9. Les démons du passé

L.A, 11am

Je me plaignais tellement de ne plus avoir mon petit studio, que Keils m'a installée chez Dave et sa femme. Cette dernière a préparé tout le sol, et Dave l'a aménagé pour qu'il ressemble à un vrai petit appartement. Je ne comprends pas qu'on ai pu passer d'un "je te déteste" à un "ça va, c'est pas si mal d'être coéquipiers, voir colocs".

C'est un petit paradis. J'étais censée habiter là maintenant, et c'était plutôt cool. Mais il y a une semaine, tout à changé, j'ai accepté ma promotion de tueuse à gage et par conséquent une mission spéciale.

Le boss ne m'a laissé qu'une semaine pour préparer mes affaires, j'arrive pas à croire que je quitte déjà ce petit (grand) cocon douillet.

Mais bon, pas le choix. Je suis en train de sortir mes vêtements de mon sac quand Dave toque à la seconde porte et l'ouvre. Je ne me retourne pas de suite, mais quand je le fais il est bien là, et viens de s'asseoir sur mon lit.

Je finis par m'arrêter de ranger et croise les bras, en l'observant.

-ça va ? J'te dérange pas Dave? Déclarai-je, un sourcil arqué.

Il hausse les épaules et secoue la tête. Wow, très drôle.

-bon, qu'est ce que tu veux, continuais-je en m'approchant et en époussetant mon jean.
Il tapote la place libre à ses côtés en me souriant, m'indiquant de m'asseoir, j'aperçois le temps d'une fraction de seconde, quelque chose dans son dos.

Une fois assise, il me tend une boîte brune, aux côtés ornée de fleurs dorées et des initiales inscrite sur le devant, juste en dessous du cadenas :  S+S.

-C'est pour toi, affirme Dave en plongeant un regard sincère dans le mien. Pour une fois.

Puis, il me tend une clé, permettant d'ouvrir le cadenas.
-Qu'est-ce que c'est ? Questionnais je, intéressée.

Il observe ma main tenant la clé, et mon air confus, puis renchérit avec humour :
-Une clé ?

Je roule des yeux, alors qu'il rit de sa blague pourrie.
Une petite minute plus tard, il finit par soupirer.
-En fait, cette boîte appartenait à tes parents, c'est Jeff qui me l'a donné, pour toi, affirme t'il.

Brusquement, je secoue la tête et met la boîte à Dave sur ses genoux, tout en me relevant pour lui tourner le dos, mains sur le visage.

Il soupire à nouveau, et attends que je m'exprime.

-Non Dave, je veux rien savoir sur eux je sais déjà qu'ils m'ont laissée seule dans un berceau, ce qui indique qu'ils ne m'aimaient pas tant que ça, ça me suffit amplement, affirmais-je.

J'entends des froissements, indiquant qu'il s'est levé, mon "protecteur" dépose une main sage sur mon épaule, pensant m'aider un peu.

-Ne m'aide pas, Dave, déclarai-je, je ne veux pas être sauvée et encore moins être aidée à ce sujet.

Je secoue mon épaule, en avançant, l'envoyant balader. Même si ça me brûle les mains de l'ouvrir cette boîte, en aucun cas je ne devrais m'intéresser à eux.

-s'il te plaît, réfléchis y Jessie, demande t'il, s'il m'arrivait quelque chose, commence t'il.

Je fais volte-face en le pointant du doigt dangereusement :
-Ferme la abruti, il ne t'arrivera rien, et n'introduit pas ton fils dans cette discussion, tu sais très bien que je protégerai ce gosse contre tout au monde pour pas qu'il ne lui arrive ce qui m'est arrivé, assurai-je en levant la voix.

Il recule, en soufflant fort.
-je le sais très bien, mais tu devrais penser à toi, tu mérites de savoir certaines choses.

Il s'en va, après m'être assurée qu'il n'était plus là, et dans un élan de rage je saisis le coffret et le jette violemment sur le sol, révoltée. Je suis terriblement en colère, j'en veux au monde entier, j'ai ce trou dans mon cœur, une rage indéchiffrable. Le genre de révolte que peu possèdent, ce genre de feu qui coule dans les veines des personnes qui ont été brisées, qui cherchent à se défaire de la douleur et de la tristesse.

Je suis ce genre de personne, je ne suis pas une bonne personne, je ne suis pas faite pour aimer de façon inconditionnelle ou pour protéger. Je suis faite pour remplir des missions, et tuer ceux qui sont contre moi. Tous, jusqu'au dernier.

Une chance que le petit ne dorme pas, sinon je m'en serais voulue.

Après quelques minutes à tourner en rond, et jeter quelques regards à la boîte fendue sur le sol, je décide de la saisir et d'enclencher la clé dans le cadenas. Mais je ne parviens pas à soulever le couvercle par faute de volonté, alors je me contente de refermer le cadenas, et de sortir du sous-sol. Visiblement calmée extérieurement.

Dans la cuisine, le petit de Dave, Miles prend son goûter avec sa mère, Mary.

Elle me sourit quand j'arrive, et Miles tend ses bras vers moi, très content de m'apercevoir. Au même moment c'est Dave qui entre, et qui me voit la boîte dans les mains, et trop proche de la poubelle pour pouvoir échapper à son instinct.

En un mouvement, il saisit l'objet de mes mains et le pose sur la table, je baisse les yeux vers le sol en mordant ma lèvre, un peu honteuse. Mais je ne veux plus voir cette objet.

Dave se met à ma hauteur et encadre mon visage dans ses grandes mains, pour m'obliger à le regarder dans les yeux, ses yeux sont souvent émotifs, le miroir de sa sensibilité.

-On va l'ouvrir tout les deux cette boîte, mais on va l'ouvrir, tu ne t'en séparera pas, c'est bien clair ? Déclare t'il alors sûr de lui. Cela ressemble à un pacte.

Je ne répond pas, à la place je ferme les yeux pour couper court au contact visuel, alors Mary s'immisce :
-Dave chéri, ne l'oblige pas à l'ouvrir, s'il te plaît.

-Non, Mary, affirme ce dernier, c'est important qu'elle sache tout.

Je lève alors la tête vers Mary et m'excuse :
-Non ce n'est pas grave, je veux pas que vous vous disputez à cause de moi, je vais l'ouvrir, assurai-je.

Et c'était vrai, Mary est une femme belle et juste, elle prend soin de moi comme une grande sœur, et ils vont si bien ensemble. Je suis déjà là contre leur gré, autant ne pas empirer les choses.

Je prends alors place sur une des chaises, Miles vient de terminer sa compote et mâchouille dans sa bouche son doudou, tout en observant mes moindres faits et gestes.

J'ouvre à nouveau le cadenas, et au moment de soulever le couvercle, Dave pose sa main sur la mienne et on ouvre la boîte ensemble.Je ne peux pas m'empêcher de laisser un sourire étirer mes lèvres quelques secondes.

Tout d'abord, je découvre une photo de mes parents quand ils étaient à peine plus vieux que moi aujourd'hui, ils semblaient si heureux.
Ils sont accompagnés de Jeff, plus jeune et d'un autre homme que je ne reconnais pas.

Ensuite, il y a une chaîne avec comme pendentif un éclair mêlé à ce qui ressemble à motif triangulaire, le tout gravé dans une balle aplatie. Original. Le triangle ressemble à un logo, un mantra que j'ai déjà aperçu à L.A.

Je retrouve plein de sortes d'objets tels qu'un jeton de casino des années 2000, un bout de tissu rouge, une carte de jeu, un joker et un stylo.
Et enfin, dans le fond de la boîte je découvre un papier, plié en son milieu, jaunit par la vieillesse et très poussiéreux.

Quand je l'ouvre, l'écriture me semble familière, car c'est presque la mienne.
Dave me fait signe que je ne suis pas obligée de la lire maintenant, je secoue la tête, autant en finir de suite.

"Chère Jessie, ou tout autre nom que l'on aurait pu te confier, je suppose que nous ne sommes pas à tes côtés si tu lis cette lettre. Nous sommes en vie. Sache que si nous sommes partis, c'était bien pour une bonne raison : ta protection. J'espère que Jeff pourrait essayer de prendre soin de toi, et te faire grandir avec sa fille, dans une famille aimante pour que tu puisses évoluer dans un monde "normal". Si ce n'est pas le cas, ma chérie, j'ose espérer que quelqu'un s'occupe de toi et que tu ne mette pas ta vie en danger comme ton père, peut-être un jour nous reverrons nous, nous t'aimerons pour toujours.
Maman et Papa. "

Nous sommes en vie. Leurs mots résonnent dans ma tête à la fois comme une berceuse, mais aussi comme un coup de poignard dans le dos. Comme si on m'avait planté un canif dans le cœur plusieurs fois et qu'on m'avait laissée là, saignant comme un porc destiné à l'abattoir. Je déteste cette lettre, et je l'aime, du plus profond de mon cœur.

La mafia m'aime plus qu'eux, c'est certain, et ça me suffit.

-Que dit le papier ? questionne finalement Mary après avoir aperçue une larme rouler sur ma joue.

Je plie la lettre, la fourre dans ma poche et réponds :
-Que la mafia est mon unique famille et qu'ils ne valent rien pour moi, je reviendrais avant le dîner, c'est promis.

L'incompréhension se lit sur leurs visages, Dave tente même de me retenir, mais je me dégage de son emprise et saisit ma veste.

-Où tu va ? Lance t'il, tu ne seras jamais là pour le dîner !

Avant de passer la porte, je lâche :
-le boss a une mission pour moi, alors je vais aller la chercher, Dave.

Et sur ces paroles, je cours en direction de la maison du boss. Cette course effrénée qui devient une bataille interne, profonde avec ce que je suis. Les émotions se libèrent et ça me permet d'évacuer toute ma colère et ma tristesse. Je les hais, je les hais de m'avoir déçue et laissée aussi triste. Lorsque j'arrive a une centaine de mètres d'un des quartiers les plus mal fréquentés de L.A, quelque chose se brise en moi, quelque chose qui était encore intact, et qui attendait juste une dernière goutte de sang versée pour exploser.

Je veux les réduire à néant.

RÉÉCRIT le 30/05/23

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