CHAPITRE V : Edelweiss - Le Réveil


"Quand il n'y a plus de chance, il y a encore de l'espoir. "

-Jean-Michel Ribes


La première chose que je me suis dite en me réveillant a été :

« Papa est mort. »

Et c'est comme ça depuis deux semaines.

Tous les matins, je me réveille avec cette unique pensée. Est-ce qu'un jour je me réveillerai aussi de cet horrible cauchemar ?

Cette vie ne peut pas être la mienne.

Mais les jours s'enchaînent, la vie passe et défile devant moi, mais il ne revient pas, et il ne reviendra jamais.

Pourquoi jamais est-il aussi long ?

Avez-vous déjà eu cette étrange sensation, en vous levant le matin, celle d'avoir l'impression que la journée d'aujourd'hui sera encore plus pourrie que la dernière, et que ce sera toujours comme ça : sans fin, sans fin heureuse du moins.

Un cercle vicieux éternel auquel vous êtes pris au piège et qui n'en vaut pas la peine mais vous peiner quand même, et avez de la peine.

La vie s'échappe, la vie m'échappe. Elle me glisse entre les doigts.

Les journées ne sont plus un cadeau de la vie depuis que tu n'es plus là, murmurais-je.

Je trouve le répit dans le sommeil, mais je me réveille, et je constate les dégâts, encore.


C'est cruel.


C'est comme si tu re-mourais,comme si chaque matin j'apprenais la triste nouvelle.

Est-ce que tu ressens ça aussi Aiden ? Pensais-je.

Dis-moi que je ne suis pas devenue folle.

Je repoussai les couvertures et je m'assis au bord du lit.

J'ai mal au crâne, c'est le bordel dans ma tête. C'est le bordel dans mon cœur.

-T'as vie est un bordel dis-je à voix haute.

Je porte un sweat gris clair trois fois trop grand pour moi, c'est quoi ce truc ? Je remonte les manches qui me couvraient les mains.

Je sors du lit, et lentement,dans un mouvement paresseux, je le retire en me dirigeant vers la salle de bains.

Je me regarde dans le petit miroir posé sur le lavabo. Mon mascara a coulé et forme deux grosses taches noires autour de mes yeux. Mon collant est effiloché de partout, ma robe remonte sur mes cuisses. J'espère que ce massacre est arrivé pendant la nuit et qu'Aiden ne m'a pas vu comme ça...

-Tu ne devrais pas passer ton pull à une dégénérée, Aiden. dis-je en regardant mon reflet.

J'enlève mes habits et passes sous la douche, j'ai trois minutes. Tant pis, je serai en retard,j'en prendrai trente. Je ne dois pas être tant attendu que ça de toute manière.

L'eau bouillante me fait du bien et détend mes muscles engourdis.

Je me lave les cheveux, je passe de l'eau sur mon visage.

Comment sommes nous rentrés hier ? Je ne me souviens de rien, à part du fait que je me suis endormi dans ses bras... Mais qu'est-ce que je fous ?

Je suis si triste pour lui.J'aimerais l'aider, mais regardez-moi, je suis pitoyable, je ne suis même pas capable de faire mon deuil comme tout le monde, il faut que j'aille pleurer dans les bras des petits copains des autres.

-A force de te lamenter tu es devenue lamentable Edelweiss Keaten.

Je sors de la douche et ne prends pas la peine de me regarder dans le miroir en me brossant les dents. Je me peigne et passe un léger coup de sèche-cheveux.

« Avoir les cheveux jusqu'aux fesses » encore un truc à la con. Il n'y a pas plus emmerdant que mes cheveux.

Je sors de la salle de bain, une serviette autour de moi. Je ne me maquille pas et enfile un jean noir taille haute et un gilet noir crop top. Que je mets directement par-dessus mon soutien-gorge.

J'attrape mon sac et en sors l'enveloppe, tout en me dirigent dans la cuisine. Je la dépose sur la petite table et la regarde longuement.

Je me décide enfin à l'ouvrir, faut que j'arrête de me poser autant de questions et de parler toute seule surtout.  

J'arrache la petite ouverture et secoue l'enveloppe au-dessus de la table, l'ensemble des documents y tombent. Il y a beaucoup de feuilles agrafées les unes aux autres,des papiers sans importance liés à l'inscription, une fiche médicale à remplir pour l'infirmerie, une autre pour le self... Je les rassemble et les dépose sur un coin de la table. Je ferais ça ce soir, à moins que ma mère ne rentre avant et le fasse... Enfin je ne compte pas trop là-dessus.

Entre toute cette paperasse se trouve une petite enveloppe, il n'y a rien écrit dessus. Je me demande si c'est le fameux truc que je suis censé redouter ou non.

Trop de questions.

Je l'ouvre rapidement, sur une feuille blanche est écrit à l'encre noire, un court texte dans une écriture obliques et ronde, presque féminine et signé « Meyer, votre professeur principal et de philosophie » .


« J'ai pris connaissance de vos résultats en philosophie Mademoiselle Keaten, et je dois dire que je suis très impressionné. J'ai également pris connaissance du mauvais virage qu'a prit votre vie. Rien n'est plus permanent que la mort c'est un fait, quant à la douleur, elle n'est que passagère.

 Et le malheur présage du bonheur. 

Car comment ressentir de la joie sans connaître la tristesse, et de la tristesse sans avoir connu la joie ? On ne se rend compte du silence qu'une fois qu'il est rompu, du jour une fois que la nuit l'emporte... 

Vous avez eu et aurez donc une belle vie, il ne vous reste qu'a y croire... »


Je restai quelques secondes immobile, les yeux fixés sur le bout de papier. Je le pliai, le rangea dans la poche arrière de mon jean, puis le reprit, le déplia et le relut.

Je pris mon sac, y glissa une pomme, et partit sans faire un bruit, je marchais à pas rapide dans les rus de Paris, mets pieds avançaient automatiquement, et j'arrivais sans m'en apercevoir jusqu'au lycée.


Cette lettre m'avait perturbé. Mais m'avait étrangement redonné espoir.

J'espérais à nouveau.

J'espérais que ce prof ait raison.


Lorsque je suis arrivée au lycée, j'avais déjà loupé mes deux premiers cours. Maths, ce qui n'était pas top si je voulais avoir mon bac scientifique -bac que je n'aurais jamais choisi de moi-même si j'avais eu le choix- et anglais qui au contraire était une chance.

J'arrivais alors en cours de philo, lettre en poche, papier d'inscription non remplie, avec une vingtaine de minutes de retard.

Je toquai à la porte puis entrai timidement. Meyer ne me fit aucune remarque, ni sur le fait que j'avais séché son cours d'hier et encore moins par rapport à mon retard. Il n'évoqua pas sa lettre et me souhaita la bienvenue. 

Je l'adore déjà.

Je me suis installée tout au fond de la salle, essayant de faire abstraction de tous ces regards que je sentais poser sur moi et de ses petits ricanements que j'entendais.


Au bout de quelques minutes, la porte s'ouvrit brusquement. Il entra sans frapper, essoufflé, et le prof lui souhaita la bienvenue de manière ironique, il s'excusa alors d'avoir séché la plupart de ses cours puis répondit sur un ton insolent et provocateur qu'il n'aimait pas la philo et que les goûts et les couleurs ne se discutaient pas. Toute la classe se mit à glousser bêtement et le professeur répondit que la philosophie n'était ni de la nourriture ni une couleur.



-A suivre-

xoxo ByR. 


PS : Petit indice sur le chapitre VI, il sera réalisé à partir du point de vue d'Aiden. ;)

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