BONUS 4 : « Sont quand même pas moches ces p'tits »

Coucou ! 

Alors aujourd'hui, c'est peut-être le déconfinement (encore une fois, faites attention à vous et à vos proches s'il vous plaît), mais il y a une chose dont on ne parle pas assez, c'est que c'est aussi l'anniversaire de Jim Morrison ! (l'histoire j'entends)

Et oui, ça fait bel et bien un an que j'ai commencé à publier. Ça me fait vraiment très bizarre de me dire ça. De me dire qu'au tout début, seule une dizaine de personnes lisait la petite vie de Maëlle parce que j'écrivais sous la forme d'une fanfiction autour de Deen Burbigo sans récolter un seul commentaire, et que vous êtes maintenant des centaines à suivre mes histoires. 

J'arrive pas à croire qu'aujourd'hui vous vous soyez plus attachés aux personnages que j'ai créée et que j'aime du fond du cœur plutôt qu'aux personnages réels, que l'histoire culmine à presque 200.000 lectures, et que sur tous les chapitres que je sors j'ai toujours une avalanche de commentaires. Et pourtant avec le recul, qu'est-ce que je trouve certains chapitres mauvais ! Mais vous êtes toujours là (sans jeu de mot), et je trouve ça fou.

Je pense que les mots ne suffiront jamais à vous dire à quel point je vous suis reconnaissante de m'avoir accompagnée jusque là, même plusieurs mois après la fin de l'histoire. Et c'est pas fini...

Tout ce que je peux vous dire, c'est merci mille fois, vous êtes toutes géniales, et mes serial-commentatrices (faudrait vraiment que je trouve une autre manière de vous qualifier un jour) je vous aime tellement putain, vous avez pas idée ! 

Enfin voilà, j'ai encore parlé pendant mille ans, merci à celles qui ont eu le courage de lire tout mon blabla.

Sur ce, je vous souhaite une bonne lecture, je vous aime ! ❤

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Aujourd'hui, et pour la première fois de ma vie, j'allais jouer un match de finale européenne à Paris. Et ce, devant à peu près toutes les personnes que j'aimais. 

La plupart de mes amis de L'Entourage avaient pris leur place, déguisés depuis des jours pour se fondre dans la masse de supporters Français. Ken était à deux doigts d'adopter pour toujours son maquillage bleu-blanc-rouge, son chapeau d'Astérix et ses lunettes tricolores, pour le plus grand malheur d'Alice. Moh, quant à lui, avait regretté son choix du déguisement silhouette sous lequel il étouffait depuis plusieurs matchs. Tarek et Hugo avaient eux aussi fait le déplacement, des bonnets poulet tricolore sur la tête, et mon père, Fanny, Sohel, Raphaël et Ines étaient venus à Paris pour l'occasion. Je savais aussi que Stine regarderait le match avec son équipe depuis les sièges qui leur étaient réservés dans le public, elles qui avaient été éliminées du championnat durant le tour principal.

Mais ce qui me motivait le plus aujourd'hui et me donnait la rage de vaincre, c'était la présence de Jude dans les bras de son père au milieu de nos amis. Deen ne l'avait amené que pour la finale, et j'étais aux anges en pensant que mon fils allait me voir jouer pour la première fois. Du haut de ses un an, il ne comprendrait probablement rien, et j'étais bien consciente qu'il se désintéresserait très vite du match, mais sa présence à l'AccorHotel Arena me faisait un bien fou.

L'AccorHotel Arena... Rien que ça ! 

J'avais peut-être été sacrée championne du monde un an plus tôt, mais jouer à Bercy devant toute ma famille me réjouissait encore plus.

À 17h30, le coup d'envoi fut sifflé.

Les Russes furent les premières à rentrer un but, puis nous en rentrâmes deux, puis trois. 

Une de leurs joueuses fut exclue, puis une des nôtres, puis encore une des leurs. 

Alors que nous marquions notre septième but pour égaliser le score, la Russie posa un temps-morts. Nous retournâmes sur le terrain pour rentrer deux nouveaux buts.

À la fin de la première mi-temps, mes coéquipières et moi menions sur un score de treize à douze. Rien n'était gagné du tout.

Nos deux étoiles sur notre maillot bleu, nous retournâmes sur le terrain, les encouragements et les consignes de notre entraîneur raisonnant encore dans nos têtes, les cris de nos supporters survoltés dans les gradins, et nous marquâmes notre premier but dans la foulée.

Ce fut à la trente-cinquième minute que je crus que j'allais exploser les têtes des arbitres Danoises. Je faillis d'ailleurs me prendre une exclusion définitive après m'être pris deux fois deux minutes pour contestation des décisions des arbitres. 

Notre demi-centre avait dû se charger de tirer un jet de sept mètre sur faute des Russes. Le but était rentré, mais le ballon avait malencontreusement touché la gardienne à la tête au passage. Il avait été évident pour tout le monde, sans doute même pour la gardienne Russe, que rien n'avait été intentionnel. Pourtant les arbitres demandèrent à voir la vidéo pour être sûres qu'Allison n'avait pas voulu dégommer le visage de la joueuse adverse. Et elles sortirent leur carton rouge. Allison quitta le terrain en larmes, les arbitres se firent huer, et je manquai presque me faire exclure à mon tour. Heureusement pour moi Estelle, ma partenaire de chambrée qui connaissait mon tempérament explosif, était venue me calmer en invoquant la présence de Jude dans le public et en me signifiant qu'il serait idiot de se faire exclure pour protestation lors d'une finale. Nous avions donc poursuivi notre match, notre demi-centre préférée en moins sur le terrain, la rage au ventre plus que jamais.

Notre détermination nous fit gagner notre match et, le score vingt-quatre à vingt-et-un s'affichant au compteur, nous avions sauté de joie et dansé dans tous les sens. À la limite des larmes, je ne pus m'empêcher de me précipiter dans les gradins pour prendre Jude des bras de Deen et de l'amener avec moi sur le terrain. Tant pis pour la médiatisation. De toute manière, le handball féminin n'était pas le sport le plus suivi au monde, un bébé changeait vite, et puis je n'allais pas pouvoir cacher très longtemps ma seconde grossesse au monde du handball.

Mon petit garçon ne comprenait absolument rien à ce qui était en train de se passer, mais il souriait et riait de toutes les dents qu'il n'avait pas. Je dus me retenir de pleurer à la pensée que mon bébé avait assisté à ma première médaille de championnat d'Europe.

Je fus vite attirée par Estelle en interview, nous qui aimions rarement devoir répondre aux questions des journalistes toute seules, surtout après avoir gagné un titre.

– Je peux le prendre ? me demanda-t-elle alors que nous arrivions non loin du micro.

J'adressai un grand sourire à ma coéquipière et lui tendit Jude, et elle ne tarda pas à babiller et à essayer de le faire rire.

Devant les caméras de Bein, je fus tout de suite moins à l'aise. Et pourtant les milliers de spectateurs dans la salle ne m'avaient pas dérangée quelques minutes auparavant.

– Oh, on a un nouveau joueur dans l'équipe ! s'exclama la journaliste en s'extasiant sur Jude dans son maillot de l'équipe de France trois fois trop grand pour lui. 

– Peut-être pas maintenant, mais j'espère un jour, répondis-je en rentrant dans son jeu.

– Et comment s'appelle ce petit bonhomme ? 

– Marcel, répondis-je du tac au tac.

Pas de doute, mes amis et mon copain se fouteraient ouvertement de ma gueule suite à cette réaction sous la panique. La journaliste cacha d'ailleurs difficilement sa surprise face au prétendu prénom de mon fils.

– Et bien on guettera le nom de Marcel Duprés-Clarkson sur les terrains dans une dizaine d'années alors ! lança-t-elle finalement dans un sourire chaleureux.

Elle pouvait chercher longtemps.

– Maëlle, Estelle ! reprit-elle finalement plus sérieusement, mais l'air aussi enthousiaste que nous. Championnes du monde l'année dernière, championne d'Europe à la maison aujourd'hui, plus rien ne vous arrête !

Aux anges, souriant comme deux débiles, ma coéquipières et moi ne savions pas quoi répondre. Ce fut finalement Estelle qui répondit qu'il ne fallait pas nous porter la poisse, et que même si nous nous étions dépassé cette année, il ne fallait pas oublier que la défaite de la Norvège en phase préliminaire nous avait beaucoup aidé. Puis lorsqu'on nous demanda de décortiquer notre match et notre préparation, je répondis les phrases habituelles en disant que nous avions fait preuve de volonté, d'investissement, et tout le blabla habituel.

Lorsqu'on fut enfin libres, je ramenai Jude dans les bras de son père. 

Bordel je rêvais de lui sauter dans les bras et de l'embrasser, mais même s'il avait fait l'effort de se déguiser un petit peu, j'avais trop peur que les gens commencent à lui porter de l'intérêt et à le reconnaître si je tentais quoi que ce soit.

Dans les vestiaires, nous chantâmes, dansâmes, criâmes, prîmes des photos plus débiles les unes que les autres, et une bouteille de champagne fut ouverte. Ce fut à ce moment-là que je dévoilai ma grossesse, et donc mon écartement des terrains pour les mois à venir.

Je parvins tout de même à croiser Deen avant de partir pour une petite tournée des interviews, et me jetai littéralement dans ses bras lorsque je l'aperçus m'attendant non loin des vestiaires avec les familles des autres joueuses.

– Putain j'suis championne d'Europe, lâchai-je le visage enfoui dans son cou, mes pieds ne touchant plus le sol.

– Je suis super fier de toi t'imagines même pas. Putain si j'étais pas rappeur j'aurais crié sur tous les toits que ma meuf est championne d'Europe.

Lorsqu'il me reposa, des papillons volèrent dans mon ventre en voyant l'admiration qu'il avait dans les yeux. Je me demandais combien de temps encore mon mec allait me faire cet effet-là. Et je nous remerciai mentalement tous les deux d'être parvenu après des années de galère à savoir exprimer nos sentiments sans avoir peur de passer pour des fragiles.

– Marcel..., lâcha-t-il finalement d'un air songeur.

Je fermai les yeux en pinçant les lèvres pour retenir un sourire désespéré. Oui, Marcel...

– J'ai paniqué, avouai-je. C'est le premier truc qui m'est venu.

Les yeux levés vers lui, je tentai de soutenir son regard d'un air innocent, puis je ne tardai pas à exploser de rire et... Lui aussi.

– Putain pauvre Juju, fit-il finalement. T'as aucun respect pour lui, c'est dingue ça.

– Ah ouais parce que tu préférerais que son prénom soit connu ? le réprimandai-je plus ou moins. Des Jude avec un « Clarkson » dans le nom de famille y'en a pas cinq-mille.

– Ouais, mais au fond, personne fera de recherches sur le bébé de Maëlle Duprés-Clarkson, me lança-t-il avec un regard joueur. Tout le monde s'en branle de ta vie.

Je me renfrognai aussitôt et pris mon plus beau regard froid avant de m'écarter de lui :

– Bonne soirée Deen Burbigo.

Sur ces mots, je repris mon sac de sport pour rejoindre mes coéquipières. Mais Deen ne l'entendit pas de cette oreille puisqu'il m'attrapa le poignet en ricanant avant de me tourner vers lui et de prendre mon visage dans ses mains :

– Tu fais pas de dinguerie hein ? me demanda-t-il avec très peu d'assurance une fois son sourire taquin évanouit.

– T'inquiètes, lui répondis-je dans un baiser. Je peux pas faire grand chose avec Alphonse.

Deen eut aussitôt un sourire en jetant un bref coup d'œil à mon ventre, puis il aligna de nouveau nos regards :

– Alphonsine, corrigea-t-il. Et enceinte ou pas, ivre ou pas, on sait tous les deux que t'es capable du meilleur comme du pire en toute circonstances.

Je ricanai, n'ayant aucun argument pour lui prouver qu'il avait tort.

– Je t'aime, lançai-je simplement avant de me décoller de lui.

– J't'aime aussi, à ce soir ma grosse !

S'ensuivirent ensuite pour moi trois interviews à la télé, puis un retour à l'hôtel où nous créchions pour revêtir nos plus belles robes de soirées afin d'aller fêter notre victoire dans une boîte de nuit réservée pour l'occasion. 

Là-bas, je retrouvai Stine et mes deux anciennes coéquipières de Larvik, Nora et Thea. Je m'amusai autant avec elles qu'avec mes coéquipières Françaises. On chanta, on dansa, je ne bus pas et n'en ressentis même pas le besoin tellement la soirée était réussie, et je rentrai finalement chez moi après des au-revoir larmoyants vers cinq heures du matin.

Mon cœur se ramollit dans ma poitrine lorsque je trouvai Deen endormi dans le canapé d'angle, Jude recroquevillé sur sa poitrine. Je me dépêchai de me déchausser et de me dévêtir pour renfiler mon survêtement aux couleurs de l'équipe de France, laissant ma valise en plein milieu du couloir, afin d'aller m'allonger au plus vite auprès de mes deux hommes.

Les couvrant d'un grand plaid, je me glissai discrètement dessous à mon tour, allongée sur le côté pour caresser doucement le dos de mon bébé.

Deen ne tarda pas à dégager son bras pour le glisser sous mes épaules et déposa un baiser ensommeillé sur mon front, puis je sombrai à mon tour dans le sommeil, classant cette journée comme l'une des meilleures de l'année.


****


– J'suis archi pas d'accord, Kobe ça reste le meilleur, tu peux pas nier !

Depuis une demie-heure environ, Tarek, Maxime et Julia débattaient sur leurs joueurs de NBA préférés, et ils n'arrivaient toujours pas à se mettre d'accord. 

Moi, j'étais installée sur l'un des grands canapés autour de la cheminée du chalet que nous avions loué pour les vacances de Noël, Elyas sur mes genoux, regardant mes amis débattre avec animation et parfois violence auprès d'un Raphaël tout aussi amusé par la scène, tenant Jude dans ses bras.

– Mon pauvre Ely va, chuchotai-je à mon neveu en embrassant ses jolies boucles. Je suis désolée que t'aies à te coltiner cet imbécile toute ta vie, dis-je en fixant Tarek s'énerver contre ses adversaires. Si ça tenait qu'à moi je t'adopterais tout de suite mon bonhomme.

– Papa 'bécile.

Je pinçai les lèvres en me retenant de rire, jetant un regard coupable à son père, espérant qu'il n'ait rien entendu. Par chance, mon ami était toujours en train de se battre et écoutait maintenant les arguments de Maxime, préparant probablement sa prochaine attaque.

Ce fut Antoine qui, se laissant mollement tomber à côté de moi dans le canapé, me démontra que je n'avais pas été si discrète que ça :

– Elma, si un jour j'ai des gosses, je te les confierai jamais, me dit-il d'un ton tout à fait honnête.

– Arrête, tu sais que je serai la meilleure Tata.

Mon ami haussa les sourcils d'un air très peu convaincu :

– En corrompant tous tes neveux et tes nièces comme tu le fais avec Elyas ?

Haussant les épaules dans un premier temps, je ne tardai pas à hocher vivement la tête avec un sourire mutin, ce qui fit rouler ses yeux bleus au rappeur.

Deen, Jude, Tarek, Elyas et moi étions arrivés seulement hier en Savoie, et ces vacances promettaient d'être fantastiques. 

À cause des emplois du temps de chacun, je n'avais pas encore compris qui viendrait quand et pour combien de temps, mais je croyais pouvoir croiser au moins chacun de mes amis. Dans l'idée, ceux qui pouvaient venir en dehors des vacances scolaires viendraient le plus tard possible, et ceux comme Julia ou moi qui étaient obligées de retourner à Paris lorsque les cours ou la saison de hand reprendraient étaient venus plus tôt. Parce que même si je ne foulerai aucun terrain jusqu'à bien après la naissance de mon deuxième bébé, je devrai tout de même assister aux séances de musculation de mon équipe et aux stratégies posées lors des entraînements. Deen resterait probablement avec Jude au chalet pour profiter de ces petites vacances jusqu'au bout.

– Il m'adore ce petit, répondis-je à Antoine après qu'il eut soupiré à la vue de mon sourire narquois. C'est pas pour rien que c'est moi la marraine !

J'en étais d'ailleurs très fière. Malheureusement, j'avais été nommée marraine seulement parce que la mère d'Elyas l'avait abandonné et que sa sœur n'avait pas pu jouer ce rôle. Mais depuis le départ de Sanya, je m'étais promis de jouer aussi le rôle de mère pour ce petit bout de Tarek. Je savais que je serais capable de faire autant pour Elyas que pour Jude.

– T'es marraine parce que t'es ma seule pote meuf ! se manifesta finalement mon meilleur ami, ayant visiblement les oreilles qui traînent malgré son débat animé. Si j'avais eu le choix j'aurais choisi n'importe qui sauf toi !

– T'aurais pu lui mettre deux parrains, grommela Hugo. Vu que c'était un baptême civil, personne t'aurais cassé les couilles. T'aurais même pu lui mettre trois ou quatre parrains si tu t'étais mis le maire dans la poche.

– Oh mais c'est qu'il serait jaloux mon p'tit Moingeon, se moqua Tarek en prenant la même voix qu'il utilisait pour parler à son fils.

– J'suis pas jaloux, je dis juste que t'as fait aucun effort et que t'as aucune reconnaissance envers tout ce que j'ai fait pour toi depuis seize ans.

Alors que mes deux meilleurs amis continuaient à s'embrouiller, Ken, une canette à la main, débarqua du bout de la pièce où il venait de terminer un partie de baby-foot et décida de rajouter son grain de sel :

– Attendtentends c'est sérieux cette histoire de plusieurs parrains-marraines-j'sais pas quoi ? demanda-t-il en se laissant tomber sur le canapé en face de Tarek et Maxime avant d'attraper une chips sur la table basse.

– Mais oui ! s'exclama Hugo avec un air outré. Ça dépend des mairies ou des paroisses mais normalement aujourd'hui tu peux en mettre plusieurs à tes gosses !

Ken se tourna vers moi et son regard me jugea de bas en haut avec dédain :

– Ah ouais donc en fait t'as choisi de m'évincer de la course au titre de parrain ?

Je levai simplement les yeux au ciel, n'ayant pas envie de rentrer dans son jeu pour le moment, me contentant de faire rebondir mon neveu sur mes genoux. Ce fut Hugo qui se chargea de lui répondre :

– Par contre je t'arrêtes tout de suite Ken, lui dit-il, mais ce p'tit gars il a besoin d'un seul parrain, et ils ont choisi le meilleur.

– Tss, il mérite plus d'un parrain ce gosse, répliqua le rappeur d'un air mauvais. Il mérite une armée.

Je commençai à rigoler, m'imaginant à la mairie lors du baptême d'Elyas et de Jude, chacun avec trois parrains et deux marraines à leurs côtés.

– Y'aurait eu plus de monde au baptême des petits qu'à vos premiers concerts, lâchai-je finalement.

Ken et Antoine me fusillèrent du regard, suivis assez rapidement par les autres rappeurs présents dans la pièce, puis Ken explosa de rire :

– Putain c'est tellement vrai, avoua-t-il puis, se tournant dans la direction de la cuisine il gueula : oh Moh ! Tu te souviens de notre premier concert ?

L'intéressé ne tarda pas à rappliquer, et les deux frères, morts de rire à l'évocation de leurs souvenirs, nous racontèrent leurs toutes premières représentations à leur lycée. J'aurais tellement aimé être là pour me foutre d'eux.

Pendant leur récit, Elyas s'impatienta, et je le laissai rejoindre le sol où il se balada à quatre pattes, allant rendre visite à chaque paire de jambes qui se présentaient à lui. Une chose était sûre, ce petit n'était pas sauvage du tout, car si ce comportement ne m'étonnait pas du tout venant de Jude étant donné qu'il passait beaucoup de temps avec nombres de mes amis, ce n'était pas forcément le cas d'Elyas. D'ailleurs, mon fils ne tarda pas à suivre son cousin, se démenant un peu plus que ce dernier pour se déplacer étant donné qu'il était de dix mois plus jeune.

Comme bien souvent depuis que Tarek avait emménagé à Paris et que les garçons passaient beaucoup de temps ensemble, ils commencèrent à faire connerie sur connerie en attrapant un peu tout ce qui se trouvait autour d'eux, et les gars en eurent marrent et décidèrent de les déposer dans leur parc. Doums ne tarda d'ailleurs pas à faire de même avec son fils alors qu'il revenait de l'extérieur avec Deen, Ivan, Hakim et Alice.

– Putain Mel, soupira Deen en se laissant tomber mollement à côté de moi avant d'écraser son front sur une de mes épaules avec désespoir. Il faut que t'envoies une tof de Jude à ma daronne, elle va me faire câbler.

Je ris tout en passant délicatement une main dans ses cheveux.

La mère de Deen était totalement fan de son premier petit-enfant. Les premiers temps, elle nous appelait tous les jours, envoyant des messages en pleine journée comme si quoi ce soit eut pu arriver entre deux appels. Si Deen avait d'abord été patient, il avait vite gentiment sommé sa mère de nous laisser un petit peu d'espace, et les appels s'étaient fait moins nombreux. J'avais alors lancé l'idée d'envoyer au moins une photo par semaine à monsieur et madame Castelle, prenant l'habitude au fil des semaines de faire ça les samedi. Samedi étant hier, et ayant passé cette journée sur la route et à nous installer, j'avais totalement oublié d'envoyer la petite photo hebdomadaire.

Sortant mon téléphone de ma poche, je parcourus ma galerie et m'arrêtai sur la photo la plus récente avant de la montrer à mon copain :

– J'ai pris ça ce matin en allant me balader avec Raph et les petits. On voit qu'Elyas mais...

– Envoie, souffla-t-il sans trop regarder la photo. Ils sont mignons, ça passe.

Je ricanai face au ton aussi laxiste que désespéré du rappeur, puis tapai mon message avant de l'envoyer. Par la même occasion, je postai la photo sur mon compte privé.

– Bon par contre, s'exclama soudainement Tarek d'un ton solennel. C'est pas le tout les gars, mais on a quelque chose d'important à régler.

Ken se leva immédiatement en soufflant :

– Oh bah moi j'me taille, nous annonça-t-il en lançant un regard saoulé à mon Kabyle.

Face au ton qu'avait employé mon frère, et parce qu'ils commençaient tous à le connaître, plusieurs autres gars se levèrent en déclarant qu'ils partaient enfin skier, chose qu'ils repoussaient sans cesse depuis qu'ils étaient rentrés des pistes aux alentours de treize heures, préférant glandouiller dans le chalet en survêtement.

Tarek les insulta tandis que je rigolai, mais alors que Deen allait les suivre, il l'arrêta :

– Hop hop hop pas si vite Castelle ! C'est à vous que je veux parler. Et à Morgan. Il est où d'ailleurs ? demanda-t-il en tournant la tête de tous les côtés pour tenter de l'apercevoir. Oh Doums ! gueula-t-il alors que le gigantesque rappeur était en train de rentrer avec la combinaison qu'il avait laissé sur le balcon. Viens faut que je te parle !

Notre ami nous interrogea du regard puis, Deen et moi lui ayant répondu par un regard blasé, il traîna les pieds jusqu'à nous, un joint posé sur l'oreille :

– Qu'est-ce tu veux, meilleur pote à Elma ?

Tarek ne fit même pas attention à sa pique et, l'air content de lui, exprima enfin ses pensées :

– Je veux qu'on fasse un concours du gosse qui marchera en premier.

Voilà. Mesdames et messieurs, du Tarek tout craché.

– Tu vas perdre, lança catégoriquement Doums. C'est Isma qui va gagner, c'est sûr. Avec Adèle on y est presque là.

– Tu rigoles ? Il reste tout la journée aux mêmes endroits votre môme. Par contre Elyas je suis sûr que dans deux mois il court partout.

Je ne voyais pas l'intérêt de ce concours : pour moi, tant que Jude ne savait pas marcher, c'était gage de tranquillité. Je n'avais pas du tout hâte de lui courir après.

– Ouais mais nan, s'en mêla Deen, c'est pas fairplay. Jude il est de fin d'année, Ely il est de février et Isma de mai, je trouve pas ça super équitable.

– Bah tant pis, fit Tarek en haussant les épaules. Ça fera moins de concurrence. 

Il n'en fallut pas moins pour éveiller mon esprit de compétition :

– Moins de concurrence mon cul, lançai-je. Jude il va écraser vos deux mioches, vous êtes pas prêts.

Tarek haussa un sourcil accompagné d'un sourire compétiteur :

– Ça veut dire que Juju participe ? 

Je lui tendis très sérieusement la main :

– Ça veut dire que Juju va gagner ton putain de concours.

Mon ami rigola, puis il serra ma main dans la sienne :

– C'est ce qu'on verra.

Doums, rapidement emporté par notre esprit de compétition, ne tarda pas à rentrer dans la partie et, après une après-midi de ski bien fatigante alors que les petits étaient gardés par Hakim et Stine, puis un bon repas bien consistant, nous écartâmes les meubles du salon pour créer une vraie piste sur laquelle les garçons auraient la place de se déplacer.

La moyenne d'âge des personnes présentes dans le chalet était probablement de trente ans, et nous organisions des jeux olympiques de premiers pas de bébés. Je ne savais pas si ça faisait simplement de nous des adultes irresponsables ou des êtres humains immondes.

En réalité, j'avais totalement confiance en Jude : il avait beau être beaucoup plus jeune que ses cousins, il passait ses journées à bouger, et je redoutai qu'il ait hérité de mes gênes d'hyperactive. Je le croyais donc totalement capable de faire ses premiers pas ce soir, car ce qu'avait dit Doums était aussi valable pour Deen et moi : depuis quelques semaines, nous y étions presque.

Mes amis m'écartèrent du déménagement du salon pour les raisons suivantes : « t'es enceinte, fais pas chier ». Des mots prononcés avec toute l'amabilité du monde par Ivan.

Je profitai donc de ce petit moment pour jeter un œil aux notifications que j'avais reçu sur la photo que j'avais posté plusieurs heures plus tôt :


Aimé par nekensoumsoum et 43 autres personnes

maëllescred sont quand même pas moches ces p'tits

tarek_bhied être fils de championne d'Europe ça l'autorise pas à martyriser mon fils

        -> raph_dupclark j'étais là et c'est ton gosse qui a fait bouffer de la neige au sien en premier

        -> tarek_bhied je verse immédiatement de l'argent dans son livret A

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Levant les yeux au ciel, je me dirigeai vers Tarek pour lui flanquer un coup de pied au cul avant de héler mon frère qui se trouvait à à peine quelques mètres de moi :

– Merci Raph ! gueulai-je en lui montrant mon téléphone pour qu'il comprenne où je voulais en venir.

Mon jumeau m'adressa un clin d'œil pour seule réponse.

Les canapés et la table basse écartés formaient une petite zone d'environ six mètres sur quatre où les trois êtres humains miniatures du chalet pourraient montrer leurs talents, un grand tapis amortissant leur pas et leur permettant une meilleure accroche que les lattes du parquet.

Comme bien souvent, ce fut Moh qui prit les paris.

– Rien que parce que je sais que vous auriez pu me nommer parrain mais que vous l'avez pas fait quand même, grogna Ken, je vais voter pour Isma. Doums c'est un vrai frère.

Ce dernier le checka, accompagné d'un « aaah mon kho » et d'un large sourire, et je leur adressai à tous les deux un regard hautain.

Rares furent ceux qui parièrent sur Jude, le petit dernier du trio. Son parrain prit immédiatement son parti, Maxime fit de même en bon oncle qu'il était, Alice qui avait été témoin des progrès de mon fils aussi, et Antoine s'ajouta à la liste car je cite : « font trop les malins les deux autres », en parlant des pères.

Enfin bon, Deen n'était pas mieux en terme d'égo, s'excitant en disant que son fils était le meilleur et que si jamais il venait à perdre, ce serait bien la seule chose qu'il raterait de sa vie.

Lorsque le combat de coq fut arrêté par Stine et Alice, je pris Jude dans mes bras, et Deen se positionna en face de moi à environ deux mètres pour l'attirer vers lui. Doums fut bien évidemment accompagné d'Adèle, et Tarek eut comme partenaire Hugo.

Nous passâmes de nombreuses minutes à essayer de faire bouger nos trois fils sous les encouragements des oncles et des tantes qui avaient parié sur eux, mais pas un ne voulait bouger.

Ismaël, surpris par autant d'agitation autour de lui, fondit en larmes et ses parents ne purent le récupérer qu'en le faisant rebondir dans leur bras et en le câlinant loin du groupe.

Elyas, hilare, n'arriva même pas à se mettre sur ses pieds tellement il rigolait sous les cris et les encouragements de tous nos amis. Tarek ne tarda pas à rire avec lui, et le père et le fils finirent pliés en deux sur le tapis.

Jude, quant à lui, n'en avait tout simplement rien à faire, l'air blasé par tout ce qui se passait sous ses yeux. Au lieu de se tourner vers son père, il restait debout devant moi alors que je le tenais par la taille, et regardait son environnement d'un air curieux. Ce fut lorsqu'il aperçut les phares d'une voiture à l'extérieur qu'on le perdit totalement.

Pour conclure ce concours, Tarek, Doums, Adèle, Deen et moi nous serrâmes la main, et promîmes de nous tenir au courant des avancées de nos trois aliens quant à la marche. Et ce, sans aucun mensonge. Je croyais Doums et Adèle sur parole, mais je n'avais en revanche aucune confiance en Tarek.

Ce soir-là, ce furent nous cinq qui pâtîmes de nos conneries : excités par tant d'agitation, Elyas, Ismaël et Jude n'eurent aucune envie de dormir et, alors que nous aurions aimé aller nous coucher comme tous nos amis, épuisés que nous étions par notre journée de ski, Tarek, Adèle et moi dûmes rester éveillés beaucoup plus tard que nos compagnons, tentant tant bien que mal de calmer nos garçons.

Elyas fut le premier à sombrer, et Tarek ne se gêna pas pour nous narguer avant d'aller coucher son fils, et d'aller se coucher par la même occasion. Adèle et moi discutâmes pendant longtemps, et j'appréciai beaucoup sa compagnie, n'ayant que trop peu l'occasion de la côtoyer seule sur Paris. 

Je ne sus pas lequel de nos fils s'endormit en premier alors qu'ils jouaient ensemble sur le tapis. En revanche, ce dont je fus persuadée lorsque je me réveillai en sursaut sur le canapé avant de voir Adèle la tête sur un des coussins et les garçons blottis contre chacune de nous, c'était qu'aujourd'hui ils avaient tout gagné et que les plus grosses perdantes de la journée étaient leur mamans.

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Petite pensée à Eda et à son commentaire plusieurs chapitres en arrière m'ayant inspirée quant à la course pour le premier des garçons qui marchera ! C'était une très bonne idée, j'espère que tu m'en veux pas de l'avoir inclue dans l'histoire (je voulais te demander si je pouvais l'utiliser mais j'avais peur de te spoiler...) ❤

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