement vers Deen, qui se tenait à une distance raisonnable de moi :

– Hein ?

– On parie qu'on y arrive pas ?

Son ton était devenu plus doux, et il semblait moins sur la défensive.

– Où tu veux en venir ?

Le rappeur se redressa, puis me regarda dans les yeux avec tout le sérieux du monde :

– Viens on emménage ensemble.

– T'es sérieux ? ricanai-je.

Il devait forcément se foutre de ma gueule suite à notre embrouille. Nous allions forcément finir par nous entre-tuer si nous faisions ça.

Mais Deen haussa les épaules. Il n'avait vraiment pas l'air de blaguer, et mon sourire s'effaça aussitôt.

– On est presque tout le temps l'un chez l'autre, ça changerait quoi ? Et puis on compte pas se séparer demain. Fin', je sais pas pour toi, mais en tout cas c'est pas dans mes plans.

Deen Burbigo était-il réellement en train de se poser ?

– On vient littéralement de s'embrouiller pour des paires de pompe Mika.

– Ouais, bah justement. C'est ce que font les couples, on est cons, mais c'est normal. Et puis, même si ça nous fait chier sur le moment, à chaque fois on se tape des barres en s'en rappelant. Au moins ça nous permettrait de nous voir plus souvent, on se croiserait forcément plus dans le même appart. Je serais même prêt à bouger d'Auber si tu veux. Enfin, j'sais pas, à toi de voir.

La première réponse qui me vint en tête fut la suivante : non. Ça n'allait jamais marcher, et au lieu de nous rapprocher, ça allait peut-être nous éloigner. 

Mais le regard de Deen ne lâchait pas le mien, et il respirait la confiance. Alors au fond de moi, je ne pus m'empêcher de penser qu'il avait raison.

De toute manière Maëlle, avec qui te voyais-tu l'année prochaine ?

Deen.

Et dans cinq ans ?

Deen. 

Avec qui te voyais-tu construire réellement quelque chose ?

Deen.

Et avec qui te voyais-tu avancer pendant de très nombreuses années ?

Deen.

Alors cet emménagement devrait forcément arriver un jour. 

Pourquoi pas maintenant ?

Le sourire de Deen s'étira lorsque j'en esquissai un léger, puis il m'interrogea rapidement :

– T'es sérieuse ?

J'haussai les épaules :

– Ça me paraît pas une si mauvaise idée, fis-je en m'avançant vers lui à quatre pattes.

Sa main vint se poser sur ma joue et nous nous embrassâmes, puis je me blottis contre lui et nous regardâmes la suite du film sans rien y comprendre.

Alors que j'aurais flippé comme jamais quelques années en arrière face à une telle situation, j'étais simplement aux anges.

– Mel...

– Hmm ?

– Tu crois qu'on a fait la connerie de l'année ?

– Y'a aucun doute.

Deen eut un éclat de rire, puis je ne tardai pas à faire la même chose, et notre fou rire dura de longues minutes sur ce canapé sur lequel nous vivrions encore de belles aventures.


[...]

– Allô ?

Février 2016, Paris était paralysée par la neige, et Deen et moi étions donc coincés chez lui pour la journée. 

Finalement, même si Deen avait été prêt à quitter son petit appartement d'Aubervilliers, c'était moi qui avait finalement laissé mon appartement. Même si je devais faire beaucoup de route pour aller à la fac et encore plus pour me rendre au Palais des Sports et que mes trajets inquiétaient parfois mon copain, au moins il était prêt de son studio et n'aurait pas à quitter cet endroit qu'il aimait tant.

Car nous le savions tous les deux, il aurait été plus dur pour lui de quitter cet environnement qu'il connaissait depuis bientôt dix qu'il ne l'aurait été pour moi de laisser l'appartement qui m'avait accueillie depuis mon retour de Norvège seulement.

« C'est qui ? » me chuchota Deen de loin et, articulant sans un bruit, je lui indiquai que j'avais à faire à Tarek.

Mais j'étais loin de penser que j'aurai à faire à un Tarek en larmes.

Très peu habituée à entendre mon frère pleurer - et là ce n'était même plus des larmes, mais des sanglots -, les larmes me montèrent aussitôt au yeux, et je dus tourner le dos à Deen pour garder encore un petit peu de fierté :

– Bouhied, qu'est-ce qui se passe ? 

Ma voix était beaucoup trop faible pour cacher mon émotion à mon copain, et il apparut quelques secondes plus tard devant moi, un air inquiet sur le visage, me demandant silencieusement ce qui se passait. Je ne pus lui répondre que par un haussement d'épaules.

J'entendis un grand reniflement dans le combiné, puis Tarek souffla un coup, et son soupir fut suivit d'un « Oh putain » plein d'autodérision :

– C'est un p'tit gars, lâcha-t-il finalement.

Il n'en fallut pas plus pour faire couler mes larmes.

Il était rare que je pleure - bien que moins maintenant -, et il était encore plus rare que je pleure de joie.

Deen sembla rassuré face à mon sourire ému, et je décollai le portable de mon oreille avant de mettre le haut-parleur.

– Il s'appelle Elyas, poursuivit mon ami. On s'en branle de combien il pèse et il mesure, mais putain il est trop beau. W'Allah, j'suis tellement heureux.

Sa voix se brisa de nouveau sur ses mots, tandis que des larmes de joie continuaient de rouler sur mes joues. Larmes que Deen ne tarda pas à sécher avec ses pouces, prenant mon visage dans ses mains d'un air mi-moqueur mi-attendrit, avant de déposer un baiser sur mon front. Je ne pus que ricaner en réalisant de quoi j'avais l'air, un peu honteuse.

– Félicitations gros, fit-il finalement. Je parle, parce que ta reus elle est en train de chialer comme une merde, elle peut rien dire. Fais des gosses plus souvent, ça me fait des vacances.

Je donnai une tape sur l'épaule de mon copain tandis que Tarek rigolait :

– Cimer Castelle, ça fait plaisir.

– Je suis si fière de toi, dis-je finalement, t'as pas idée.

– Merci Mel... Moi aussi. Je flippe ma race mais... Putain je l'aime déjà de ouf alors que ça fait littéralement une heure qu'il est là. Je te jure, je comprends pas, il est minuscule mais j'ai l'impression d'avoir jamais autant aimé quelqu'un.

Et allez ! Nouvelles chutes de larmes pour Maëlle !

– Arrête gros, ricana Deen, tu vas la faire caner, je l'ai jamais vu pleurer autant de joie.

Tarek rigola tandis que j'essuyais mes joues, tentant de me reprendre en main.

– Faudra que vous veniez le voir, fit mon frère. Je suis tellement fier, j'ai envie de le montrer à tout le monde !

– Je viens dès que les routes seront dégagées, lui promis-je.

Et ce fut ainsi que le lendemain, Raphaël, Ines, Deen et moi nous retrouvions dans la chambre qu'occupaient Sanya et Elyas dans la petite maternité.

Le monde autour de moi aurait pu cesser d'exister, je ne l'aurais même pas vu. Je me souvins vaguement avoir salué les jeunes parents ainsi qu'Hugo, puis tous mes sens avaient été attirés par le petit berceau près de la maman.

Et j'y découvris mon neveu.

Tout à coup, tout ce qui avait compté, ça avait été lui, le petit garçon de mon frère, et rien d'autre.

La peau halée et des cheveux noirs en pagaille sur sa petite tête, il avait les yeux fermés. 

C'était peut-être encore une fois par manque total d'objectivisme, mais ce bébé était loin d'être moche. Il était magnifique.

Doucement, je pris sa petite main dans la mienne, et imperceptiblement, ses yeux s'ouvrirent pour s'ancrer dans les miens. 

Il m'observa avec curiosité, et je me perdis durant de longues secondes dans ses yeux noirs ressemblant en tout point à ceux de Tarek. 

Il était son portrait craché.

Je ne sais pas combien de temps nos regards étaient restés alignés, mais je n'avais jamais été aussi émue par un contact visuel. Mon neveu m'avait touché en plein cœur.

Ce ne fut même pas lui qui mit fin à notre échange, mais moi, devant me résigner à laisser ma place à mon frère jumeau.

Je l'observai donc à son tour s'émerveiller devant son neveu, tandis qu'un bras m'entourait les épaules. Ce fut totalement surprise que je me laissai basculer contre Tarek, qui m'embrassa le haut de la tête. 

Son fils avait eu raison de sa froideur.

– Est-ce que tu voudrais bien être sa marraine ? me chuchota-t-il tandis que j'entourais sa taille de mes bras.

Je déglutis difficilement pour ravaler mon émotion, puis me redressai pour regarder mon ami dans les yeux, acquiesçant simplement, et Tarek me retourna un sourire ému.

De toute façon, je m'étais promis à la minute où j'avais croisé les yeux de bébé Elyas que j'allais le protéger toute ma vie.

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