20.
Melkior me sourit depuis le comptoir. J'attends avec lui qu'Uriel rentre de son travail. Car en plus de faire de la musique dans le bar où travaille son petit-ami, le métis est graphiste dans une maison d'édition. Et que selon le barman, c'était son rêve de gosse.
- Tu es sûr de toujours rien vouloir ? me redemande Melkior en rangeant les derniers verres.
- Certain. Je viens juste ici pour parler avec Uriel.
- Tu risques d'attendre encore un petit moment. Il était en rendez-vous.
Melkior part s'occuper d'un client et j'en profite pour vérifier que je n'ai reçu aucun message. Rien de mes amis, ni de ma famille. Et encore moins de Loïk. C'est encore et toujours un grand vide. Après s’être occupé de l'homme assis à une table, il pose devant moi une grande tasse de café-crème.
- Tiens, c'est cadeau. Tu me fais de la peine à te morfondre comme ça.
Je le remercie et bois une gorgée sous son regard indiscret. C'est facile de deviner qu'il veut ma version des faits.
- Loïk nous a dit pour le week-end dans sa famille. Et il... Il nous a aussi raconté le reste. Sache que nous ne lui avons rien demandé ! Il l'a fait de son propre chef.
- Donc... Il vous a parlé de... De l’hôtel ?
Pitié, faite que non. Je n'ai aucune envie que tout son groupe d'ami connaisse les faits sur nos terribles et désastreux ébats de cette nuit-là.
- Oui. Mais rien de ce que vous avez fait une fois la porte fermée. Il nous a juste expliqué votre conversation.
Ça me soulage un peu. Mais je n'en oublie pas notre discussion et des propos maladroits que j'ai tenu.
- J'ai été horrible avec lui...
- Disons que tu aurais pu lui faire part de tes doutes d'une autre manière.
La porte du bar tinte derrière moi. Uriel entre enfin dans l'établissement, retire sa veste et embrasse rapidement son compagnon par-dessus le meuble en bois. Il prend un tabouret à côté de mien et s’éclaircit la gorge en croisant les bras. Habillé d'un costume noir, il est vraiment différent d'ordinaire. L'anneau qu'il porte habituellement à son nez a même disparu.
- Je vais pas y aller par quatre-chemins avec toi. Ce que tu as dit à Loïk était dégueulasse.
J'en ai pleinement conscience. Mais je ne m'attendais pas à ce qu'il me le dise aussi sèchement. Ce qui est aussi le cas de Melkior, car il croise les bras et lui lance un dur regard noir.
- Mon ange, tu sais que je t'aime, mais des fois, tu manques cruellement de subtilité.
- Ce n'est pas de ma faute si Loïk s'est senti comme un moins-que-rien !
- C'est de la mienne... réponds-je faiblement.
C'est entièrement de ma faute. Je lui ai fait du mal. Je l'ai fait pleurer.
- Je... Je suis désolé ! J'aurai jamais dû lui parler comme ça ! Je n'aurai jamais dû lui poser autant de questions ! J'aurai dû lui dire que je voulais pas qu'on le fasse !
Melkior tente de me calmer, mais ma panique redouble d'intensité.
- Loïk me déteste !
- Tristan...
- Je supporte pas ses silences... J'ai... J'ai besoin de lui.
Je prends mon visage entre mes mains pour cacher ma peine.
- J'ai aucune idée de mes sentiments, mais je sais que j'ai besoin de le voir, de lui parler et de l'avoir près de moi...
- T'es amoureux.
J'observe Uriel qui remue son thé. Mes sentiments pour le blond semblent si évidents pour lui ?
- Je suis pas-
- Oh si, que tu l'es, me coupe-t-il en posant sa cuillère. Est-ce que tu as mal quand tu le vois proche de quelqu'un d'autre ? Tu as besoin qu'il soit à tes côtés à chaque seconde ? Tu rêves de t'endormir dans ses bras chaque soir ? Ses baisers, ses caresses et ses mots doux sont les meilleures choses qui existent pour toi ?
- Oui, mais-
- Alors il n'y a pas de mais, me coupe-t-il encore une fois. Vous êtes amoureux l'un de l'autre. Et en même temps, vous êtes incapables de vous l'avouer.
- Lui me l'a dit.
- Est-ce qu'il t'a regardé dans les yeux et t'a dit de vive voix, ''je t'aime'' ?
- Non...
- Alors cet imbécile ne te l'a pas avoué.
Melkior secoue la tête en riant et Uriel lui lance un doux regard. Regard qui se remplit de tendresse quand le brun relève la tête et qu'ils se croisent. Il faudrait être idiot pour ne pas deviner les sentiments qu'ils partagent.
- Outre ça, je dois t'avouer que je t’apprécie.
Uriel m’apprécie. C'est la meilleure celle-là !
- Bon... C'est encore un peu tôt pour que je te considère comme un ami, surtout que tu dois encore te rattraper auprès de notre blond préféré.
Je savais bien que c'était trop beau.
- Mais je dois reconnaître qu'avant cette histoire, tu le rendais heureux. Un peu idiot et ridicule, mais heureux.
- En gros, Uriel est comme une maman poule, rit Melkior. Et là, il vient de t’accepter comme compagnon de son poussin.
- C'est pas... En gros, je protège Loïk et je pense que tu es quelqu'un de bien.
- C'est exactement ce que je viens de dire !
Melkior quitte le bar pour débarrasser une table, non sans embrasser la joue de son petit-ami qui fait une grimace.
- Si je n'aimais pas autant ton coté guerrier viking, je t'aurais rasé la barbe. Tu piques.
Pour l’embêter, le brun dépose un baiser dans son cou et il le repousse en riant.
- Va travailler au lieu de flirter avec ta clientèle...
Il lui envoie un salut militaire, mais revient rapidement vers moi, un plateau sous le bras.
- Je viens juste d'y repenser ! Loïk m'a proposé de venir à la salle de boxe après mon service. Tu pourrais venir, me propose-t-il avec un grand sourire. Ça te donnerait l'occasion de lui parler.
- Si c'est ça, ils vont plutôt se parler avec leurs poings.
- Soit pas pessimiste !
- J'ai jamais fait de boxe, déclaré-je un peu surpris qu'il me le demande.
- Alors ce sera une occasion d'apprendre ! Tu vas voir, ça défoule vachement !
- J'ai pas d'affaire !
Melkior donne à Uriel, un sac de sport qu'il est parti chercher dans le bureau.
- On doit faire à peu près la même taille, sourit le métis en me le donnant à son tour.
Je vais donc revoir Loïk et l'on va pouvoir se cogner dessus. Je ne sais pas si je dois être heureux ou juste angoissé à cette idée.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top