6. La roue finit toujours par tourner

Los Angeles, 14H.

Quand j'arrive vers le quartier du boss, pour la deuxième fois en deux jours à peine, je croise deux gosses, d'une dizaine d'années, qui s'amuse à imiter des coups de feu.

Je les observe silencieusement, après tout, on ne peut pas leur retirer leur innocence, ou leur enfance. Je n'ose même pas imaginer ce qu'ils ont déjà vu à leur jeune âge. Ici, on en croise beaucoup des gamins, souvent que de simples agents ou des missionnaires de Keils.

On sait tous pourquoi, ils cherchent la sécurité que plus personne ne peut leur apporter, et un peu d'argent, peut-être. J'étais comme eux, pendant un an, jusqu'à ce que le boss me recrute, j'ai eu de la chance, en soit. Ou si j'ai bien compris, un coup de pouce.

Je passe à côté d'un homme avec une balafre en-dessous de l'œil, il a du sang sur son cou et ses cheveux d'un noir de jais sont emmêlés. Sa lèvre est en sang, son menton a une légère entaille et un bleu se profile sur sa pommette gauche. Il me jette un regard quand on se croise, tout en essuyant sa bouche. J'aperçois quelques dollars s'échapper de sa main dans sa poche. Je pense que si un jour je me sors de cette vie, je ferais tout pour que personne d'autre n'ait à le vivre. J'oublierai jamais tout ça.

Dieu sait ce que certains d'entre nous font pour survivre, et à voir sa mine dépitée, il n'a pas affronté que son pire ennemi.

Dans ce monde dangereux mieux vaut connaître ses ennemis, mais encore plus ses amis. Car le plus souvent ce sont qui m'ont trahie, m'enfin c'est une autre histoire.

Le temps d'une fraction de seconde, j'ai crus voir un éclat de regrets dans ses yeux bruns. Je secoue ma tête, chassant toutes ces idées de mon crâne, Jake m'attends, mieux vaut ne vaut pas le convaincre que le boss ait besoin de changer d'avis!

J'offre un hochement de tête respectueux au garde à l'entrée qui me laisse entrer, je pousse la porte et m'engage dans le salon, mains dans les poches. Jake Tons se balade dans la pièce, un verre de vin rouge à la main.

Le conseiller, finit enfin par se désintéresser de l'extérieur, qu'il admirait depuis la fenêtre. Son regard sombre croise alors mes prunelles bleues et un sourire étire ses lèvres.

-Jessie Miller! S'exclame t'il en accentuant l'accent sur mon nom de famille tout en ouvrant grand ses bras, quel plaisir de te voir!

Quelques gouttes de vin s'échappent du verre et tombent sur le tapis, il n'y prête pas attention et s'avance rapidement vers moi. Le gars sert ma main bien avant que je n'ai le temps de dire mafia.

-J'imagine que tu viens ici pour ta prochaine mission, sourit-il, viens avec moi dans le petit bureau.

J'acquiesce, et le suis sans dire autre chose. On traverse un couloir en passant devant minimum trois portes. Parvenus au fond, je découvre une autre porte, mais aussi un escalier en bois qui conduit au premier étage.

Alors que je pensais qu'il m'y conduisais, il me retiens avant que je ne puisse poser un pied sur la première marche.

-Ne sois pas impatiente de le rencontrer tu finiras bien un jour, assure t'il, mon bureau est derrière cette porte, désolé de ne pas t'honorer de la présence du boss, il met un point d'honneur à ce que ses rencontres soient précieusement justifiées.

Je hoche la tête et ajoute :

-je suppose donc que de simple remises de missions n'en font pas partie?

Jake affirme en ouvrant la porte. Le bureau reste spacieux et lumineux grâce au vitrage à gauche, il possède une petite bibliothèque ainsi qu'un placard en verre, mettant à profit les quelques bouteilles de vins coûteux. Un bureau en chêne est planté vers le centre de la pièce, et deux chaises s'opposent en ses largeurs. Un canapé en cachemire rouge, est l'unique touche de couleur de la pièce, un fauteuil de la même couleur, mais dégarni se tient à sa gauche, la table basse en verre reste simple, cependant.

-vous n'êtes pas si sombre que ça, finalement, fis-je remarquer en prenant place sur la chaise en face de la sienne.

Je pose mes mains sur le bureau et tape des doigts, en l'observant absorber sa troisième gorgée de vin, en dix minutes à peu près.

-J'admire ton don pour remarquer les petits détails, sourit-il, mais en effet, je ne suis pas qu'un bourreau exécuteur des ordres, j'ai ma part de couleur au milieu des ténèbres.

J'opine, me redresse sur ma chaise bras croisés et lance les hostilités :

-bien, si nous pouvions cesser de tourner autour du pot? proposais-je, il est temps de me donner cette mission.

-ne sois pas impatiente voyons, soupire t'il en posant son verre de vin, nous pouvons discuter.

Je lève les yeux au ciel et décroise mes bras, je sors de ma poche la lettre du boss et la pose sur la table.

-aujourd'hui, je me suis déplacée car le boss me l'a demandé, et il n'est pas question de "discuter", déclarais-je en imitant les guillemets, mais plutôt de me donner cette foutue mission, et au passage l'avance que vous me devez.

Jake hoche la tête en souriant.

Je commence à m'énerver et réplique sur un ton froid, le regard lourd :

-Ou bien voudriez-vous que je dise au patron que vous n'exécutez pas ce qu'il vous demande convenablement? Je me demande quelles conséquences cela pourrait entraîner...

Il semble se ressaisir et déglutis difficilement, j'ai trouvé ton point faible, l'ami. Il pose son verre de vin sur la table basse et se dirige vers le bureau. Je le suit du regard.

-Nous n'allons bien évidemment pas en arriver là, assure t'il en fouillant déjà dans son tiroir, il en sort une enveloppe kraft et m'indique de l'ouvrir.

Je m'exécute et en sort un ordre de mission, donnant, la date, l'heure et ce que je dois faire.

Je fronce les sourcils et lâche :

-Caleb Johns? Le Caleb que je connais?

Jake répond :

-Si c'est le garçon qui semble irréprochable auquel tu penses, alors tu ne te trompes pas, il a une dette envers nous, et il ne l'a pas remboursée.

-Mais! m'écriais-je en me levant, c'est impossible, je le connais très bien, Caleb doit avoir une bonne raison!

Jake soupire et m'indique de me calmer :

-certes, mais nous ne la connaissons pas, souhaites-tu que j'indique au boss que tu ne pourras pas exécuter cette mission en raison de vos liens entre toi et Caleb?

Je fronce les sourcils en regardant sur le côté restant toujours autant choquée.

Je secoue négligemment la tête et refuse :

-Non, vous n'en aurez pas besoin, si c'est ce qu'il faut faire, alors je le ferais, j'ai confiance, assurais-je à contrecœur.

Jack semble fier et rassuré à la fois, il se lève en époussetant son chemisier et tend la main pour que je la lui sert.

Je le fais, bien sûr, tout en espérant qu'ils reviendront sur leur décision, ce qui reste impossible de la part de la mafia.

-je suis heureux que tu nous restes loyal, le boss a conscience que ce ne sera pas simple pour toi, mais il prend le risque, nous te remercions d'avance, nous nous reverrons dans deux jours, quand nous saurons si cela s'est bien passé, clame Jake.

Je hoche la tête et récupère l'ordre de mission ainsi que la lettre.

Jake me raccompagne jusqu'à la sortie en me souhaitant bonne chance pour ce soir.

Ce n'est pas comme si j'allais mourir, non?

Bien sûr que non Jess,

mais tu vas certainement perdre un de tes amis pour la cause de la mafia.
La personne trahie sera Caleb, et tu en sera la traîtresse.

LA, Jackson's Street, 22h45.

Il fait déjà nuit quand j'arrive dans la rue, je me cache près d'une voiture garée, non loin d'un bar où la musique s'échappe et les lumières sont encore allumées à cette heure-ci.

Plusieurs personnes en sortent, mais pas de Caleb,je reste dubitative, aurait-il réussi à déjouer nos plans? Non, ce n'est pas le Caleb que je connais. Putain, qu'est-ce que Payton va me dire quand il apprendra que j'ai peut-être tué son meilleur ami.

Pourtant, ma conscience me rappelle qu'il a une dette envers le boss, ce qui veux dire que plus rien ne devrait m'étonner et que je devrais mieux me concentrer.

J'aperçois un homme en costard qui retiens mon attention, je le reconnais! C'est l'homme balafré d'il y a quelques heures.

Je le vois échanger des sachets avec un homme dans la ruelle toute proche, chacun des deux hommes a une arme dans le pantalon, ils s'échangent de l'argent. Le blond, s'en va, tandis que le balafré prend un appel.

Qu'est-ce que c'est que cette histoire...ma curiosité s'enclenche, devrais-je mener l'enquête?

Un bruit sec retient mon attention dans mon dos, je me tourne lentement, et découvre Caleb, un doigt sur ses lèvres m'indiquant de ne rien dire. Après m'être remise de mon sursaut de courte frayeur j'ouvre grand les yeux, bon sang!

-Caleb! chuchotais-je assez fort pour qu'il m'entende, mais qu'est-ce que t'as foutu!

Le garçon m'offre un clin d'œil et m'indique l'homme d'un coup de tête.

-Tu le sais alors, soufflais-je, que je suis censée devoir te terrifier pour que tu puisses t'enfuir? ça n'a pas de sens!

-Allons, Jess, sourit-il, fais donc marcher ton cerveau, tu me penses donc capable de devoir autant au boss pour qu'il t'envoie juste me faire peur?

Je me reprends et secoue la tête, quand soudain, tout s'assemble, c'est un examen!

-Ce n'est pas vraiment toi que je dois effrayer c'est ça? m'exclamais-je presque, mais le balafré!

Mon ami lève les yeux a ciel et joint ses mains pour prier dieu, comme si il avait attendu cette réponse toute sa vie.

-Tu as deviné, affirme t'il, maintenant, fais ton boulot.

Caleb finit pas s'éloigner de moi et me laisse seule, près de cet homme. Je m'en tiens aux closes de l'ordre de mission, je dois juste lui faire peur.

Alors je rabats ma capuche, mon foulard sur ma bouche et prends mon arme en main.

J'apparais alors dans la ruelle alors qu'il est toujours de dos, j'en profite pour tirer dans le mur en brique, provoquant un sursaut de sa part, son téléphone portable tombe de ses mains et il fait volte-face.

-Qui êtes-vous! demande t'il en dégainant son arme.

Je ricane, et réplique :

-je serais vous, je baisserais cette arme.

-Ah ouais? s'exclame t'il , ce n'est pas comme si vous me faisiez peur!

-Sûrement, affirmais-je en arquant un sourcil, mais sachez que le prochain qui me suivra, ne sera pas aussi gentil, oh...la  mafia n'est pas aussi gentille.

J'appuie sur le dernier bout de phrase, cela donne plus de peps à la rencontre, vous trouvez pas? Il semble tendu, alors je change de tactique. Je me détends complètement.

Je baisse mon arme et m'amuse à la faire tourner sur mon doigt tandis qu'il commence à comprendre.

-Je ne vois pas de quoi vous parlez! Lance t'il, le canon de son revolver pointé sur le sol.

Mais il me ment, et je déteste ça.

Je tourne mon regard vers lui, et le soutiens, je ricane encore :

-Ah bon? Vous voulez que je vous éclaircisse la mémoire peut-être? Rétorqué-je.

Je dirige de nouveau mon arme vers lui et déclare :

-je vous conseille de rembourser votre dette, l'ami, dieu sait et Jake peut-être, ce que vous risquiez de perdre, est-ce que ça en vaut la peine?

Il baisse peu à peu son arme et hoche la tête :

-je le ferais.

Je lève un sourcil, fais mine de le laisser tranquille, et réplique aussitôt pour terminer le boulot :

-Je n'en suis pas si sûre, laisse-moi te convaincre!

Avant qu'il n'ai eu le temps de dire ouf, je tire et la balle de mon arme se loge dans sa cuisse gauche.

Un cri d'effroi et de douleur s'échappe de sa gorge et il tombe au sol presque aussitôt, ses mains plaquées sur sa cuisse pour arrêter de faire couler le sang.

-Qui êtes-vous! crie-t'il alors que je lui tournais déjà le dos.

Je fais tomber ma capuche et tourne légèrement la tête tout en jouant encore avec mon revolver.

-Je ne fais que mon travail, j'aurais pu tirer autre part, sois heureux que je sois de bonne humeur, affirmais-je en tournant les talons.

Je l'entends jurer dans mon dos, je me contente de tourner directement sur la droite, pour reprendre mon souffle. Je me rends compte que je respirais à peine.

Derrière moi, il lance d'autres injures, je me contente de souffler et de m'en aller, avant que la police ne m'attrape. J'entends déjà les sirènes au loin, quelqu'un à dû les appeler après les coups de feu.

Je rabats ma capuche et m'enfuis, mieux vaut ne pas traîner dans le coin.

La roue finit toujours par tourner après tout.

RÉÉCRIT le 30/05/23

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