Drago et les dragons

Depuis toujours, Hagrid vouait une passion plutôt obsessionnelle aux dragons; ce n'était un secret pour personne. Les étudiants ne furent donc nullement étonnés lorsque leur professeur leur annonça qu'ils allaient devoir prendre soin de bébés dragons.

Hagrid les répartit en équipes de deux, un gryffondor avec un serpentard, pour soi-disant bénéficier des qualités de chaque maison. Drago se retrouva donc avec Parvati Patil — la sorcière qui avait accompagné Harry au bal en quatrième année — ainsi qu'un dragonnet couleur feu flamboyant.

— Elle s'appelle Mirya et elle a trois ans et demi, les informa Hagrid. Regardez à la page cent dix de votre manuel, ça vous expliquera comment s'occuper d'elle.

Le géant s'éloigna ensuite vers la prochaine équipe, constituée de Potter et Goyle (un mélange assez douteux selon le blond) pour leur présenter Théo, le frère de Mirya, qui ressemblait beaucoup trop à un petit démon avec ses ailes noires et rouges. Au moins, sa soeur avait l'air calme, pensa Malefoy pour se rassurer.

— Salut toi, murmura Parvati en souriant à la petite bête. T'es vraiment mignonne.

Elle rigola en allant lui caresser le bout du nez. Mirya avait l'air parfaitement heureuse jusqu'à ce que Drago ne s'approche doucement; elle se mit alors à grogner dans sa direction, quelques flammèches s'échappant de sa gueule entrouverte. Il recula aussitôt et ses mains se mirent à trembler contre son gré.

Drago avait toujours ressenti une profonde curiosité envers les dragons, puisque c'est ce que son prénom signifiait en latin. Cependant, il ne pouvait s'empêcher d'en être terriblement effrayé. Le serpentard n'avait jamais eu une connexion facile avec les animaux et il en était pleinement conscient. Ce n'était pas près de changer non plus.

— Tu devrais réessayer avec un morceau de viande, lui suggéra sa coéquipière.

— Oh, oui. Bonne idée, euh, Parvati...

Cette fois, la dragonnette mangea dans sa main sans hésitation avant de grogner à nouveau et s'éloigner subitement, se dirigeant vers sa mère qu'Hagrid gardait attachée un peu plus loin.

— Attends, s'exclama-t-il en la poursuivant avec de la nourriture. J'ai d'autre viande, reviens!

— Tu dois baisser les yeux devant un dragon Malefoy, lui cria Parvati. Sinon il va penser que tu le provoques.

Mais il n'entendit pas le conseil de la jeune fille et se retourna brusquement en sentant un souffle brûlant dans ses cheveux. Un énorme dragon d'environ cinq mètres de haut avait penché sa tête à seulement quelques centimètres de la sienne. Son coeur bondit violemment dans sa poitrine. Il fut bien trop paniqué pour effectuer le moindre mouvement, son regard demeurant verrouillé dans celui de la créature. Il avait déjà vécu une fâcheuse expérience avec les grosses bêtes et depuis, il en avait une horrible phobie.

Drago eut si peur que sa vision se picota de noir et bientôt il ne vit ni ne sentit plus rien sauf la dureté soudaine du sol sous son corps.

❄︎❁✾

Tous les élèves furent témoins de la chute fulgurante de Malefoy. Le pauvre venait de s'évanouir de terreur devant la dragonne. Puis sous la stupéfaction générale, celle-ci lui donna gentiment un coup de museau sur l'épaule, comme pour s'excuser de lui avoir fait peur.

Hagrid poussa un soupir de soulagement. Il avait cru qu'elle attaquerait le garçon, mais il semblerait qu'elle l'appréciait.

— Quelqu'un aimerait se porter volontaire pour amener monsieur Malefoy à l'infirmerie? demanda Hagrid.

— Je peux y aller! s'écria aussitôt Harry.

Ron le dévisagea comme s'il était un alien.

— Harry? Depuis quand tu te précipites pour aider Malefoy?

— C'est mon pire ennemi, expliqua le brun. Avec qui j'vais me disputer si c'est plus lui?

Sans perdre de temps, il glissa une main dans le dos de Drago et l'autre sous ses genoux, avant de le soulever dans ses bras. Le corps du blond se crispa alors soudainement; soit il allait se réveiller, soit il faisait semblant de s'être évanoui. Harry n'y fit pas plus attention et se mit à marcher.

Il fut surpris en se rendant compte du poids étrangement léger de Malefoy pour un homme de sa taille. Après tout, le serpentard faisait la même taille que lui, alors qu'il avait beaucoup grandi ces dernières années.

— Tu devrais peut-être manger un peu plus Drago, murmura-t-il.

Puis n'ayant aucune réaction, il ajouta:

— Tu sais que je sais que t'es pas vraiment évanoui hein? Peut-être que je devrais t'embrasser pour que tu te réveilles?

Il rigola, mais n'eut pas plus de réaction. Il remarqua alors la mince couche de sueur sur le front de son ennemi préféré et ses sourcils arqués.

— Malefoy, ça va?

Harry le secoua un peu; ils étaient presque arrivés à l'infirmerie.

— À ton avis, Potter! gémit le blond en ouvrant les yeux.

Il se dégagea violemment de sa prise et régurgita l'entièreté de son déjeuner au sol. Il n'avait vraiment, vraiment pas l'air bien. Harry n'avait pas bougé, l'observant d'un air désolé.

— Qu'est-ce que tu fais encore là, scarhead? marmonna faiblement Drago. J'ai pas besoin de toi, laisse moi tranquille.

Le brun partit effectivement, pour aller chercher madame Pomfresh. Il n'avait jamais été aussi inquiet. En les voyant revenir, le blond leva les yeux au ciel, l'air profondément exaspéré.

— Évidemment, il ne peut pas s'empêcher de vouloir sauver tout le monde, ce saint Pottah!

— Monsieur Malefoy, calmez-vous, l'implora Pomfresh. Vous avez besoin de repos.

Il tenta de se relever, mais réalisa avec horreur qu'il se sentait beaucoup trop faible pour ça. S'il chancelait une fois debout, ce serait la honte; il perdrait toute crédibilité pour le restant de ses jours. Et plutôt mourrir cent fois que de demander l'aide de Potter!

Drago se releva donc lentement, prenant de grandes respirations en attendant que sa vision se stabilise. Puis alors qu'il entamait quelques pas, pressé d'en finir avec cette situation fort déplaisante, Harry vint fermement enrouler un bras autour de sa taille pour l'aider à marcher.

— Ce serait dommage que tu tombes Drago, chuchota-t-il tout contre son oreille.

Malfoy manqua de faire une crise cardiaque.

— Je pense que j'vais encore vomir...

— Oh que non! s'écria madame Pomefresh. Vous allez avaler une potion anti-vomissements.

Dès qu'ils arrivèrent à l'infirmerie, elle le força à ingurgiter un liquide nauséabond — ce qui eut au moins le mérite d'être efficace — avant de l'allonger sur un matelas.

Le gryffondor resta en retrait pendant que l'infirmière posait des questions au blond et lui faisait passer quelques tests.

— Alors, qu'est-ce qu'il a? demanda-t-il finalement lorsqu'elle eut terminé. C'est grave?

— La chute n'a pas causé de blessure... J'ai peur que le vrai problème soit plutôt une dépression, soupira Pomfresh. Mais il n'y a pas de potion pour régler ça.