8. Cachée

Los Angeles, deux jours après le braquage foireux.

Quand je me réveille, j'entends du bruit dans l'entrée de la maison où je vis depuis deux nuits.

Cela ressemble à des rires, des accolades, puis la porte d'entrée claque. Mieux vaut ça qu'une visite soudaine des flics, même si la maison est surveillée par deux membres 24h/24.

Je décide d'enfiler un jogging et de garder le tee shirt de la veille. Mon collègue avait une fille de mon âge il y a quelques temps, du moins, jusqu'à ce qu'elle se fasse tuer par le camp adverse. Alors, il a laissé tomber le gang, pris sa retraite à quarante ans, et maintenant il rend service au boss de temps à autre. Genre comme accueillir le temps de quelques jours des membres en fuite.

On m'a toujours beaucoup parlé de cet homme, Jeff. On dit que c'était autrefois une personne remarquable et terriblement loyale, qu'il était fort et intelligent.
En effet, quand j'ai passé le pas de sa porte, le nez en sang et essoufflée, il n'as pas hésité une seule seconde et m'a prise dans ses bras comme un vieil ami, comme un père.

Je me souviens qu'un jour, un des messagers m'avait confié qu'il connaissait mes parents avant leur fuite, et que ça me ferait du bien d'entendre ses histoires de jeunesse. Mais je n'ai jamais voulu en entendre parler, je pense que j'en ai jamais vraiment eu besoin, je me suis toujours suffi à moi-même.

Je préfère laisser au passé ce qui lui appartient.

Mais même après ça, il m'a prêté les vêtements de sa fille, a brûlé les miens dans la cheminée et m'a envoyé prendre une douche en me promettant des œufs au plats à mon retour.

Je dévale déjà les escaliers quand la douce odeur du pain grillé envahit mes narines. Bon dieu, ce que ça me manquais de me sentir dans une bonne maison douillette.

-Salut, lancé-je en souriant et tout en m'adossant au comptoir.

Jeff se retourne et arbore un grand sourire à son tour, une poêle à la main.
-Salut ma grande, alors, bien dormi ? Lance-t'il à son tour.

Je hoche la tête et m'assois sur un des tabourets. Il fait ensuite glisser une tartine grillée avec un œuf et deux pancakes aux myrtilles dans mon assiette.

-Merci, affirmais je, je viendrais plus souvent, ta cuisine c'est dla balle.

Il rit suite à ma phrase et s'assoit à son tour pour déguster son petit-déjeuner.
Tandis que je mange, je remarque qu'il ne fait qu'observer le tee-shirt que je porte et ma fourchette allant de mon assiette jusqu'à mes lèvres.

-qu'est-ce qu'il y a ? Questionnai -je finalement, t'es pas habitué à avoir des ados criminels qui mangent pour quatre dans ta cuisine ?

Il rit à nouveau et secoue sa tête, gentiment, affirmant qu'il aurait préféré sûrement.

Je m'arrête de manger et lui sourit en continuant:
-Tu sais ta fille, je sais que je te fais penser à elle, je te jure que si quelqu'un aurait pu la sauvée, on l'aurait fait, sans hésité, assurais-je, elle méritait certainement de vivre pleinement sa vie et de ne pas plonger dans le... crime.

Je sais que ça peut le convaincre, mais j'en suis pas convaincue moi-même. Même l'adjectif n'avait rien de bon.

-Tu peux encore leur tourner le dos, me dit-il en prenant ma main dans la sienne, prends ta retraite, viens vivre avec moi.
-Je suis désolée, j'ai promis, tu aurais fait ça pour nous aussi, se venger du mal qu'ils nous ont fait, terminais-je.

Il hoche la tête, déçu mais se contente de me sourire. Je ne peux pas remplacer sa fille, il le sait, ici n'est ma place que pour quelques jours.

Je tends le bras pour allumer la télé et je tombe sur les infos.

Une femme aux cheveux blonds semble lire minutieusement ce qui est écrit sur sa feuille, quant au bandeau au bas de l'écran, il y défile un message qui retient mon attention.

"Les autorités compétentes ont permit de saisir trois membres encore en vie qui ont braqué la Banque nationale il y a à peine quelques jours, nous recherchons toujours activement une jeune fille qui est liée de prêt à ces actions, voici sa photo"

-bla, bla, bla, marmonnais-je en voyant apparaître ma photo, là j'avais même pas dix ans, ils sont trop cons, même pas à jour les flics.

Jeff acquiesce en soupirant :
-Je pense que tu va rester plus longtemps, Keils voudra pas de toi dans le coin tant que tu passeras aux infos.

-je sais, soufflai-je, je connais la procédure autant que toi...

Une semaine et demie plus tard, 20h.

-merci Jeff, souriais-je en serrant sa main, tu as été génial.

Il me sert dans ses bras une dernière fois avant de me laisser partir de la maison.

J'ouvre la porte et me retrouve face à Henry et Dave, mon protecteur officiel visiblement.

-À bientôt, peut être, lançais-je avant que Dave m'entraîne courir jusqu'à la voiture, tête baissée.

Une fois dans le véhicule, je donne une tape sur la cuisse à Henry :

-Bah alors, on t'as pas viré toi ?

Il sourit, amusé :

-Je suis un cafard, ils peuvent pas se séparer de moi !

Dave quant à lui ne pipe pas un mot et me tend une enveloppe scellée. Ce qu'elle contient me glace le sang.

-c'est quoi ça, m'énervais je, comment les flics m'ont trouvée ?

Ah oui, remise à zéro, je me suis prise un appartement pour moi toute seule, laissant Payton. Mais c'était censé être un secret !

Dave pose sa main sur mon épaule, m'invitant à me détendre, puis il répond :
-Ça, c'est nous, on a récupérés certaines de tes affaires, on t'as déplacée autre part et on a faussé un cambriolage, c'est le boss qui voulait ça.

-Super, lâchais-je en lançant le dossier contre le siège d'en face, et je vis où moi maintenant ?

-Tu le sauras bientôt, là le boss veut te voir, réplique-t-il.

-En personne ? Ricanais-je en roulant des yeux, arrêtes de mentir tu sais que presque aucun de nous ne l'as vraiment vu, encore moins sous rendez-vous personnel et réservé.

J'appuie sur le "et".

-Parce qu'il a confiance en toi, m'assure Dave, il a une proposition à te faire.

-Va te faire foutre, lançais-je.

Le véhicule entre dans le quartier du boss et s'arrête sur une place de parking. Je ne prends même pas la peine de le laisser couper le moteur, je défonce la portière.

-n'essaie même pas, me hurle Dave.

Mais c'était déjà trop tard. Je vois rouge, et je ne tiens plus, une semaine et demie de confinement a eu raison de moi. Certains membres du groupe me voient passer, je reviens de loin selon eux.

J'arrive à la maison du boss, je ne prends pas la peine de parler aux gardes, je les pousse et débarque à l'intérieur.

Des hommes tentent de me retenir, mais je leur pointe mon couteau sous la gorge :

-Je vous avise de me laisser passer ou bien je vous tue dans la minute, on s'est compris? Menaçais-je.

Le garde lève les mains et me laisse passer.

Le bras droit tente lui aussi de s'interposer entre moi et les escaliers menant à l'étage, mais je le pousse pour grimper comme un éclair, folle de rage. Je crois qu'en plus il s'est cogné le bras cet abruti.

Je monte les escaliers quatre à quatre et entreprend de défoncer chaque porte avant de tomber sur la bonne porte. Je fais face à un siège retourné et un bureau droit, même pas les couilles de m'affronter ! Je marmonne une insulte de mécontentement.

-Ravi de te voir, m'affirme une voix grave, ferme la porte s'il te plaît, je t'attendais.

Ça va être compliquée, elle est sortie de ses gonds. Je reste debout, plantée là, observant son visage enfin apparaître, le souffle saccadé.

C'est un homme, plutôt carré aux épaules, ses cheveux blancs sont bien là. Il a aussi des tatouages bien visibles dans son cou et sur son bras droit. Il a aussi des yeux bleu perçants et des lèvres épaisses.

À première vue, je dirais pas qu'il soit à fond dans le sport, et qu'il ne doit pas dépasser le mètre quatre-vingt.
Pas vraiment menaçant comme chef de la mafia...

-Alors, comment s'est passée ta semaine de vacances ? Sourit il.

Je reprends mes esprits et lance sur son bureau le dossier, puis je croise les bras et lui lance un regard noir. Son regard s'abaisse sur le dossier, puis ensuite il s'occupe à allumer son cigare, je le laisse en prendre une bouffée, puis je lui retire des mains brusquement.
-hé ! S'exclame t'il, je n'ai rien fait, moi.

J'arque un sourcil, m'appuie sur son bureau et d'un geste écrase sa fumette sur le dossier, sans remords.

-Ah ouais ? Et envoyer mes propres collègues simuler un braquage dans mon appartement, c'est un pur hasard et pas de votre ressors peut-être ? Accusai-je.

Je le pointe du doigt, d'une façon accusatrice, puis je pousse le dossier sous son nez.

Il se redresse sur son siège, balaie de la main les cendres de la cigare et ouvre le dossier, en me jetant des regards contrariés.

Après avoir étudié les photos, il expire longuement et fait même la moue. Non mais je rêve !

-Et bien, je vois rien de mal, j'ai ordonné ça pour brouiller les pistes, affirme t'il en reprenant son allure sérieuse.

-Vous auriez dû m'en parler, soupirais-je en finissant par me détendre enfin devant son calme absolu.

-Tu sais, Jessie, continue t'il, c'est typiquement ce genre de réaction que j'attends de mes membres, ta colère est utile, tu as cette envie de vengeance et de faire le bien en même temps en toi, c'est pour ça que je te garde auprès de moi et que je te protège.

Je roule des yeux et me tourne vers lui après avoir fait les cents pas dans la pièce.

-Alors, pourquoi m'avoir fait venir ici si vous n'aviez rien à me reprocher ? Je fais partie d'une équipe qui a foiré son braquage! Et j'ai laissé mes coéquipiers au lieu de me laisser faire prendre aussi, marmonnais je.

-Non, c'est ce que j'attends, assure t'il en se levant et faisant le tour pour venir en face de moi.

Je lève les yeux pour me plonger dans son regard océan, il me sourit étrangement, alors que je n'y comprends toujours rien.

-Qu'attendez vous de moi ? déclarai-je un peu dédaigneuse, mais en restant respectueuse.

-Deviens ma tueuse à gage, sois enfin promue pour ton courage exceptionnel, établis les plans avec moi, et devient un membre à part entière de la mafia, propose t'il fièrement, je peux te donner ce que tu veux, absolument tout.

Quelque chose qui s'était endormi en moi ces derniers jours se réveille, et je respire profondément. Tout ce que je veux ?

Le chef s'éloigne de moi et me tends sa main en replaçant sa veste de costume correctement. J'hésite beaucoup, je pile quelques minutes sur sa main tendue, mais je finis par la serrer.

-Je vous promets toute ma loyauté et ma détermination, boss, promis-je.

-Bienvenue à nouveau dans notre famille, Jessie, sourit-il, fier de m'avoir à ses côtés.

Mais, était ce une si bonne idée ?

RÉÉCRIT le 30/05/23

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