Printemps et honnêteté

Dans les semaines qui suivirent, Drago continua de rencontrer Maud. Tel que convenu, elle lui avait donné d'autres défis à court terme comme faire au moins une nouvelle activité qui lui plaisait pendant minimum une heure et discuter de ses émotions avec une personne en qui il avait confiance. Puisqu'il préférait ne pas faire trop compliqué, il avait choisit de jouer au Quidditch avec Harry et Nicholas et d'avoir une conversation sue ses « émotions » avec Pansy. Pour l'instant, la jeune fille était bien la seule avec qui il pouvait réellement parler de n'importe quoi. Toutefois, il souhaitait changer cela et c'était justement pour cette raison qu'il avait une demande spéciale pour sa psychologue cette journée-là:

— J'aimerais qu'on parle d'Harry aujourd'hui.

— C'est le garçon avec qui tu sors, c'est ça?

— En théorie, oui...

— Raconte-moi tout, lança-t-elle, les yeux pétillants de curiosité. Je t'écoute.

Pendant une heure entière, Drago expliqua alors sa relation avec Potter, de la façon désastreuse dont elle avait commencé en première année, jusqu'à l'espèce d'amourette qu'ils entretenaient depuis quelques temps. Il avoua que la fin de leur scolarité l'inquiétait, qu'il avait peur que le gryffondor l'abandonne et qu'il s'était beaucoup trop attaché à lui pour ne pas que ça l'affecte.

— Avant il m'énervait tellement, j'voulais juste qu'il me foute la paix. Maintenant... maintenant je sais même pas c'que j'ferais sans lui.

— Mais de ce que tu me dis, il a l'air de t'aimer aussi... qu'est-ce qui te préoccupe autant?

— Je vais devenir dépendant de lui et le jour où on va finir par se laisser, ça va être encore pire, marmonna-t-il.

— C'est très pessimiste, se désola la psychologue.

— Réaliste surtout.

Maud se redressa sur sa chaise et prit le même ton qu'elle avait employé lorsqu'il était encore effrayé pendant leur première rencontre:

— Les relations amoureuses... c'est quelque chose de tellement différent pour chaque personne, y'a pas une bonne ou une mauvaise façon de faire. Par contre, ce qui est sûr, c'est que si éventuellement ton couple fonctionne plus avec Harry, c'est mieux de vous séparer que de rester malheureux ensemble. C'est pas vraiment une dépendance comme tu dis; c'est une forme d'attachement très forte et c'est normal que ce soit difficile à supporter si jamais vous vous séparez. Ce serait juste la preuve que tu l'aimais. Tu ressentirais sûrement la même chose si tu perdais ta meilleure amie.

— Je sais, admit le blond. Je dis juste que, j'aime pas ça, cette impression de dépendre de lui.

— Y'a une façon très simple de régler ce problème-là.

Voyant qu'elle avait toute l'attention de son patient, la psychologue enchaîna:

— En premier, il faut que toi et Harry discutiez de vos attentes l'un envers l'autre. C'est à vous deux de définir votre relation ensemble. Tout le monde le dis: la base d'un couple c'est la communication! Et après, il faut que tu trouves des activités qui te font plaisir que tu peux faire sans lui. C'est pas parce que tu l'aimes beaucoup que c'est la seule personne importante dans ta vie, tu comprends? Passes du temps avec tes amis, eux-aussi ils t'aiment! Ça va t'aider à prendre plus le contrôle sur ta vie et tu vas te sentir moins dépendant des autres, fais-moi confiance.

Ce soir-là, Malefoy réfléchit longuement à ce que Maud lui avait dit. Elle avait probablement raison; il fallait qu'il mettre certaines choses au clair avec Potter. En attendant d'avoir une occasion de discuter avec son brun, il sortit un parchemin vierge et commença à y noter des activités qui pourraient l'intéresser quand il aurait terminé ses examens.

⇨ Club de Quidditch non-professionnel
⇨ Magasinage moldu avec Pansy
⇨ Cours privés de potions avancées? (en parler avec Sev)
⇨ En apprendre plus sur les dragons/animaux familiers (voir Hagrid?)
⇨ Visiter maman
⇨ Apprendre le français? Le roumain..?
⇨ Garder contact avec Goyle?

Un mince sourire se forma sur ses lèvres, quand il déposa sa plume. Oui, il allait reprendre le contrôle de sa vie.

❦❦❦

Aujourd'hui, c'était le dernier match de Quiddich de l'année: Serpentard contre Gryffondor. Nicholas Adams était à nouveau l'attrapeur de l'équipe de Serpentard et il s'était entraîné sans relâche pour être à la hauteur. Il avait eu la chance d'avoir l'aide de deux des meilleurs attrapeurs de Poudlard, alors il était assez confiant. D'ailleurs, Harry et Drago hurlaient des encouragements dans les gradins parmi tous les autres élèves. Nicholas avait été choqué de voir que le sauveur s'était installé dans la tourelle de la maison rivale à la sienne.

Quand la partie débuta, le stade devint chaotique. L'école entière — professeurs inclus — était venue encourager les joueurs. Malgré le brouhaha ambiant, l'attrapeur tenta de faire le vide dans son esprit pour pouvoir se concentrer pleinement; ça c'était un des trucs de Potter. Il fit totalement abstraction de tout ce qui l'entourait excepté la petite bille d'or. Son seul objectif était de l'attraper. Peu importe quel moyen il utilisait pour y parvenir, ce qui importait c'était le résultat final (Harry lui avait raconté la fois où il avait carrément avalé le vif). Puis comme Malefoy le lui avait conseillé, le jeune serpentard s'assura également de toujours demeurer à proximité de l'attrapeuse adverse. De cette façon, si elle trouvait le vif avant lui, il ne serait pas trop loin derrière et pourrait la rattraper facilement.

Les trente premières minutes de jeu se déroulèrent sans qu'une équipe prenne le dessus sur l'autre. Les buts de chaque côté s'enchaînaient et la foule se défoulait. Cependant, ni Nicholas ni sa rivale n'avait repéré la petite balle d'or encore. Enfin, jusqu'à ce que soudainement l'attrapeuse de gryffondor ne fonce vers le bas où un éclat doré avait attiré son attention. Le jeune serpentard se précipita aussitôt à sa poursuite. Il piqua vers le vif à toute allure, le sol se rapprochant dangereusement vite. Il devait absolument être plus rapide, puisqu'il était quelques centimètres derrière.

Nicholas n'était pas certain de quelle idée de génie l'avait traversé à ce moment-là, mais quand il se réveilla deux heures plus tard à l'infirmerie avec une légère commotion cérébrale, son équipe avait gagné. Ses coéquipiers étaient rassemblés autour de lui et le félicitaient bruyamment. Madame Pomefresh ne cessait de les réprimander, mais ils étaient trop heureux pour l'écouter. Le match n'avait même pas duré une heure; les Serpentards l'avaient remporté haut la main.

— Qu'est-ce qui s'est passé? demanda alors Nicholas. Je me rappelle plus trop c'que j'ai fait.

— Bro, c'était malade! s'exclama le chef d'équipe. Tu t'es écrasé par terre et tout le monde pensait que tu pourrais pas continuer le match, mais quand on t'as retourné sur le dos pour t'amener à l'infirmerie, on a trouvé le vif coincé en-dessous de toi. L'attrapeuse de gryffondor était enragée, j'te jure!

Malgré son léger mal de tête, l'infirmière finit par le laisser rejoindre la fête qui battait son plein après maintes supplications de sa part. Après tout, c'était probablement la dernière fois qu'il s'amuserait avant les examens.

✵꥟✧

Du haut de la tour d'astronomie, Drago et Harry observaient de loin les dernières festivités de la victoire des Serpentards. Des feux d'artifices verts et argents explosaient encore par-ci par-là. Potter avait plus ou moins discrètement lié leurs doigts ensemble et le blond avait osé le laisser faire. Tant qu'il ne se plaignait pas de ses mains moites, il n'y voyait pas d'inconvénient.

Ils étaient biens là, juste tous les deux, entourés d'une ambiance douce et romantique. Le magnifique ciel étoilé ainsi que la brise qui leur chatouillait délicatement la nuque y étaient pour beaucoup. Ça ressemblait à un film moldu. D'ailleurs, Malefoy avait l'impression d'être l'héroïne d'une série à l'eau de rose moderne qui allait bientôt embrasser son crush pour la première fois. L'été dernier, Pansy l'avait converti à sa passion pour le cinéma moldu (un secret qu'il gardait précieusement). Quoique, à bien y penser, c'était effectivement ici qu'ils s'étaient embrassés pour la première fois lui et Potter, même si c'était dans des circonstances très différentes.

Après de longues minutes dans le calme, le serpentard finit par engager la conversation sur le sujet qui le chicotait depuis un moment:

— Harry..? murmura-t-il en pivotant vers ce dernier. J'me demandais, est-ce qu'on est en couple?

Le gryffondor sourit niaisement. Les joues de son joli blond étaient adorablement rosies.

— Pourquoi on l'serait pas?

— Je sais pas moi... Parce que c'est compliqué?

— C'est pas compliqué, réfuta-t-il en se collant davantage contre lui. C'est parfait.

— J'me doutais que tu dirais ça, soupira Drago, mais... c'est vrai que c'est compliqué. « Être en couple » c'est vague comme définition. Peut-être que pour toi ça veut pas dire la même chose que pour moi, peut-être qu'on va avoir des attentes envers l'autre et qu'au final on va finir par être déçus. Et c'est sûr qu'on va pas s'entendre sur plein de choses... J'aimerais, j'aimerais qu'on essaie d'en parler maintenant, pour éviter de mal se comprendre.

— C'est une bonne idée, approuva Harry. Pour moi, « être en couple » ça veut dire qu'on vit ensemble. Dans le sens où on passe beaucoup de temps ensemble, on se raconte nos journées, on cuisine et on mange souvent ensemble. On s'engage à être présent dans la vie de l'autre.

— Donc si je te parlais pas pendant plusieurs jours, tu serais triste?

Le brun eut l'air scandalisé.

— Triste? J'serais probablement en petite boule dans mon lit en train de pleurer en pensant que tu recommences à m'haïr!

Malefoy pouffa en secouant la tête.

— T'inquiète. Honnêtement, j'peux plus me passer de toi, avoua-t-il en grommelant.

Satisfait, Potter déposa un baiser appuyé sur sa joue.

— Moi non plus.

L'atmosphère sembla devenir encore plus intime et le serpentard sentit son coeur battre plus vite.

— Et, qu'est-ce tu penses des marques d'affection en public?

— Ça me dérange pas, toi?

— Moi, ça me va, dans la limite du raisonnable, hein! Mais il risque d'avoir des articles de journaux un peu... négatifs sur toi si on te voit avec un ancien mangemort, non?

Harry parut agacé. Ce n'était pas le sujet le plus joyeux, sauf que c'était nécessaire de l'aborder.

— Si ça dépendait juste de moi, je crierais à tout le monde que j'veux te marier et te faire plein d'enfants mais comme c'est un peu compliqué...

— Pardon? Des enfants?!

On aurait dit que Drago venait de voir un fantôme. Le gryffondor eut la décence d'avoir l'air gêné.

— Pas maintenant! Dans plusieurs années, peut-être.

À ce moment-là, le blond comprit qu'il n'était probablement pas la meilleure personne pour Potter, qu'il n'était pas celui qui le rendrait heureux toute sa vie, parce qu'il ne voulait pas d'enfant. Jamais. Un jour, le brun irait former une famille avec quelqu'un d'autre et il serait anéanti. Cependant, il décida aussi à ce moment-là d'être égoïste. Cette relation ne durerait sûrement pas pour toujours... et alors? Il allait peut-être en profiter pendant longtemps avant que tout n'éclate. Ce serait stupide de précipiter les choses.

— Commence par essayer de me supporter pendant un an avant d'envisager le mariage et les enfants.

— Oui, ce serait un bon début en effet. Mais on fait quoi pour la presse? Tu veux qu'ils sachent ou pas?

— J'aimerais mieux qu'ils sachent rien pour l'instant. Après Poudlard, j'pensais rester un peu dans le monde moldu le temps qu'on m'oublie.

— Oh, donc tu vivras plus au manoir de tes parents?

— Non, pourquoi?

Harry bouillonnait littéralement de joie.

— On pourrait habiter ensemble!

— Euh... attends là. On va devoir instaurer une liste de règles à respecter si tu veux vivre avec moi. J'vais pas réussir à endurer ton bordel sinon.

— Tout ce que tu veux princesse! concéda aussitôt le gryffondor, débordant d'enthousiasme. T'as d'autres demandes particulières?

— Mmh, les surnoms que tu me donnes, j'les aime bien, mais c'est juste quand on est les deux, okay?

— Okay!

— Et toi, t'as des demandes spéciales?

— Euh, c'est pas vraiment... j'me demande juste, est-ce que ça te rends mal à l'aise si je t'appelle... mon amour? compléta Harry en chuchotant.

— Non, pas mal à l'aise. C'est juste que, ça me fait sentir tellement... important, soupira Malefoy. Et, je risque de devenir encore plus égocentrique qu'avant, encore plus... faible qu'avant.

— C'est pas grave ça. Moi, j'suis déjà beaucoup trop faible pour toi, gloussa le brun avant de déposer un petit bisou sur le nez de son amour.

C'était la stricte vérité: il ne pouvait plus du tout se passer de son joli blond. En plus, dès que quelqu'un s'approchait trop près de lui, les tendances jalouses et possessives du gryffondor ressortaient au grand jour. Il les contrôlait difficilement; c'était plus fort que lui.

— Harry... pourquoi moi? osa questionner Drago d'une voix incertaine.

Il était assez curieux de savoir pourquoi le grand sauveur du monde sorcier préférait un mangemort maigrichon plutôt que n'importe qui d'autre (même s'il fallait admettre que le mangemort maigrichon était plutôt beau gosse).

— Hum, j'pense que j'ai un truc pour les mignons petits blonds, avoua-t-il, taquin. Mais toi t'es mignon et beau en même temps, définitivement le plus beau de Poudlard.

— C'est bon, j'ai compris!

— Non non, attends, y'a d'autres raisons. Quand j'suis avec toi, j'me sens bien, chanceux. On s'est détestés pendant tellement d'années donc à chaque fois que j'ai ton attention juste pour moi, sans que ce soit parce que t'es fâché... Je sais jamais c'que tu penses. J'aime te prendre dans mes bras, ta peau est toute douce. Je suis un gryffondor, tu sais comment on est: agaçants des fois, mais... beaucoup trop amoureux.

Il n'osa pas lui dire qu'il adorait son odeur aussi et enfouir sa tête dans le creux de son cou. Harry avait toujours le coeur qui battait vite quand il était question de Drago. Malgré lui, il passait un temps fou à s'imaginer des tonnes de scénarios — parfois érotiques, parfois romantiques ou drôles — avec son blond préféré. Dans tous les cas, après ses rêves et ses fantaisies, avoir le garçon qu'il aimait en chair et en os à ses côtés le rendait euphorique. Il se sentait infiniment reconnaissant.

Quant au serpentard, il ne savait pas vraiment quoi répondre. Il n'avait jamais fait un seul compliment au brun de toute sa vie; il n'allait quand même pas lui confier maintenant que sa voix grave et de ses grandes mains lui plaisaient un peu trop! Surtout lorsqu'il emprisonnait sa taille fine entre ses doigts...

— Moi aussi, j'aime être dans tes bras, finit-il par murmurer.

Ce n'était sûrement pas la meilleure réponse, mais il n'était pas un beau parleur comme Potter. Pourtant, le gryffondor ne semblait pas déçu, au contraire. Il le tira contre son torse et l'enferma dans ses bras de la plus délicieuse des façons. Sans attendre, Drago se retourna pour lui faire face et l'embrassa passionnément. Il restait de nombreuses choses à discuter, mais rien qui ne puisse attendre le lendemain.

Le baiser s'intensifia rapidement et Malefoy sentit ses joues chauffer. N'importe qui pouvait les surprendre, quoique pour la première fois, il s'en fichait. Il agrippa les mains timides d'Harry qui reposaient sur ses épaules et les guida jusqu'à ses fesses. Sans décoller leurs lèvres, celui-ci le renversa sur dos et ravi, le blond enroula ses jambes autour de ses hanches. Il ne voulait pas que son griffon s'éloigne d'un seul millimètre.

— Je sais qu'on risque de s'engueuler encore pour des trucs plus ou moins importants, mais je veux rester avec toi, laissa échapper Drago. Reste avec moi.

— J'vais tellement te coller que tu vas regretter d'avoir dit ça, beauté.

C'est bientôt la fin les amis. Et c'était le plus long chapitre de l'histoire jusqu'à date ;)