44.

Contrairement à ce que j'avais imaginé pour notre première nuit ensemble des vacances, Loïk et moi avons passé plus de temps à dormir qu'à faire autre chose. Ça lui a un peu déplu, mais j'attends le meilleur moment pour me poser avec lui. Là, il y a trop de problèmes avec mes amis pour que je puisse réellement en profiter. C'est comme au début de notre relation. Et un rien pouvait gâcher nos moments intimes.

Et ce matin, ce fut Loan qui a débarqué pour que nous fassions les courses. En soit, c'est logique que nous devons manger. Ce qui l'est moins, c'est qu'il a gentiment jeté Adam, Lou et Loïk. Prétextant qu'il n'y aurait pas de place pour tout le monde dans la voiture. Ça aurait pu être logique, s'il n'avait pas insisté pour qu'Arllem vienne avec lui. Je suis venu avec Émilie pour veiller au grain. Mon ami ne tentera rien, mais c'est beaucoup moins sûr du côté de Loan. Surtout quand je vois parfaitement sa main se poser sur le bassin d'Arllem au rayon jus de fruit. Ce dernier rougit comme pas permis et le remet gentiment à sa place avant de m'entraîner dehors. J'ai un peu traîné des pieds, mais je sais qu'il a besoin de souffler un coup avant d'exploser dans le rayon des biscuits apéros.

Et maintenant, je sais qu'il a besoin d'éclaircir certaines choses avec moi. Brevan n'a fait que les survoler.

- Tu as des choses à me demander Arly, je le vois bien.

Il serre les poings. Ça ne doit certainement pas être un sujet simple à aborder.

- Déjà, dis-moi que ton histoire avec Loïk, c'est du sérieux.

Je m'attendais à plein de questions, mais pas à celle-là en premier lieu.

- Pourquoi tu veux savoir ça ? demandé-je en allumant une cigarette. Mon histoire avec lui ne te regarde pas.

- Ça fait combien de temps que vous sortez ensemble ?

Je souffle une bouffée de nicotine. C'est dingue comme il peut être obstiné à certains moments.

- Ce que tu es têtu ! Nous deux, ça fait huit mois, si tu veux tout savoir.

Je suis sorti avec un garçon bien avant lui. C'est vraiment étrange quand j'y pense.

- Pourquoi tu ne m'en as jamais parlé ?

La question que j'attendais qu'il me pose.
Parce que je ne pouvais pas lui faire ça. Il galérait avec ses relations amoureuses alors que j'embrassais et couchais déjà avec un mec.

- J'ai pas à tout te dire.

- On se connaît depuis qu'on a six ans. On est censé se dire ce genre de choses.

Je jette ma cigarette à peine entamée et me redresse devant lui. On parle plus de moi que de lui, là.

- Arllem, on est ami, pas en couple. Si je n'ai pas envie de te dire certaines choses, je ne le fais pas.

Il baisse la tête. Je m'y prends très mal. Loïk me dirait même que je manque de tact. Mais Arllem ne se laisse pas faire.

- Mais tu dois au moins me regarder dans les yeux sans avoir besoin de me mentir, rétorque-t-il. Les coups sur ton visage ? Ton bandage sur le poignet ? Tes piercings sur les oreilles qui ont disparu ? Ce sont des accidents peut-être ?

Je ris sèchement. Il avait tout vu. Il a toujours remarqué les coups. Mais il n'a rien dit.

- Il y a des choses que tu n'as pas besoin de savoir.

- Ton père te bat.

Nos regards gris se croisent. Je sens mon cœur battre plus vite. Oui. Il me frappait tellement fort, que parfois, je me demandais comment je tenais encore debout. Mais grâce à Louise et Marc, je n'ai plus peur.

- Tu sais quoi ? commencé-je plus calmement. On va éviter de parler de ma vie et on va parler de la tienne à la place. Comment va Brevan depuis sa rencontre avec Romain dans les toilettes ?

Je le vois blêmir. Parfois, je repense à ce qu'il s'est passé dans cette cabine et la détresse que j'ai vue sur le visage de Brevan.

- Brevan m'a dit que tu l'avais aidé...

- Heureusement que j'ai eu une pressante envie.

- Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Dis-moi, me supplie-t-il.

Je me calme un peu. Il n'a pas besoin de plus pour paniquer. Je m'assois de nouveau à côté de lui sur le muret.

- Arly...

- Tristan, Loïk m'a fait comprendre que Romain avait embrassé Brevan et lui, il refuse de me dire ce qu'il s'est passé. Tu es le seul à pouvoir me répondre.

- T'as pas envie de savoir...

Il attrape ma main et je la regarde. Je presse doucement sa paume. Sa main est toute froide. Il veut savoir, mais j'ai peur de ce qu'il va ressentir après ça. Il ne veut certainement pas entendre que Romain allait certainement agresser sexuellement Brevan dans une cabine des toilettes. Pourtant, je dois lui dire.

- Je suis arrivé dans les toilettes et Brevan était dans une cabine. Romain était pressé contre lui, sa main sur sa bouche. Ils avaient l'air tellement paniqués tous les deux, que j'ai eu un peu de mal à comprendre ce qu'il se passait au premier abord.
Puis j'ai bien vu que Brevan n'était pas paniqué. Il était carrément terrorisé. Je veux pas te dire comment était réellement Romain.

- Si. Je veux savoir.

- Arly, je t'assure. Tu n'en as pas envie.

Il serre plus fort ma main.
Je vais le regretter.

- Je n'ai eu besoin que d'un regard pour comprendre que Romain bandait sur lui... finis-je dans un soupir.

Arllem me lâche et se met debout. Il est complètement paniqué.

- Dis-moi qu'il ne l'a pas touché... Dis-moi qu'il ne lui a rien fait...

- J'en sais rien... Mais je peux te promettre qu'il ne réessaiera pas. Mes poings s'en souviennent encore, souris-je timidement en craquant mes doigts.

Et je le frapperai à nouveau sans hésitation.

- Ça date de quand ? me demande-t-il en prenant son visage entre ses mains.

- Avant que Brevan ne reçoive des mots.

Si on calcule, c'est peu après leur première fois. J'ose pas imaginer comment il doit se sentir.

- Pourquoi Romain n'a rien dit sur le fait que tu l'aies frappé ?

- Il parlait et je disais tout sur la scène dans les toilettes. Ça serait pas passer lui avec un garçon.

- Pourquoi Brevan ne m'a jamais rien dit ?

- Ça, je ne sais pas. Je ne suis pas dans la tête de Brevan. T'as pas une idée, toi ?

Mon ami sait quelque chose que j'ignore sur Brevan. C'est évident. Mais je préfère ne pas me faire de fausses idées. Ils n'ont pas obligation de tout me dire. Surtout si c'est un sujet complexe.

- Je sais pas, Tris... Putain... Je sais pas quoi faire, marmonne-t-il.

- Hey, calme toi.

Je me lève et le prends dans mes bras. Il me serre contre lui. C'est une situation que j'avais évitée depuis cette fameuse soirée au collège dont il n'a aucun souvenir, mais je ne dirais rien sur ça. Il n'a besoin que d'un ami en ce moment. C'est plus comme quand nous étions plus petits.

- Considère ce geste comme une bonne grosse étreinte virile entre meilleurs potes, ris-je. T'es tellement sexy quand tu renifles, Arly.

- Ferme-la, répond-t-il en se détachant de moi avec un faible sourire.

Ma main secoue ses cheveux et je sors de ma poche, mon portable qui se met à vibrer.

'' Tu... Tu as pris une décision pour l'année prochaine ? ''

- Ça va ? Il y a problème à la maison ?

Je m'apprête à lui répondre, mais Loan et Émilie reviennent sur le parking et m'en empêchent. Je fais non de la tête et me penche vers lui.

- En tout cas, il va falloir que tu parles à ton petit-copain, chuchoté-je.

Tout comme je vais devoir parler au mien.

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