6. La requête de Miller.

Je galopai jusqu'à mon petit appartement et m'y enfermai aussitôt. Je sais qu'Agathe a un double de mes clefs. Alors je déplaçai mon vieux meuble à tiroirs devant la porte, dans un raffut grinçant. Comme cela il n'y avait aucun risque qu'elle rentre sans autorisation, au milieu de la nuit pour remettre le couvert. Car si elle continue de siroter du rhum comme tout à l'heure, elle en serait bien capable.

Dans la salle de bain  je pris une longue douche bien chaude. Je me frottai énergiquement le visage sous l'eau. Je voulais que cette soirée ne soit qu'un mauvais rêve, ou un accident. Je ne reconnaissais pas Agathe. Elle m'avait ouvertement humilié devant mon tout nouveau patron. Certes intérimaire, mais mon patron quand même! Et elle en avait retiré une certaine satisfaction. Voir même un malin plaisir. Une boule dans ma gorge me signifia que j'allai pleurer sous peu.

Pour quelle raison mon amie avait-elle agit ainsi? Je croyais que notre amitié de longue date valait mieux que cela. Son comportement avait changé depuis mon anniversaire. Elle avait une manière constante de me rabaisser ou de reprendre tout ce que je disais. Comme si tout ce que je pouvais penser, dire ou faire n'avait aucune importance ni valeur pour elle. Ce pouvait-il que Milla ait raison? Agathe serait-elle jalouse de ma nuit d'anniversaire? Après tout, elle savait qui était l'homme avec qui j'avais passé la nuit. Et par ce concours de circonstances, moi Bérénice, fille passe-partout pas très belle ni trop moche, j'avais pu bénéficier des exceptionnelles faveurs du-dit homme et pas elle. Sans doute, qu'elle avait dû se contenter soit d'un refus de cet homme ou bien son charme n'était plus ce qu'il était. Et si c'était le cas, bah merde alors! Notre amitié va en prendre un coup. Parce-que je n'allais pas pouvoir supporter ses moqueries permanentes. Tout ça, pour un homme que je ne connaissais même pas!

Je devais absolument me calmer. Il est plus sûr de penser que tout cela n'était qu'une regrettable erreur dut à l'alcool. Et que lundi sera un autre jour. Elle aura largement de deux jours pour digérer notre dispute. J'attendais d'elle des excuses. Fera-t-elle le premier? La connaissant, j'en doutais fort.

Il était environs 23 heures quand je me glissai dans les draps. J'étais encore passablement énervée et je n'arrivai pas à trouver le sommeil. Alors que je tournai en rond depuis une bonne demi heure, j'entendis frapper à la porte. Je ne reconnaissais pas les coups portés. Je me levai donc et derrière la porte je dis pour la forme:

- Rentres chez toi Agathe! Je n'ai plus envie de te voir!

- Ce n'est pas Agathe, c'est Jaime. Je peux vous parler s'il vous plaît?

- Oh...attendez... fis-je en poussant le meuble pour lui ouvrir.

Mais quand j'allai tourner la clef, je me rendis compte que je ne pouvais pas ouvrir la porte en nuisette. J'adore les sous-vêtements. Je dépense des fortunes pour ça. Au lieu d'en dépenser pour des vêtements que tout le monde peut voir. Et là j'avais mis une chemise de nuit courte type taille empire, avec de la jolie dentelle blanche. Elle appartenait à ma défunte mère. J'adore la porter pour dormir. J'ai l'impression d'être une princesse sexy. Ainsi  j'ai toujours une part d'elle avec moi.

Comme je ne pouvais pas décemment ouvrir la porte ainsi, je courus donc rapidement me vêtir d'une robe de chambre. Je pris la première accrochée à la patère de ma petite salle d'eau et l'enfilai. La noire. C'est bien. Je déplaçai la commode et tournai la clef pour ouvrir enfin, sur mon patron. Mais quelle ne fut pas ma surprise quand je vis le visage ahuri de mon boss. Non pas qu'il fut horrifié de me voir ainsi. Non ça, c'était jeudi de la semaine dernière. Quoi que...

A son regard je compris que finalement, ma petite robe de chambre de satin noire n'était pas la plus adéquate pour le recevoir. J'aurais dû mettre mon vieux peignoir tout défraichi! Mais à défaut, je ne pensais pas faire un jour cet effet là à un homme! Je virai au rouge, ne sachant plus ou me mettre. Quant à Miller il semblait gêné et...comblé à la fois. Son petit sourire au coin des lèvres était assez explicite.

- Puis-je entrer un instant? Me demanda-t-il en s'approchant du seuil de ma porte. Je ne voudrais pas que Daniel ou Agathe entendent ce que j'ai à vous dire.

Euh...est-ce que je dois le laisser entrer dans mon antre? Et vu comme il est près de la porte c'est que ce qu'il a à me dire est vraiment important. Ou alors je vais avoir le droit à une petite vengeance à cause du petit nom que je lui ai trouvé...

- Je peux? Demanda-t-il en faisant un autre pas.

- Euh...oui entrez.

Je m'effaçai pour le laisser entrer. Puis pris soin de vite refermer derrière lui.

- Et bien je vois que le partage des locaux est tout à fait équitable. Dit-il d'un ton amère.

- C'était le deal avec Agathe et de toutes façons il faut bien que je me loge.

- C'est certain...votre chez vous est bien plus personnel et accueillant que celui d'Agathe.

Je ne saisissais pas où il voulait en venir. Faire des remarques sur mon appartement était hors contexte. Du moins pour moi.

- De quoi vouliez-vous vous entretenir?

Il posa enfin son regard sur moi. Je me sentis toute petite d'un coup.

- Je voulais que vous sachiez que je ne cautionne pas du tout le comportement d'Agathe. Et qu'elle a agit ainsi, uniquement parce que je lui ai dit plus tôt dans la soirée, que vous étiez une personne intéressante. Et que votre joli visage allait me rendre bien des services pour nos entretiens d'embauche à venir.

- Je crains de ne pas vous suivre Monsieur. Sortis-je dans le flou total.

Est-ce qu'il a bien dit que mon visage était joli?

- Disons que, l'Agathe que je connais n'a pas beaucoup d'estime pour toute autre femme qui pourrait lui faire de l'ombre.

- De quelle autre femme parlez-vous?

Il me regarda avec insistance un petit moment. Ce qui accentua mon malaise. Puis il pencha la tête sur le côté et daigna me répondre.

- De vous Mademoiselle Lorne. Me dit-il d'une voix rauque qui me donna de petites contractions dans le bas de ventre. C'était très étrange comme sensation. On dirait des papillons qui volaient dans tous les sens au creux de moi.

- Vous...vous devez faire erreur...

- Je ne pense pas. Et vous vous méprenez sur les intentions qu'Agathe à votre encontre. Elle joue la meilleure amie avec vous mais elle n'est en aucun cas votre amie. Au mieux vous êtes une distraction pour elle.

- Attendez! Vous êtes en train de lui casser du sucre sur le dos?

- N'est-ce pas ce qu'elle a fait tout à l'heure à votre sujet? Demanda-t-il en s'approchant de moi.

- Je...oui mais...bafouillai-je en reculant d'un pas.

Sa façon de se déplacer avait quelque chose de sensuelle que je n'avais jamais vu chez un homme.

- Agathe a des vues sur moi. Et elle ne m'intéresse pas. Reprit-il en avançant encore d'un pas.

- Des vues!! M'exclamai-je étonnée de la confidence. Sachant que je m'en fichai pas mal qu'ils sortent ensemble ces deux là.

- J'imagine que sa tenue des plus suggestives de ce soir ne laissait aucun doute sur ses intentions.

- Je ...oui mais elle en fait toujours un peu...

- Sachez seulement qu'elle n'est pas à son premier coup d'essai et que cela persiste depuis plusieurs années. Elle ne semble pas comprendre le mot non. Me coupa-t-il le regard glissant sur le bas de mon peignoir de satin qui cachait tout juste mes cuisses.

Je gardai le silence tentant de comprendre ce qu'il était en train de me dire. Mais je ne voyais pas où il voulait en venir.

- Et donc vous êtes venu chez moi pour...me faire des confidences? Hasardai-je.

- Juste pour vous apaiser. Et que quoi qu'elle puisse faire qui vous importune, je serai toujours de votre côté. Que vous pouvez compter sur moi.

- Vous me tendez la main pour quoi au juste?

Il ne semblait pas vouloir me répondre franchement. Son regard des plus perçants ne quittaient pas le mien. Parfois il s'échappait jusqu'au bas de mon peignoir puis il remontait à mon visage. J'essayai de comprendre sa démarche. Que voulait-il? Venait-il me consoler de la méchanceté d'Agathe? Ou bien me prévenir que j'allai découvrir un autre visage de mon amie? Et qu'il était clair que c'était ce qu'il allait se passer.

Moi je m'en fichai qu'Agathe drague honteusement mon nouveau patron. Si ce n'était que cela ce n'était pas trop grave. Après tout, il n'est que mon patron que pour quelques semaines. Et je n'avais aucune envie de rentrer dans leurs petites histoires.

- Je préviens juste qu'Agathe ne sera pas tendre avec vous.

- Rassurez-vous elle ne l'a jamais été vraiment. Même si, je dois avouer qu'elle l'est de moins en moins depuis ma soirée d'anniversaire. A croire que l'ami qu'elle m'a trouvé pour passer la nuit, ne pouvait pas être un homme très doué pour la bagatelle. Et si en plus, moi, sa copine pas trop jolie a eu droit à trois orgasmes de suite, alors là...

Je m'arrêtai un peu trop tard sur mes confidences. Merde! Ce n'était pas le genre de chose qu'il fallait faire devant son tout nouveau patron. Je réalisai ce qui venait de sortir de ma bouche. Trop honteuse, je n'osai pas croiser son regard. Il resta silencieux. Sans doute réfléchissait-il à ce que je venais de dire

- Je dirais que cela a touché sa fierté de séductrice. Peut-être devriez-vous prendre contacte avec cet homme. Et sortir avec lui. Fit-il alors que je relevai la tête vers lui.

- Pourquoi le ferrai-je? Demandai-je intriguée par cette requête.

- Je suis certain qu'un homme qui a pris autant de plaisir à vous en donner, vous a trouvé très à son goût. Et de toute évidence  cela prouve qu'il serait prêt à renouveler l'expérience. Ne soyez pas si dure à votre votre sujet Mademoiselle. Cessez de penser, que les hommes n'aiment que les femmes qui ressemblent à Agathe.

- Parce-que c'est votre cas, j'imagine? Balançai -je sans réfléchir.

Il s'immobilisa et me toisa de nouveau en fronçant les sourcils.

Oups! Et voilà que je l'ouvre encore sans réfléchir!

- Les femmes de son genre ne m'intéressent pas.

Ah!

- Je préfère largement votre style!

Je me raidis et croisai ses yeux.

Tiens mon style? Il en a quelques chose à faire finalement!

- Euh...mon style? Soufflai-je, intriguée qu'il mette mon style sur le tapis maintenant. Sans doute parce-que je voulais savoir ce qu'il en pensait vraiment.

Il me fit un immense sourire franc, qui me coupa la chique. Mon dieu qu'il était magnifique! Je ne l'avais vu sourire que partiellement, pensant que c'était une option chez lui. En réalité il illuminait son regard couleur chocolat. Et les papillons que j'avais sentis quelques minutes plutôt, avaient migré vers mon entre-jambe. Mais que faisaient-ils là? Est-ce que c'est mon patron me faisait cet effet là?

Noooon!!

Et je remarquai que Miller s'était rapproché de moi. Un peu trop même.

- Votre style oui... Dit-il presque à voix basse. Et sur un ton qui voulait tout dire.

Mince alors il était en train de me faire du rentre dedans là non?

En même temps vu la tenue dans laquelle je le reçus, je compris qu'il puisse trouver agréable ce qu'il vit. Après ma tenue de fille de trottoir, je lui faisais la belle endormie. C'est sûr que j'avais un style bien particulier à ce niveau.

- Il se fait tard. Vous devriez rentrer chez vous. Prononçai-je tétanisée par sa façon d'être. Quand mes yeux croisèrent de nouveau les siens, je les trouvai étrangement sombres.

C'est possible ça? Ou est ce normal que ses yeux soient si sombres d'un coup? Mon dieu est ce normal que cela me fasse de l'effet!!!

- J'aime vraiment votre style... définitivement votre style Mademoiselle Lorne. Sourit-il en reculant d'un pas pour rejoindre la porte.

Je sortis de ma torpeur pour comprendre ses mots. Et je ressentis comme une bouffée de chaleur m'envahir tout à coup.

- Pensez à ce que je vous ai dit au sujet d'Agathe et de votre amant. Me prévint-il sérieux avant d'ouvrir la porte et de disparaitre.

Et voilà! Mon nouveau boss avait eu droit à un avis bien tranché sur sa personne de ma part. Et il ne semblait pas m'en tenir rigueur. Enfin cela restait à voir lundi. Et je crois bien qu'il m'a dragué. C'était de la drague non?

Non parce-que d'habitude c'est Agathe que les hommes séduisent, branchent ou harcèlent parfois. Et là, pour le coup je me retrouvai un peu dans le flou. J'hésitai  à garder ça pour moi. Peut-être un avis plus expérimenté serait le bienvenu! Mais à qui pourrais-je en parler? Pas à Agathe! Elle est persona non grata. Daniel? Quelle idée! Milla peut-être?

Il était près de minuit, je n'allais tout de même pas la déranger pour ça! Et si j'osai?

Je saisis mon Smartphone et lui envoyai un sms trop excitée ou stressée, allez savoir, pour attendre demain afin de lui en parler.

" Si un homme s'approche de toi avec un putain de sourire trop sexy, te parle avec une voix très très grave et sur un ton entreprenant. Est-ce que je peux considérer ça comme du rentre dedans?"

J'attendis en m'installant dans mon lit. Elle répondit presque aussitôt.

" Aurais-tu fais les yeux doux à un beau mâle?"

" Pas du tout. Enfin je crois. Mais Miller était chez Agathe ce soir. C'est un ancien copain de lycée de Daniel. Et c'est de lui dont je te parle."

" Attends, tu me parles du Jaime Miller du boulot? Ton nouveau boss? C'est lui qui t'a fait du rentre dedans?"

" Oui."

Comment lui expliquer tout ça par sms? Autant l'appeler directement. Elle répondit aussi sec avec un brin d'excitation dans la voix. Je lui fis un topo détaillé de la situation. Parce-qu'elle voulait les détails. Tous les détails. Et pour une fois je n'allais pas être avare à ce niveau là. Parce que je savais que Milla n'allait pas me juger comme le faisait Agathe.

Sa conclusion fut sans appel:

- Ouais, bah ma belle il t'a fait du rentre dedans! C'est clair! Et comme il pense la même chose que toi au sujet d'Agathe. Il doit espérer de l'alliance qu'il te propose. De plus, il semblerait qu'il te trouve à son goût.

- Quoi! Non! Qu'il me trouve amusante je veux bien, mais pas à sont goût! Et puis c'est mon supérieur quand même!

- Par intérim.

- Mais il reste mon supérieur. Tu crois qu'il faut que je m'inquiète?

- J'en sais rien. Peut-être bien qu'il pourrait attendre un juste retour.

- De quoi? Je n'ai rien demandé moi!

- Et bien c'est pas comme si tu ne lui avais pas ouvert en petite tenue...

- Je portai une robe de chambre!!

- Comme tu veux. Toujours est-il qu'il t'a fait un tour de séduction et que tu as ressenti des choses qui n'ont rien de comparables avec celles que tu espères ressentir avec Daniel.

- Mais c'est mon patron Milla!

- Et alors? Même si tu flirte avec lui, on s'en fou cela fera la nique à Agathe! Si tu me dis qu'en plus elle n'a pas été sympa avec toi!

Je soupirai bruyamment complètement perdue.

- Ça me dépasse. Je crois que je suis fatiguée et que j'ai besoin d'une bonne nuit de sommeil! Je ne suis plus en état de réfléchi correctement.

- Ne te prends pas trop la tête avec cette histoire Bérénice. Par contre profite de ce week-end pour réfléchir à cette idée de revoir ton amant d'anniversaire! Je trouve que c'est une excellente idée.

- Je n'aurai peut-être pas trop le temps d'y penser mon père arrive demain.

- Ah oui tu m'en as parlé. Bon passe un bon week-end et on se revoit lundi.

- Oui.

Nous nous quittâmes et je déposai mon téléphone sur ma table de chevet. Je n'étais pas certaine que cette discussion m'ait beaucoup aidé. Milla avait abondé en mon sens, mais aussi dans celui de Miller. Et j'avais encore des questions sans réponses. Peut-être y verrai-je plus clair lundi avec Miller sous le nez.

Je m'allongeai et éteignis la lumière.

Voilà un nouveau tête à tête entre Bérénice et Jaime Miller. Qu'en pensez-vous?

Je vous remercie d'avoir lu. Et si ce chapitre vous a plu n'oubliez pas la petite étoile.

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