Chapitre 24 : Silence

Hermione restait immobile. Assise sur la pierre humide des cachots du quartier général de Grindelwald, elle venait de se réveiller. Tout ce dont elle se souvenait, c'était que le leader des partisans de Grindelwald l'avait appelé « Granger », et qu'ils savaient qu'elle venait du futur. Ensuite, elle s'était battue, mais elle avait perdu le contrôle à un moment. Sûrement le sortilège de l'Imperium... De la magie noire, et impardonnable. Le fait que Grindelwald sache pour sa mission initiale envers Tom l'inquiétait énormément : elle restait là, repliée sur elle-même dans l'obscurité, à trembler à cause du froid et de l'angoisse.

Qu'allaient-ils faire d'elle ? Comment allait-elle faire pour empêcher Tom de devenir un mage noir, si elle mourrait ? Elle ne pouvait s'empêcher d'en vouloir à Dumbledore : c'était à cause de lui si elle avait voyagé dans le temps, et encore à cause de lui si elle avait rejoint Grindelwald. Certes, elle lui avait proposé, mais... Elle était mineure, bon sang ! Mineure, et peut-être trop loyale. Peut-être qu'en fait, elle avait proposé cela sans être pleinement consciente de tous les enjeux.

Installée dans cette cave, cela lui sautait aux yeux. Mais à la fois, elle l'avait voulu : être meilleure amie avec Potter donnait finalement envie de connaître cette adrénaline des missions, des enjeux, des mystères à résoudre. Elle commençait pourtant à en avoir plus qu'assez... Elle rêvait de calme, de silence, de livre et d'apaisement.

Plusieurs personnes se trouvaient dans la pièce, collés au mur. Des grilles en fer séparait la salle en plusieurs parcelles, et des barrières magiques empêchaient quiconque de faire usage de la magie, mais aussi de parler avec les autres prisonniers. Génial.

Il lui fallut attendre une éternité avant que la grille en fer forgée qui permettait l'accès aux cachots ne s'ouvre dans un grincement atroce. Le leader des partisans entra d'un pas assuré, un grand sourire aux lèvres.

— Coucou, ma chérie ! s'exclama-t-il en ouvrant la grille de sa cellule. Alors, comment tu vas ?

Hermione ne répondit rien. « Ma chérie » ? Pour qui se prenait-il ? Ils n'avaient pas élevé les Scroutts à Pétards ensemble !

— Lève-toi !

Sa baguette en main, il lui jeta un nouvel Impero. Hermione se sentit se lever sans qu'elle ne puisse le contrôler, bien qu'elle tentait de se débattre. L'homme la força à quitter la cellule, puis ils partirent tous les deux en dehors des cachots. Hermione se laissait faire : elle ne parvenait pas à se défaire de l'Imperium. Elle savait bien que c'était possible, mais il fallait du temps et énormément de force mentale. Elle s'en sentait incapable.

Ils finirent par rejoindre un grand salon, où de nombreuses personnes étaient assises. Elle portait encore son uniforme de Poudlard, mais sa chemise était déchirée : cela laissait à vue une partie de son ventre. Un sortilège devait l'avoir griffé ; pas assez profondément pour qu'elle n'en souffre trop, mais assez pour que sa chemise soit tachée de sang.

— Voici la Sang de Bourbe ! s'exclama le leader en plongeant dans une révérence.

Hermione sortit enfin de l'Imperium. Elle prit une bouffée d'air et observa les alentours : visiblement, elle se trouvait en pleine fête des partisans de Grindelwald. Elle avait déjà assisté à plusieurs reprises à ce genre de cérémonies, qu'elle avait toujours trouvées ennuyantes. Tout le monde l'observait ; certaines femmes parlaient à leurs voisins, masquées par leur éventail, et ne semblait pas dire du bien de la jeune femme, au contraire. Hermione finit par poser son regard face à elle. Installé sur son fauteuil qui ressemblait à un trône, Grindelwald tenait un verre de vin à la main. Il avait beau être installé de manière nonchalante, il n'en perdait pas moins son charisme et sa classe : Hermione ne savait pas comment il faisait. D'une certaine manière, il lui rappelait énormément Tom... Ce qui ne la rassurait pas. Elle savait bien que Tom était capable des pires atrocités, même si elle tentait de le dissuader de tomber dans la magie noire.

— Alors voici notre traitresse, souffla Grindelwald.

Hermione soutint le regard du mage noir. Ils allaient la tuer, de toute façon, alors autant mourir fièrement. Autant rendre fière ses parents, ses amis ; la maison Gryffondor, aussi.

Alors elle ne détournait pas le regard, non. Elle restait immobile, bien droite, affirmée. Grindelwald se mit debout, posant son verre au passage. Il s'approcha d'Hermione sous le silence de l'assemblée.

— Pourquoi nous avoir trahi ? demanda-t-il, l'air intéressé.

— J'ai toujours été l'alliée du professeur Dumbledore, répondit-elle. Toujours.

— Pourquoi ? Voyez-vous en lui le père que vous avez perdu ?

Hermione secoua légèrement la tête. Ce n'était pas ça. C'était simplement... Dumbledore était leur modèle, depuis leur arrivée à Poudlard, à Harry, Ron et elle. Il était un puissant sorcier, un combattant pour ses valeurs, pour la magie blanche, pour le Bien. Et en 1943, c'était devenu son seul repère. Le seul lien qu'elle avait avec son époque. Alors peut-être qu'inconsciemment, elle avait cherché à ce qu'il soit satisfait d'elle, à défaut d'être fier, pour avoir l'impression qu'elle avait accompli sa mission... Grindelwald cherchait à la mettre mal à l'aise.

— Le professeur Dumbledore n'est pas une figure paternelle. C'est un sorcier puissant qui défend le Bien ; il est normal de se ranger derrière lui lorsque l'on doit lutter contre les Forces du Mal.

— Vous tenez un discours si proche du sien, c'en est amusant. Je me doutais que Dumbledore préparait une armée composée de ses élèves.

Hermione sentit son regard se voiler. L'Armée de Dumbledore, ils l'avaient créée pour lutter contre Dolores Ombrage, leur professeure tyrannique en 1995.

— Et quelle est cette histoire de voyage temporel ? questionna-t-il de nouveau.

— Qui vous a parlé de voyage temporel ?

— Un de mes partisans a lu dans votre esprit. Vous n'avez aucune barrière d'occlumancie, c'est assez amusant. Dumbledore ne vous forme pas aux rudiments de la magie de défense.

Hermione garda le silence. Grindelwald sourit simplement face à son mutisme ; il leva la tête vers le leader, puis dit :

— Je vais m'en charger. Merci, MacMillian.

Hermione sursauta à l'entente du nom. MacMillian ? C'était un de ses camarades de classe à Serpentard, que ce soit en 1944 ou en 1996. Les deux adoraient se vanter au sujet de leur sang pur... En l'observant rapidement, Hermione parvenait à distinguer quelques traits communs à ses probables héritiers.

Hermione se sentit entraînée par une femme nommée Vinda Rosier, qu'elle connaissait depuis longtemps. Elles partirent toutes deux sur les pas de Grindelwald, assez peu confiante pour Hermione. Cela allait mal finir.

— Alors vous allez la laisser tomber ? lâcha Tom, assis dans le bureau du directeur.

Dippet était assis derrière le bureau. Dumbledore était là, aussi, debout derrière son supérieur.

— Nous craignons que Miss Smith ne puisse pas se sortir indemne de cette mission.

— Elle ne s'appelle pas Smith, d'après ce qu'ils ont dit. Pourquoi a-t-elle menti sur son nom ?

Le directeur resta silencieux quelques instants. Dumbledore lui avait confié, en surface, bien sûr, la mission qui avait été confiée à Hermione en 1996. Dippet ne s'était pas senti offensé de ne pas l'avoir su avant : il savait que Dumbledore prendrait la tête de Poudlard par la suite, il le formait déjà à cette position. Concernant Grindelwald, Dippet lui laissait carte blanche : il avait même accepté qu'Hermione devienne agent double.

— Nous l'ignorons, mentit Dippet.

Tom leva le regard sur Dumbledore, qui restait immobile. Il l'observa quelques instants, silencieux, avant de dire :

— Donc vous allez la laisser mourir là-bas ?

Dumbledore était surpris. Jamais il n'aurait imaginé que Tom aurait demandé un rendez-vous avec le directeur pour discuter au sujet d'un autre élève. Surtout d'une autre élève.

— Nous craignons qu'il soit déjà trop tard, avoua Dippet.

Tom eut un mouvement de recul. Il baissa le regard quelques instants, la respiration un peu plus rapide : Dumbledore semblait de plus en plus étonné. Alors, il angoissait à l'idée de la perdre ? C'était impossible. Mais après tout, cela faisait presque trois ans qu'ils se côtoyaient, alors... Il était probable que Tom ait été influencé par elle. Tel qu'elle le voulait, en réalité.

— Donc vous laissez tomber, dans le doute ?

— Des Aurors sont à sa recherche. Nous vous tiendrons au courant si nous avons des nouvelles.

Tom resta silencieux. Il ne comprenait pas : c'était Dumbledore qui lui avait confié cette mission, et il ne faisait même pas l'effort d'aller la chercher. Cela le mettait en colère : et pire encore, il haïssait d'autant plus cet idiot de professeur. Le jeune homme se mit debout, prêt à partir.

— Ne tentez pas de la retrouver vous-même, déclara Dumbledore. Nous savons que vous aviez rejoint Grindelwald : ne tentez pas de rejoindre de nouveau leurs rangs pour prendre de ses nouvelles ou tenter de la sauver. Ils vous tueront, car ils penseront que nous avons su vous convaincre d'aller l'aider.

— Encore faudrait-il que j'accepte de vous faire confiance, pour cela.

— Et ce n'est pas le cas ? demanda Dippet, sourcils froncés.

Un simple regard de Tom leur fit comprendre que non. Il leur souhaita une bonne journée et quitta la pièce d'un pas assuré. La colère accélérait son rythme cardiaque avec force, à tel point qu'il en était chamboulé. Il commençait à trembler et son seul rêve était de faire demi-tour pour aller se battre contre Dumbledore. Quel idiot ! Il avait profité de la loyauté d'Hermione pour l'entraîner dans cette mission dangereuse, et...

Et à la fois, que lui prenait-il ? Cette fille lui avait menti. Selon MacMillian (il avait reconnu le leader de cette brigade des partisans de Grindelwald, bien sûr), elle avait voyagé dans le temps dans l'objectif de le tuer. Mais finalement, elle serait tombée amoureuse de lui, donc elle ne l'aurait pas tuée. Et elle s'appelait Hermione Granger, et elle avait paru surprise lorsqu'il avait prononcé son nom.

D'un côté, Tom voulait la haïr. Si elle lui avait menti là-dessus, que lui avait-elle caché d'autre ? Venait-elle vraiment du futur ? Au fur et à mesure de ses pas dans le couloir, tout semblait s'assembler dans son esprit. Le retourneur temporel dans son sac. Les pensées qu'il avait pu percevoir grâce à la légilimancie. Le fait qu'elle ne parle que très peu de ses souvenirs lorsqu'ils se retrouvaient avec Abraxas et Elena. C'était peut-être même cela qui avait plu à Tom, la concernant : elle n'était pas comme les autres. Hermione était comme lui, en fait : froide, renfermée sur elle-même. La douleur traversait souvent son regard et cela rassurait Tom, en quelques sortes. Il était moins seul.

Alors, Tom peinait à la haïr. Il voulait comprendre, plus qu'autre chose. Et puis... Elle pourrait peut-être lui être utile. Il ne savait pas encore comment, mais... Elle le connaissait assez, désormais, pour qu'il ne puisse pas la laisser tomber. Surtout qu'il fallait mieux garder ses amis proches de soi, mais encore plus ses ennemis... Dans son cas, c'était plutôt garder ses alliés près de soi, et ses ennemis encore plus près.

Tom garderait Hermione très proche de lui, alors. 

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