38.

Je n'arrive pas à me regarder en face. Noé non plus. Je l'ai mis devant le fait accompli. J'ai appelé les services sociaux pour notre sécurité et pour nous aider. Alors depuis samedi soir, nous logeons dans un foyer jusqu'à ce qu'une famille soit prête à nous accueillir. Après une décision de justice, notre père perdra sûrement notre garde s'il ne change pas rapidement de comportement. Mais ça, mon petit frère a dû mal à le comprendre. J'ai presque l'impression que ce fut la pire idée que je pouvais avoir.
Ma vie est d'un bordel sans nom.

- Sur, c'est Brevan, propose Adam.

Il a au moins le mérite de me faire penser à autre chose. Je regarde Arllem, qui a les joues rouges. Après l'appel que nous avons eu, je n'ai pas hésité à en parler à Adam pour me changer les idées. Notre petit poussin a perdu sa virginité et nous débattons depuis un moment à nous demander lequel de lui ou Brevan avait pris l'autre.

- Nan... Je vois plus Arllem, contredis-je. Si tu l’avais entendu au téléphone ! En totale panique le pauvre !

Il me donne un coup de pied dans la chaussure et j'affiche un sourire satisfait.

- Bah alors, mon petit Arly, ta soirée ne s'est pas bien passée ?

Je suis certain que parfois, il doit avoir envie de me gifler. Voir peut-être même tout le temps.

- Ce que l'on fait tout les deux ne te regarde pas. Et puis si tu as envie de parler de cul, on peut parler de toi et de Loïk.

Je me mords la lèvre et expire la fumée de ma cigarette. J'appelle Loïk à chaque fois que je me sens mal. Il m'aide, me soutient. C'est un véritable pilier et pas juste un mec avec lequel je couche.
Arllem aime Brevan, c'est évident, mais leur relation n'a rien avoir avec celle que j'entretiens avec Loïk.

- Tu t'es fait quoi ?

Il fixe mon oreille bandée. Ma jambe se met à frapper le bitume. S'il savait la vérité, il me hurlerait dessus en me demandant pourquoi je ne lui en ai jamais parlé. Je jette mon mégot, récupère mon sac et rentre dans le bâtiment.

Il me suit jusque dans les escaliers. Je pourrais le remercier d’être aussi tenace et de vouloir m'aider. Mais là, c'est la dernière chose que je veux.

- Qu'est-ce que tu veux Arly ? demandé-je en me retournant vers lui.

- Je veux savoir pourquoi t'as un bandage sur l'oreille.

Je descends deux marches et éclate de rire en croisant les bras. Il voudrait sauver le monde entier.

- J'ai fait une infection à cause de mes piercings, ça te va comme réponse ?

Il acquiesce et je remonte les marches jusqu'à notre salle de cours. Je sais très bien qu'il ne me croit pas. Mais j'aimerais un jour qu'il insiste un peu plus et que je puisse lui dire la vérité qui commence à me ronger de l’intérieur. J'ai besoin de hurler que rien ne va plus dans ma vie. Que je me fais du mal juste pour me sentir un peu mieux.

Je jette mon sac contre le mur et attendant que le prof de physique nous ouvre. Puis j'avise le devoir qu'il fallait faire pour aujourd'hui. Je vais continuer d’être abonné aux notes catastrophiques encore un moment.
Le cours se passe avec une lenteur excessive, je manque même de m'endormir sur ma table. Puis un mouvement brusque derrière moi me relève soudainement sur ma chaise. Brevan lève haut la main, le regard brumeux.

- Monsieur, j-je me sens p-pas très bien !

Le prof l'autorise à quitter la classe. Arllem attrape une boulette en papier sur sa table et se retourne vers le fond de la classe, où Romain offre un sourire mauvais. J'ai un très mauvais pressentiment.
Arllem prétend vouloir aller aux toilettes, mais je sais très bien qu'il va le rejoindre pour l'aider à gérer sa crise. L'homme l’autorise également et Romain m'envoie un doigt d'honneur. Je ris et lui en envoie un en retour avec un baiser. Il va vite regretter.

Arllem et Brevan reviennent dans la classe après presque une bonne vingtaine de minutes. C'est à la limite de se demander s'ils n'ont pas fait autre chose que parler.
Je serai presque jaloux d'eux avec leur relation. La sonnerie retentit et je me dirige vers les toilettes, à la suite de Romain. Je fais probablement la pire connerie de ma vie. Je jete mon sac au sol, attendant qu'il sorte de l'une des cabines. Il finit par sortir de l'une d'elle, en me jetant un sourire acerbe. Je le hais.

- Qu'est-ce que tu veux, Tristan ? me demande-t-il en se lavant les mains.

- Que tu foutes la paix à Arllem et Brevan.

- Et le seul moyen que tu as trouvé de faire ça, c'est de me le demander gentiment ?

Je ne le laisse pas sortir des toilettes et le pousse contre le mur.

- T'es malade !C'est quoi ton problème ?

- Mon problème Romain, c'est toi, connard. T'es tellement homo que le seul moyen que t'as trouvé de soulager ta frustration sexuelle, c'est de les rabaisser.

- Arrête de dire des conneries ! Je suis pas PD !

- Franchement, assume, prends toi un coup de bite dans le cul et tu verras beaucoup mieux.

Il m'envoie son poing en pleine mâchoire. Il frappe fort ce con.

- Retire tout de suite ce que t'as dit !

- Quoi ? Que t'es gay ? Mais tu l'es tellement mon pauvre Romain !

Il va m'envoyer un autre coup, mais j'esquive et lui envoie en pleine joue. Il recule sous l'impact. Je ne remercierais jamais assez Loïk pour les cours de boxe.

- Je te jure Romain, la prochaine fois que t'approches de l'un d'eux pour faire de la merde, je t'assure que je détruis ta sale gueule.

Il ne dit rien et se frotte la joue. Moi, je jubile. Je ramasse mon sac et disparais dans le couloir.
Il n'osera jamais aller pleurer dans les jupes de sa mère.
Ma main me fait mal. J'ai essayé autre chose pour ressentir quelque chose, mais rien. Je crois que c'est même pire qu'avant.

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